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La commission internationale des frontières et des eaux (IBWC) face aux enjeux de la préservation de l'environnement


par Clémence Léger
Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 - Master Etudes Européennes et Internationales - Aire anglophone 2022
  

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Commission de coopération

D'après Marko Keskinen et ses co-auteurs dans un chapitre sur les Commissions de coopération de l'ouvrage Hydro-Diplomacy: Sharing Water Across Border, les Commissions sont sources d'hydro-diplomatie :

« Many water cooperation agreements also have a joint body, such as a river commission, that facilitates the cooperation by providing technical support and by gathering information. Such a body can provide major support also for water diplomacy, as it creates a natural forum for discussion and can generate relevant and jointly produced data and information to facilitate the discussions » (Pangare 2014, 38).

Ici, les auteurs font référence à des commissions autour de rivières qui pourraient aider à la mise en place d'une coopération au niveau hydrique entre les pays limitrophes en apportant des supports techniques, en rassemblant des informations et en créant des forums de discussions. L'IBWC représente l'une de ces Commissions. Même si, dans les faits, il peut être compliqué pour les États-Unis et le Mexique de coopérer sur le plan hydrique, l'aggravation des problèmes environnementaux à la frontière et leur impact sur les populations rend l'IBWC de plus en plus essentielle pour éviter les conflits. Il sera étudié dans la suite de ce travail des forums de discussions mis en place par l'IBWC pour échanger les informations entre les populations, les scientifiques et la Commission, entre autres (« Citizens' Forum Meetings » s.d.) afin de trouver les meilleures solutions possibles. De plus, la mise en place de Minutes en faveur de l'environnement depuis les années 2000 est un exemple de coopération accrue. En outre, la collaboration et la mise en commun des informations récoltées par les scientifiques de part et d'autre de la frontière rend possible la mise en place de discussions qui aboutissent à des Minutes, en faveur de l'environnement notamment, comme il sera expliqué plus amplement dans les prochaines parties.

Hydro-diplomatie et gouvernance adaptative entre les États-Unis et le Mexique

Malgré l'apparition du terme d'hydro-diplomatie dans les années 1990 et la non-intégration de l'aspect environnemental dans les relations hydriques entre les États-Unis et le Mexique avant les années 1980 et le Traité de La Paz, la plupart des articles scientifiques portant sur le Traité de 1944 ou sur les relations hydriques entre les deux pays de manière générale rapportent que dès 1944 il s'agissait déjà d'hydro-diplomatie : « the treaty is the countries' most notable and enduring act of hydrodiplomacy » (Wilder et al. 2019). Dans cet article, Margaret O. Wilder et ses co-auteurs définissent l'hydro-diplomatie telle que Fadi George Comair l'a fait puisqu'ils la désignent comme une coopération internationale concernant des ressources hydriques partagées par différents États et qui peut varier en fonction des outils et des pouvoirs de ces différents pays. Il s'agit également d'utiliser des expertises scientifiques pour mettre en place des actions visant à contrer des scénarios pessimistes d'un point de vue environnemental (Wilder et al. 2019). Par exemple, les auteurs constatent un paradoxe entre les États-Unis et le Mexique. En effet, même si le manque d'eau n'est pas effectivement encouragé par l'un des deux pays, lorsque des pénuries d'eau apparaissent à la frontière, elles sont souvent le résultat d'une mésentente. En ce sens, il est possible de reprendre l'exemple des barrages étatsuniens qui ne libèrent de l'eau que lorsque les États-Unis décident de le faire. Ceci prouve la nécessité de la coopération entre les deux pays pour tenter d'éviter les pénuries au sud des États-Unis et au Mexique. De plus, la méfiance des populations de part et d'autre de la frontière les conduit à faire appel à leur gouvernement pour résoudre les crises. Ces résolutions se font dans cent pour cent des cas en passant par l'IBWC. C'est ainsi qu'à la fin des années 2010, la Commission a mis en place des groupes de travail mexicano-étatsuniens concernant certains problèmes sur le Rio Grande (Wilder et al. 2019). Toutefois, ces groupes ne répondent pas aux questions d'approvisionnement en eau du Mexique vers les États-Unis en temps de sécheresse (Wilder et al. 2019) et ne répondent donc pas non plus au problème initial. En effet, le volume d'eau supposé être fourni lors d'un cycle de cinq ans n'est pas atteinte en temps de sécheresse par le Mexique et cela influe sur le secteur agricole étatsunien, notamment au Texas, qui a de forts besoins en eau et particulièrement celle du Rio Grande.

Un autre article scientifique rend compte de l'hydro-diplomatie entre les États-Unis et le Mexique comme étant effectivement introduite dans les discours au XXIe siècle et posant la question des éléments d'une collaboration scientifique et politique efficace pour la gouvernance de l'eau à la frontière. Dans l'article « Hydrodiplomacy and adaptative governance at the U.S.-Mexico border: 75 years of tradition and innovation in transboundary water management », Margaret O. Wilder et ses co-auteurs expliquent que même si des recherches scientifiques et des constats ont été faits sur les problèmes hydriques et environnementaux pour aider à les résoudre, la plupart des problèmes, au niveau global, ne sont toujours pas réglés, voire se révèlent impossible à l'être. En outre, selon eux, les résultats des problèmes hydriques sont souvent perçus comme binaires, positifs ou négatifs, faisant des gagnants et des perdants. Ce phénomène est très clair avec l'exemple des relations entre les États-Unis et le Mexique : concernant le Colorado, les États-Unis avaient l'ascendant sur le Mexique puisqu'ils possédaient la majeure partie du fleuve et pour ce qui est du Rio Grande, le Texas avait un impact très important lors de la signature du Traité de 1944. Ceci diminuait le poids du Mexique dans la relation, comme il sera possible de le voir dans la prochaine partie. C'est pour cette raison qu'une hydro-diplomatie effective et efficace doit faire en sorte que les États limitrophes prennent confiance l'un en l'autre pour finalement s'accorder sur des actions en faveur de l'environnement (Wilder et al. 2020, 190). C'est exactement l'ambition de l'IBWC qui doit faire coopérer l'instance mexicaine et étatsunienne pour tenter de résoudre les problèmes hydriques à la frontière.

Un terme important que soulève ce même article est celui de « gouvernance adaptative » des ressources en eau :

« adaptative governance eschews static water-resources management prescriptions, opting instead for engagement and knowledge exchange with diverse stakeholders, usually loosely, or formally organized within a multiscalar network » (Wilder et al. 2020, 191).

Cette gouvernance inclut les relations et la coopération entre les entités étatiques et non étatiques. Elle est d'ailleurs également nommée « cogestion adaptative », ce qui montre bien une intégration de différentes parties dans cette gouvernance hydrique. L'idée est de pouvoir mettre en commun les connaissances scientifiques et les connaissances locales dans le but d'adapter, potentiellement, les politiques à la région où elles seront mises en place. La gouvernance adaptative conçoit les questions de ressources hydriques à l'échelle locale, régionale et internationale ; il faut ainsi s'adapter encore et encore aux entités en cause. Il s'agit ainsi de faire oeuvre les différents États entre eux ou les États avec des communautés locales (telles que des agriculteurs) ou encore des communautés entre elles ainsi que des communautés d'experts pour résoudre les problèmes hydriques (Wilder et al. 2020, 191). Pour ce qui est des États-Unis et du Mexique, il est souvent question des agriculteurs texans qui mettent en cause les États Étatsunien et Mexicain pour ce qui est de la résolution des problèmes hydriques sur le Rio Grande.

Plusieurs auteurs désignent une gouvernance adaptative comme la meilleure garantie possible pour tenter de résoudre les problèmes hydriques environnementaux. En effet, la capacité à générer des connaissances et à les appliquer permet de répondre efficacement aux problèmes ou, du moins, d'apporter des réponses et solutions claires et adaptées même si elles ne sont pas toutes efficaces (VanNijnatten 2020, 1052). Encore une fois, la gouvernance adaptative suppose de prendre en compte les antécédents des problèmes hydriques et des résultats des solutions apportées. Il s'agit également de concilier les solutions avec les paramètres économiques, politiques et sociaux des États-Unis et du Mexique ainsi qu'avec les résultats des solutions précédentes pour optimiser les chances de réussite des nouvelles réponses. Pour ce qui est de la frontière États-Unis-Mexique, l'agriculture et les retombées économiques sont primordiales des deux côtés de la frontière et doivent être considérées lors de la prise de décision pour résoudre les problèmes hydriques. En effet, les enjeux économiques ne doivent pas surpasser les enjeux environnementaux même si les intérêts économiques des agriculteurs doivent être respectés. Ces enjeux économiques peuvent notamment concerner l'irrigation et les sécheresses et donc être liés à l'environnement.

La gestion intégrée des ressources en eau est également indissociable et pertinente dans la gouvernance adaptative de l'eau. En effet, la possibilité de faire participer une multitude de différents décideurs, riverains et autres entités en lien avec la gouvernance est également cruciale pour résoudre les problèmes, comme l'explique par exemple Debora L. VanNijnatten :

« There is clear evidence that governance and policy systems which promote interactions within and across state, private sector and civil society are more successful in terms of increasing both the legitimacy of decision-making within these governance systems as well as the quality of decisions made, particularly at local and watershed scales » (VanNijnatten 2020, 1053).

Ainsi, avoir un panel de points de vue différents permet de pouvoir répondre aux attentes de la plupart des entités prises en compte dans la mise en place de solutions des problèmes hydriques. En ce sens, tenir compte de la société civile permet d'accroître la légitimité et la qualité des décisions prises puisqu'elles seraient plus pertinentes pour ces populations. Il s'agit encore une fois de gérer à plusieurs et de partager le pouvoir à différentes échelles pour résoudre les problèmes hydriques. La gouvernance adaptative requiert donc une coopération entre entités étatiques et non-étatiques pour répondre aux problèmes liés à l'eau.

Pour ce qui est des agriculteurs à la frontière États-Unis-Mexique, leur opinion est entendue dans la mise en place de solutions environnementales puisque leur voix est très importante dans la région. Il n'est cependant pas certain que cette voix soit convergente avec la protection de l'environnement. On notera notamment que l'utilisation de l'agriculture intensive est problématique pour l'environnement. Néanmoins, les sécheresses ou les pénuries, par exemple, ont des retombées négatives pour les agriculteurs qui veulent alors les éviter. En considérant l'exemple de la crise dans la vallée du Rio Grande de l'automne 2020 mentionnée dans l'introduction, il convient de rappeler qu'il est question de la frustration des agriculteurs mexicains lorsque l'État utilise l'eau de la retenue d'Amistad pour répondre aux attentes du Traité de 1944 plutôt que pour répondre aux besoins des Mexicains. En effet, les agriculteurs ont besoin d'une quantité importante d'eau, mais le manque constant d'eau dans la région frontalière rend ce besoin difficile à satisfaire. Ainsi, lorsque le Mexique utilise ses réserves pour répondre aux attentes du Traité de 1944, les agriculteurs peuvent craindre un manque d'eau encore plus important qui ne permettrait pas de garantir une irrigation suffisante des cultures. Cette crainte débouche sur des manifestations et des affrontements pour préserver leurs intérêts (Varady, Gerlak et al. 2021).

Ceci démontre donc un paradoxe entre la gouvernance adaptative souhaitée et la réalité de la situation qui dénote une inaptitude à prendre en compte les besoins des usagers. Il est ainsi possible de constater le lien entre les intérêts des parties concernées par le problème et la solution mise en place pour y répondre.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire