3.1.2 Cartographie participative de la communauté
Ndotoun
Ndotoun est un village du Cameroun situé dans le
département de Nkam, arrondissement de Yingui. Ndotoun a une superficie
d'environ 1010 hectares. La Fig. 8 nous présente les usages de l'espace
de Ndotoun. C'est une forêt dense humide dont la composition
végétale sempervirente diffère suivant l'altitude.
À l'Ouest, elle est située à basse altitude (0 à
300 m) et caractérisée par une série d'essence ; à
l'Est-elle se trouve à moyenne altitude (300 - 500 m). Cette formation
forestière, reconnue surtout pour sa richesse en biodiversité,
procure des ressources forestières à une population locale
très pauvre qui vit à proximité.
Les échanges à travers le corridor forestier
s'établissent entre les populations de l'Ouest et les populations de
l'Est grâce à l'existence des sentiers (Fig.8) qui traversent le
corridor d'Ouest en est. L'enquête a été
réalisée dans plusieurs villages du corridor forestier qui ont
déjà fait l'objet de nombreuses recherches, et où la
confiance instaurée permet d'assurer la fiabilité des
données. Deux villages sont situés en lisière ouest du
corridor.
Des enquêtes individuelles ont été
menées auprès des villageois vivant dans ou à
proximité de la forêt, en basant l'échantillonnage sur une
typologie qui rend compte du fonctionnement spatial des exploitations et de la
sensibilité des ménages aux mesures de conservation (Toillier et
al., 2011). L'impact des mesures de conservation sur les stratégies de
survie des familles est évalué selon la structure de
l'exploitation et la taille de la famille, la distribution spatiale des
parcelles et leur éloignement de la forêt, la répartition
du travail et les sources de revenu. Leur statut conféré par leur
activité se traduit par des intérêts, un pouvoir de
décision et un niveau d'étude différents.
60
Source : Données de terrain, INC
Figure 8 : Usages de l'espace à
Ndotoun
61
La cartographie participative que nous avons
réalisée à Ndotoun nous montre que les activités de
subsistance couvrent environ 30% de la tenure foncière coutumière
du village. Entre autres, nous avons des zones de chasse, des champs, des sites
de collecte des PFNL, des zones de pêche. Des infrastructures telles que
la chefferie et l'Église catholique occupent également une partie
du territoire de Ndotoun. Ndotoun est délimitée au nord-ouest par
Ndokmem Nord, au sud-ouest par Beyamb, au sud par Londeng et à l'est par
Mosse. Ndotoun a un potentiel hydrographique important avec les grands cours
d'eau tels que Manguend, Nouye, Bolo, Hianga, Makongon, Soka et Mouandja. La
chute sur la rivière Mouandja est une attraction touristique pour la
communauté Ndotoun. La forêt d'Ebo limite Ndotoun au sud-ouest.
Due à cette proximité, il y a une forte pression anthropique que
le village de Ndotoun exerce sur la biodiversité de la forêt
d'Ebo. La faune et la flore sont menacées en permanence par les
activités de subsistance menées par la population de Ndokmem
Nord.
Les séances de travail et de collecte de données
avec les cartographes locaux ont permis d'identifier les habitats des primates
à Ndotoun (Fig. 9). Cette première confrontation
à la carte permet de franchir un pas supplémentaire dans
l'appréhension de la perception de l'espace rural par les habitants.
Plus généralement, cette confrontation permet d'encourager les
habitants à faire le lien entre leur discours sur l'espace et le
repérage cartographique. À ce stade, les habitants ont en
même temps pu produire du discours sur leur propre subjectivité
spatiale, et être confrontés aux subjectivités des autres
enquêtés, tout en initiant une discussion de groupe sur la carte,
ce qui les amenait à la carte collective produite en atelier. La
co-construction d'une dernière carte, collective, portant
spécifiquement sur cet espace. L'idée est ici de définir
précisément les contours de ces villages, ce qui fait consensus
et les points qui divergent.
Pour arriver à cette précision, nous partons
à nouveau de la pratique en demandant aux enquêtés
d'indiquer les contours « comme s'il devait le longer sans jamais y entrer
». Le résultat cartographique - réalisé a posteriori
- permet de mesurer l'ampleur des différences de perception des
différents villages.
62
Source : Données de terrain, INC
Figure 9 : Habitat de primates à
Ndotoun
63
La faune que l'on retrouve est la même que celle
retrouvée dans la forêt d'Ebo. Ceci est évidemment
justifié par la proximité de la forêt d'Ebo. Les animaux
migrent de la forêt d'Ebo vers la communauté pour se nourrir des
produits agricoles (principalement dans les plantations de cacao et de
bananes). La forte concentration de faune se trouve au sud du village, dans
cette partie bordant la forêt d'Ebo. Mais aussi au nord du village et
surtout loin des maisons de Ndotoun.
L'agriculture est très peu développée
car, non seulement elle est le plus souvent destinée à la
consommation locale, mais aussi il se pose un réel problème
d'évacuation ses produits en cas de nécessité dû au
manque d'infrastructures routières, et au mauvais état de la
route existante. Les activités agricoles s'étalent presque sur
toute l'année et sont pratiquées en majorité des
populations. Les cultures pratiquées dans cette zone sont notamment :
- les cultures vivrières (le macabo, la banane
plantain, le manioc, le concombre, le maïs...) qui se font dans le cadre
des champs familiaux de taille modeste. Cette activité est
généralement menée par toute la famille (père,
mère et enfants) ;
- et les cultures de rente, dont la principale est la cacao
culture l'on a remarqué que les plantations cacaoyères
créées par les populations autochtones sont très souvent
louées (contre rémunération) aux étrangers
(Bamiléké, Bamoun, Haoussa) qui assurent leur production.
L'extension et/ou la création de nouvelles plantations
s'effectue en période de saison sèche (Juillet à
Août et Décembre à Février). Les superficies de
forêt vierge défrichées dépendent de la
capacité (main d'oeuvre) et des objectifs de chaque individu qui veut
créer ou étendre sa plantation. L'abattage des arbres est fait au
moyen de la machette, de la hache, de la tronçonneuse. Il faut signaler
que la technique agricole couramment utilisée ici est la culture
itinérante sur brûlis en fonction des saisons.
La chasse est essentiellement pratiquée par les hommes.
Le matériel utilisé est fonction de la technique de chasse
pratiquée. Le piège qui se fait souvent avec un fil de fer est la
technique de chasse la plus répandue. Les différents types de
pièges identifiés ici sont : le piège à collet, le
piège à patte. L'usage du fusil et du câble en acier est
généralisé. La chasse au fusil, pratiquée par de
nombreux ménages, vise principalement la capture du gros gibier. On
pratique également le ramassage dans le cas par exemple des tortues. De
manière globale, la chasse est l'activité principale dans cette
zone. Elle est pratiquée en temps plein.
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Tableau 2 : Primates identifiés à
Ndotoun
Codé
|
Nom commun
|
Nom scientifique
|
Fréquence de contact visuel
|
Variation de la
population
|
Dernière observation
|
Période d'observation
|
Emplacement dans le village
|
Chassés ?
|
1d
|
Galago à griffes d'aiguilles du Nord
|
Euoticus pallidus talboti
|
Vu
fréquemment
|
Grandissant
|
10/10/2021
|
Nuit
|
Partout
|
Non
|
.3d
|
Milne
Edwardspotto
|
Perodicticus Edwards
|
Pas
fréquemment
|
Descendant
|
10/10/2020
|
Nuit
|
Partout
|
Oui
|
4c
|
Mangabey à tête rouge
|
Cercocebustorquatos
|
Pas
fréquemment
|
Descendant
|
03/09/2021
|
Jour
|
Sud
|
Oui,
excessivement
|
7c
|
Le singe de Preuss
|
Allochrocebuspreussipreussi
|
Vu
fréquemment
|
Grandissant
|
8/10//2021
|
Jour
|
Loin des ménages
|
Oui
|
9d
|
Singe couronné à ventre doré
|
Sous-espèce Cercopithecus pogonias
|
Vu
fréquemment
|
Grandissant
|
08/10/2021
|
Jour
|
Partout
|
Oui
|
12 c
|
Singe à croupion rouge
|
Cercopithecus nictitansludio
|
Vu
fréquemment
|
Grandissant
|
12/10/2021
|
Jour
|
Partout
|
Oui
|
16d
|
Chimpanzé
nigérian Cameroun
|
Pan troglodytes eliotti
|
Rare
|
Descendant
|
08/10/2021
|
Jour
|
Zones de haute altitude
|
Non
|
Source : Données de terrain, 2021
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Le tableau ci-dessus (tableau 2) est le résultat d'une
identification participative avec la population de primates vivant à
Ndotoun. Elle nous présente le statut des primates à Ndotoun. En
conséquence, la chasse est une activité qui a un impact
négatif sur la population de primates à Ndotoun.
Néanmoins, les chimpanzés ne sont pas chassés à
Ndotoun car la communauté est consciente de son statut d'espèce
protégée.
|