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Le système de preuve devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda

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par Liliane Egounlety
UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI (Bénin) - DEA Droits de l'Homme et Démocratie 2005
  

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PARAGRAPHE 2 : LES OBLIGATIONS RECIPROQUES ENTRE L'ACCUSATION ET LA DEFENSE.

Le droit à l'égalité des armes signifie que chacune des parties au procès doit avoir la possibilité d'exposer sa cause dans des conditions qui ne la désavantagent pas d'une manière significative vis-à-vis de la partie adverse119(*). C'est donc plus en termes d'équilibre que d'égalité que se définit ce droit120(*). Un équilibre qui exige que dans la préparation de la défense, l'accusé et son conseil aient accès aux informations appropriées (A), notamment, les documents et autres éléments de preuve susceptibles de l'aider à se disculper ou atténuer sa culpabilité121(*). Dans le même ordre d'idées, aucune atteinte ne doit être portée au droit de la défense d'interroger les témoins. L'anonymat des témoins parfois requis pour protéger ces derniers constitue en ce sens une source d'iniquité du procès (B).

A- Les modalités d'accès à l'information

Le droit à la pleine information induit que les documents et les renseignements doivent être rapidement communiqués avant le procès, dans un délai qui permette une préparation suffisante de celui-ci. Les informations dont ont besoin les parties consistent essentiellement en la communication de pièces et d'éléments de preuve détenus par chacune d'elles. Ainsi, une fois les charges confirmées, et avant le procès, les parties doivent se communiquer leurs moyens de preuve. Le RPP du Tribunal est assez prolixe à cet égard. En son article 66 il dispose que le procureur doit communiquer à la défense dans un délai de trente (30) jours après la comparution initiale de l'accusé, une copie de toutes les pièces justificatives jointes à l'acte d'accusation lors de la demande de confirmation, ainsi que toutes les déclarations antérieures de l'accusé recueillies par le procureur122(*).

Hormis les cas d'exceptions légales à l'obligation de communication d'informations, le procureur doit permettre à la défense, à la demande de celle-ci, d'examiner tous livres, documents, photographies et autres objets se trouvant en sa possession ou sous son contrôle, qui sont nécessaires à la défense de l'accusé, ou qui seront utilisés par le procureur comme moyen de défense au procès123(*).

Le procureur doit aussi communiquer la liste des témoins qu'il entend citer en prenant soin de ne pas mentionner les noms de ceux de ses témoins qui font objet d'une mesure de protection nécessitant leur anonymat. En outre, bien qu'il n'ait aucune obligation relative à la recherche et à la collecte d'éléments de preuve à décharge, il doit informer l'accusé de l'existence de moyens de preuves propres à le disculper ou à atténuer sa culpabilité ou qui pourraient porter atteinte à la crédibilité des moyens à charge dont il a connaissance124(*).

De la même façon, la défense doit aussi communiquer à la poursuite la liste de ses témoins et doit de façon "facultative et exceptionnelle", préciser la ligne de défense qu'elle compte adopter et les éléments de preuves sur lesquels elle compte s'appesantir pour soutenir cette ligne de défense125(*), s'il s'agit d'un alibi, d'un moyen de défense spécial comme la déficience mentale ou la diminution des capacités mentales.

Le choix des qualificatifs "facultatif" et "exceptionnel" nous est dicté par l'utilisation respective dans la disposition du verbe « informer » et de l'expression « intention d'invoquer ». Le verbe « informer » montre qu'il ne s'agit pas d'une véritable obligation, mais juste d'une notification dont le choix semble être laissé au libre arbitre de la défense, et dont le défaut ne limite d'ailleurs pas le droit de l'accusé à invoquer lesdits moyens de défense126(*). L'« intention d'invoquer » renseigne sur le caractère exceptionnel de cette communication de la défense, et nous amène à déduire a contrario que si la défense ne prévoit pas d'utiliser une ligne de défense spéciale, il ne lui reste comme pièce à communiquer que la liste des témoins qu'elle entend citer.

Il faut observer, comme Mme LA ROSA, que l'obligation conséquente de la charge de la preuve qui découle de la présomption d'innocence rend nécessairement asymétrique cette obligation de communication qui incombe au procureur127(*). En réalité cette obligation de communiquer de la poursuite est permanente, alors que celle qui incombe à la défense est circonstancielle, exigible dans des circonstances expressément prévues par les textes du Tribunal. Elles restent tout de même des obligations auxquelles les parties ne doivent pas se dérober. Leur violation par l'une des parties ne dégage pas l'autre partie de son obligation.

La communication des éléments de preuve nécessaires à la préparation de la défense procèdent dans une large proportion de la mise en oeuvre effective du principe de l'égalité des armes, en ce sens qu'une faute commise par une partie, en particulier la non-transmission par le procureur de preuves à décharge dont il avait connaissance peut justifier la réouverture du procès128(*). D'ailleurs, il ne serait pas superflu à notre sens, que soit insérée dans les textes du Tribunal, une disposition au terme de laquelle les juges décident des sanctions à infliger à une partie qui ne s'acquitte pas de son obligation de communiquer.

En outre, les restrictions dans la communication de l'information telles que la non-divulgation des noms des témoins, doit être rigoureusement encadrée car elle constitue, lorsqu'elle est autorisée, une véritable entorse à l'équilibre entre les parties.

* 119 Jean Claude SOYER, Michel de SALVIA, "article 6" in Louis Edmond PETITI, Emmanuel DECAUX, Pierre-Henri IMBERT (sous la dir.), La Convention Européenne des Droits de l'Homme , Economica, Paris, 1995, p. 265 ; Voir CEDH, DELCOURT c/. Belgique, arrêt du 17 janvier 1970, A n°11 § 26.

* 120 Annick SADZOT, "L'égalité des armes et la contradiction dans le procès pénal" in Les droits de la défense, Actes du Colloque « Jacques Henry » organisé par la Conférence Libre du jeune Barreau de Liège le 28 mars 1997, ASBL Editions du Jeune Barreau de Liège, 1997, p 137.

* 121 RPP du TPIR, art. 66 et 68.

* 122 Un mémoire préalable au procès qui traite des questions de fait et de droit; des accords entre les parties sur des points de fait ou de droit et un exposé sur d'autres points non litigieux; un exposé des points de droit et de fait litigieux, une liste des témoins que le procureur entend citer comportant :

- le nom ou le pseudonyme de chacun des témoins ; 

- un résumé des faits au sujet desquels chaque témoin déposera ;

- les points de l'acte d'accusation sur lesquels chaque témoin sera entendu ; et la durée probable de chaque déposition ;

- une liste des pièces à conviction que le procureur entend présenter, en précisant à chaque fois que possible si la défense conteste ou non leur authenticité ;

- les copies des déclarations de chacun des témoins que le Procureur entend appeler à la barre.

* 123 RPP du TPIR, art. 66,B).

* 124 RPP du TPIR, art. 68.

* 125 RPP du TPIR, art. 67, A), ii).

* 126 RPP du TPIR, art. 67, B).

* 127 Anne-Marie LA ROSA, op. cit., p. 124.

* 128Aff n°ICTR IT-95-17/1, FURUNDZIJA, décision du 16 juillet 1998; Aff n°ICTR-00-56,. NDINDILIYIMANA, decision of the defence motion for Immediate Stay of all charges against the accused NDINDILIYIMANA, due to the prosecutors non-compliance with the rules.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand