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L'impact de l'auto emploi sur le chômage et la pauvreté au Cameroun

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par Aloys Mahwa
Université Catholique d'Afrique Centrale - Maîtrise 2007
  

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CHAPITRE II. : L'AUTO EMPLOI, LE CHOMAGE ET LA PAUVRETE

Comme nous l'avons vu précédemment, le travail indépendant comme la création d'activité en auto emploi renferme plusieurs réalités : l'intervention étatique, le financement de l'activité, la problématique du revenu des indépendants. Les récentes littératures sur l'économie africaine pensent que les micro- entreprises sont incontournables dans le processus de croissance, du développement et la promotion de l'esprit d'entreprise. Outre la dynamique entrepreneuriale, plusieurs auteurs pensent que la création d'emploi devrait avoir pour objectif opérationnel et pratique la lutte contre la pauvreté. Par ailleurs BABISSAKANA28(*) pense que « toute stratégie de réduction de la pauvreté monétaire excluant l'emploi et le marché du travail est par nature vouée à l'échec » et, qu'au niveau macro économique, deux facteurs importants jouent directement sur la création d'emplois : l'employabilité et l'entrepreneuriabilité. Ces deux facteurs sont déterminés par la qualification qui elle dépend de la qualité et de l'adéquation de l'éducation et de la formation. C'est aussi l'avis du Bureau International du Travail (BIT)29(*) qui pense que de manière générale, tant l'emploi rémunéré que l'emploi indépendant contribue à assurer un revenu et à réduire ainsi la pauvreté s'ils permettent :

-de passer du chômage à l'emploi ;

-d'accroître l'ensemble des salaires et prestations versés aux travailleurs pauvres ;

-d'augmenter les revenus tirés de l'emploi indépendant ;

-de passer d'une façon plus générale et à plus long terme, dans une économie donnée, d'un emploi moins rémunéré dans le secteur informel à un emploi mieux rémunéré et mieux protégé dans le secteur formel.

Si de manière générale l'on considère la promotion de l'emploi indépendant comme moyen de réduire le chômage, l'efficacité des mesures d'incitation à la création d'activité s'apprécierait à travers la pérennité des activités créées.30(*) Le taux de survie des activités créées est un aspect fondamental à considérer. Il semble être très lié à la rigueur avec laquelle le projet d'entreprise est jugé. En Allemagne, par exemple, où l'on est particulièrement rigoureux dans l'évaluation du projet d'entreprise, une étude réalisée par l'Institut für Arbeitsmarkt und Berufsforschung portant sur un échantillon d'entreprises créées depuis 1994 par des chômeurs ayant bénéficié de l'allocation relais montre que, trois ans après avoir bénéficié du dispositif, 70 pour cent des bénéficiaires sont toujours travailleurs indépendants et, en moyenne, chaque bénéficiaire a embauché un salarié. Les résultats observés aux Pays-Bas sont très semblables (OCDE, 2000). Le taux de survie s'interprète comme la durée pendant laquelle la personne est occupée ou a un emploi effectif (qui est l'activité). Une autre interprétation du taux de survie, c'est la durée pendant laquelle la personne jouit de son autonomie financière, étant entendu que la raison d'être principale des programmes d'aide au travail indépendant destiné aux chômeurs est économique. Ces programmes veulent faire passer le participant d'un état de dépendance financière (à l'endroit de l'assurance- chômage ou de l'aide sociale) à un état d'autonomie financière. Avant d'arriver à ce problème qui constituera notre objet dans la partie pratique d'analyse d'activités créées par le Fonds national de l'Emploi au Cameroun, appréhendons d'abord la problématique de la lutte contre le chômage à travers « l'employabilité » (ou le salariat) et « l'entrepreneurabilité » (emploi indépendant ou autre). L'employabilité tant qu'il est un moyen de réduire le taux de chômage pose trois problèmes principaux à savoir :

-la rigidité du marché de l'emploi où la vitesse de rotation d'un poste à l'autre ou d'un emploi à l'autre est très réduite.

-L'employabilité fait aussi problème à travers la notion de travailleurs pauvres élaborée par le Bureau International de travail, ceux qui n'ont pas assez de revenu quel que soit leur emploi.

-L'employabilité touche aussi la difficulté de l'emploi décent, un autre concept usuel au Bureau International du Travail selon lequel, il ne suffirait pas de créer des emplois, mais encore faut-il que ces emplois soient décents et capables d'assurer un minimum de sécurité au personnel employé.

L'entrepreneurabilité quant à elle, n'est pas aussi évidente en Afrique (en générale) et au Cameroun (en particulier) où des réelles difficultés s'observent à travers la lourdeur administrative lorsqu'il faut créer une entreprise, la difficulté d'accès au crédit, malgré la surliquidité des banques commerciales (on peut aussi évoquer l'absence de marché financier), les contraintes fiscales, la culture ou l'esprit d'entreprise, etc.

Section 1 : L'employabilité et ses difficultés

I. Théorie du chômage et le fonctionnement marché du travail

Les néoclassiques considèrent le travail comme une marchandise homogène. On parle de marché de l'emploi lorsque d'un côté, un travailleur (les ménages en général) se présente sur le marché du travail pour offrir sa main d'oeuvre. Il se comporte donc comme un vendeur. Evidemment, plus le salaire offert pour un emploi donné est élevé, plus les candidats sont nombreux et inversement. De plus, un individu n'accepte que l'emploi qu'il estime le plus avantageux à ses yeux, c'est-à-dire, celui qui offre la rémunération la plus élevée au regard des attraits et difficultés du poste. A l'inverse, un employeur (les entreprises en général) se présente sur le marché du travail pour se procurer de la main-d'oeuvre, et se comporte donc comme un acheteur. Ainsi, l'employeur n'accepte d'embaucher un travailleur que s'il rapporte (tous apports confondus) plus qu'il ne coûte (tous coûts confondus). Selon la même logique, un employeur ne consent à des hausses de salaires ou des avantages sociaux supplémentaires qu'à condition que la productivité des travailleurs soit suffisante pour justifier des coûts additionnels. Sur ce marché se confrontent une offre et une demande de travail, qui sont une fonction respectivement croissante et décroissante du salaire réel. Le déséquilibre sur ce marché porte le nom de « chômage. »

De manière générale et de façon mécanique, le chômage indique le nombre d'individus (en âge de travailler) n'ayant pas d'emploi à un moment donné. Pour le Bureau International de Travail (BIT), un chômeur est une personne sans emploi n'ayant pas travaillé (ne serait-ce qu'une heure) lors de la semaine précédent l'enquête, n'ayant pas recherché un emploi au cours du mois précédent l'enquête, mais qui est disponible pour travailler. Les chômeurs au sens du BIT (« actifs inoccupés ») comprennent toutes les personnes ayant atteint l'âge de 15 ans, qui au cours de la période de référence étaient à la fois :

* « sans travail », c'est-à-dire, n'étaient pourvues ni d'un emploi salarié ni d'un emploi non-salarié, comme défini ci- avant ;

*« disponibles pour travailler » dans un emploi salarié ou non salarié durant la période de référence ;

*« à la recherche d'un emploi », c'est-à-dire, qui avaient pris des dispositions spécifiques au cours d'une période récente spécifiée pour chercher un emploi salarié ou un emploi non salarié.

Ces dispositions spécifiques peuvent inclure :

*l'inscription à un bureau de placement public ou privé ;

*la candidature auprès d'employeurs ;

*les démarches sur les lieux de travail, dans les fermes ou à la porte des usines, sur les marchés ou dans les autres endroits où sont traditionnellement recrutés les travailleurs ;

*l'insertion ou la réponse à des annonces dans les journaux ;

*les recherches par relations personnelles ;

*la recherche de terrain, d'immeubles, de machines ou d'équipement pour créer une entreprise personnelle ;

*les démarches pour obtenir des ressources financières, des permis et licences, etc.

Deux théories s'opposent quant à l'origine du chômage dans une économie : la théorie libérale estime que « le chômage est volontaire » et la théorie keynésienne selon laquelle « le chômage est involontaire. » Selon la théorie libérale, lorsque le marché fonctionne convenablement, le salaire est parfaitement flexible et permet d'égaliser l'offre à la demande de travail. Une offre supérieure à la demande conduit à une baisse du salaire, et une demande supérieure à l'offre à une augmentation, cela jusqu'à égalité entre les deux. Sauf un certain taux de chômage frictionnel ou chômage d'équilibre, mis en évidence par William H. Beveridge, résultant de la mobilité du travail et du laps de temps nécessaire pour retrouver un nouvel emploi après avoir quitté le précédent, ou un taux de chômage naturel résultant de l'inadaptation de certains individus (Friedman), le chômage, selon cette théorie est volontaire et s'explique par un refus individuel ou collectif d'accepter de travailler au salaire d'équilibre.

Par ailleurs, les prolongements néolibéraux conviennent que l'Etat serait à l'origine du chômage par ses interventions qui nuisent au fonctionnement du marché. Ainsi Friedman et Rueff pensent que l'allocation de chômage perturbe le calcul rationnel des individus. Chez les Keynésiens, par contre, le chômage n'est pas un phénomène « microéconomique » et « volontaire. » Selon Keynes, l'équilibre partiel existe, mais il n'y a aucune raison pour que les seules forces du marché y parviennent puisque offre et demande de travail résultent de variables différentes (salaire nominal pour l'offre de travail et salaire réel pour la demande de travail). Le niveau d'emploi n'est pas fixé sur le marché du travail, il résulte directement du niveau global de la production, qui lui-même résulte du niveau de la demande effective, c'est-à-dire, de la demande anticipée par les entreprises.

Quelle que soit la théorie sur l'origine du chômage, des spécialistes convergent aujourd'hui pour admettre qu'il faut rendre le marché du travail flexible (minimiser les conditions et les coûts d'entrée et de sortie). Pour que le marché de travail soit qualifié de flexible, il doit donc fonctionner librement et pouvoir s'adapter aux chocs conjoncturels et à un environnement économique en perpétuelle évolution. La flexibilité du marché du travail désigne la facilité avec laquelle les travailleurs et les employeurs peuvent négocier des contrats de travail mutuellement avantageux. Selon Joseph Stiglitz (1974), la rotation de la main-d'oeuvre (le turn-over) a en effet un coût non négligeable pour l'entreprise : un coût de licenciement (surtout si des primes de licenciement sont prévues), un coût d'embauche (par exemple l'utilisation d'un cabinet de recrutement), un coût de formation et un coût d'adaptation (les nouveaux embauchés sont moins productifs que les anciens). Ces nouveaux coûts peuvent inciter les entreprises à rémunérer leurs salariés au-dessus du salaire du marché (et donc du salaire d'équilibre) afin de fidéliser leur main-d'oeuvre.

La dynamique de l'emploi indépendant (auto -emploi) vient en quelque sorte révolutionner cette vision du marché de travail. Ce n'est plus le rapport traditionnel entre un employé et un employeur qui compte, mais plutôt la « dimension réflexive » où l'employé et l'employeur constituent une même personne physique. Il y a donc un passage d'une relation « commutative » où l'employeur est en relation avec son employé à travers le contrat de travail vers une relation « réflexive » où le travailleur indépendant est son propre employeur. C'est sans doute ce qui a fait dire à Diane- Gabrielle Trembaly, dans le contexte du Canada, en s'interrogeant sur « comment le chômage et la sécurité doivent être définis dans le nouveau contexte, puisque le taux de chômage ne mesure pas correctement l'offre de travail réelle, ni l'insécurité. Ceci est notamment visible lorsqu'on analyse le cas du travail autonome...les catégories d'employés, de chômeurs et d'inactifs sont trop simplistes pour analyser les réalités du travail autonome, comme la diversité des statuts d'emploi (occasionnel, temporaire, temps réduit, temps partiel, etc.). Ainsi, ajoute-elle, le concept même de la population active se trouve remis en question face à la diversité des formes de travail mises en évidence par ailleurs. En effet, diverses formes de travail se multiplient et certaines sont plus reconnues que d'autres. »31(*)

A la fin des années 80, le Cameroun s'est tourné vers les bailleurs de fonds internationaux qui lui ont imposé une politique d'ajustement structurel (PAS). Ces politiques, en visant une réduction importante des dépenses budgétaires publiques, ont entraîné l'arrêt progressif des projets d'investissement en cours, une forte rationalisation du personnel de la fonction publique et ont impulsé un mouvement de privatisation. Elle a profondément affecté l'emploi, forçant le pays à passer d'une organisation où l'Etat était le principal pourvoyeur d'emplois à une organisation où le secteur privé devait en assurer la relève. Les dernières enquêtes faites par l'Institut National de Statistiques au Cameroun montrent que l'Etat n'a pas encore repris sa fonction de premier employeur et l'informel prend de plus en plus de l'ampleur.

Tableau n°1 : Structure des emplois selon le secteur institutionnel et la catégorie socio- professionnelle par milieu de résidence au Cameroun

Secteur institutionnel Urbain Rural Cameroun

Public 10,5 2,6 4,9

Privé formel 11,8 2,0 4,7

Informel non agricole 67,4 22,5 35,2

Informel agricole 10,3 72,9 55,2

Total 100 100 100

Catégorie socio- professionnelle

Cadres 10,1 1,8 4,2

Travailleurs indépendants 45,5 55,9 53,0

Employés, ouvriers 20,3 3,2 8,0

Manoeuvres et autres 14,5 5,5 8,0

Aides familiaux 9,6 33,6 26,8

Total 100 100 100

Source : INS, enquête sur l'emploi et le secteur informel 2005, phase 1, p. 38.

Une approche plus fine de la réalité du secteur informel non agricole montre l'importance qu'y prennent les micro- entreprises (moins de six salariés) et l'auto -emplois. Ces deux catégories représentent à elle seules près de 90% des emplois informels, chacune d'elle en représentant à peu près la moitié. Les services regroupent 66% de ces emplois, dont 28% pour le commerce, 21,3% des actifs exercent par ailleurs dans un véritable local professionnel et 23% d'entre eux sont des travailleurs ambulants.32(*)

Structure général et principaux indicateurs de la population active

De manière générale, la population d'un pays est répartie en trois groupes tenant compte de l'âge : personne ayant moins de 15 ans (supposées non actives et entièrement dépendantes des personnes adultes, souvent un parent), les personnes ayant leurs âge entre 15 et 65 ans (considérées comme personne en âge de travailler ou personne active) et les personnes ayant dépassé les 65 ans (âge de la retraite). Les chercheurs d'emplois se trouvent dans la deuxième catégorie et le taux de chômage mesure souvent la part des personnes actives qui n'ont pas d'emplois. Par expérience et selon des études, la relation entre pauvreté et âge prend généralement la forme d'une courbe en « U » qui indique que la pauvreté a tendance à être plus élevée entre les deux bouts de l'espérance de vie (0 à 25 ans et à partir de 60-65 ans). La recherche de l'emploi quant à elle suit une courbe « U » renversée. Nous verrons par la suite la catégorie d'âge à laquelle appartiennent les promoteurs d'activité d'auto emploi du Fonds National de l'emploi. La structure générale de la population active se schématise de la manière suivante :

* 28 « Faisabilité du projet de pacte national pour l'emploi », in Débats économiques du Cameroun & d'Afrique, Yaoundé, Prescriptor, 2003, P.501.

* 29 Bureau International du Travail, « Emploi, productivité et pauvreté : tendances mondiale », Rapport sur l'emploi dans le monde, Genève, 2007.

* 30 La pérennité dont il s'agira ici sera déterminée par deux variables complémentaires, l'existence d'activité et la durée de vie de l'activité, que nous développons dans la partie pratique.

* 31 Diane- Gabrielle Tremblay, « Chômage et transformations du marché du travail ; les enjeux sur le plan de la sécurité et de l'insécurité », Note de recherche 2003- 17, Télé- université, Université du Québec, PP. 5-6.

* 32 Source : INS, enquête sur l'emploi et le secteur informel 2005, phase 1, P.10.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway