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Les délais dans le contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin

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par Théodor Enone Eboh
Université d'Abomey-Calavi/(ex-Université Nationale du Bénin - Maà®trise 2004
  

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B- Un assouplissement à l'exigence de la publicité : La théorie de la connaissance acquise

Au principe ainsi aménagé subordonnant le déclenchement des délais à une mesure officielle d'information, la jurisprudence apporte un assouplissement. Tout comme son homologue français, le juge béninois admet la théorie de la connaissance acquise pour faire échec à certaines demandes jugées tardives.

La connaissance acquise est, selon Monsieur Jean-Claude KAMDEM « la conception selon laquelle, en l'absence d'une publicité régulière, le délai peut être considéré comme commençant à courir s'il est avéré d'une manière quelconque que l'intéressé avait connaissance de l'acte ».50(*)

La connaissance acquise était autrefois appliquée de façon générale par le juge français pour déclarer certaines demandes tardives irrecevables, dès lors qu'il était établi que le requérant avait connaissance de la décision.

Elle est écartée pour certains actes par la jurisprudence et par le législateur. Dans son arrêt du 12 avril 1972, le Conseil d'Etat français élimine les décrets de la connaissance acquise en ces termes: « Ainsi, en ce qui concerne les décrets, leur publication au journal officiel n'est pas seulement un mode de publicité nécessaire, mais une condition même de leur force obligatoire. Dès lors, à leur égard, la connaissance acquise ne fait pas jouer le délai de recours contentieux »51(*). La connaissance acquise ne s'applique que dans trois hypothèses bien précises :

· dans les recours formés par les membres d'une assemblée délibérante contre les décisions prises au cours des séances où lesdits membres étaient présents ;

· lorsque le requérant montre, par son attitude qu'il a nécessairement eu connaissance de la décision ;

· lorsque l'existence et le contenu d'un acte sont nécessairement connus par un autre acte qui y fait référence et qui, lui, a fait l'objet d'une publicité adéquate.

Le juge administratif français réduit ainsi le champ d'application de la théorie de la connaissance acquise et exclut la simple connaissance de fait. Cette conception restrictive se retrouve chez son homologue béninois.

C'est dans ce sens que la requête de monsieur MONTCHO Marcel c/ Etat béninois a été rejetée52(*). Dans cette affaire, le requérant a saisi par lettre le Président de la République d'un recours gracieux en date du 13 juillet 1989. Dans ladite lettre, il fait référence à une lettre du 24 février 1989 qui ne figure pas au dossier mais qui indique en tout cas qu'à cette date, il avait déjà connaissance de la décision incriminée.

L'arrêt ZODOGANHOU Thomas c/ Ministre de la Défense Nationale, rendu en 1999 est très significatif en matière de connaissance acquise. Les faits de l'espèce sont relatifs à la radiation des Forces Armées de Monsieur ZODOGANHOU Thomas, Chef d'Etat Major des Forces de défense nationale, en octobre 1984, puis inculpé de corruption. La notification de la décision de radiation n'ayant pas été faite à l'intéressé, celui-ci l'attaque en janvier 1991 devant le juge administratif. Statuant sur la recevabilité, le juge oppose la connaissance acquise au requérant en ces termes :

« Que la théorie de la connaissance acquise est opposable au requérant dans le cadre de la procédure engagée contre lui suite à son inculpation de corruption consécutive à sa radiation des Forces Armées ; qui au vu des pièces versées au dossier, une procédure judiciaire a été engagée contre le sieur Thomas ZODOGANHOU inculpé de corruption par l'entrepreneur Romain TOSSA ; Que cette procédure découlait directement de la décision de radiation contestée par le requérant a fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu en date du 5 juillet 1988.

Qu'à l'occasion de cette procédure judiciaire, le requérant a été incontestablement informé du lien qui existait entre son inculpation et la décision par laquelle il a été radié des Forces Armées ;

Qu'en admettant comme date de départ de la connaissance acquise la date de prise de l'ordonnance de non-lieu, c'est-à-dire le 5 juillet 1988, le requérant avait jusqu'au 5 septembre 1988 au plus tard pour former son recours gracieux ; 

Que par ailleurs, en admettant la date de la délivrance de l'attestation de l'ordonnance de non-lieu, soit le 8 mai 1990, le requérant a jusqu'au 8 juillet au plus tard pour former son recours gracieux ;

Que dans la réalité le recours gracieux de Monsieur Thomas ZODOGANHOU étant intervenu hors délai, il y a lieu de conclure à l'irrecevabilité du recours pour excès de pouvoir du requérant »53(*).

Comme les décrets, lois, ordonnances, certains actes sont impérativement publiés au journal officiel. C'est le cas du compte-rendu des débats de l'Assemblée Nationale.54(*)

De manière générale, lorsqu'une loi, ou un règlement édicte de manière précise un mode de publicité, le non-respect de cette formalité a pour conséquence de ne pouvoir faire courir le délai contentieux. L'administré est fondé à croire qu'il n'y a pas eu de décision administrative le concernant. Dans une telle situation de non-décision, le requérant peut inciter l'autorité administrative à en prendre une. La règle selon laquelle " pas d'intérêt pas d'action ", peut se résumer ici par la formule " pas de décision pas de recours ".

* 50 Voir J.-C. KAMDEM, Cours du contentieux administratif, T. 1, Inédit, Université de Yaoundé, 1988-1989, p. 102.

* 51 CE, 12 avril 1972, cité par G. VEDEL, P. DELVOLVE, Droit administratif, T. 2, 12e éd. PUF, Paris, 1992, p. 160.

* 52 Arrêt N° 77/CA du 04 octobre 1999, MONTCHO Marcel c/ Etat béninois, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1999, P. 331.

* 53 Arrêt ZODOGANHOU Thomas c/ Ministre de la Défense Nationale du 12/08/1999, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1999, pp. 410 et 411.

* 54 Article 86 al. 2 de la Constitution de la République du Bénin du 11 décembre 1990

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore