WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La question des l'universalite des droits de l'homme dans les manuels relatifs aux droits et libertés

( Télécharger le fichier original )
par Mohamed Hedi SEHILI
Université Montpellier 1 - Master recherche Droit constitutionnel et théorie du droit 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

§. 2. La conception Asiatique des droits de l'homme

La doctrine des droits et libertés n'avait pas analysé profondément les spécificités de la conception asiatique des droits de l'homme pourtant cette conception représente une véritable démarcation par rapport a la déclaration universelle des droits de l'homme et traduit la fragilité de l'universalité a l'heure actuelle.

Néanmoins, certains auteurs avaient mis l'accent sur les valeurs qui marquent l'identité asiatique et empêchent la réception « normale » de la conception occidentale, et l'on peut déduire que les Etats asiatiques défendent une dimension plus cosmologique du monde174(*).

En effet, dans le communique de gouvernement a Singapour en 1991 sur les valeurs partagées ou dans la déclaration commune a Bangkok en 1993, l'argument de la spécificité confucéenne de l'Asie est très présent175(*). Les dirigeants des États asiatiques comme Singapour, la Malaisie et la Chine critiquent la conception occidentale des droits de l'Homme comme un instrument de l'hégémonie de l'Occident. Ils subordonnent les libertés au développement économique, et qualifient le discours sur les droits de l'Homme d'« impérialisme culturel », à la manière du « choc de civilisations » défini par Samuel Huntington176(*).

Mais, en réalité, les valeurs asiatiques177(*) opposées à la conception occidentale des droits de l'homme cachent des gouvernements autoritaires qui, au nom de ces valeurs, renoncent à la démocratie. Le professeur Michel Levinet prévoit à cet égard que « sans doute, l'invocation des valeurs asiatiques peut se muer en un outil politique au service d'une élite qui détient le pouvoir politique et économique »178(*). Plusieurs gouvernements asiatiques, tout en se déclarant pourtant favorables au concept des droits de l'Homme et à son universalité, ont « cherché à redéfinir cette notion en mettant en question son applicabilité universelle dans des contextes culturels, économiques et sociaux divers. En somme, les participants ont souligné tant la diversité que l'universalité des droits de l'Homme ». Singapour a mis en exergue le fait que la reconnaissance universelle des droits de l'Homme pouvait s'avérer nocive si l'universalisme servait à refuser ou masquer la réalité de la diversité. De ce fait, l'universalité des droits de l'homme est acceptée mais avec des réserves, ce qui permet de parler d'une acceptation conditionnelle de l'universalité par les élites asiatiques. S'agissant des déclarations formulées par les Etats Asiatiques, on peut citer la Déclaration de Bangkok, adoptée lors de la Conférence régionale sur les droits de l'Homme réunie dans cette ville du 29 mars au 2 avril 1993, deux mois avant la Conférence de Vienne.

Certes, la Déclaration de Bangkok a réaffirmé le principe que tous les droits de l'Homme sont universels, toutefois, elle n'a pas manqué de souligner l'importance de la prise en compte des particularités nationales et régionales ainsi que les contextes historique, culturel et religieux.

La doctrine avait mis l'accent aussi sur les obstacles de la prise en compte de l'universalité des droits de l'homme par les Etats asiatiques, et à cet égard on peut citer la religion Bouddhiste ; le fruit d'une méditation transcendantale individuelle parfaitement accomplie.

Claude Leclercq prévoit que « le bouddhisme est universel, au même titre que la théorie des droits de l'homme, des droits naturels, posés par les écrits des auteurs occidentaux et dans les déclarations des droits d'origine européenne et américaine »179(*)

Par conséquent, les sympathisants de cette religion refusent d'adhérer a la conception occidentale des droits de l'homme et ce afin d'atteindre le Nirvana, le monde de la libération.

Faut il aussi ajouter que cette religion qui se veut mondiale, s'attaque aux religions monothéistes et en particulier au christianisme, ce qui justifie clairement le refus de tout commandement venant de l'occident. D'autres facteurs freinent l'acception de la conception occidentale, marquée par une idéologie individualiste, notamment la tradition de l'obéissance à la famille, à la communauté, aux autorités et à l'empereur. Ajoutons à ces facteurs, le système des Castes ou les intouchables en Inde, tout a fait contradictoire au principe de l'égalité, considéré comme un principe transversal en droit international. Le système des castes implique que chacun occupe une place assignée par la naissance et, partant, légitime les pires discriminations180(*). A cet égard le professeur Norbert Roland affirme que « pour les orientaux et la pensée confucéenne, l'homme doit vivre en harmonie avec ses semblables et le reste du monde, grâce a l'éducation, l'observation des rites, la recherche des arrangements et du compromis. Le droit en tant que système de régulation sociale jouit de peu d'estime ; la notion de droits subjectifs a peu de sens dans ces sociétés où les statuts ont une grande importance ; le recours au juge pour trancher un conflit est un signe presque infamant d'échec. On comprend des lors que tout système de déclaration de droits soit fort difficile à implanter dans cette partie du monde »181(*). De plus, il est presque impossible, souligne la doctrine, de parler des droits de l'homme en Chine, en effet le pays le plus peuple de la planète exerce des pratiques attentatoires aux droits de l'homme.

La réponse asiatique aux critiques sur les violations des droits de l'Homme prend la forme d'un réquisitoire contre l'Occident. Le concept des droits de l'Homme est considéré comme une invention occidentale et une abstraction à base culturelle imposée par un hégémon occidental vis-à-vis d'un monde peu enthousiaste.

Les valeurs partagées sont énumérées dans la déclaration de Bangkok comme suit : la nation avant la communauté, la société avant l'individu ; la famille comme unité fondamentale de la société ; le soutien communautaire et le respect pour l'individu ; le consensus et non pas le conflit ; l'harmonie raciale et religieuse. L'ordre public et la stabilité politique priment sur les droits individuels et la démocratie libérale. Les normes sociales collectives ont tendance à surpasser l'individualisme à l'oeuvre dans les sociétés démocratiques libérales. La démocratie est précieuse uniquement si elle débouche sur les autres gains sociaux préférés (ordre public et prospérité économique) ; elle n'est pas une fin en soi. La « démocratie à l'asiatique » repose sur le consensus social et la confiance en l'autorité. À cet égard, l'école singapourienne note l'incompatibilité entre les valeurs asiatiques et la démocratie libérale.

La primauté de la subsistance sur la liberté est un élément constitutif de la Déclaration de Bangkok. Cette approche réaffirme « l'interdépendance et l'indivisibilité des droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques, et la nécessité d'accorder la même importance à toutes les catégories de droits de l'homme » (article 10). Cependant, l'ordre dans lequel les droits sont énumérés indique la supériorité des droits de deuxième génération. La justification avancée par les relativistes est que le progrès économique et social facilite la tendance croissante vers la démocratie ainsi que la promotion et la protection des droits de l'homme. Prôner la division culturaliste est nuisible. La géopolitique orientaliste fournit un bon exemple de la perception du « choc de civilisations » défini par Samuel Huntington. Celui-ci considère l'Asie comme une connexion confucéenne islamique et une menace pour le monde judéo-chrétien des démocraties occidentales. À la lumière de la remise en question des valeurs asiatiques, il est impératif de repenser le modèle théorique culturaliste de Huntington.

Le ralliement au concept des valeurs asiatiques apparaît comme une tentative de créer un cadre idéologique pour justifier l'existence d'un gouvernement autoritaire. Il est clair que la rhétorique sur les valeurs asiatiques et la dichotomie des positions prises par les dirigeants au sein de la région montrent que le débat est privé de socle culturel mais, au contraire riche de notions idéologiques. « L'explication culturelle fondée sur « une identité asiatique » semble prématurée et reflète les aspirations de certains dirigeants asiatiques plutôt que les prédispositions culturelles des peuples d'Asie »182(*)

* 174 MATHIEU B. et VERPEAUX M. Contentieux constitutionnel des droits fondamentaux - 2002 - LGDJ, p. 13

* 175 Favoreu L. et alii Droit des libertés fondamentales -3ème éd. 2005 -Dalloz, p. 51

* 176 Le choc des civilisations (traduction française, Odile Jacob, 1997)

* 177 La notion trouve son origine à Singapour à la fin des années 1980 et au début 1990 quand le premier ministre Lee Kwan Yew et ses ministres ont réfléchi sur l'identité de leur Etat Cité et aux moyens de la renforcer.

* 178 LEVINET (M.). Théorie générale des droits et libertés. - Bruxelles : Bruylant, 2006, p. 220

* 179 Leclercq (C.), Libertés publiques, Litec, 2003, p. 18

* 180 LEVINET (M.). Théorie générale des droits et libertés. - Bruxelles : Bruylant, 2006, p. 222

* 181 Ibid

* 182 Maria Linda Tinio. Préface de Boutros Boutros-Ghali. Editions l'Harmattan, Paris, in Les enjeux de l'universel , http://www.ldh-france.org/media/hommeslibertes/doss3_128.pdf

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius