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Externalisation des politiques migratoires européennes au Niger: reconfigurations des lieux et des trajectoires des migrants


par Bachirou AYOUBA TINNI
Université Abdou Moumouni de Niamey - These de Doctorat  2021
  

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5.2.3 Les conséquences politiques et sécuritaires

La loi 2015-36 a eu également un impact sur la sécurité à Agadez. En effet, une coïncidence existe entre l'arrêt de cette migration de transit et l'amorce d'une insécurité résiduelle. Celle-ci se traduit par des vols comme le note ce propos : « le vol des motos, il suffit de déposer ta moto devant ta porte, après cinq minutes tu ne la verras plus » (Entretien Diouf, Agadez, mars 2019). On peut noter aussi le vol de tout objet de valeur. Interrogée sur cette situation la police l'impute à une concentration de personnes dans la ville qui n'exercent aucune activité consécutivement à la fermeture de la mine du Djado et à la criminalisation de la migration de transit.

Autre dimension de cette insécurité résiduelle c'est la reprise des attaques à main armée sur les routes. Celle-ci est favorisée par le fait que de plus en plus certains passeurs qui continuent à opérer empruntent des voies non balisées ou sécurisées par les forces de défense et sécurité. Sur ces routes nouvelles se croisent très souvent des trafiquants de drogue, d'armes et des passeurs de migrants irréguliers. C'est donc dans ces territoires de la contrebande que les migrants sont

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attaqués ou dépouillés de leurs biens. Nombreux sont les migrants qui estiment que très souvent ces attaques sont organisées avec la complicité des passeurs dans le seul but de les dépouiller.

5.3 Les tentatives de solutions

5.3.1 Plan de reconversion des acteurs de la migration : vision, bilan et limites

Devant la brutalité de son application et son impact négatif, les prestataires, notamment les passeurs, coxeurs et gérants de ghettos, se sont tournés vers le Conseil régional, instance légitime représentant la population afin d'exprimer leurs préoccupations. Ils ont tenu à rappeler la fermeture de la mine du Djado l'une des principales sources de revenus dans le Kawar. Aujourd'hui la criminalisation de la migration de transit est un acte qui met au chômage les acteurs qui l'animent et prive par la même occasion de nombreuses familles d'une source de revenu vitale. Saisi, le conseil régional a pris attache avec les autorités et la délégation de l'UE au Niger. C'est ainsi que la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix a commandé une étude sur l'économie de la migration à Agadez. Celle-ci a relevé le poids de cette ressource dans l'économie de la région ainsi que celle des ménages. Une autre étude conduite par l'institut néerlandais Clingandael est parvenue aux mêmes conclusions accablant l'État du Niger et son partenaire européen : « la criminalisation de l'industrie de la migration à Agadez a manqué de reconnaître à quel point l'industrie est ancrée dans l'économie politique plus large de la ville, et a par conséquent eu un effet contraire et néfaste, tant sur les migrants que sur la population locale » (Clingandael, 2017, P 28).

Pour trouver une solution une réunion de la Commission Consultative Régionale de l'Administrative Territoriale (COCORAT) à Agadez réunissant l'ensemble des autorités élues et administratives élargie aux couches concernées de la population a été organisée afin de trouver des solutions aux problèmes. Il est alors envisagé de faire un plan de reconversion des acteurs de l'économie de la migration à travers le financement des micro-projets. Dans cette perspective une liste exhaustive de ces acteurs a été élaborée dans l'ensemble des communes concernées par la migration. Transmise au Conseil régional cette liste fait cas de 6565 acteurs dans la région. Ces derniers doivent élaborer des micro-projets et les soumettre au comité mis en place à cet effet, composé des représentants du Conseil Régional, de la HACP et des ex-prestataires de la migration.

Dans la foulée de cette contestation, l'UE met en place sous financement FFU un Plan d'Actions à Impact Économique Rapide à Agadez (PAIERA) au profit de la région d'Agadez exécuté par deux ONG (Karkara et CISP) et la HACP.

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Photo 5:Plaque CISP à Agadez

Crédit photo : B Ayouba Tinni, Agadez, mars 2019

CISP se propose de réhabiliter le patrimoine de la vieille ville d'Agadez classée patrimoine mondial de l'UNESCO à travers des travaux à haute intensité de main d'oeuvre. Il s'agit d'utiliser la population locale pour restaurer la vieille ville d'Agadez. Les ouvriers sont payés à 2500F CFA par jour de travail durant le projet. Dans la conception du promoteur, cette approche permet d'injecter du liquide dans l'économie et de participer au relèvement économique des ménages. Son avantage est qu'il cible un public qui va au-delà des anciens prestataires de la migration. Par-delà, ce projet s'inscrit dans une démarche de formation des maçons aux techniques traditionnelles de restauration.

Le projet de Karkara d'une valeur de plus 100 millions de francs CFA a aussi fait place aux acteurs de la migration à travers leurs mères et femmes (voir photo ci-dessous). Des kits individuels de reconversion leur ont été distribués. Des appuis à la mise en place des activités génératrices de revenus et des taxis motos ont servi pour la reconversion.

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Photo 6:Une plaque de projet de reconversion à Agadez Crédit photo : B Ayouba Tinni, Agadez, septembre 2019

Le projet majeur ciblant les acteurs de la migration a été mis en oeuvre par la HACP. Le premier obstacle du plan de reconversion est le montant dédié. Initialement, une enveloppe de 800 000 FCFA par projet a été décidée par la HACP. Cette approche est très vite contestée par les acteurs qui le juge insignifiant au regard des revenus que génère la migration de transit. Finalement, l'enveloppe est rehaussée à 1 500 000 FCFA par acteur mais les propriétaires de ghettos et véhicules sont exclus.

Après examen des 2345 micro-projets soumis, 981 sont déclarés éligibles pour le financement. Avec son enveloppe de 200 millions de FCFA, la HACP a pu financer 108 micro-projets pour une enveloppe de 1 500 000 FCFA chacun. Les acteurs ciblés sont en majorité des coxeurs, rabatteurs et gérants de ghettos. Le nature des projets financés varie : AGR, embouche bovine ou caprine, taxi moto et restauration. Karkara a aussi financé à travers son projet PASSERAZ (Karkara) 186 demandes. Ce qui fait un total de 371 acteurs ayant bénéficié d'une aide à la reconversion.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault