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Les déterminants de l'épargne des ménages au Cameroun

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par Pierre Alain YOUMBI
Université de Douala - DESS en Gestion Financière et Bancaire 2003
  

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

Dans les années 60 à 80, le crédit international était abondant et bon marché. Nos pays ont ainsi contracté un volume important d'emprunts extérieurs pour financer leur développement. Ces entrées massives de capitaux, dans leur phase de retour ont généré un important service de la dette dont le gonflement a été accéléré à partir des années 80 par la hausse concomitante des taux d'intérêt et des taux de change. L'incapacité à honorer le service de la dette a été à l'origine des politiques de rééchelonnements, de remises ou d'annulations partielles du stock ou de l'encours commercial et public.

Pour assurer la solvabilité de nos pays, les bailleurs de fonds vont imposer des politiques d'ajustement budgétaire et monétaire à l'objectif de rétablir les équilibres macroéconomiques. La mise en place de ces réformes s'avèrent tellement contraignantes (restructuration du système bancaire, surveillance mul1tilatérale des finances publiques, désengagement de l'Etat du système productif...) que des solutions alternatives à la dépendance extérieure (promotion de l'épargne intérieure) commencent sérieusement à être explorées pour pallier la diminution des flux de capitaux externes.

Figure n° 1 : Les différentes catégories d'épargne

Epargne budgétaire

Epargne gouvernementale

Epargne des entreprises publiques

Epargne officielle étrangère

Epargne étrangère

Emprunt commercial privé

Investissements directs

Epargne privée Epargne des entreprises

Epargne des ménages

Pour ce qui est de l'épargne des ménages, elle se présente sous plusieurs formes (voir Annexe I). On peut la regrouper en :

- Epargne financière (placements) ou non financière.

- Epargne formelle, semi formelle et informelle.

- Epargne affectée ou avortée (ROBERTSON, 1926).

La mise en place progressive d'un marché financier, l'organisation et la réglementation de l'activité de microfinance participent d'une volonté de promotion de l'épargne intérieure. L'appel direct à l'épargne va réduire l'importance du financement par le crédit bancaire. Les banques sont responsables de la création monétaire alors que les marchés de capitaux ont un rôle d'affectation de l'épargne. Dans un cas, il y a injection nouvelle de pouvoir d'achat, dans l'autre il y a recyclage de la monnaie existante.

Au Cameroun, le taux de l'épargne des ménages pour la période allant de 1970 à 2000 varie entre 4,15 et 10,75 % du revenu disponible brut (voir annexe IV). Ce taux, faible assurément, est un indicateur de l'effort qui reste à fournir. L'existence de l'épargne n'est plus à démontrer. Seulement il existe des capacités et gisements sous-estimés et sous-exploités. Cette épargne est thésaurisée ou transférée à l'étranger (fuites) ou encore dirigée vers des investissements improductifs, des consommations somptuaires, des acquisitions spéculatives ou enfin vers des circuits financiers traditionnels qui échappent à toute comptabilité.

Paul WACHTEL1(*) (1985) constate que l'épargne des ménages qui, dans les pays développés ou à revenus intermédiaires (en 1992, ce taux d'épargne2(*) était de 39% en Chine, 37% en Indonésie, 35% en Malaisie, 28% en Allemagne, 23% au Nigeria et 21% au Brésil) est une source de financement importante pour la formation du capital n'est qu'une source potentielle dans les PVD parce que largement inutilisée.

Dans une politique de mobilisation de l'épargne ADAMS3(*) (1985) recommande que l'accent soit mis non pas sur l'incapacité à épargner mais sur les incitations à l'épargne et les opportunités de placement. De même, ces politiques d'encouragement à l'épargne doivent s'accompagner de politiques d'orientation de l'épargne vers la formation du capital productif. Celles-ci passent par une meilleure connaissance des motivations, des pratiques, attitudes et comportements d'épargne et par une bonne compréhension des mécanismes de formation de l'épargne financière ainsi que de sa composition entre les différents emplois possibles.

Après avoir fixé la problématique et l'intérêt du sujet, nous allons définir les concepts épargne, ménages et déterminants de l'épargne pour ensuite préciser les objectifs et enfin parcourir les évolutions de l'analyse du rôle de l'épargne dans la pensée économique.

D'après François POULON4(*) (1998) « l'épargne est un des concepts dont la définition est si claire qu'elle frôle la tautologie mais dont les racines plongent dans l'obscurité ». Il la définit comme la non dépense du revenu en biens de consommation, comme une consommation future substituable à une consommation présente. Concevable aisément comme non consommation présente du revenu courant, il fait remarquer le caractère imprécis de cette définition dès qu'on l'envisage dans la continuité du temps, à chaque instant duquel le flux de non consommation présente est normalement compensé par un flux strictement égal (sauf croissance du revenu) de non consommation passée redevenue consommation présente.

Pour KEYNES, l'épargne est le résidu du revenu après la consommation.

Pour Bernard BERNIER, Yves SIMON5(*) (2001), l'épargne est la « part des ressources courantes qui reste disponible pour accumuler les actifs physiques ou financiers ».

Le Petit Larousse définit l'épargne comme « la fraction du revenu individuel ou du revenu national qui n'est pas affecté à la consommation».

S'agissant de la définition conceptuelle du ménage, R. LAGRAVE et J. B PAJET6(*) (1966) le réduit à « l'ensemble des personnes vivant ensemble dans un même foyer et formant une même famille ».

La comptabilité nationale améliore la définition précédente et considère le ménage comme « un groupe de personnes qui vivent ensemble sous un même toit quelque soit les liens qui les réunissent et qui mettent en commun au moins une partie de leur revenu pour pourvoir au logement, à la nourriture et aux besoins essentiels »

Leurs ressources principales proviennent des  revenus du travail (salaire, traitement...), des revenus de la propriété (loyers, dividendes...) et des revenus mixtes pour les entrepreneurs individuels à la fois apporteurs de travail et propriétaire des moyens de production.

Les ménages dont il est question ici sont les ménages résidents qui ont effectué des opérations économiques pour un an ou plus sur le territoire économique du pays.

Au sens du Petit Robert, le terme déterminant renvoie à ce qui peut amener, inciter, pousser à poser volontairement un acte. Les déterminants de l'épargne peuvent alors être considérés comme les variables qui influencent ou expliquent le comportement d'épargne i.e. qui peuvent soit inciter, amener ou pousser à épargner ou à ne pas épargner, soit déclencher, provoquer ou entraîner le désir d'épargner plus ou la décision de ne plus épargner.

Le type d'épargne étudié est l'épargne volontaire des ménages. Ils décident du montant, de la durée et du type de placement. A coté de cette épargne volontaire (produits d'épargne souscrits), il existe également une épargne involontaire ou forcée (remboursement d'emprunt, fiscalité, inflation, taux de change surévalué...) et une épargne contractuelle (produits d'assurance vie, compte à terme, plan épargne logement).

L'analyse du rôle de l'épargne dans la pensée économique s'est faite dans deux directions. Celle qui accorde une importance mineure à l'épargne et celle qui milite pour sa promotion.

Au départ de la première tendance, on retrouve MALTHUS (1766-1834). Dans sa correspondance du 7 juillet 1821, il indique qu' « un effort d'accumulation très rapide en impliquant une dimension considérable de la consommation improductive affaiblit grandement les motifs habituels de production, entraîne un arrêt prématuré du développement de la richesse ». Il existe selon lui un taux d'épargne optimal fournissant le maximum de richesse et d'emploi. Le dépassement de ce taux engendre la crise.

KEYNES et les postkeynésiens tiennent des positions radicales. Pour KEYNES7(*) « l'acte d'épargne individuelle signifie une décision de ne pas dîner aujourd'hui. Mais, il n'implique pas nécessairement une décision de commander un dîner ou une paire de chaussures, une semaine ou une année plus tard ». Du fait de cette incertitude, l'épargne est un gaspillage de ressources présentes qui ne peut qu'accentuer les déséquilibres futurs tandis que la consommation présente est un gage de consommation future. La consommation des ménages constitue pour lui la composante stable, prévisible et largement dominante du revenu national. L'épargne n'est donc pas un préalable nécessaire à l'investissement. Les comportements d'épargne et d'investissement ont des motivations différentes. Le premier est une fonction stable du revenu tandis que le second est très volatile et dépend des anticipations du taux de l'intérêt.

Dans le modèle de croissance d'HARROD et DOMAR (1939), l'épargne est à l'origine d'une croissance déséquilibrée avec des fluctuations importantes et cumulatives de l'activité.

Pour Alvin H. HANSEN, l'épargne provoque la stagnation.

Parallèlement à ces analyses, d'autres auteurs ont accordé une place importante à l'épargne. D'Adam SMITH8(*) (1723 -1790) à David RICARDO9(*) (1772-1823) en passant par John STUART MILL10(*) (1806 -1873), ils pensent que l'épargne est la principale source de croissance et d'accumulation du capital. La consommation utilise les ressources dans le présent et l'épargne accroît le potentiel de croissance de demain.

Les tenants de la croissance endogène (ROMER, 1986) et (LUCAS, 1986) pensent qu'une augmentation du taux de l'épargne augmente pour toujours le taux de croissance de l'économie. D'autres néoclassiques (SOLOW, 1956) ont mis en exergue une corrélation positive entre la croissance et l'épargne. Des auteurs comme D. W. ADAMS11(*) (1985) montrent que l'épargne financière a une importance capitale pour le développement parce qu'elle :

- améliore l'affectation des ressources;

- induit une répartition plus équitable des revenus;

- renforce la vitalité du marché financier en favorisant l'intégration des circuits financiers et économiques;

- réduit l'inflation;

- accroît le degré de liberté économique.

Après l'analyse du rôle de l'épargne, il est nécessaire de préciser la raison pour laquelle notre étude se réduit à l'épargne des ménages.

P. WACHTEL12(*) (1985) attire l'attention sur le fait que le financement public (épargne budgétaire) soustrait les décisions d'investissement et de financement de la discipline concurrentielle du marché pouvant aller jusqu'à la mauvaise allocation des ressources.

Sur un autre plan, la possibilité de s'endetter pour financer l'accumulation permet de relâcher transitoirement la contrainte sur l'épargne. L'endettement revient simplement à déplacer dans le temps cette contrainte.

- Il expose aux contraintes aléatoires des marchés internationaux de capitaux, (inflation importée, spéculation sur les taux de change, fluctuation des taux d'intérêt).

- Il favorise les éventuels effets d'éviction de l'épargne nationale par l'épargne étrangère. En plus d'avoir un effet négatif sur la balance des paiements et de ne pas être adapté aux indispensables financements à court terme, il accroît la dépendance financière.

L'analyse de la structure des agrégats et des ratios d'endettement au Cameroun montre qu'une partie importante de la richesse nationale est absorbée par le service de la dette. Au regard du poids de l'encours de la dette totale dans le PIB, il est quasi certain qu'à terme, le développement pourrait même être compromis (cf. Evolution des agrégats et ratios d'endettement au Cameroun de 1992 à 2001 en Annexe II)

J.P. BENOIT13(*) remet en cause l'efficacité de la dette dans la mesure où la plupart des décisions des pays donateurs concernant l'affectation de leur aide extérieure sont fondées sur des liens politiques, économiques et culturels (une ancienne puissance coloniale veut maintenir des relations privilégiées avec les anciennes colonies), des affinités religieuses, des considérations stratégiques et géopolitiques (l'aide est considérée comme un outil pour l'accomplissement d'objectifs de politique étrangère du donateur) plutôt que sur des critères purement financiers.

Même si les entreprises réalisent une épargne qui est à l'origine de l'autofinancement, des placements ou des prises de participations, il n'en demeure pas moins qu'elles restent structurellement des emprunteurs nets. Dans la plupart des cas, les ménages possèdent encore des droits de propriété (actions) ou de créances (obligations) sur ces entreprises.

Il reste enfin les ménages qui structurellement sont des épargnants nets. Ce sont des agents à capacité de financement dont le fonction économique principale est la consommation et accessoirement la production quand elle est organisée dans le cadre d'une entreprise individuelle. Numériquement, ils sont plus importants. D'après ECAM II, (Enquête Camerounaise Auprès des Ménages) réalisée en 2001, le nombre de ménages est évalué à 2 865 265 pour une population active et totale respectivement estimée à 6 121 000 et à 15 472 558.

Les objectifs assignés à notre étude sont de :

- déterminer les facteurs qui influencent le comportement d'épargne des ménages;

- cerner la pertinence des variables de politiques économiques par rapport à l'épargne des ménages.

La détermination des facteurs qui influencent le comportement d'épargne des ménages va permettre dans le cadre d'une politique nationale de mobilisation de l'épargne des ménages de repérer les variables significatives sur lesquelles les autorités peuvent agir pour :

- identifier les préférences des ménages en services financiers;

- augmenter le taux et le volume de l'épargne des ménages;

- modifier la structure en augmentant la part de l'épargne financière;

- maîtriser la répartition régionale de l'épargne;

- concevoir et appliquer des techniques adéquates de collecte de l'épargne des ménages;

- attirer l'épargne informelle vers le secteur financier formel.

Aussi, allons-nous déterminer le rôle du secteur informel et leur importance dans la mobilisation de l'épargne et proposer des politiques qui seront utiles pour la mobilisation et la promotion de l'épargne des ménages au Cameroun.

De la revue de la littérature, nous testerons la significativité des variables influençant le comportement d'épargne des ménages en utilisant des tests et estimations économétriques. Nous utiliserons la technique de co-intégration pour identifier clairement la relation véritable entre les variables en cherchant l'existence d'un vecteur de co-intégration et en éliminant son effet le cas échéant. En d'autres termes, nous estimerons d'abord les relations d'équilibre à long terme entre l'épargne des ménages et ses variables explicatives, pour ensuite procéder à l'estimation du modèle à correction d'erreur du comportement à court terme des variables. Le respect de cette procédure attestera, non seulement la fiabilité de l'interprétation des résultats obtenus, mais aussi la fiabilité des prévisions et des recommandations de politiques pour une meilleure promotion de l'épargne des ménages au Cameroun. Le modèle sera estimé par la méthode des MCO avec le logiciel E-Views 4.0. La période d'estimation va de 1970 à 2000.

Les données secondaires utilisées sont obtenues pour certains, à partir CD-ROM 2002 World Development indicators de la Banque Mondiale et pour d'autres auprès de l'institut National de la Statistique.

Pour ce qui est du plan, l'étude est subdivisée en deux parties et en quatre chapitres. Trois chapitres sont consacrés à la théorie et un chapitre aux tests, interprétations et recommandations.

« Le principe qui nous porte à épargner, c'est le désir d'améliorer notre sort,

désir qui est en général calme et sans passion, mais qui naît

avec nous et ne nous quitte qu'au tombeau »

ADAM SMITH

* 1 WATCHTEL P. Quelques observations sur l'épargne des ménages dans les PVD in Epargne et développement sous la dir de KESSLER D, ULLMO P. Paris 

: Economica, 1985 p....Epargne et Développement op cit. p 17

* 2 GILLIS Malcolm et al. Economie du développement, 4ème éd., Paris : Deboeck, 1998, p391.

* 3 ADAMS D.W. L'épargne financière rurale a-t-elle un rôle à jouer dans le développement ? in Epargne et développement, op cit. p 11

* 4 POULON François, Economie générale, Paris : Dunod, 1998, 4ème éd. p.349

* 5 BERNIER Bernard, SIMON Yves, Initiation à la macroéconomie, 8ème éd, Paris : Dunod, 2001, p.25

* 6 LAGRAVE R., PAYET J.B, L'économie des ménages, Paris : Ed.Didier privat , 1966, p11

* 7 KEYNES, John Maynard, Théorie générale de l'emploi de l'intérêt et de la monnaie, Trad. Française, Paris : La petite bibliothèque PAYOT, 1971 p169

* 8 ADAM Smith, Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776

* 9 RICARDO David, Principe de l'économie politique et de l'impôt, 1817

* 10 STUART MILL John, Principe de l'économie politique, 1848

* 11 ADAMS D. W. Op. Cit, p.10

* 12 P. WACHTEL op. cit .18

* 13 JP.V BENOIT, Taux d'intérêt administrés et taux d'intérêts du marché in épargne et développement sous la dir de KESSLER D., ULLMO, P, Paris :Economica, 1985, P265

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984