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Transports et développement dans la métropole d'abidjan quel modèle de ville derrière les projets dans les transports ?


par Gaspard Ostian
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Master Dynped  2021
  

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CONCLUSION GÉNÉRALE

Cette étude a permis de mettre en lumière le tournant du rôle de la puissance public dans la fabrication de l'espace national, ici dans le cas de la capitale Abidjan. En 2011, après trois décennies difficiles, le pays, appuyé par certains discours politiques, semble enfin retrouver la voie du dynamisme économique et du développement. La Côte d'Ivoire a subi pendant cette période les difficultés liées au tournant libéral pris depuis les années 1980. L'État, très puissant depuis l'indépendance, fait alors face à des difficultés sociales, économiques et politiques en même temps que baisse drastiquement le budget public. Il s'est ainsi vu perdre beaucoup de son influence, pour en laisser une part croissante à des acteurs privés. Dans les transports, cela s'est notamment traduit lors de la concession du rail à la SITARAIL, filiale du groupe Bolloré.

En 2011, l'État est toujours très affaibli, mais le retour d'un contexte favorable et le besoin pour le gouvernement de retrouver une légitimité le poussent à donner au pays un objectif pour le moins ambitieux : atteindre le statut de pays émergent en 2020. Pour cela, la Côte d'Ivoire a besoin de résultats visibles : de grands efforts sont concentrés à Abidjan, sa capitale, pour en faire la vitrine d'une réussite spectaculaire. C'est là qu'est le tournant : initialement contraint de confier certaines de ses prérogatives à des acteurs privés, l'État fait désormais le choix délibéré de leur laisser part croissante, en généralisant de plus en plus les PPP. Certains résultats sont spectaculaires, à l'image du pont Henri Konan Bédié, construit en moins de trois ans, ou encore de la croissance remarquable du PAA et des nombreux et importants aménagements réalisés en son sein.

L'un des objectifs de ce mémoire était de comprendre mieux et de caractériser la voie de développement suivie par la Côte d'Ivoire, en observant le modèle de ville mis en place à Abidjan par les autorités. Je conclus de l'ensemble des observations, discussions et réflexions menées au cours de ce travail que le développement ivoirien en l'état est un développement « par le haut », privilégiant la croissance économique et la recherche du prestige à l'amélioration générale des conditions de vie de la population. Il y a un caractère artificiel dans les chiffres de l'important dynamisme ivoirien mis en valeur par les autorités. Certes, le revenu national a augmenté de 80% entre 2012 et 2015, mais selon la Banque mondiale, le taux de pauvreté sur la même période n'a baissé que de cinq points, passant de 51% à 46% de la population. Souvent à Abidjan, j'ai pu entendre des témoignages similaires que l'on peut

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résumer par cette phrase que m'a dit un chauffeur de taxi : « on voit que le pays avance, mais ça ne se ressent pas beaucoup dans le niveau de vie de la population ».

Par ailleurs il apparait que l'État, en multipliant les PPP, joue un jeu dangereux. En effet, ces derniers sont très intéressants pour l'État dans sa stratégie de croissance actuelle, mais seulement tant qu'il conserve le contrôle. C'est là tout l'objet du cadre juridique mis en place autour de ces PPP, par exemple par le biais des textes des conventions de concessions. Le risque est double : d'abord, l'État doit toujours conserver l'équilibre des bénéfices en sa faveur, ce qui n'est pas garanti. Nous l'avons vu dans le cadre des concessions des différents terminaux du port : à l'heure actuelle, l'État se voit obligé de modifier différentes conventions de concession pour augmenter les redevances dues par les concessionnaires, car pour l'instant certains concessionnaires tirent plus de bénéfice que la puissance publique de l'exploitation des terminaux. Le second risque est inhérent à la stabilité politique de la Côte d'Ivoire, et donc à la capacité de l'État de se maintenir en capacité de faire valoir ses intérêts face à ceux des acteurs privés. Même si la tendance actuelle ne semble pas l'indiquer, un nouvel épisode de crise exposerait l'État ivoirien à une importante baisse de sa force géopolitique, et donc à un détournement d'infrastructures et activités d'intérêt public vers des intérêts privés.

Finalement, il semblerait que la promesse de l'émergence prononcée par Alassane Ouattara ait été l'objet d'une méprise définitionnelle. Pour de nombreux ivoiriens et ivoiriennes parmi les plus modestes notamment, « l'émergence » entrait en résonnance avec le Miracle ivoirien des années 1960, et incarnait l'idéal d'une amélioration pour tout le monde des conditions de vie. Dix ans après, la quête de l'émergence ivoirienne s'avère plus proche d'une voie de développement de nature néolibérale, créatrice de grandes richesses pour une part très réduite de la population, et génératrice d'importantes inégalités sociales, économiques et spatiales. On peut en tout cas dire que l'État ivoirien suit en effet ses objectifs et ambitions d'intégration à la mondialisation : en renforçant les fonctions métropolitaines de sa capitale et en favorisant l'investissement d'acteurs privés dans les activités d'intérêt public, l'État ivoirien positionne son pays parmi les pays d'Afrique les plus attractifs selon les critères de l'économie mondialisée. Cela se fait au prix d'un renforcement très important des inégalités socio-spatiales que l'on retrouve beaucoup dans le secteur des transports, à échelle du pays comme au sein de la métropole d'Abidjan.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault