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Les contres mesures en droit international public

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par Hassani MOHAMED HASSANI
Universite Cheikh Anta DIOP de Dakar - Maitrise de Droit Public 2006
  

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UNIVERSITE CHEIK ANTA DIOP DE DAKAR

Faculté des Sciences Juridiques et Politiques

LES CONTRE-MESURES EN DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

Mémoire présenté pour l'obtention de la

MAITRISE DE DROIT PUBLIC

2006/2007

Presenté par : Sous la direction de:

Hassani MOHAMED HASSANI Mr Mactar KAMARA,

Docteur en Droit International de l'Université de Paris 1.

AVERTISSEMENT

____________________________

L'UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR N'ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION NI IMPROBATION AUX IDÉES ET OPINIONS ÉMISES DANS LE PRÉSENT MÉMOIRE.

ELLES N'ENGAGENT QUE LA RESPONSABILITÉ DE SON
AUTEUR, ET NE REFLÈTENT EN AUCUN CAS CELLES DU DIRECTEUR DE MÉMOIRE NI DE LA FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES DE LADITE UNIVERSITÉ.

REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont expressément :

A mon directeur de mémoire, Monsieur Mactar KAMARA, d'avoir accepté de superviser ce travail malgré ses nombreuses occupations. Sa disponibilité et son accessibilité nous ont facilité le travail.

A mon père qui, malgré la distance qui nous sépare, n'a ménagé aucun effort afin que ce travail soit réussi. Sa pression et son soutien moral ont été mes seuls stimulateurs.

DEDICACES

" A ma mère, cette jeune mère qui, s'endormant très légèrement ce 26 juillet de l'année 1989 quand j'avais 8 ans, m'a confié à papa avec mes deux frères et trois soeurs ;

A mon père qui, en m'inculquant la devise "HONTE A CELUI QUI NE FAIT PAS MIEUX QUE SON PERE", m'a donné ce que j'ai de plus précieux au monde : l'honnêteté, la fierté et le travail bien fait ;

A tous mes frères et nes soeurs,

A toi, fraîcheur qui adoucit ma vie... ;

A tous mes ami(e)s, mes camarades, mes cousin(e)s... ;

A tous mes ami(e)s sénégalais(e)s et d'autres nationalités de la 1ère année 03/04 à la maîtrise 06/07 "Promotion Kéba MBAYE" ;

Ma dédicace spéciale à Nassilat ABOUDOU, retrouve dans ces lignes toute ma reconnaissance et ma gratitude.... ;

A mes futurs lecteurs, partisans et détracteurs...

INTRODUCTION

1ère Partie :

L'INTERET DE L'ADMISSION DES CONTRE-MESURES EN DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

Chap. 1 :

DES MESURES DE SANCTIONS UNILATÉRALES CONFORMES AU DROIT INTERNATIONAL

Sect. 1 : Une conformité reposant sur le respect des principes fondamentaux du droit international public.

Sect. 2 : Une conformité reposant sur l'intention de l'Etat auteur

Chap. 2 :

UN OUTIL DE RÉGULATION DES RELATIONS INTERNATIONALES

Sect. 1 : Les Etats, gendarmes du droit international

Sect. 2 : Les contre-mesures, sanction de l'illicite en droit international

2ème Partie :

LA STABILITE DE L'ORDRE JURIDIQUE INTERNATIONAL PAR LA REGLEMENTATION DES CONTRE-MESURES

Chap. 1:

LA PRÉCISION DES CONDITIONS DE RECOURS À DES CONTRE-MESURES

Sect. 1 : La précision des conditions formelles

Sect.2 : La précision des conditions matérielles

Chap. 2 :

LES LIMITES LÉGALES APPORTÉES AUX CONTRE-MESURES

Sect. 1 : Les limites apportées à la substance des contre-mesures

Sect. 2 : Les contre-mesures illicites

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

_________________

Ouvrages Généraux

CARREAU Dominique, Droit International

Pédone, Coll. Etudes Internationales, 5ème Edition 1997.

COMBACAU Jean et Serge SUR, Droit International Public

Montchrestien, Coll. Domat Droit Public, 5ème Edition, 2001.

DUPUY Pierre Marie, Droit International Public

Précis Dalloz, 4ème Edition, 2002.

NGUYEN Quoc Dinh, Alain PELLET et Patrick DAILLIER, Droit International Public

LGDJ, 7ème Edition, 2002.

RIVIER Alphonse, Principes du droit des gens, Rousseau, Paris, 1899, t. II

SINKONDO Marcel, Droit International Public

Ellipses, Coll. Universités, 1999.

Ouvrages Spécialisés

ALLAND Denis, Les contre-mesures dans l'ordre juridique international. Etude théorique de la justice privée en droit international public, Pédone, Paris, 1992,

AGO R., 3ème rapport sur la responsabilité des Etats, ACDI, 1971, vol. II

BOISSON DE CHAZOURNES Laurence, Les contre-mesures dans les relations internationales économiques

Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales ; 1992.

DOBELLE Jean-François et Marc Perrin de Brichambaut, L'application du droit international : la responsabilité internationale, les contre-mesures, Leçons de droit international public, 2002

De LACHARRIERE G., La politique juridique extérieure, Paris, Economica, 1983,

EISEMANN P.M., Les sanctions contre la Rhodésie, Paris, Pédone, 1972

KISS A. Ch., Répertoire de la pratique français en matière de droit international public, Paris, CNRS, t. I 1962, t. VI 1969

RUCZ Claude, Les mesures unilatérales de protection des droits de l'homme devant l'Institut de droit international, 1992

SICILIANOS Linos Alexandre, Les réactions décentralisées à l'illicite, Des contre-mesures à la légitime défense, LGDJ, Paris, 1990.

Articles

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BENNOUNA Mohamed, Le règlement des différends peut-il limiter le «droit» de se faire justice à soi-même? (http://www.ejil.org/journal/Vol5/No1/art4.pdf)

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COHN G., "La théorie de la responsabilité internationale", R.C.A.DI. 1939, II, vol.68,

CONDORELLI Luigi, Le règlement des différends en matière de responsabilité internationale des Etats: quelques remarques candides sur le débat à la C.D.I. ( http://www.rfdi.net)

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DOMINICE Christian, « La vaine sommation, condition d'exercice des contre-mesures », In : Mélanges à Michel Waelbroeck ; vol. I, 1999.

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GOMEZ ROBLEDO A., Le jus cogens international : sa genèse, sa nature, ses fonctions, 172 RCADI, 1981 III.

KOLB Robert, « La proportionnalité dans le cadre des contre-mesures et des sanctions : essai de clarification conceptuelle », In : Académie de Droit International de La Haye ; 2004.

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LEBEN Charles, « Les contre-mesures inter-étatiques et les réactions à l'illicite dans la société internationale », In : Annuaire français de droit international, 1982, p9-77

PELLET Alain, "Remarques sur une révolution inachevée: le projet d'articles de la CDI sur la responsabilité des États", AFDI, 1996.

ROUSSEAU Ch., "Chronique", 92 RGDIP, 1988.

SICILIANOS Linos Alexandre, « La codification des contre-mesures par la Commission du droit international », In : Revue belge de droit international ; vol. 38 afl. 1-2, p. 447-500/ 2005.

SICILIANOS Linos Alexandre, « Sanctions institutionnelles et contre-mesures : tendances récentes »,

In : Les sanctions économiques en droit international / Académie de Droit International de La Haye / 2004

ZOLLER Elizabeth, « Quelques réflexions sur les contre-mesures en droit international public », In : Mélanges Colliard, 1984, p361-381

Webographie

Sites officiels

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http://www.diplomatie.be/newyorkun/default.asp?id=57&mnu=57

http:// www.un.org

http://www.un.org/law/ilc/

http://www.un.org/law/ilc/sessions/50/french/n9809954.pdf

http://www.un.org/french/law/ilc/reporfra.htm

http://daccessdds.un.org/doc/UNDOC/GEN/N05/488/87/PDF/N0548887.pdf?OpenElement

http://untreaty.un.org/ilc/sessions/58/chpII_III(f).pdf

http://untreaty.un.org/ilc/texts/instruments/francais/projet_d'articles/9_6_2001_francais.pdf

http://www.untreaty.un.org/ilc/documentation/french/a_cn4_l602_rev1.pdf

http://untreaty.un.org/ilc/summaries/9_6.htm

http://usinfo.state.gov/journals/itps/1101/ijpf/frtaylor.htm

Sites généralistes et personnels

http://www.format-prod.com/droit-etudiants/responsabilite-internationale-des-etats.html

http://www.er.uqam.ca/nobel/r15410/jur3501/PowerPoint%20JUR3501-5.ppt

http://www.format-prod.com/droit-etudiants/droit-international-public.html

http://www.monde-diplomatique.fr/2002/01/CHEMILLIER/15989

http://www.afp.com

Sites spécialisés

http://www.ejil.org/journal/Vol5/No1/art9.html

http://www.net-iris.fr/veille-juridique/doctrine/10842/la-sanction-en-droit-international.php

http:// www.ejil.org

http://www.sfdi.org/ (rubrique sentinelle)

http://www.ejil.org/journal/Vol5/No1/art9.html

http://www.ejil.org/journal/Vol5/No1/art4.html

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http://www.rfdi.net

http://www.ejil.org/journal/Vol5/No1/art4.pdf

SIGLES ET ABREVIATIONS

A/C. 6 ............................................................ Assemblée générale des Nations Unies,

6è Commission

ACDI ................................................................ Annuaire de la Commission du Droit International

AELE ................................................................ Association européenne de libre échange

AFDI ................................................................ Annuaire français de droit international

AGDO .............................................................. Assemblée Générale des Nations Unies, Documents officiels

A.G ................................................................... Assemblée Générale des Nations Unies

AHDI ................................................................ Annuaire de La Haye de Droit international

AIDI (Ann. IDI) ............................................. Annuaire de l'Institut de droit international

AJIL ................................................................. American Journal of International Law

Ann. IDI ......................................................... Annuaire de l'Institut de droit international

A/Rés. .............................................. Résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies

BM ................................................................... Banque mondiale

CDI (ILC) ....................................................... Commission du Droit International

CEE .................................................................. Communauté économique européenne

CIJ (ICJ) ......................................................... Cour Internationale de Justice

CIJ Rec. .......................................................... Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances de la CIJ

CJCE ................................................................ Cour de Justice des Communautés européennes

CPJI .................................................................. Cour permanente de Justice internationale

CPJI Sér. A .................................................... Arrêts de la CPJI

CSDO ............................................................... Conseil de sécurité des Nations Unies, Documents officiels

COJI Sér. B .................................................... Avis consultatifs de la CPJI

FMI (IMF) ....................................................... Fonds Monétaire International

G.A.F.I ............................................................. Groupement d'action financière

GATT ................................................................ Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce

IDI .................................................................... Institut de Droit International

OMC ................................................................. Organisation Mondiale du Commerce

ONU ................................................................. Organisation des Nations Unies

OTAN ................................................................ Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

RCADI ................................................................. Recueil des Cours de l'Académie de droit international de la Haye

RSANU.............................................................. Recueil des sentences arbitrales

(Publié par l'ONU)

RTNU.................................................................. Recueil des traités des Nations Unies

UE ........................................................................ Union européenne.

INTRODUCTION

Nemo judex in re sua (Nul n'est juge en sa propre cause). Visant la garantie de l'impartialité des décisions de justice, l'adage rejoint le principe fondamental qui veut que personne ne puisse être à la fois juge et partie dans un même procès. Il rejoint, par cette même philosophie, le principe selon lequel « nul ne peut se faire justice soi-même ».

Ces principes généraux de droit, bien respectés en droit interne, semblent ne pas recevoir d'écho dans la pratique internationale. Les contre-mesures en sont une bonne illustration à travers des pratiques telles que les représailles et les mesures de rétorsion.

En effet, depuis des décennies, il est né dans les relations internationales une pratique qui tend de plus en plus à remettre en cause le principe nemo judex in re sua à tel point qu'on se demande aujourd'hui si l'ordre public international est encore effectif face à une société internationale plus décentralisée que dans les années d'après guerre.

Cette pratique, communément connue sous le nom de « contre-mesures », consiste à reconnaître aux sujets de droit international, en particulier les Etats, « un droit de se faire une justice privée »((*)1). C'est-à-dire le pouvoir et le droit pour un Etat de sanctionner unilatéralement un autre Etat face à des actes licites ou illicites commis par celui-ci et qu'il estime préjudiciables à son égard, soit parce qu'ils portent atteinte à ses droits, soit parce qu'ils lèsent ses intérêts.

Littéralement, selon le "Petit Larousse (2005)", le mot « contre-mesure » (emprunté à l'anglais countermeasure) signifie « une disposition prise pour s'opposer à une action, un événement, ou pour les prévenir ». Mais, faut-il bien le souligner, cette nouvelle expression ne sera consacrée juridiquement en droit français que vers 1978 à l'occasion de la décision du tribunal arbitral intervenue à l'occasion du litige opposant les Etats-Unis à la France dans « l'affaire concernant l'accord relatif aux services aériens du 27 mars 1946 »((*)2).

Dans le jargon juridique, les contre-mesures désignent un « nom générique donné, dans les relations internationales (politiques ou économiques), à diverses initiatives prises unilatéralement par un Etat pour faire respecter ses droits en réponse aux agissements licites ou illicites d'un autre Etat qui lèsent ses intérêts, mesures dont la vocation légitime, comme moyens temporaires de pression, est de déboucher sur les procédures de règlement pacifique des différends, sans les supplanter »((*)1).

Cependant, même si les Etats recouraient souvent à de telles pratiques, la terminologie de contre-mesures n'était pas encore consacrée dans la pratique juridique. On se contentait de qualifier ces actes d'« embargos, sanctions économiques ou boycott »((*)2).

Par extension, en droit international public, l'embargo est un acte d'autorité d'un Etat qui peut s'appliquer à tout moyen de transport ou à toute catégorie de marchandises ou de produits. Ces derniers peuvent être les armes, les produits stratégiques ou pétroliers. L'embargo consistera alors, soit à bloquer les moyens de transport sur le territoire de l'Etat qui le décide, soit à interdire l'importation des marchandises vers l'Etat sur lequel on entend faire pression. Cette interdiction peut frapper aussi bien les importations que les exportations((*)3).

Quant au boycott, il désigne un procédé par lequel un Etat, afin de protester contre les actes d'un autre Etat et de faire pression sur celui ci, interrompt, de façon partielle ou totale, pour une durée variable, les relations politiques, économiques qu'il entretenait avec cet Etat((*)4). Contrairement à l'embargo, le boycott sous-entend soit la suspension des seules importations, soit la suspension de toutes les relations commerciales.

Aujourd'hui, l'expression « contre-mesure » est une expression qui couvre un champ sémantique beaucoup plus large qui regroupe en son sein l'embargo, le boycott, les représailles et les rétorsions et tout autre type de sanctions d'ordre économique, financier ou politique. Cependant, « du point de vue de la qualification juridique, les actions auxquelles les Etats ont eu recours sont classées le plus souvent en actions de représailles et en actions de rétorsion »((*)1). C'est en ces termes qu'on désigne dorénavant les contre-mesures.

Juridiquement, les mesures de rétorsion sont considérées comme un « moyen de contrainte consistant, dans le fait, pour un Etat de répondre par un usage rigoureux de son droit à des actes eux-mêmes licites mais inamicaux commis à son égard par un autre Etat »((*)2). Gérard Cohn voit en la mesure de rétorsion « une mesure qui, tout en se tenant dans la limite de la loi, a pourtant pour fin un traitement particulièrement défavorable pour l'Etat contre lequel elle est dirigée »((*)3). On peut citer par exemple l'expulsion réciproque d'agents diplomatiques ou la limitation de leur déplacement dans un rayon déterminé à l'intérieur du pays d'accréditation. Ce sont des mesures qui sont licites mais inamicales car « draconiennes ». L'Etat, auteur de ces mesures, utilise son droit mais d'une façon rigoureuse ; ce qui les différencie donc des représailles.

En ce qui concerne les représailles, l'Institut de Droit International les définit comme des « mesures de contrainte, dérogatoires aux règles ordinaires du droit des gens, décidées et prises par un Etat, en réponse à des actes illicites commis à son préjudice par un autre Etat et ayant pour but d'imposer à celui-ci, par pression exercée, au moyen d'un dommage, le retour à la légalité »((*)4) On peut citer par exemple, l'internement des étrangers ou la saisie de leurs biens. Les représailles se présentent sous deux formes.

On distingue les représailles classiques et les représailles armées. Seules les premières, qui sont pacifiques, sont admises par le droit international public comme des actes constitutifs de contre-mesures. Toutes les deux sont illicites, certes, mais la légitimité des représailles non armées découle de l'illicéité du fait auquel elles répondent et de leur caractère pacifique.

Par contre, il est établi depuis longtemps « que l'emploi de la force ne saurait être admis en tant que réaction à des faits illicites n'ayant pas le même caractère »((*)5). Ceci exclut donc tout recours à des représailles armées contre un Etat pour répondre à des agissements qui ne sont pas similaires de la part de celui-ci.

Il y a lieu de différencier également les contre-mesures de la légitime défense. Le droit international classe la légitime défense parmi les réactions licites mais il la différencie des contre-mesures. En effet, bien que la légitime défense et les contre-mesures aient des caractères communs à savoir la condition de proportionnalité, elles se différencient du seul fait que la légitime défense suppose le recours à la force et est liée à une agression armée alors que les contre-mesures visent la cessation d'un fait illicite ou la réparation du dommage qui pourrait résulter de ce fait.

L'autre distinction qui s'impose, c'est celle entre les contre-mesures et les mesures prises en application de clauses de sauvegarde, dites mesures de sauvegarde. Ces dernières sont définies comme « toute mesure destinée à faire face à une situation critique, comportant, pendant une durée limitée, la mise en oeuvre licite de dérogations aux règles d'un régime permanent et permettant de revenir, au bout d'un certain temps, à l'application intégrale de ces règles normales »((*)1). Généralement de nature tarifaire, elles sont imposées provisoirement sur des importations de produits qui causent ou menacent de causer un préjudice grave à une branche de l'industrie nationale qui fabrique des produits similaires. Leur objectif est de fournir du temps à l'industrie affectée pour se soumettre à un processus d'ajustement, et elles sont prévues surtout en matière commerciale((*)2).

La grande distinction entre ces différentes sortes de mesures et les contre-mesures est que celles-ci présentent une morphologie hétérogène et peuvent donc être prises dans plusieurs domaines des relations internationales.

Il y a des contre-mesures qui se présentent sous la forme de sanctions économiques comme l'embargo (technologique, alimentaire, énergétique, etc....), le boycott ou la rupture des relations économiques et commerciales. D'autres ont un aspect financier tels que le gel d'avoirs étrangers, pendant que d'autres revêtent une forme politique. Il peut s'agir en ce qui concerne ces dernières, des expulsions des étrangers, de leur internement, d'expulsion réciproque des diplomates, etc. 

La pratique des contre-mesures s'est généralisée depuis la fin de la seconde guerre mondiale, notamment sous la guerre froide, période pendant laquelle, certains Etats, à l'instar des Etats-Unis d'Amérique, « s'estimant victimes ou tout simplement concernés par ce qu'ils considéraient être des violations flagrantes des règles internationales, réagissaient en utilisant à leur tour l'arme économique »((*)1), pour amener d'autres Etats à cesser un comportement inamical ou à se faire dédommager d'un préjudice qu'ils ont pu subir((*)2).

Avant les Etats-Unis, les pays arabes producteurs de pétrole ont eu à recourir à de telles pratiques pendant la période de la guerre israélo-arabe de 1973((*)3). Il en est de même pour les Etats européens qui ont, eux aussi, pris des contre-mesures contre l'Argentine dans l'affaire dite des îles Malouines en 1982((*)4).

Face à la généralisation de leur usage, la question de la légitimité et de la licéité des contre-mesures commença à se poser sur le plan international pour finir sur la table du juge. Vers la fin de la décennie 1970 et le début des années 1980, les contre-mesures furent consacrées pour la première fois par un tribunal international. C'est dans la sentence arbitrale du 9 décembre 1978 intervenue dans l'affaire de « l'interprétation de l'accord franco-américain relatif au transport aérien » opposant les Etats-Unis d'Amérique à la France que, pour la première fois, un tribunal s'est prononcé sur la licéité des contre-mesures inter-étatiques. En effet, le juge arbitral a rappelé que chaque Etat «...a le droit, sous la réserve de respecter les règles générales du droit international relatives aux contraintes armées, de faire respecter son droit par des contre-mesures »((*)1).

Cette décision sera reprise en 1980 par la Cour Internationale de Justice dans la décision relative à l'affaire du personnel diplomatique américain à Téhéran, dans laquelle, le juge international réaffirma la position du juge arbitral((*)2).

Pour sa part, la doctrine s'est penchée sur la question. De nombreux spécialistes du droit international, universitaires comme praticiens, du nord comme du sud, s'y sont prononcés, allant des divergences aux convergences d'idées. Le problème réside toujours dans la reconnaissance de la légalité et la légitimité des contre-mesures, mais également dans leur finalité. On leur reproche d'être des outils de pression aux mains des superpuissances, ou des moyens de règlement de compte entre sujets de droit international, échappant par conséquent au contrôle de celui-ci. Cette controverse a été également observée lors de la 53ème session de l'Assemblée Générale des Nations Unies notamment sur le point intitulé « Rapport de la 53eme session de la Commission du Droit International », sur lequel les délégations étatiques et les spécialistes du droit international se sont longuement opposés((*)3).

Dans le cadre de sa mission de développement et de codification du droit international, la CDI a entamé depuis 1959, un projet d'articles sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite. Il a tenté de codifier la pratique des Etats en insérant dans ce projet, des dispositions expresses relatives aux contre-mesures, cherchant ainsi à leur donner un régime juridique spécifique afin d'éviter leur caractère incertain. Depuis le début du projet jusqu'au milieu des années 1998, les Etats, surtout du Tiers-Monde et non alignés, se sont longuement montrés hostiles à toute reconnaissance des contre-mesures en tant que sanction de l'illicite international, ou circonstance excluant la responsabilité. Cela a été également accentué par une hostilité manifeste de la plus grande majorité de la doctrine qui allait jusqu'à qualifier les contre-mesures de « mesures belliqueuses par nature»((*)1).

Après plus de 40 ans de débats sur la question, la CDI a abouti à l'adoption d'un projet final de 59 articles, intitulé « Projet d'articles sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite »((*)2). L'article 22 de ce projet dispose en des termes clairs que « l'illicéité du fait d'un Etat non conforme à l'une de ses obligations internationales à l'égard d'un autre Etat est exclue si, et dans la mesure où, ce fait constitue une contre-mesure prise à l'encontre de cet autre Etat conformément au chapitre II de la troisième partie »((*)3). Ce projet, soumis à l'Assemblée Générale de l'Organisation des Nations Unies par la Commission du Droit International, dans le cadre de son rapport sur les travaux de la cinquante sixième session de l'Assemblée, n'a jusqu'à lors pas débouché sur la conclusion d'un traité international((*)4).

Cependant, il n'empêche que les Etats ont encore recours à de telles pratiques. Aujourd'hui, l'usage des contre-mesures est toujours ambigu, tant que leur admissibilité par le droit international contemporain reste controversée.

En effet, dans la mesure où celui-ci reconnaît à un Etat le droit de sanctionner unilatéralement un autre Etat, par des contre-mesures, sans l'intervention d'une autorité judiciaire internationale, une question mérite d'être posée. Doit on dire que les contre-mesures constituent une source de faiblesse de l'ordre juridique international ou plutôt qu'elles contribuent à son renforcement ? Autrement dit, quels sont l'intérêt et l'impact de l'usage des contre-mesures en droit international public ?

Ce sont ces différentes questions qui feront l'objet de notre étude, étude dont l'intérêt nous semble évident. L'enjeu des contre-mesures dans les relations internationales contemporaines ne prête pas à équivoque. Pour s'en rendre compte, il suffit de voir les réactions actuelles des Etats, qui n'hésitent pas à recourir à des menaces de contre-mesures pour amener un autre Etat sur la table des négociations. Leur reconnaissance par le droit international, revêt un intérêt indéniable qui est à la fois théorique et pratique.

Théorique, parce que l'admission des contre-mesures dans le droit international public continue encore d'alimenter le débat sur son caractère hypothétique, opposant de plus en plus les praticiens et les spécialistes. Tandis que certains militent pour leur reconnaissance institutionnelle en tant que sanction contre les violations des obligations internationales, en excluant toute responsabilité internationale de l'Etat auteur, d'autres voient en elles une brèche d'instabilité de l'ordre public international et un moyen efficace de pression des superpuissances sur les Etats faibles.

Pratique, en ce sens que face à l'absence d'une police internationale, chargée de faire respecter le droit international et de protéger les droits et intérêts de ses sujets, les contre-mesures permettent aux Etats, faibles ou puissants, de se prendre en charge eux-mêmes, en réagissant face aux éventuelles atteintes desdits droits et intérêts, afin d'en demander le rétablissement ou la réparation.

Le présent mémoire a donc pour finalité de montrer qu'en remettant la justice internationale aux mains des Etats, par une reconnaissance d'un pouvoir légitime à chaque Etat de réagir unilatéralement afin de protéger ses droits et intérêts ou toute violation qualifiée du droit international par un autre Etat, les contre-mesures permettent une meilleure régulation des relations inter-étatiques et contribuent au maintien en équilibre de l'ordre juridique international et au développement du droit international public.

Une telle affirmation s'appuiera essentiellement sur les différentes analyses de la doctrine, c'est-à-dire des spécialistes du droit international intervenus sur la question des contre-mesures, des avis et de la pratique des Etats, et des différentes décisions des juridictions internationales intervenues dans la matière. Il sera également question de faire une étude approfondie du régime juridique des contre-mesures, envisagé par le projet de la Commission du Droit International relatif à la responsabilité internationale de l'Etat, ainsi que des divers instruments normatifs internationaux.

Il n'est pas nécessaire de consacrer des développements larges dans la notion de contre-mesure, celle-ci ayant largement été évoquée dans cette introduction.

Il s'agira de montrer quel est l'intérêt de l'admission des contre-mesures en droit international public, en appréciant notamment leur conformité à celui-ci et leur efficacité dans les relations internationales (1ère Partie). Il s'agira également de montrer que si l'on s'en tient au régime juridique proposé par la Commission du Droit International dans son projet de codification de la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite, les contre-mesures contribuent au maintien de l'équilibre de l'ordre juridique international, en ce sens que cedit projet pose les conditions et les limites du recours aux contre-mesures (2ème Partie).

PREMIERE PARTIE

INTERET DE L'ADMISSION DES CONTRE-MESURES EN DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

La pratique des contre-mesures dans les relations internationales n'est pas chose récente. Dans l'histoire des relations internationales, il est admis de longue date que les Etats ont pu recourir à une « justice privée »((*)1) pour régler leurs différends. Cela s'expliquait par l'inexistence dans la société internationale d'une organisation qui devait régler leurs litiges. Les Etats pouvaient donc se faire justice eux-mêmes en ayant recours à des sanctions individuelles mais pacifiques afin d'éviter tout recours à la guerre. A titre d'exemple, des pratiques comme celle consistant pour un Etat à interner les ressortissants d'un autre Etat dont le comportement est jugé dommageable, ont été monnaie courante dans l'Antiquité et au Moyen age. Dans le droit international contemporain, de telles pratiques sont encore d'actualité à travers les mesures de représailles et de rétorsion.

Que ce soit d'une manière décentralisée, c'est-à-dire un Etat contre un autre Etat, ou d'une façon institutionnalisée, c'est-à-dire décidées par un organe institutionnel de droit international, comme par exemple dans le cadre de l'application des articles 40 et 41 du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, les contre-mesures sont devenues aujourd'hui un outil dont le recours est indispensable, sinon efficace, dans les relations internationales.

Depuis fort longtemps, elles sont admises par le droit international public, tantôt en tant que moyen de pression dans les relations inter-étatiques, tantôt en tant que sanction unilatérale ou institutionnelle, à l'encontre de tout sujet de droit international en violation de ses obligations internationales.

Au fil des années, la généralisation de l'usage des contre-mesures en tant que sanction par les Etats, a suscité beaucoup de questions au sein de la communauté internationale. On les reproche d'être une des causes de l'instabilité de l'ordre juridique international de par leur caractère diffus et décentralisé.

Cependant, ce serait ignorer totalement l'intérêt majeur de leur admission dans le droit international, dans la mesure où elles ont pour philosophie principale, le contournement du recours à la force dans le règlement des différends inter-étatiques.

L'objet de la présente partie est de montrer que l'intérêt des contre-mesures dans le droit international public, est qu'elles contribuent au développement de celui-ci. Les contre-mesures permettent aux sujets du droit des gens de s'autocontrôler, par des pouvoirs des sanctions unilatérales, sans remettre en cause les principes fondamentaux du droit international public.

Cela peut être illustré par deux grands atouts des contre-mesures. C'est que, dans un premier sens, elles sont des mesures de sanctions unilatérales, certes, mais qui respectent les bases fondamentales régissant le droit des gens (Chapitre 1er). Leur second atout s'explique par le fait que, face à l'absence d'organes internationaux chargés de faire respecter le droit international et notamment les obligations qui découlent des relations bilatérales, les contre-mesures constituent tout au moins un palliatif à cette lacune en permettant une meilleure régulation des relations internationales (Chapitre 2ème).

Chapitre I : Des mesures de sanctions unilatérales conformes au droit international public

Chapitre II : Les contre-mesures, un outil de régulation des relations internationales.

Chapitre Premier

DES MESURES DE SANCTIONS UNILATÉRALES CONFORMES AU DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

Les contre-mesures sont définies comme des sanctions qu'un sujet de droit international, plus particulièrement un Etat, peut prendre unilatéralement à l'encontre d'un autre Etat qui lèse ses intérêts ou qui porte atteinte à ses droits. Ce peut être également une sanction qu'un Etat ou plusieurs Etats décident à l'encontre d'un Etat qui ne respecte pas, en général, ses obligations internationales, c'est-à-dire un Etat qui se trouve en violation qualifiée du droit international.

A première lecture, on serait tenté de dire que pratiquement les contre-mesures permettent aux Etats de se faire justice eux-mêmes, sans recourir à des autorités judiciaires internationales pour régler leurs différends. C'est la principale problématique de l'admission des contre-mesures en droit international. Cette problématique s'est soulevée lorsque ce dernier les a reconnues en tant que circonstances excluant la responsabilité d'un Etat auteur d'un fait internationalement illicite. En légitimant les actes illicites qu'un Etat aurait pris contre un autre, on craignait d'un côté que cela ne débouche à un détournement de l'objet des contre-mesures de la part des Etats, surtout puissants. D'autre part, on voit aux contre-mesures une brèche de l'instabilité du système juridique international en ce sens qu'elles constituent un pouvoir de sanction diffus entre ses sujets qui en disposent arbitrairement.

Cependant, ces affirmations doivent être relativisées. Si les contre-mesures sont admises par le droit international, c'est grâce à leur caractère pacifique et leur finalité. Quoiqu'elles soient des sanctions unilatérales, en principe illicites, dont la qualification du fait reproché relève du pouvoir discrétionnaire de chaque Etat, il n'empêche que leurs modalités d'exécution et leur régime sont en conformité avec les dispositions du droit international public. La question qui se pose consiste à savoir comment cette conformité se justifie-t-elle alors que les contre-mesures permettent à chaque Etat de « punir » un autre sans l'autorisation du juge international. On verra que la conformité des contre-mesures au droit international s'explique par le fait qu'elles sont, avant tout, des mesures qui respectent les principes fondamentaux du droit international public (Section I). Ce sont également des sanctions décentralisées, certes, mais qui trouvent leur fondement en droit international dans l'intention pacifique de l'Etat qui décide d'y recourir (Section 2).

Section I

Une conformité reposant sur le respect des principes fondamentaux du droit international

Le caractère répressif et unilatéral des contre-mesures n'est pas à discuter ici. Leurs partisans et comme leurs détracteurs sont d'accord sur ces deux aspects qui les caractérisent d'une manière générale.

La controverse reste, cependant, sur leur nature et leur aboutissement, c'est-à-dire leurs conséquences jugées néfastes au droit international. Certains auteurs, à l'instar du Professeur Charles LEBEN, les qualifient de « mesures belliqueuses »((*)1), c'est-à-dire des mesures agressives qui se plaisent à la guerre. Affirmer ainsi, aujourd'hui, serait ignorer le caractère pacifique des contre-mesures et leur première finalité.

La licéité que le droit international public reconnaît aux contre-mesures est due au fait que celles-ci sont caractérisées par une absence totale de tout recours ou de toute menace d'usage de la force dans le règlement des différends (Paragraphe 1). Le respect des principes fondamentaux du droit international par les contre-mesures s'explique également par le fait qu'elles offrent l'occasion aux Etats d'affirmer leur égalité et leur souveraineté en droit international (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

Le respect du principe de non usage de la force

C'est la caractéristique principale des contre-mesures. Ces dernières doivent obligatoirement respecter le principe du non recours à la force posé par l'alinéa 4 de l'article 2 de la Charte des Nations Unies, mais aussi de l'obligation faite aux Etats de recourir à tout moyen pacifique pour résoudre leurs différends, posée par l'article 33((*)1). Le non usage de la force se manifeste dans tous les types de contre-mesures, des mesures de rétorsion et représailles (A) aux autres types de sanctions économiques (B).

A- Les mesures de rétorsion et de représailles

Les actes de rétorsion, d'abord, sont des mesures contraignantes prises par un Etat qui use rigoureusement de son droit afin de répondre à des actes eux-mêmes licites mais inamicaux commis à son égard par un autre Etat. Ce sont des mesures licites et légales au regard du droit international car, même si elles sont contraignantes et dolosives, elles ne comportent cependant aucun usage de la force. L'Etat auteur des rétorsions use de sont droit mais d'une manière forte, ou plutôt draconienne. L'admission des rétorsions par le droit international trouve un fondement légitime. On dit qu'« un Etat à l'égard duquel un autre Etat a pris une mesure qui, tout en étant légale et licite, est discourtoise, rigoureuse, dommageable, peut prendre à son tour, à l'égard de celui-ci, des mesures ayant le même caractère afin de l'amener à composition »((*)2).

La mesure de rétorsion peut prendre des formes extrêmement variées. Elle peut viser les relations diplomatiques, comme par exemple l'expulsion de citoyens ou de diplomates ou par exemple la rupture desdites relations((*)3). Ce peut être également des entraves exercées à l'égard des relations économiques ou commerciales((*)4), mais le principe reste le non usage de la force.

Il faut noter que peu importe qu'elle réponde à un acte licite ou illicite, la mesure de rétorsion est par nature licite et légale au regard du droit international. C'est cette licéité par nature qui fait sa différence par rapport aux mesures de représailles, qui ne sont licites que par définition((*)1).

En effet, selon l'Institut du Droit International, les représailles sont des « mesures de contrainte dérogatoires aux règles ordinaires du droit des gens prises par un Etat à la suite d'actes illicites commis à son préjudice par un autre Etat et ayant pour but d'imposer à celui-ci, au moyen d'un dommage, le respect du droit »((*)2). Les mesures de représailles se différencient des rétorsions sur deux points. D'abord elles sont des réactions à un acte illicite, puis elles s'exercent par « des moyens qui auraient été illicites si le comportement initial qui les explique n'avait pas été lui-même illicite »((*)3). Ce sont donc des mesures illicites par nature mais dont la licéité découle du fait qu'elles sont destinées à combattre un acte illicite antérieur. Par contre, sont exclues des contre-mesures les représailles armées qui sont à priori interdites par le droit international((*)4).

L'absence d'usage de la force armée dans les mesures de représailles pacifiques et les actes de rétorsion cautionne leur licéité et, par conséquent, leur conformité avec le droit international public. Cependant, cette licéité a un seuil à ne pas dépasser qui s'analyse par rapport à l'acte préalable auquel elles répondent et à leur conformité au droit international général, obligation étant faite aux Etats de respecter les normes impératives de ce dernier (jus cogens)((*)5). En effet, bien qu'un Etat puisse légitimement décider des rétorsions ou des représailles en riposte à des actes illicites d'un autre Etat, on condamne certaines mesures ayant pour but de contraindre un Etat à subordonner l'exercice de ses droits souverains((*)6). C'est le problème posé par les contre-mesures économiques et financières qui ont souvent un tel dessein.

B- Les autres types de sanctions économiques et financières

Comme les représailles et les rétorsions, ces sanctions sont également caractérisées par le pacifisme et la diversité. On distingue le boycott, l'embargo et certaines contre-mesures à caractère financier.

Le boycott consiste en une suspension des relations commerciales ou politiques ou une interruption des importations entre deux ou plusieurs Etats. Il peut également consister en une action comme en une abstention. C'est une pratique très prisée par les Etats grâce à son caractère politique et dissuasif. Un Etat peut décider de boycotter ses relations politiques avec un autre Etat lorsqu'il estime que celui-ci pratique des manoeuvres dolosives à son égard, ou lorsqu'il juge que cet Etat ne respecte pas, en général, le droit international. C'est cette politique qu'ont adoptée les Etats-Unis contre l'URSS lorsque celle-ci avait envahi l'Afghanistan aux années 1979((*)1). Pour le boycott abstentionniste, « un Etat peut interdire à ses nationaux (personnes physiques ou morales) de commercer à l'importation ou à l'exportation avec un Etat tiers et ses nationaux »((*)2).

Quant à l'embargo, il relève d'un régime un peu plus contraignant que le boycott. C'est une mesure qui frappe aussi bien les exportations que les importations vers ou en provenance de l'Etat sur lequel on entend faire pression. L'embargo est en général commercial mais peut revêtir d'autres formes.

Pour l'embargo commercial, il peut être partiel comme il peut être total. L'embargo partiel est moins léger que l'embargo total car il ne vise qu'une catégorie de produits commerciaux stratégiques comme les armes((*)3). L'embargo total consiste, quant à lui, à interdire catégoriquement toute importation ou toute exportation avec l'Etat visé quel que soit le produit commercial((*)4). Cependant, il n'y a pas que l'embargo commercial. L'embargo peut être d'ordre technologique((*)1), militaire ou même financier qu'on qualifiera de contre-mesures ou de sanctions financières.

Les contre-mesures financières consistent pour l'Etat décideur, soit à bloquer ou geler les avoirs financiers de l'Etat sur lequel on entend faire pression, soit à réduire les aides financières envers cet Etat. Les Etats-Unis utilisent l'arme financière tantôt comme moyen de sanction contre l'organisation terroriste Al-Quaida, tantôt comme moyen de négociation et de pression à l'égard du régime nord-coréen((*)2). Les contre-mesures financières peuvent également être prises en dehors de tout cadre conflictuel notamment lorsque des organisations internationales décident des sanctions financières contre des Etats réfractaires aux politiques monétaires internationales ou constituant des paradis fiscaux ou de nids de blanchiment d'argent((*)3).

Toutefois, la licéité de ce type de contre-mesures n'est établie que lorsqu'elles ne sont pas entachées d'un abus de droit. C'est-à-dire leur usage ne doit pas avoir comme objectif de contraindre la souveraineté d'un Etat mais celui de l'amener à la légalité internationale ou à un état non compromettant. Autrement dit, ces sanctions doivent avoir en elles, la philosophie première des contre-mesures.

Paragraphe 2

Le respect du principe d'égalité et de la souveraineté des Etats

Les contre-mesures permettent d'affirmer les principes de l'égalité et de la souveraineté des Etats en droit international. En matière de recours à des contre-mesures, les Etats ont une égalité de droit, observée également dans la pratique, quel que soit leur niveau de développement ou leur pouvoir d'influence (A). Cette égalité est renforcée par le fait que chaque Etat a le droit et le pouvoir de qualifier souverainement le fait illicite et d'en décider discrètement sa sanction (B).

A- Une égalité de droit et de fait reconnue à chaque Etat

On peut dire que les contre-mesures permettent d'assurer une certaine égalité entre les Etats dans les relations internationales. Le droit international reconnaît un pouvoir à chaque Etat de prendre des contre-mesures pour protéger ses intérêts, quelle que soit sa puissance économique et financière, ou son pouvoir d'influence sur la scène internationale. C'est une égalité de droit reconnue à tous les Etats et affirmée par la plupart des textes internationaux. C'est le cas, par exemple, de l'Accord de l'OMC qui donne le droit à chaque membre de prendre des contre-mesures contre un autre membre((*)1). La Charte de l'ONU prévoit également dans son chapitre VII que dans la recherche d'une résolution d'un éventuel conflit, les Etats membres de l'Organisation peuvent être invités à prendre des mesures n'impliquant pas l'usage de la force, qu'on peut qualifier de contre-mesures((*)2).

Ces textes sont aussi affirmés par le projet de la CDI qui donne le droit à chaque Etat de prendre des contre-mesures face à un acte dolosif de la part d'un autre Etat ou la violation par celui-ci du droit international((*)3). Au regard du droit international, les Etats sont égaux et peuvent décider des contre-mesures entre eux sans avoir à se justifier du moment où ces mesures sont justifiées et sont en respect avec leurs obligations internationales relatives au droit international général. Certains auteurs reprochent, cependant, aux contre-mesures d'être une source d'inégalité de fait.

Pourtant, d'aucuns pensent que le principe selon lequel en droit international les Etats sont égaux en droit mais inégaux de fait s'illustre dans la pratique des contre-mesures. Selon cette théorie, il est facile pour un Etat fort et puissant, ou une organisation internationale ayant un pouvoir d'influence, de décider des contre-mesures à l'encontre d'un Etat faible. De telles contre-mesures seront effectives car l'Etat contre lequel on les décide va céder à la pression, craignant de se voir sanctionner((*)1).

Par contre, dit-on, un Etat faible aura du mal à prendre des contre-mesures vis-à-vis d'un Etat fort et puissant. De telles contre-mesures restent toujours ineffectives car l'Etat destinataire, s'il est une superpuissance, peut user de son pouvoir d'influence et sa puissance économique pour contrebalancer des mesures prises à son égard. Surtout si elles ne sont pas décidées par une juridiction internationale. On dit donc que les contre-mesures sont un instrument stratégique permettant aux superpuissances d'asseoir leur hégémonie sur les Etats faibles, maintenant ainsi leur souveraineté en état d'assujettissement.

Cependant, il faut noter que dans la pratique on constate une tendance au contraire. Le risque d'inégalité dans l'usage des contre-mesures existe certes, mais il doit être amoindri. En effet, dans la pratique contemporaine du droit international, on note que certains Etats dont on qualifierait de faibles, ont pu prendre des contre-mesures à l'égard d'autres Etats puissants((*)2). Récemment, un micro Etat, à savoir la Biélorussie, a menacé de prendre des contre-mesures contre son ancienne puissance, la Russie, une des superpuissance du monde((*)3).

Ceci montre qu'au lieu de constituer une source d'inégalité de fait entre les Etats, les contre-mesures sont au contraire un signe d'affirmation de l'égalité des Etats, et respectent de ce fait, l'un des principes fondamentaux du droit international public. Elles permettent également aux Etats d'affirmer leur souveraineté notamment dans la qualification du fait internationalement illicite et sa sanction.

B- Le pouvoir de qualification unilatérale du fait illicite et sa sanction

Les contre-mesures, comme nous l'avons dit, sont des sanctions qu'un sujet de droit international, en particulier un Etat, prend unilatéralement contre un autre sujet (un autre Etat) en réponse à des faits internationalement illicites que ce dernier aurait commis à son égard ou à l'égard du droit international général. On se demande qui décide de la licéité du fait et de sa sanction. Ce pouvoir revient en général à l'Etat lésé. La qualification du fait internationalement illicite permet donc de constater, encore une fois, que les contre-mesures mettent les Etats au même pied d'égalité. L'illicéité du fait commis se constate au regard des règles du droit international mais c'est l'Etat auteur des contre-mesures qui décide lui-même de qualifier cette illicéité et d'en déterminer unilatéralement la sanction. Il n'y a pas de transfert de souveraineté au niveau international. Cette souveraineté ne s'exerce que sur le plan interne, notamment dans la qualification de la faute et sa sanction. L'Etat regarde son intérêt lorsqu'il analyse si le traité est violé ou s'il est respecté. Il exerce sa souveraineté en interprétant le texte, le fait et en décidant la sanction. Par exemple, dans l'affaire franco-américaine relative à l'interprétation de l'accord aérien de 1946, il n'y avait aucun transfert de souveraineté lorsque les Etats-Unis se sont prononcés sur l'illégalité du comportement du gouvernement français.

La seule leçon qu'il faut retenir d'une telle pratique est que les contre-mesures donnent l'occasion aux Etats de faire valoir leur souveraineté internationale. La notion de contre-mesures dépend du pouvoir de chaque partie. Chaque Etat, quelle que soit sa puissance, peut juger unilatéralement le comportement d'un autre Etat et le qualifier d'illicite au regard du droit international pour, ensuite, le sanctionner. Le problème reste à savoir si une telle pratique ne résulterait pas d'une sorte de vengeance entre les Etats ou un usage des contre-mesures dans un autre but.

Section II

Une conformité reposant sur l'intention de l'Etat auteur

Contrairement à l'idée selon laquelle les contre-mesures sont un outil arbitraire dont les superpuissances disposent contre les Etats faibles, on peut dire que ce sont des mesures qui, en plus d'être pacifiques, présument une bonne intention de la part de l'Etat auteur. Leur caractère unilatéral et décentralisé ne cache pas forcément une mauvaise intention quant aux finalités que les Etats les assignent. Un Etat qui décide de recourir à des contre-mesures contre un autre Etat a un autre dessein que celui de le sanctionner ou de soumettre sa souveraineté à un état d'assujettissement. Il s'agit de voir ici en quoi consiste cette intention (Paragraphe 1). Par ailleurs, le caractère unilatéral et dommageable des contre-mesures trouve un fondement en droit international. Ce fondement repose sur le pouvoir légitime reconnu à chaque Etat de protéger lui-même ses intérêts face à une éventuelle atteinte par un autre Etat (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

La philosophie principale du recours aux contre-mesures

En analysant les contre-mesures dans leur fond, on constate que leur première philosophie n'est pas toujours de sanctionner. Un Etat qui décide des contre-mesures à l'égard d'un autre le fait principalement soit pour dissuader celui-ci pour l'amener à la négociation (A), soit pour faire pression sur lui (B).

A- Le recours aux contre-mesures à fin de négociation

La première philosophie des contre-mesures est la dissuasion. C'est un moyen de pression que les Etats ou les organisations internationales utilisent pour convaincre un autre Etat qui viole le droit international à la négociation afin qu'il cesse le fait illicite reproché, ou qu'il répare le dommage résultant de ses actes((*)1). Les Etats sont rattachés à la résolution pacifique des conflits face à des actes préjudiciables de l'un d'entre eux. Leur réaction est de tenter de le convaincre de revenir dans la situation antérieure, c'est-à-dire de rétablir la légalité. Le principe pacta sunt servanda fait que devant un conflit, chaque Etat va essayer d'abord de trouver un règlement pacifique.

L'usage des contre-mesures comme instrument de négociation dans les relations inter-étatiques est d'une grande actualité dans la pratique contemporaine du droit international. La communauté internationale n'hésite pas à menacer de sanctionner un Etat dans le but de le dissuader. Il est vrai qu'on emploie souvent le terme de « sanction » pour désigner les contre-mesures mais la philosophie du terme « sanction » est de convaincre l'Etat récalcitrant à faire cesser l'illicéité ou à réparer le dommage y résultant. Un exemple parmi tant d'autres, on peut citer le cas récent où « le gouvernement américain décida de sanctionner les autorités soudanaises par des contre-mesures face à leur obstruction de trouver une issue définitive à la crise du Darfour »((*)1). Le but était d'amener ces autorités à négocier avec la communauté internationale pour une intervention armée au Darfour en vue de faire cesser les hostilités. Les organisations internationales utilisent, elles aussi, cette politique de négociation par des contre-mesures à l'égard de certains Etats réticents dans l'application du droit international ou qui sont en violation avec ce dernier((*)2).

B- Le recours aux contre-mesures à fin de dissuasion

Les contre-mesures sont avant tout des mesures dissuasives que punitives. La dissuasion ne joue pas seulement à l'égard de l'Etat en cause. Elle peut également viser un Etat tiers qui voudrait, à l'avenir, manifester le même comportement illicite. Les contre-mesures auront donc pour objectif d' « endiguer de tels agissements dans le futur »((*)3). Cet endiguement peut être, par exemple, la suspension du traité ou son extinction qui constitue également une contre-mesure. La dissuasion peut être, par exemple, des manifestations vigoureuses et répétées de la part des membres de la communauté internationale auprès des ambassadeurs représentant l'Etat en question. La dissuasion par des contre-mesures est une politique initiée par les Etats-Unis mais aujourd'hui reprise de plus en plus par les Etats. De nombreux Etats font aujourd'hui recours aux contre-mesures pour faire pression même à la communauté internationale((*)4). Il résulte que cette fin dissuasive montre combien les Etats sont attachés à une politique pacifique dans le règlement des différends internationaux, objet principale des contre-mesures. L'exemple de la menace américaine et onusienne de sanctionner le Soudan montre combien ces derniers voulaient à tout prix éviter de recourir à la force contre cet Etat, ce qui aggraverait encore la situation dans la région. La dissuasion a usé de son influence car sous la pression diplomatique, les autorités soudanaises ont fini par céder et accepter l'intervention sans condition de la force hybride africaine et onusienne au Darfour.

Cependant, un problème s'est soulevé, celui de considérer que l'usage des contre-mesures comme moyen dissuasif dans les relations inter-étatiques aura un effet pervers sur lesdites relations. On accuse les contre-mesures de constituer une sorte de chantage que certains Etats ou organisations internationales pourraient mettre en exergue pour arriver à leurs fins((*)1).

Il faut dire que ce risque est moindre. Au regard du droit international, les Etats sont égaux en droit. Ils ont donc les mêmes droits et moyens de décider des contre-mesures entre eux du moment où celles-ci sont en respect avec les normes obligatoires du droit international public. La question sur l'égalité des moyens qui fait que les Etats sont inégaux en fait, ne se pose guère dans la pratique des contre-mesures dans la mesure où chaque Etat peut y recourir sans l'aval d'aucune instance internationale, ni avoir à se justifier au préalable devant l'Etat contre lequel il décide ces contre-mesures.

L'idée selon laquelle les contre-mesures constituent un outil dangereux pour la société internationale en ce sens qu'elles permettraient à certains Etats d'obtenir des avantages de la part d'un Etat faible par des négociations forcées, doit donc être relativisée. Il ne faut pas ignorer une telle hypothèse mais elle peut être remise en cause dans la pratique. L'Etat qui use des contre-mesures à cette fin sort carrément de leur cadre d'application qui, rappelons-le, constituent une réponse à un fait antérieur illicite. Si le but de cet Etat est uniquement de soumettre la volonté d'un autre Etat, il viole lui-même le droit international((*)1). Ses mesures ne sauraient se justifier en l'absence d'un fait illicite générateur((*)2). Les contre-mesures ne sont légitimées que lorsqu'elles constituent une réponse à une violation antérieure du droit international ou une lésion d'intérêts((*)3). C'est l'existence de cet acte illicite antérieur qui justifie l'adoption des contre-mesures.

Paragraphe 2

Le fondement de la légitimité et la légalité des contre-mesures

Le problème de l'introduction des contre-mesures dans le droit international réside essentiellement sur cet aspect : leur légitimité et leur licéité. Les contre-mesures sont légitimes et légales au regard du droit international pour deux principales raisons. D'abord c'est parce que chaque Etat a le droit et le pouvoir de protéger lui-même ses droits et intérêts face à un acte préjudiciable d'un autre Etat (A). Ensuite, c'est parce que la contre-mesure est prise pour contrer une mesure antérieure illicite ou licite mais dommageable (B).

A- La légitimité de chaque Etat à protéger lui-même ses intérêts

En droit international, il est reconnu à chaque Etat le droit, sinon le devoir de protéger lui-même ses intérêts. La société internationale n'est pas assez intégrée au point qu'il y ait une structure chargée de la défense de l'intérêt de chaque membre comme c'est le cas pour les pouvoirs publics au plan interne. Il appartient donc à chaque membre d'exercer sa souveraineté pour protéger lui-même ses intérêts face à une éventuelle atteinte à ses droits par un autre sujet. C'est ce qu'a été décidé par exemple dans la sentence arbitrale du 9 décembre 1978 dans l'affaire opposant la France aux Etats-Unis((*)4). Face à une lésion de ses intérêts par les faits et actes d'un autre Etat, ou une violation du droit international qu'il juge préjudiciable à son égard, ou tout simplement non-conformes aux normes du droit international public, un Etat peut prendre différentes mesures pour demander la réparation du préjudice subi ou la cessation des actes illicite en cause((*)1).

Les contre-mesures offrent aux Etats un moyen de faire valoir leurs droits sans violer le droit international. Avant de constituer une sanction contre un Etat, elles ont pour but de demander à cet Etat de réparer le dommage qu'il ait pu faire subir par ses agissements illicites. L'Etat qui recourt aux contre-mesures ne viole pas le droit international car il est fondé à protéger ses intérêts. Leur légitimité se trouve justifiée sur ce principe, le droit pour chaque Etat de protéger personnellement ses droits et intérêts.

Le problème qui reste à déterminer, c'est de savoir comment de telles mesures sont conformes au droit international alors que, parfois, elles constituent elles-mêmes des actes illégaux. C'est le problème du fondement de la légalité des contre-mesures.

B- Le fondement de la licéité des contre-mesures

Les contre-mesures ne sont pas des réactions anticipées comme les mesures de sauvegarde ou les lois antiblocage. Ce sont des mesures prises en réaction à des actes préalables d'un Etat, ayant un caractère illicite au regard du droit international, ou licite mais préjudiciable à l'égard de l'Etat visé. Leur légalité par rapport au droit international s'explique par l'illicéité de ces actes. D'ailleurs, « la notion de contre-mesures est définie par la C.D.I. comme l'ensemble des actes par lesquels un Etat riposte à une mesure prise par un autre Etat et qui seraient illicites dans des circonstances normales. Elles deviennent cependant licites du fait qu'elles répondent à un comportement lui-même illicite dont l'Etat lésé conteste le bien-fondé »((*)2).

Par contre-mesure, on désigne l'ensemble des actes constituant une réponse, une riposte à un acte illicite d'un autre Etat. Il résulte donc qu'en l'absence d'une mesure préalable, illicite ou licite mais qui porte atteinte aux intérêts d'un Etat, celui-ci ne peut pas prendre des contre-mesures.

Conclusion du chapitre 1

Les contre-mesures sont des sanctions unilatérales aux mains des Etats certes, mais conformes au droit international. Cette conformité nous l'avons vu, repose sur leur respect des principes fondamentaux du droit international public. Les contre-mesures respectent et maintiennent en effet le principe du non usage de la force armée d'une manière unilatérale dans les relations inter-étatiques et les principes de l'égalité et de la souveraineté des Etats. Si leur conformité au droit international public reste évidente, il reste à savoir quel rôle jouent elles à l'égard de ce dernier.

Chapitre II

UN OUTIL DE REGULATION DES RELATIONS INTERNATIONALES

L'autre intérêt de l'admission des contre-mesures dans le droit international public s'analyse en leur efficacité dans la régulation des relations inter-étatiques. Il est de la nature, pour les Etats, de toujours faire valoir leurs intérêts par rapport à leurs obligations internationales. Cela débouche le plus souvent à une violation marquée du droit international par les Etats au nom de leur souveraineté ou à des conflits incessants. Face à l'absence d'une police internationale chargée de faire respecter le droit international ou de servir d'arbitre dans les relations inter-étatiques, les contre-mesures s'avèrent être un outil efficace dans la régulation desdites relations. Les contre-mesures désignent en effet « les actes par lesquels un Etat riposte à des mesures qu'il estime infondées et préjudiciables à ses intérêts, décidées à son encontre par un autre Etat »((*)1). Cet aspect unilatéral facilite leur recours et donne aux Etats l'occasion d'agir rapidement sans passer par une juridiction internationale devant laquelle la procédure serait longue et décourageante.

La question de l'efficacité des contre-mesures dans la régulation des relations internationales a fait l'objet de plusieurs critiques de la part d'un certain nombre d'auteurs et de praticiens du droit international((*)2). On se demandait, en effet, quel est l'intérêt d'admettre de telles pratiques dans les relations internationales face à une société déjà décentralisée et divisée par les intérêts individuels de chacun. On craignait qu'en admettant les contre-mesures, le droit international ne légitime pas l'arbitraire des Etats en leur reconnaissant un pouvoir de sanction, dont ils disposeraient à leur guise. On dit que les contre-mesures n'ont pour effet que l'affaiblissement du système juridique international((*)3).

Ces effets négatifs tant redoutés ne sont pas observés nécessairement dans la pratique. Il faut noter, en effet, que les Etats recourent aux contre-mesures non seulement pour régler pacifiquement leurs différends, mais aussi dans le but de prévenir ou de punir toute violation du droit international par un autre Etat. On peut dire de ce fait que les contre-mesures permettent aux Etats d'être leurs propres gendarmes en veillant au respect du droit international (Section 1). Dans la mesure où elles permettent aux Etats de sanctionner l'illicéité d'un acte international commis par un autre Etat, on peut dire que les contre-mesures érigent les Etats en leurs propres juges mais aussi en juges du droit international (Section 2).

Section 1

Les Etats, gendarmes du droit international

Les contre-mesures ne dénaturent pas le droit international public. Au contraire, elles sont la manifestation de la volonté des Etats à vouloir le renforcer en veillant à leur respect. En permettant à ceux-ci de recourir à des contre-mesures pour demander la cessation d'un fait illicite, ou pour obtenir la réparation d'un dommage qui pourrait résultait d'un tel fait, le droit international permet aux Etats de veiller au respect du droit international. Ils sont devenus ainsi leurs propres gendarmes, les gendarmes du droit international. Les Etats se contrôlent mutuellement et, par le biais des contre-mesures, chaque d'eux oblige l'autre à respecter ses obligations internationales, quoiqu'elles découlent d'une convention bilatérale, multilatérale, ou du droit international général. Ceci se manifeste à travers plusieurs caractéristiques des contre-mesures dont, principalement, leur fonction (Paragraphe 1) mais aussi leurs finalités c'est-à-dire le but de leur emploi (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

Les fonctions des contre-mesures

Ici, on se pose une question essentielle. Que peut faire un Etat contre un autre qui lèse ses intérêts en contrevenant à ses obligations internationales ? Cet Etat peut prendre des contre-mesures contre le premier. Les contre-mesures ont deux principales fonctions importantes. Elles visent d'abord à faire cesser l'acte illicite (A) et obliger l'autre Etat à réparer le dommage qui pourrait résulter d'un tel acte (B).

A- Obliger un Etat à cesser un fait illicite ou licite mais dommageable

La principale fonction des contre-mesures est de demander la cessation d'un acte illicite. Elles obligent un Etat à respecter ses obligations conventionnelles ou celles découlant du droit international général. Face aux actes et faits d'un Etat qui méconnaît une obligation découlant d'une convention entre deux Etats, l'autre Etat décide des contre-mesures pour obliger l'Etat défaillant à revenir à la légalité. Le but est de l'obliger à cesser l'acte illicite qu'il est entrain de commettre((*)1). Le fait illicite peut découler d'une série d'actions ou d'omissions de l'Etat((*)2).

Des contre-mesures peuvent également être décidées contre des décisions ou des actes qui ne sont pas forcément illicites au regard du droit international mais préjudiciables à l'un de ses sujets. C'est le cas des mesures dites dommageables. Par exemple, lorsqu'un Etat décide de chasser de son territoire les ressortissants d'un autre Etat ou de nationaliser les biens de ces derniers, il le fait de plein droit mais, du coup, il porte atteinte aux intérêts de cet Etat. Les différentes mesures pouvant être décidées sont des actes de rétorsion((*)3), qui auront pour but d'obliger cet Etat à revenir en arrière, c'est-à-dire à cesser ses actes dommageables.

La faculté de prendre des contre-mesures n'est pas reconnue uniquement qu'à l'Etat directement lésé. D'autres Etats se sentant indirectement lésés peuvent décider de sanctionner un Etat par des contre-mesures lorsque celui-ci viole le droit international général, même s'il ne porte aucune atteinte aux intérêts de ces Etats. La seule violation du droit international justifie ces contre-mesures((*)4). Les contre-mesures décidées dans un cadre collectif tendent le plus souvent à protéger les intérêts collectifs. Le plus souvent, les arguments portent sur la protection des droits de l'homme. Ces contre-mesures sont, en général, des mesures de sanction économiques ou politiques. Les Etats deviennent ainsi gendarmes de leurs propres intérêts et, en même temps, les gendarmes du droit international.

Il n'existe aucune police internationale qui aurait comme fonction d'obliger tous les sujets de droit international à se conformer aux normes de ce dernier. La mise en oeuvre de ces règles dépendant de la volonté des Etats, le droit international peut se trouver menacé parce que chaque Etat aura tendance à faire prévaloir sa souveraineté. L'absence d'une police internationale fait que les Etats deviennent des gardiens de fait et demandent cessation de tout acte qui viole le droit international par le biais des contre-mesures, celles-ci ayant une force dissuasive.

La justice internationale intervient également pour affirmer cette fonction des contre-mesures. Dans l'affaire des prises d'otages dans l'ambassade américaine de Téhéran, la CIJ décida que l'Iran devait « faire cesser immédiatement la détention illicite du chargé d'affaires, d'autres membres du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis... »((*)1). Lorsque l'Etat aura obtenu la cessation de l'acte illicite, il va demander à l'autre de réparer le dommage qu'il a pu occasionner.

B- Obliger un Etat à réparer le dommage résultant de ses actes

L'autre fonction des contre-mesures est celle d'obtenir la réparation du dommage qui peut résulter du fait de l'Etat fautif. Ici encore, l'absence d'une police internationale oblige les Etats à s'ériger en gendarme de leurs intérêts. Ils veillent sur eux et demandent réparation en cas d'atteinte sans recourir à une juridiction internationale. En effet, le dommage peut être imminent et très nocif pour l'Etat lésé. Le fait d'entamer des procédures devant une telle juridiction peut avoir pour effet de retarder la réparation ou de rendre celle-ci obsolète. L'intérêt pour l'Etat de prendre des mesures immédiates comme les contre-mesures en est qu'il va demander la cessation du fait et la réparation du préjudice subi de ce fait.

L'obtention d'une réparation est, peut-on dire, la raison d'être des contre-mesures. Les Etats demandent la cessation des actes illicites qui est toujours suivie d'une demande de dédommagement des préjudices ayant résulté de ces actes. La seule cessation du fait ne suffit pas, les contre-mesures ayant pour fonction de remettre les parties à l'état initial qu'elles étaient avant la commission du fait. L'obtention de la réparation est affirmée à plusieurs reprises pas la justice internationale comme l'a affirmé, par exemple, la Cour Permanente de Justice Internationale dans son arrêt rendu le 13 septembre 1928 concernant l'affaire entre l'Allemagne et la Pologne, dite affaire de l'Usine de Chorzów((*)1).

La réparation peut avoir plusieurs formes. Ce peut être, soit une restitution intégrale ou restitutio in integrum, soit une réparation par équivalent ou encore par une satisfaction sous quelque forme que ce soit.

La restitutio in integrum peut être une réparation en nature du dommage subi (restitution en nature). Par exemple, la restitution des biens nationalisés ou des territoires annexés par la force. La réparation par équivalent et la satisfaction peuvent être, par exemple, une réparation financière.

Par leurs fonctions, les contre-mesures permettent aux Etats de s'assurer du respect du droit international en prévenant sa violation. Cette qualité, qu'on a qualifiée de gendarme du droit international s'analyse également à travers les finalités des contre-mesures.

Paragraphe 2

Les finalités des contre-mesures

Les finalités des contre-mesures sont corollaires de leurs fonctions. L'analyse des finalités des contre-mesures revient à étudier leur cause finale c'est-à-dire les objectifs des réactions. Les contre-mesures ont, en général, deux finalités ou objectifs : la coercition (A) et la correction (B).

A- La finalité coercitive

Les contre-mesures ont une finalité coercitive. Dans la mesure où elles visent à effacer les effets préjudiciables d'un fait illicite en obligeant l'Etat auteur de ce fait à s'acquitter de son obligation, soit en réparant ce préjudice, soit en mettant fin à l'acte illicite qui lui est imputable, il y a usage de la coercition. La coercition s'analyse dans les trois fonctions principales des contre-mesures à savoir l'obtention d'une réparation, la dissuasion et la cessation du fait illicite.

Un Etat décide des contre-mesures pour deux finalités principales dont la caractéristique principale est la contrainte : l'obtention d'une réparation, la dissuasion et la cessation de l'illicite((*)1). Le but est de contraindre l'Etat défaillant à réparer immédiatement toute conséquence dommageable résultant de ses actes, licites ou illicites((*)2).

Elle peut également avoir d'autres finalités dites accessoires. C'est, par l'exemple, lorsqu'on contraint un Etat à se rattacher à la norme internationale ou à accepter la soumission du différend à un tiers impartial. La première est en général utilisée par des Etats qui ne sont pas concernés directement par le préjudice mais qui sanctionne toute violation du droit international((*)3).

Quand au deuxième cas, il « se manifeste lorsque l'auteur d'un fait illicite est lié vis-à-vis de l'Etat s'estimant lésé par une convention ou un accord contenant une clause compromissoire en vue d'une instance arbitrale sur le différend qui oppose les parties, ou la soumission du litige à un tiers partial »((*)4). Face au refus auteur de la faute de recourir au tiers pour régler le différend, l'Etat lésé peut décider des contre-mesures dans le but de l'obliger à coopérer((*)5).

Il ne faut pas assimiler la coercition à une punition. En effet, celle-ci s'analyse comme une vengeance d'un fait déjà consommé, alors que « la coercition est une incitation ou une pression tendant à amener l'Etat défaillant à modifier un comportement illicite qui est en cours »((*)6). La différence en est que la réaction punitive est irréversible. Par contre, la coercition n'a de sens que si les effets de l'acte illicite initial sont en cours, continuent de se déployer dans le temps. Une telle réaction est toujours réversible. L'Etat auteur des contre-mesures cesse ces dernières dès lors que le préjudice s'arrête, sinon il corrige.

B- La finalité corrective

Les contre-mesures on également une finalité corrective. Elles visent à corriger un Etat que l'on pourrait qualifier de fauteur de troubles. Les mesures prises par l'Etat lésé visent « à remédier à la situation résultant du fait illicite »((*)1). Le but est de s'assurer que justice sera faite et qu'il aura un avantage de cette correction, un avantage réel et tangible, comme la réparation, la remise de la chose détruite à l'état initial. Une mesure de représailles, par exemple, qui consiste à expulser les nationaux de l'Etat auteur de la faute va dans ce sens. Il en est ainsi du gel des avoirs que l'Etat décideur de la contre-mesure prend à son profit.

De cette finalité corrective, résulte une autre finalité cachée des contre-mesures. C'est l'ambition de retrouver le rééquilibrage des positions des parties. Une telle finalité est en principe présente dans le cadre des conflits résultant des relations conventionnelles. Si le fait illicite consiste en la violation de ladite convention, la ou les parties lésées décident des contre-mesures dans le but de remettre les intérêts de chacun à l'état antérieur à la violation. Ces contre-mesures peuvent être, par exemple, la suspension du traité, sa rupture, sa dénonciation mais, également, des contre-mesures financières comme le gel des capitaux. L'idée de rééquilibrer et de remettre les parties sur le même pied d'égalité est bien affirmée par les juges et arbitres internationaux, soit d'une façon implicite, soit de façon explicite((*)2).

Les contre-mesures pourraient avoir une autre finalité, celle de punir. On se demande si un Etat peut réellement punir un autre. Cette question pourrait avoir une réponse affirmative dans la mesure où les Etats sont à la fois gendarmes du droit international mais également juges de sa violation. A part le rôle de gardien du droit international, les Etats peuvent sanctionner toute atteinte portée à celui-ci par un autre Etat.

Section 2

Les contre-mesures, sanction de l'illicite en droit international

C'est ici où se fonde, en effet, l'intérêt majeur de l'introduction des contre-mesures en droit international, mais c'est aussi la question qui soulève trop de polémiques dans la communauté internationale. On pourrait même se demander si un Etat a le pouvoir de sanctionner unilatéralement un autre. On craint par ailleurs que les contre-mesures ne débouchent à un règlement de compte entre les Etats, la généralisation de la vengeance et de la justice privée. Autre question qui s'est posée, les contre-mesures ne remettent elles pas en cause les moyens de règlements prévus par le droit international ? Ne justifient-elles pas le comportement illicite d'un Etat dans la mesure où elles excluent notamment sa responsabilité internationale ?

Il faut noter que le risque de « perversion » des contre-mesures en vengeance est moindre grâce à la réglementation de leur usage((*)1). Les contre-mesures constituent seulement un palliatif face à l'impuissance de la société internationale à protéger les droits et intérêts de chaque membre. Chaque Etat peut individuellement se protéger, comme des Etats peuvent se réunir pour défendre un seul Etat ou punir toute violation du droit international (Paragraphe 1). L'affirmation des contre-mesures par les instances internationales illustre également leur utilité et leur efficacité dans la régulation des relations internationales (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

La justice internationale aux mains des Etats, un palliatif à l'impuissance de la société internationale.

Les tribunaux internationaux ne pourraient pas intervenir pour juger tous les différends inter-étatiques. Ceux-ci portent le plus souvent sur des questions subjectives, parfois anodines mettant généralement en cause des droits subjectifs relevant du droit interne des Etats. C'est ainsi que le droit international admet que les Etats puissent adopter des contre-mesures d'une manière unilatérale (A), ou collectivement (B) pour sanctionner l'illicite en droit international.

A- Les contre-mesures individuelles

Les contre-mesures peuvent être « de nature verticale ou horizontale »((*)1). Les contre-mesures de nature verticale sont les réactions décidées unilatéralement par un Etat qui s'estime lésé face aux actes dolosifs ou illicites d'un autre. L'Etat qui prend ces réactions s'érige en juge de fait et sanctionne l'autre Etat. Il est de son droit, pour cet Etat, de prendre des contre-mesures, lesquelles ont une logique correctrice dans un double rôle.

Le premier rôle est de protection puisque l'Etat qui décide les contre-mesures « entreprend... de se mettre à l'abri des conséquences dommageables du comportement inamical ou prétendument fautif d'un autre Etat »((*)2). L'Etat qui recourt aux contre-mesures pour sanctionner l'autre, le fait dans le but d'éviter de se retirer, par exemple, de la convention qui les lie, retrait qui « aurait pour effet de libérer l'autre partie de ses propres obligations à son égard ». Ces mesures permettront à l'Etat de se protéger du déséquilibre résultant du comportement illicite de l'autre partie. On pourrait dire qu'il juge l'Etat défaillant et l'oblige à exécuter son jugement lorsqu'il exerce une pression afin d'aboutir à un règlement satisfaisant.

Le second rôle est de répression. L'Etat qui décide des contre-mesures entend « infliger à l'Etat visé des contraintes qui affectent ses droits et ses intérêts »((*)3). Ces mesures, même si elles constituent, elles aussi, des troubles au fonctionnement régulier des relations inter-étatiques, elles ont pour but de rétablir l'ordre rompu par les actes préalables en cause((*)4). Ces mesures de sanction peuvent être expresses ou indirectes.

Comme sanctions expresses, on peut citer l'embargo ou le boycott notamment lorsque l'Etat décide des restrictions aux importations ou en limite les échanges. Quant aux sanctions indirectes, ce peut être le rappel de son ambassadeur accrédité par un Etat auprès de l'Etat accréditeur pour contester contre les agissements de celui-ci. Toujours est-il que l'Etat fait tout pour protéger ses intérêts individuels ; ce qui n'est pas, généralement, le cas pour des Etats qui décident ensemble de sanctionner un Etat par des contre-mesures.

B- Les contre-mesures collectives

En ce qui concerne les contre-mesures collectives, elles s'exercent dans un autre cadre. Celles-ci sont exercées collectivement par des Etats pour protester contre une violation du droit international par un autre Etat. L'objet en cause ici n'est pas seulement un droit ou des intérêts individuels d'un Etat lésé, mais d'une manière générale et d'une façon plus large l'ordre international dans son ensemble.

Certains auteurs voient en ces contre-mesures un danger potentiel dans les relations internationales, celui de l'inégalité de puissance entre Etats puissants qui décideraient de telles sanctions contre un seul Etat faible((*)1). Cette position est également soutenue par les Etats du Tiers-Monde. Cependant, elles sont également d'une utilité convaincante car elles peuvent constituer une substitution de la défaillance des mécanismes institutionnels de règlement de conflits, à l'exemple du Conseil de sécurité. Certaines institutions internationales ont reconnu l'usage stratégique des contre-mesures et ont souvent recours.

Paragraphe 2

L'affirmation des contre-mesures par les instances internationales

La coutume des Etats en matière de contre-mesures reçoit son écho dans la pratique internationale. Les instances internationales reconnaissent de plus en plus l'intérêt des contre-mesures dans le droit international. Pour canaliser l'illicite dans la société internationale, certaines organisations internationales préconisent aux Etats d'adopter des contre-mesures ou les prévoient comme moyen de règlement des différends (A), pendant que des tribunaux internationaux ont affirmé et continuent d'affirmer leurs fonctions et leur légitimité (B).

A- Les contre-mesures et les organisations internationales

Les organisations internationales, surtout de coopération, adoptent de plus en plus des contre-mesures si elles ne recommandent pas aux Etats membres d'en recourir. C'est dans le seul souci de sanctionner toute violation du droit international ou la méconnaissance de ses obligations internationales par un Etat.

Pour ce qui est de l'Organisation des Nations Unies, par exemple, on accorde une place importante aux contre-mesures. Elles sont reconnues entièrement en tant que moyen de pression ou de règlement des conflits, l'article 41 du chapitre VII de la Charte le démontre clairement((*)1).

Le Conseil de Sécurité des Nations Unies peut recommander aux Etats de sanctionner un autre, ou décider de le sanctionner lui-même lorsqu'il estime que celui-ci ne respecte pas le droit international (menace pour la paix et la sécurité internationales au sens de l'article 41 de la Charte). C'est le cas par, exemple, des sanctions du Conseil de Sécurité de l'ONU à l'égard de l'Union Sud-africaine contre laquelle il a pris une résolution (Résolution 418 du 4 novembre 1977) où il demandait aux Etats « d'instituer un embargo total sur la livraison d'équipements militaires, après avoir qualifié la politique de ce pays comme une menace à la paix et à la sécurité internationales »((*)2).

Il faut noter que le Conseil peut décider des sanctions contre un Etat même si cet Etat n'est pas membre de l'Organisation((*)3).

Au sein de l'ONU, ce n'est pas uniquement le Conseil de Sécurité qui applique les contre-mesures. L'Assemblée Générale adopte, elle aussi, de telles mesures pour sanctionner toute atteinte au droit international. Face aux manoeuvres d'un Etat qui sont contraires au droit international ou mettant en danger l'ordre public international, l'Assemblée Générale de l'ONU peut prononcer des sanctions ou demander aux Etats de le faire.

L'exemple typique est sa résolution 273 (III) en date du 11 mai 1949 dans laquelle elle a demandé aux Etats membres de l'ONU de prendre différentes sanctions contre l'Etat d'Israël lorsque celui-ci a envahi et occupé les territoires arabes. Ces différentes mesures consistaient à faire cesser toute livraison d'armes à Israël, la suspension de toute assistance et toute coopération avec lui, la rupture des relations diplomatiques, commerciales ou culturelles avec l'Etat hébreux.

L'Organisation des Nations Unies n'est pas la seule organisation internationale qui pratique les contre-mesures. D'autres organisations internationales adoptent, elles aussi, de telles sanctions. Soit elles les adoptent elles-mêmes, soit elles les recommandent à leurs Etats membres. C'est le cas, par exemple, du FMI, de l'AELE, du GATT et de l'OMC et d'autres organisations de coopération économique.

Au sein du Fonds Monétaire International, par exemple, il existe « une procédure permettant à un Etat qui se dit lésé de porter plainte contre un autre Etat pour non respect de ses obligations... Le Fonds, lui-même, peut adopter des sanctions centralisées contre un membre défaillant »((*)1). Des dispositions similaires sont prévues par les autres organismes suscités, qui ont pour but, soit de rétablir l'équilibre rompu par un comportement illégal d'un Etat, soit de le sanctionner, sanctions toujours reconnues par des tribunaux internationaux.

B- Les contre-mesures et les tribunaux internationaux

Les tribunaux internationaux ne sont pas en reste dans l'affirmation des contre-mesures en droit international public. Deux célèbres décisions sont connues comme précurseurs de la reconnaissance des contre-mesures dans le droit international. C'est d'abord celle rendue par le tribunal arbitral du 9 décembre 1978 sur l'affaire des services aériens opposant la France aux Etats-Unis.

Dans cette affaire, le juge arbitral international a décidé que chaque Etat « a le droit, sous réserve du respect des règles générales du droit international relatives aux contraintes armées, de faire respecter son droit par des contre-mesures »((*)1). Il a affirmé la licéité des contre-mesures dans le cadre du droit international général et a confirmé donc la pratique des Etats et des organisations internationales en la matière.

La deuxième décision est celle rendue par la Cour Internationale de Justice dans l'affaire opposant les Etats-Unis d'Amérique à l'Iran, relative à la prise en otage du personnel diplomatique et consulaire américain à Téhéran. Le juge a reconnu le droit pour les Etats de prendre des contre-mesures lorsqu'ils s'estiment lésés par un autre Etat ou lorsqu'ils jugent qu'un Etat ne respecte pas, en général, le droit international.

Mis à part d'avoir réaffirmé la licéité et la légitimité des contre-mesures dans cette décision, la Cour a également montré leur caractère contraignant en décidant que les Etats-Unis ont adopté de telles mesures contre l'Iran dans le but de l'obliger à « cesser immédiatement la détention illicite du chargé d'affaires, d'autres membres du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis »((*)2).

Cependant, ce ne sont pas les premières décisions qui ont eu à intervenir sur les contre-mesures même si ce sont elles qui ont généralisé leur pratique. Bien avant ces décisions, le juge international a eu à se prononcer sur les contre-mesures ; ce qui affirme le souci du juge de vouloir préserver le droit international contre toute violation depuis longtemps.

Parmi ces anciennes décisions, on peut citer l'arrêt rendu par la Cour Permanente de Justice Internationale le 13 septembre 1928 concernant l'affaire entre l'Allemagne et la Pologne, dite affaire de l'Usine de Chorzów qui consacra, par exemple, le droit à réparation d'un dommage résultant d'un acte illicite international((*)3). D'autres arrêts sont rendus par la CIJ postérieurement à ces deux célèbres décisions. On peut citer celui du 27 juin 1986 sur l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, ou récemment encore celui du 25 septembre 1997 relatif à l'affaire Gabcikovo-Nagymaros.

Conclusion du chapitre 2

L'intérêt de l'introduction des contre-mesures dans le droit international public se confirme également dans leur rôle de régulateur des relations internationales. La société internationale n'est pas assez organisée d'une manière à ce qu'elle puisse bien protéger les intérêts de ses membres et prévenir la violation du droit international. L'échec du Conseil de Sécurité des Nations Unies à régler tous les conflits du monde le démontre bien. C'est pourquoi une pratique comme les contre-mesures constitue un outil efficace dans la mesure où elles permettent aux Etats de s'ériger en gendarmes pour défendre leurs droits et intérêts mais également en juges pour sanctionner toute violation du droit international, pratique relayée par les instances internationales.

CONCLUSION 1ère PARTIE

A travers des pratiques telles que les représailles et les rétorsions, ou les sanctions économiques et financières, les contre-mesures ne peuvent être indexées comme étant des mesures belliqueuses. Ce sont, au contraire, des mesures qui sont en conformité avec les principes fondamentaux du droit international public par leur caractère pacifique.

L'intention des Etats dans l'usage des contre-mesures est en principe d'amener un Etat défaillant à la négociation. Lorsque celles-ci sont décidées en guise de sanction, elles trouvent leur fondement et leur légitimité dans le fait qu'il est reconnu à chaque Etat le droit et le pouvoir de protéger lui-même ses droits et intérêts, ou protéger le droit international contre toute violation. C'est ainsi que les contre-mesures font des Etats leur propre gendarme, en même temps que celui du droit international. Elles permettent en effet, aux sujets de droit international (Etats et Organisations internationales) de sanctionner individuellement ou collectivement toute violation du droit international. En un mot, l'intérêt des contre-mesures est qu'elles constituent un palliatif aux carences des mécanismes de la société internationale en matière de règlement de conflits entre Etats.

Mais, est ce qu'en reconnaissant à un Etat le droit de sanctionner unilatéralement un autre, les contre-mesures n'ouvrent-elles pas une brèche vers le déséquilibre de l'ordre juridique international ? C'est la question à laquelle nous nous attacherons à répondre dans la deuxième partie de la présente étude.

DEUXIEME PARTIE

LE MAINTIEN DE L'ORDRE JURIDIQUE INTERNATIONAL PAR LA REGLEMENTATION DES CONTRE-MESURES

La pratique des contre-mesures, nous l'avons dit, ne date pas d'aujourd'hui((*)1). Bien généralisée dans l'époque contemporaine, elle a commencé à devenir un sérieux problème dans la communauté internationale. Il est notoire que les Etats font prévalent d'abord la protection de leurs intérêts personnels avant ceux de la société internationale. La tendance à agir unilatéralement pour les protéger est omniprésente chez tous les Etats. Il serait donc dangereux de leur laisser libre recours dans l'usage des contre-mesures car cela pourrait déboucher sur deux grands problèmes majeurs dans le droit international((*)2).

Ayant soulevé une polémique dans la communauté internationale, la réglementation de l'usage des contre-mesures s'est imposée. Le but est de faire d'elles un outil efficace des relations internationales, et non la source de leur instabilité. Dans le cadre de sa mission de développement et de codification du droit international, la Commission du Droit International va se pencher sur la question pour leur trouver un vrai régime juridique, codifiant ainsi la coutume des Etats. La tâche n'a pas été facile pour celle-ci, mais elle finira par adopter un projet final de 59 articles, dit « Projet d'articles sur la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite », qui sera soumis au vote de l'Assemblée Générale des Nations Unies((*)3).

Le but de la CDI dans ce projet est de créer une procédure de mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat pour fait international, et tracer dans quels cas cette responsabilité pourrait être exclue. C'est dans ce dernier aspect que la Commission a profité pour introduire les contre-mesures en tant que circonstance justifiant la licéité d'un acte internationalement illicite.

Consciente de la réalité de la pratique étatique, la Commission a mis en place des garde-fous pour empêcher que les contre-mesures ne deviennent elles-mêmes un instrument arbitraire aux mains des Etats. Leur réglementation s'imposa donc comme le seul moyen de limiter un usage abusif. C'est ici où se pose la question de savoir dans quelle mesure peut-on dire que cette réglementation contribue à la stabilité de l'ordre juridique international alors qu'elle laisse toujours les contre-mesures à la libre disposition des Etats, autrement dit, la réglementation des contre-mesures limite-t-elle réellement leur usage arbitraire par les Etats ?

Ce sont là des questions intéressantes qui démontrent clairement le rôle joué par la CDI dans le développement du droit international. Il sera question de montrer ici que la réglementation des contre-mesures constitue une véritable garantie pour le maintien de l'ordre juridique international. En précisant les conditions de recours à des contre-mesures (Chapitre 1), la Commission du Droit International a fait d'une pierre deux coups en ce sens qu'elle a également apporté de véritables limites à leur usage (Chapitre 2).

Chapitre I : La précision des conditions de recours à des contre-mesures

Chapitre II : Les limites légales apportées aux contre-mesures

Chapitre Premier

LA PRÉCISION DES CONDITIONS DE RECOURS À DES CONTRE-MESURES

Le projet de la Commission du Droit International entamé depuis les années 1959 avait pour objet de réglementer la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite. La Commission en a profité pour soumettre le recours aux contre-mesures au respect de différentes conditions, la finalité étant de limiter l'arbitraire des Etats et la tendance à l'autodéfense de ces derniers.

A part les conditions posées généralement par le droit international général, la CDI a introduit d'autres conditions renforçant ainsi le régime des contre-mesures. La précision de ces conditions consiste à leur poser des freins, à restreindre leur recours généralisé par les Etats dans le règlement des conflits, mais également, à limiter le risque de débordement qu'elles présentent pour la stabilité de l'ordre juridique international. La démarche est intéressante d'un point de vue pratique notamment la protection de certains Etats dits faibles contre l'arbitraire des superpuissances.

Si on voulait laisser les Etats recourir aux représailles sans conditions comme dans la pratique coutumière, certains feraient d'elles leur instrument de négociation même.

Le problème qui se pose est de savoir la réalité de ces conditions et leur portée dans la pratique des contre-mesures. En d'autres termes, en quoi peut-on affirmer que le projet de la CDI pose véritablement des limites au recours à des contre-mesures ?

Il s'agira de préciser ici en quoi consistent ces conditions et quel est leur impact dans l'usage des contre-mesures. L'étude de la réglementation des contre-mesures passe en effet dans l'analyse des différentes dispositions mises en place par le projet de la CDI et celles posées antérieurement par le droit international général telles que les deux conventions de Vienne et la Charte de l'ONU. Nous distinguerons deux types de conditions posées aux contre-mesures. On fera remarquer avant tout que tout Etat qui décide de prendre des contre-mesures doit d'abord respecter certaines conditions de forme relatives à la procédure (Section 1). Mais, comme ces seules conditions ne suffiraient pas à canaliser les risques de débordement des contre-mesures, d'autres conditions sont prévues qui tendent, quant à elles, à limiter la qualification du fait illicite imputable et sa sanction (Section 2).

Section 1 

La précision des conditions formelles

La limitation du recours à des contre-mesures passe d'abord par la précision de ces conditions formelles. Les conditions formelles sont celles relatives au respect des procédures de mise en oeuvre des contre-mesures, c'est-à-dire aux différentes étapes de la sanction, de l'intention de prendre la contre-mesure à sa décision. Il s'agit, dans ces conditions, d'encadrer minutieusement l'Etat qui va prendre des contre-mesures afin d'éviter que celui-ci ne dénature pas leur finalité.

Le respect des conditions formelles suppose la soumission de l'Etat lésé à un formalisme rigoureux qui consiste, d'une part, à le décourager dans son projet et, d'une autre part, à recourir à un moyen institutionnel de règlement des conflits. L'Etat qui décide de prendre des contre-mesures doit, avant tout, remplir certaines conditions préalables (Paragraphe 1), s'assurer de l'inexistence d'un moyen de règlement de conflit prévu à cette fin (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

Conditions préalables à toute prise de contre-mesures.

L'article 52 du projet de la CDI dispose qu'avant de prendre des contre-mesures, l'Etat lésé doit remplir deux conditions : exiger de l'Etat défaillant l'acquittement de ses obligations (A) et lui notifier sa décision de prendre des contre-mesures tout en lui offrant un moyen de négociation (B).

A- L'exigence d'une mise en demeure infructueuse

Un Etat n'a pas le droit de prendre des contre-mesures sans tenter la négociation pour un règlement à l'amiable. L'ambition de la CDI est d'éviter que les Etats ne prennent les contre-mesures comme le moyen de principe dans le règlement de leurs différends. Il faut noter que celles-ci ne trouvent leur valeur et leur raison d'être que si on est en face d'un conflit n'ayant pas trouvé un consensus ni résolution amiable. Les contre-mesures sont l'exception et non le principe.

Aux termes du projet, « avant de prendre des contre-mesures, l'Etat lésé doit : 1) demander à l'Etat responsable, conformément à l'article 43 [du projet] de s'acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la deuxième partie. »((*)1). Les obligations en question sont celles prévues par la deuxième partie dudit projet qui sont le maintien de l'exécution de l'obligation (art. 29), la cessation et la non répétition du fait illicite (art. 30) et la réparation (art. 31). Ce qui est important, ici, ce n'est pas de commenter le projet d'articles mais d'apprécier l'obligation faite aux Etats de respecter cette condition d'exercice des contre-mesures. L'obligation de la mise en demeure préalable a deux stipulations.

Premièrement, l'Etat lésé doit demander à l'Etat défaillant de cesser l'acte ou les actes en cause, c'est-à-dire l'acte internationalement reconnu comme illicite ou licite mais préjudiciable. La demande de cessation tend à éviter une réponse similaire qui aurait comme conséquence le déséquilibre de l'ordre juridique international.

Deuxièmement, la partie lésée doit demander vainement la réparation du dommage qu'il a subi des actes et manoeuvres de l'autre partie. C'est alors face à cette mise en demeure, si elle s'avère infructueuse, que l'Etat lésé peut prendre des contre-mesures. La mise en demeure infructueuse est une condition obligatoire dont les Etats ne peuvent s'en déroger, même en cas d'attaque armée. Le juge international a eu à le rappeler dans la célèbre sentence arbitrale rendue le 31 juillet 1928 sur l'Affaire Naulilaa qui opposait l'Allemagne au Portugal. Dans cette affaire, le tribunal énonça que « la mesure de représailles n'est licite que lorsqu'elle a été précédée d'une sommation restée infructueuse. »((*)2).

En constatant que les autorités allemandes avaient déclenché des représailles contre les autorités portugaises sans aucune formalité préliminaire, le tribunal arbitral a également énoncé que « il y a eu..., de la part des autorités du Sud-Ouest africain, recours à la force, sans essai préalable d'obtenir satisfaction par les voies légales, ce qui exclut... la légitimité des représailles »((*)1). Même si cette sentence a été rendue à propos des représailles armées, elle est considérée comme la condition classique des représailles pacifiques.

Une question s'est soulevée s'il fallait attendre l'épuisement de toutes les voies de recours pour entamer les contre-mesures. Autrement dit, fallait il avoir une réponse négative de la part de l'Etat défaillant pour décider des contre-mesures contre lui ? Cette question n'a pu recevoir de réponse précise. Toutefois, « on peut en déduire que l'Etat lésé n'est pas obligé d'attendre l'épuisement des négociations pour prendre des contre-mesures »((*)2) dans la mesure où, dans la sentence arbitrale du 9 décembre 1978 sur l'Affaire concernant l'accord relatif aux services aériens, le tribunal arbitral déclara qu'il ne pensait pas « que dans l'état actuel des relations internationales, on puisse énoncer une règle qui prohibe les contre-mesures au cours d'une négociation. »((*)3). L'hésitation est permise, et on peut se poser la même question en ce qui concerne l'obligation de notification.

B- L'exigence d'une notification et d'une offre de négociation

Elle est également posée par l'article 52 du projet de la Commission du droit international. Il résulte de ce texte qu'avant toute décision de prendre des contre-mesures, l'Etat lésé doit notifier à l'Etat responsable toute décision de prendre des contre-mesures et offrir de négocier avec cet Etat.

L'exigence d'une notification à l'autre partie est une condition formaliste de la précédente, même si celle-ci a pour objet l'interdiction d'une réponse surprise. L'Etat désirant prendre des contre-mesures ne peut le faire d'une manière unilatérale et spontanée sans prévenir l'autre partie par notification. En insérant cette disposition dans son projet, la CDI pense non seulement limiter les dégâts qui résulteraient de la prise de telles mesures soudainement, mais c'est aussi un moyen de chercher un terrain d'entente. On pense que si on prévient l'Etat défaillant qu'on va prendre des représailles à son encontre, il aura tendance à céder aux pressions et à exécuter ses obligations. Cette condition se présente donc « comme le strict minimum qui pourrait éviter, le cas échéant, l'aggravation du différend »((*)1).

L'exigence de notification n'est cependant pas une innovation de la CDI. Comme la condition précédente qui a été reprise d'une pratique ancienne, la Commission n'a fait que codifier, une fois de plus, la coutume des Etats. Il relève de la coutume que ces derniers cherchent toujours à régler pacifiquement leurs différends. Face à des actes dommageables d'un Etat, la pratique a montré que l'Etat lésé prévient toujours avant de sanctionner. Certains avisent même en quoi va consister la sanction. Ce fut le cas, par exemple, de la France contre la Roumanie en 1955.

Face au refus du gouvernement roumain de libérer certains ressortissants français emprisonnés en Roumanie, la France décida de prendre des contre-mesures contre elle, estimant qu'elle a violé l'accord qu'ils avaient signé sur cette question. Outre les tentatives de régler le différend à l'amiable, le gouvernement français avait notifié à la Roumanie la mesure projetée avant de l'appliquer((*)2). L'introduction d'une telle exigence dans le projet de la CDI a été influencée par des situations récentes qui ont eu lieu tout juste avant l'ouverture des débats du projet et pendant sa rédaction. C'est par exemple l'affaire qui opposait les Pays Bas à l'Indonésie sur le statut de l'Irian occidental. Devant le refus des Pays Bas de quitter l'Irian que l'Indonésie considérait comme faisant partie intégrante de son territoire, le gouvernement indonésien décida de nationaliser les entreprises néerlandaises opérant sur son territoire, déclaration étant faite devant l'Assemblée générale des Nations Unies((*)3).

Il faut noter que l'obligation de notification n'est pas erga omnes. Elle peut être écartée si la nécessité l'exige. C'est ce qui résulte du paragraphe 2 de l'article 52 qui dispose que « nonobstant le paragraphe 1b, l'Etat lésé peut prendre les contre-mesures urgentes qui sont nécessaires pour préserver ses droits ». Une fois de plus, cette disposition prête à hésitations si l'on sait très bien que ce sont les Etats qui déterminent eux-mêmes cette nécessité.

Paragraphe 2

L'inexistence d'un mécanisme de règlement de différend

Cette condition pose, une fois de plus, une difficulté au recours à des contre-mesures. Celui-ci n'est possible que s'il n'existe aucune procédure de règlement de conflits prévue entre les Etats (A). Il ne doit également pas y avoir un tribunal en cours d'instance de jugement du différend ou une décision judiciaire ayant intervenu sur le litige (B).

A- L'absence d'une procédure de règlement prévue entre les Etats

C'est une condition qui veille au respect des mécanismes internationaux de règlement des différends. Avant de prendre des contre-mesures, un Etat doit s'assurer s'il n'existe d'autres moyens prévus pour régler le conflit. Autrement dit, l'Etat lésé doit s'assurer qu'il n'y a aucun moyen textuel ou coutumier lui permettant de faire cesser l'illicite ou faire réparer le dommage. Ces moyens peuvent être prévus par un traité qui pose lui-même les différents modes de règlement des différends. Ce peut être, par exemple, l'intervention d'un arbitre pour trancher, d'un organe prévu à cette fin, ou tout simplement la négociation.

Il doit y avoir, en tout état de cause, un épuisement de toutes les voies de droit internes et les moyens traditionnels de règlement des différends. On pourrait dire qu'il est fait obligation aux Etats de chercher à régler, d'abord, pacifiquement la crise avant de prévoir des représailles ou des rétorsions.

Cette question a soulevé beaucoup de débats au sein de la CDI lors de la préparation de son projet relatif à la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite. Lors de sa session de novembre 1999, certaines délégations ont prié la Commission d'examiner de manière plus approfondie le lien existant entre les contre-mesures et les procédures de règlement pacifique des différends((*)1). Le souci était d'éviter que les contre-mesures ne l'emportent sur les mécanismes de règlement prévus entre les Etats.

Dans son projet final de 2001, la CDI n'a pas expressément prévu cette condition. Ce choix n'est, peut-être, pas anodin. On pense, en effet, que si un Etat décide d'employer des contre-mesures pour amener un autre à composition, c'est parce que, peut-être, ces moyens de règlement n'existent pas ou, lorsqu'ils sont prévus, ne sont pas assez suffisants pour dissuader l'Etat récalcitrant. Les procédures de règlement existent surtout en matière communautaire qui ont ce qu'on appelle « des moyens suffisants à eux-mêmes »((*)2). La Commission a mis seulement l'accent sur l'absence d'une instance du différend devant une juridiction.

B- L'absence d'une saisine d'un organe juridictionnel international

Dans l'article 52 de son projet, la CDI prévoit que « des contre-mesures ne peuvent être prises et, si elles sont déjà prises, doivent être suspendues sans retard indu si le différend est en instance devant une cour ou un tribunal habilité à rendre des décisions obligatoires pour les parties »((*)3). La position de la CDI dans cette disposition est catégorique. En prévoyant cette incompatibilité, l'ordre juridique international et les mécanismes internationaux de règlement des conflits sont, une fois de plus, affirmés et protégés. Le texte pose deux termes : il est interdit, en premier lieu, à un Etat de prendre des contre-mesures contre un autre si une instance du différend qui les oppose est en cours devant une juridiction internationale et, en deuxième lieu, il lui est fait obligation de cesser ses contre-mesures (si elles sont déjà prises) devant l'existence d'une telle procédure.

« A partir du moment où un mécanisme juridictionnel de règlement des litiges est dûment saisi et apte à fonctionner, la faculté de l'Etat s'estimant lésé de réagir unilatéralement se trouve en principe suspendue jusqu'au prononcé de la décision définitive »((*)4). On dit donc que cette saisine aura pour effet d'entraîner « la substitution des pouvoirs des tiers aux compétences normales d'auto-interprétation des Etats »((*)1).

L'incompatibilité des réactions unilatérales avec le déroulement d'une procédure devant une juridiction est affirmée de longue date par la jurisprudence internationale. De nombreuses affaires font état des décisions qui sont rendues pour rappeler le respect de ce principe. Il y a, par exemple, dans les années d'après-guerre l'Affaire de l'Anglo-Iranian Oil Co dans laquelle le Royaume Uni menaça d'intervenir en Iran pour assurer la protection de ses sujets en danger alors que l'affaire était en instance((*)2). Il y a les incidents répétés entre les garde-côtes islandais et les navires britanniques dans l'affaire concernant la Compétence en matière de pêcheries alors que la CIJ était saisie((*)3), la tension qui régnait entre la Grèce et la Turquie lors de l'affaire du Plateau continental de la mer Egée((*)4). La tendance à vouloir sanctionner l'Etat responsable pendant que le différend est sub judice est très fréquente chez les Etats lésés. La pratique actuelle fait que, même face à un moindre conflit, les Etats sanctionnent avant la prononciation d'une décision. C'est le cas, par exemple, du différend frontalier qui opposait le Burkina Faso au Mali, de l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci et dans l'affaire de l'accord relatif aux services aériens entre les Etats-Unis et la France.

Dans toutes ces affaires, la CIJ a rendu des ordonnances conservatoires dans lesquelles elle demandait aux Etats de cesser les rétorsions et les représailles tant que le différend est en cours. Entamer une telle démarche n'aurait pour effet que de remettre en cause le système judiciaire international et ses mécanismes de règlement des différends et porter atteinte à l'autorité de la juridiction saisie. C'est ce qu'a décidé la CIJ à l'égard des Etats-Unis dans l'affaire du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran((*)5).

Il faut noter que cette interdiction est anéantie lorsque l'Etat défaillant ne fait rien pour éviter la sanction. C'est ce qui résulte du paragraphe 3 de l'article 52 du projet de la CDI dont cette disposition « ne s'applique pas si l'Etat responsable ne met pas en oeuvre de bonne foi les procédures de règlement des différends »((*)1). On ne peut pas spéculer en disant que la Commission a ouvert une brèche dans cette exception pour justifier les mesures qu'un Etat aurait prises à l'encontre d'un autre pendant que le différend est en sub judice. Il y a, outre ces conditions, d'autres que l'Etat doit remplir quand il prend des contre-mesures. Ce sont les conditions matérielles.

Section 2

La précision des conditions matérielles

Il s'agit ici de voir qu'est ce qui va engendrer la sanction et comment sera-t-elle. Les conditions formelles sont relatives au fait illicite reproché et à sa réponse. La précision des conditions matérielles des contre-mesures joue un rôle majeur dans le maintien de la paix et la sécurité internationales. Un Etat ne peut pas, un beau jour, décider de sanctionner un autre sans raison valable. C'est pourquoi le fait illicite ou licite générateur des contre-mesures a été précisé de façon à cantonner l'usage de celles-ci dans un cadre précis, légitime et légal (Paragraphe 1). La sanction a été, elle aussi, limitée et précisée dans sa substance comme dans sa durée (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

La précision du fait générateur

Le fait générateur qui va faire l'objet de la contre-mesure a été strictement précisé. Le but est d'éviter que les Etats ne recourent à des contre-mesures entre eux à tort ou à raison face à n'importe quel fait. Pour éviter cet arbitraire, on exige qu'il y ait, au préalable, un fait illicite (A). A défaut d'un fait illicite, l'Etat doit avoir subi un dommage résultant du fait de l'Etat responsable (B).

A- La condition sine qua non d'un fait illicite préalable

Les contre-mesures ne sont pas des réactions anticipées. Ce sont, selon la Commission du droit international, l'ensemble des actes par lesquels un Etat riposte à une mesure prise par un autre Etat et qui seraient illicites dans des circonstances normales. On en déduit alors qu'elles deviennent licites du fait qu'elles répondent à un comportement antérieur lui-même illicite dont l'Etat lésé conteste le bien-fondé((*)1). L'autre déduction qu'on a pu tirer, c'est que les contre-mesures constituent une riposte à un acte préalable pris par un autre Etat. C'est le terme « riposte à un acte préalable » qui nous intéresse ici.

En prenant des contre-mesures contre un autre Etat, l'Etat lésé doit justifier qu'il y a eu une violation du droit international, c'est-à-dire un acte internationalement illicite. C'est cet acte qui, en mettant en jeu la responsabilité internationale de l'Etat défaillant, va déclencher et justifier la contre-mesure. En l'absence de violation d'une obligation internationale par un Etat, les mesures qui seront décidées par l'autre Etat s'estimant lésé ne peuvent être considérées comme des contre-mesures, mais tout simplement des actes contraires au droit international qui engageraient, par la suite, sa responsabilité internationale. Il reste, cependant, à se demander en quoi consiste ce fait illicite.

Le fait internationalement illicite consiste en la violation d'une obligation internationale. En droit, il y a deux sortes d'obligations. Une obligation positive (faire) et une obligation négative (ne pas faire). En droit international, l'obligation de faire peut être, par exemple, celle d'exécuter un contrat, de libérer des ressortissants étrangers, de quitter un territoire envahi.

L'obligation de ne pas faire peut être l'interdiction de s'ingérer dans les affaires intérieures d'un Etat, de violer les droits humains, de ne pas faire la guerre ou tout simplement de ne pas méconnaître les termes d'un accord. Le fait illicite consiste soit en une commission, soit en une action qui viole l'une de ces obligations, toutes deux attribuables à l'Etat responsable.

La condition du fait illicite préalable n'est pas une innovation de la Commission du droit international. Elle relève de la coutume et a également été, maintes fois, affirmée par la jurisprudence. L'exigence de la violation d'une obligation internationale comme condition de la sanction et particulièrement des représailles a été affirmée par la Cour permanente d'arbitrage dans la sentence rendue sur l'affaire des pêcheries de la côte septentrionale de l'Atlantique. Le problème qui était soulevé au niveau de la CDI résidait sur la définition de la faute((*)1). On se demandait comment prouver une faute internationale et quand est ce que le fait d'un Etat peut être considéré comme illicite, entraînant ainsi sa responsabilité internationale. C'est pourquoi à la notion floue de la faute internationale, on a toutefois admis que l'Etat peut se prévaloir du dommage qu'un autre lui aurait fait subir par ses faits et actes, même licites.

B- L'exigence d'une lésion

Une contre-mesure n'est pas seulement une riposte à un acte illicite. Elle peut également répondre à un acte licite, mais qui cause des dommages. On définit, par exemple, la mesure de rétorsion comme une mesure qui, « tout en se tenant dans la limite de la loi, a pour fin un traitement particulièrement défavorable pour l'Etat contre lequel elle est dirigée »((*)2). On dit, en outre, qu' « un Etat à l'égard duquel un autre Etat a pris une mesure qui, tout en étant légale et licite, est discourtoise, rigoureuse, dommageable, peut prendre à son tour, à l'égard de celui-ci, des mesures ayant le même caractère, afin de l'amener à composition »((*)3). Ceci dit qu'à part la présence de violation d'une obligation internationale, une contre-mesure ne peut se justifier que lorsque l'Etat qui les décide a subi un dommage résultant des actes de l'Etat visé par les contre-mesures. En effet, un Etat peut, tout en étant dans la légalité, porter atteinte aux intérêts d'un autre. Il peut lui causer des dommages sans pour autant enfreindre une obligation internationale. C'est lorsque, par exemple, cet Etat interdit l'accès dans son territoire des ressortissants de l'autre Etat, expulse lesdits ressortissants ou tout simplement nationalise ses biens. La contre-mesure aura pour objet de demander la réparation de ce préjudice. L'Etat qui prend la contre-mesure doit donc prouver l'existence d'une lésion, d'un préjudice, prouver qu'on l'a lésé moralement, physiquement ou matériellement.

La lésion ou le préjudice peut être moral, physique ou matériel.  Le dommage moral peut être la détention des citoyens, l'expulsion des diplomates ou la limitation de leur mouvement dans une circonscription déterminée, la prise d'otages((*)1), ou le refus de laisser entrer un aéronef ou navire sur le territoire.

En ce qui concerne le préjudice physique, il peut s'agir de l'assassinat, mais aussi de l'emprisonnement arbitraire des ressortissants. La détention des ressortissants étrangers peut être à la fois un préjudice moral et physique. Le cas de l'assassinat est relativement rare dans la pratique internationale mais pose des problèmes lorsqu'il y a lieu((*)2). Le préjudice matériel est le plus caractéristique et celui qui fait souvent l'objet des rétorsions. Ce préjudice frappe, en général, les biens mobiliers ou immobiliers de l'Etat lésé, ou tout simplement les droits qui portent sur ces biens. C'est, par exemple, la nationalisation des entreprises étrangères, la rupture d'un accord, la pratique des manoeuvres anti-concurrentielles ou tout simplement l'atteinte à une convention qui porte, par exemple, sur des clauses préférentielles.

L'exigence d'une lésion a soulevé le problème de savoir quel Etat peut s'estimer lésé. Ce problème consiste à déterminer si un Etat qui n'a pas subi directement un dommage peut justifier les contre-mesures qu'il prend à l'encontre d'un autre. La réponse a porté à controverse car, dans une affaire récente, on a décidé qu'un Etat indirectement lésé peut prendre des contre-mesures contre l'Etat responsable. La célèbre affaire qui confirma ce principe est l'affaire des bananes. Dans cette affaire, l'Europe acceptait plus facilement les bananes d'Afrique que celle d'Amérique latine. Les Etats-Unis posèrent un recours contre l'Union Européenne aux moyens selon lesquels celle-ci a méconnu les dispositions du GATT. L'Union européenne répondit que les Etats-Unis n'ont aucun intérêt juridique car ils n'ont subi aucun préjudice. L'arbitre chargé de trancher cette affaire répondit que dès que les obligations juridiques se trouvent violées, tous les membres de l'OMC sont juridiquement fondés à faire valoir le respect de l'accord.

On peut dire donc que « le cercle des États habilités à réagir, longtemps cantonné aux États directement lésés dans leurs droits subjectifs, s'étend aujourd'hui à tous les États de la communauté internationale qui, lésés par la violation des droits de l'homme, sont habilités à adopter des mesures »((*)1). Afin de mettre un frein à l'arbitraire des Etats, la Commission a également défini la mesure constitutive de la réponse.

Paragraphe 2

La substance de la réaction

L'acte constitutif d'une contre-mesure est strictement encadré par le projet de la Commission du droit international, par la pratique des Etats mais aussi par la jurisprudence. En un bloc, on oblige un Etat qui prend une contre-mesure de veiller à ce que celle-ci soit proportionnelle à l'acte auquel elle répond (A) et de veiller à ce que la contre-mesure cesse au même moment que cesse le fait reproché (B).

A- L'obligation de proportionnalité

L'article 51 du projet de la Commission du droit international pose le principe de la proportionnalité de la contre-mesure au dommage dû au fait illicite reproché. Celui-ci dispose : « les contre-mesures doivent être proportionnelles au préjudice subi compte tenu de la gravité du fait internationalement illicite et des droits en cause »((*)2). Cette disposition tente de restreindre les abus des Etats qui n'hésiteraient pas à prendre des contre-mesures abusées et disproportionnées à l'acte incriminé. C'est une disposition qui reprend le principe selon lequel la réponse doit être proportionnelle à l'attaque.

Le principe de la proportionnalité a été maintes fois affirmé dans la pratique internationale. L'Institut du droit international affirma à travers une résolution que dans l'exercice des représailles, l'Etat lésé doit « proportionner la contrainte employée à la gravité de l'acte dénoncé comme illicite et à l'importance du dommage subi »((*)3). Dans l'affaire de l'incident de Naulilaa, le tribunal arbitral avait qualifié d'illicites les représailles allemandes car « hors de toute proportion avec l'acte qui les a motivées »((*)4).

Dans une autre affaire, la jurisprudence a rappelé le respect de cette obligation. C'est l'affaire de l'accord relatif aux services aériens entre la France et les Etats-Unis dans laquelle le tribunal énonça qu' « on ne saurait considérer que les mesures qui ont été l'objet de l'action des Etats-Unis aient été clairement disproportionnées à celles prises par la France »((*)1).

Le principe de la proportionnalité des contre-mesures à l'acte contesté ou au dommage est également le souci des Etats. Ces derniers veillent à son respect et reconnaissent en lui une condition substantielle du recours à des contre-mesures. De nombreux Etats affirment que les contre-mesures doivent être proportionnées « au mal causé »((*)2) par le fait illicite. Au cours de la rédaction du projet de la CDI, certains Etats ont insisté sur ce point et critiquaient l'absence d'une « disproportion manifeste »((*)3). Il en a été ainsi pour la doctrine((*)4). Sans influence, la CDI n'a pas pris en compte les critiques, mais inséra tout simplement que la proportionnalité se mesure « au préjudice subi, compte tenu de la gravité du fait internationalement illicite et des droits en cause ». L'autre coup porté à la contre-mesure est l'obligation de cessation.

B- L'obligation de cessation après la disparition du fait litigieux

L'obligation de cessation est une obligation formelle. Elle s'impose, selon la CDI, à l'Etat qui a pris des contre-mesures, d'en cesser au cas où l'Etat responsable s'est acquitté de ses obligations. L'article 53 du projet dispose qu'« il doit être mis fin aux contre-mesures dès que l'Etat responsable s'est acquitté des obligations qui lui incombent à raison du fait internationalement illicite conformément à la deuxième partie ».

L'obligation de cessation est une obligation qui s'applique à toutes les contre-mesures, quelque soient qu'elles répondent à des actes licites ou illicites. Cela s'explique. L'Etat qui prend des contre-mesures doit cesser sa sanction dès lors que l'acte reproché ou le dommage a cessé. La disparition de l'acte incriminé entraîne en conséquence celle des contre-mesures. Lorsque l'Etat lésé avait suspendu le traité ou avait délimité le déplacement des diplomates de l'autre Etat sur son territoire, la cessation des actes reprochés doit entraîner le rétablissement des situations en question, c'est-à-dire la reprise de l'application du traité et la redéfinition du droit de circuler des diplomates. La cessation des contre-mesures après la disparition du fait reproché a été posée depuis longtemps par l'Institut du droit international.

Dans sa résolution sur les représailles, l'Institut affirmait que l'Etat lésé doit « cesser les représailles aussitôt qu'il aura obtenu réparation ». Se pose, toutefois, le problème consistant à déterminer le moment précis de la cessation des contre-mesures. Autrement dit, quand est-ce que les contre-mesures doivent-elles prendre fin ? Cela dépend de la nature de l'acte illicite. On dit que « si le fait illicite est instantané, les représailles cesseront au plus tard au moment où l'Etat auteur accordera une réparation adéquate »((*)1).

Si « le fait illicite est composé d'une série d'actions ou d'omissions, les représailles prendront fin lorsque l'Etat défaillant offrira des garanties suffisantes quant à la non-répétition des agissements incriminés »((*)2). On se demande cependant comment faire lorsque le fait illicite est continu. Dans ce genre de situation, c'est-à-dire si le fait illicite est continu, « les représailles se termineront au moment où l'Etat auteur s'acquittera de son obligation de mettre fin au fait illicite »((*)3).

Conclusion du chapitre 1

La limitation de la substance des contre-mesures répond bien à leur finalité : la stabilité de l'ordre juridique international. La CDI a veillé à ce que les contre-mesures ne soient pas cet instrument arbitraire aux mains des Etats telles qu'on les a toujours qualifiées. La précision des conditions de recours rend leur usage difficile à tel point qu'elles ne puissent nuire à l'ordre juridique international. D'abord leur forme, puis leur fond, tout a été passé en revue. Les nombreuses interdictions imposées par le projet ont toutes le même souci de la protection de l'ordre juridique international contre l'arbitraire des Etats. C'est ce même souci qui a animé la CDI à limiter également leur usage en canalisant les contre-mesures dans un usage bien précis.

Chapitre 2

LES LIMITES LÉGALES DES CONTRE-MESURES

L'usage des contre-mesures a été tracé et délimité pour un but précis : la sanction de l'illicite en droit international. La Commission du droit international, la Charte des Nations Unies, les Conventions de Vienne sur le droit des traités de 1961 et 1963, la doctrine et la jurisprudence internationales ont toutes prévu des mécanismes qui ont pour finalité de maintenir la stabilité de l'ordre juridique international.

Ce souci s'est manifesté également dans la réglementation des contre-mesures. Soumettre le recours à ces dernières à un respect des conditions formelles et matérielles est certes dissuasif mais pas tellement convaincant pour empêcher les Etats de les détourner à des fins politiques. La canalisation de leur usage s'en est donc imposée.

La canalisation des contre-mesures revient en effet à délimiter l'objet et la nature des contre-mesures et à prohiber carrément l'usage de certains types de contre-mesures, surtout en temps de paix. C'est une avancée importante dans le droit des conflits internationaux dans la mesure où on pose de vrais contrepoids aux contre-mesures abusives, aux contre-mesures disproportionnées et aux contre-mesures illégales et illégitimes. Une question cruciale mérite d'être posée. La canalisation de l'usage des contre-mesures à des fins précises constitue-t-elle véritablement une garantie de l'ordre public international ? Y a-t-il réellement un contrepoids au caractère « belliqueux » des contre-mesures ? C'est à ces questions que nous essayerons de répondre dans ce chapitre.

On aura à montrer que les contre-mesures sont réduites à un formalisme draconien qui limite de plus en plus leur recours par les Etats. Disons, une fois de plus, qu'elles ne constituent pas une remise en cause du droit international public. Cette affirmation découle de l'analyse des différentes limites apportées aux contre-mesures (Section 1) et de l'interdiction d'user de certaines contre-mesures (Section 2) dans les relations inter-étatiques.

Section 1

Les limites apportées à la substance des contre-mesures

La substance des contre-mesures a fait l'objet d'une limitation minutieuse. L'objet a été d'encadrer véritablement les contre-mesures, de contourner l'arbitraire des Etats et de bannir carrément l'usage de la menace et de la force dans les relations internationales. Les limites apportées à la substance des contre-mesures consistent à interdire que les Etats ne s'adonnent à un règlement de comptes, une guerre illimitée de contre-mesures ou qu'ils ne prennent des contre-mesures afin d'arriver à d'autres fins. C'est pourquoi on a tenu à préciser, d'une part, leur objet (Paragraphe 1) et d'autre part leur nature (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

La limitation de l'objet des contre-mesures

Ces limites, posées par l'article 49 du projet de la C.D.I., consistent en plusieurs interdictions et visent à réduire, sinon empêcher l'usage abusif et pérenne des contre-mesures par les Etats. Il s'agit de ne pas diriger les contre-mesures à d'autres finalités (A). L'autre limite est celle qui oblige l'Etat à prendre des contre-mesures tout en gardant la porte ouverte à la reprise des obligations par l'autre partie et savoir les limiter dans le temps (B).

A- L'interdiction de détourner les contre-mesures à d'autres fins

On interdit à l'Etat auteur des contre-mesures de détourner leur but à d'autres fins que celles ayant pour objet l'obligation de cessation d'un fait internationalement illicite ou la réparation d'un dommage. L'alinéa 1er de cet article dispose : « l'Etat lésé ne peut prendre des contre-mesures à l'encontre de l'Etat responsable du fait internationalement illicite que pour amener cet Etat à s'acquitter des obligations qui lui incombent... ».

La CDI a posé ici un véritable frein à l'arbitraire des Etats. Il résulte de ce texte qu'un Etat ne peut prendre des contre-mesures contre un autre que dans le but de l'obliger à « s'acquitter de ses obligations » qu'il a, auparavant, violées. Le terme « s'acquitter de ses obligations » signifie, tout autant le respect des obligations découlant du droit international général, que celles découlant du droit international conventionnel, c'est-à-dire des conventions entre Etats.

Le premier vise la cessation des actes constituant une violation du droit international public, le second la réparation d'un dommage résultant d'un comportement préjudiciable de la part de l'Etat à l'égard d'un autre. Un Etat ne peut être visé par une sanction telle qu'elle a été présentée ci-dessus que s'il a engagé sa responsabilité internationale. En d'autres termes, l'Etat en question doit avoir violé une norme du droit international général causant ainsi un dommage certain et réel à d'autres Etats.

C'est une idée remarquable de la part de la Commission du droit international d'autant plus que cette interdiction limite l'inégalité de fait qu'on reproche aux contre-mesures. Un Etat puissant ne pourrait se prévaloir des contre-mesures pour justifier une sanction qu'il décide contre un autre Etat faible si ladite sanction sort du cadre général d'utilisation des contre-mesures. Il y a ici une volonté de la Commission de vouloir éviter l'usage abusé des contre-mesures par certains Etats qui voudraient en faire leur instrument de politique dissuasive dans les relations inter-étatiques.

Cette contrainte n'est pas une innovation de la Commission du droit international. Elle date de l'entre-deux guerres. Dans sa résolution sur le régime des représailles en temps de paix adoptée en 1934, l'Institut de droit international a souligné que l'Etat doit « ne pas détourner les représailles du but qui en a déterminé initialement l'usage »((*)1). C'est une règle qui vaut mutatis mutandis pour toutes les réactions à l'illicite, à fortiori les contre-mesures. Détourner l'objet des contre-mesures a toujours été interdit par le droit international((*)2) et est sanctionnée par le juge international((*)3). La reprise de ce principe par le CDI dans son projet sur la responsabilité des Etats démontre clairement son ambition à vouloir réglementer l'usage des contre-mesures dans un souci de protéger l'ordre juridique international. C'est ce même souci qu'on retrouve dans la limitation de la durée et la consistance des contre-mesures.

B- La limitation de la durée et la cohérence des contre-mesures

L'autre limite apportée par ce même article est celle posée par son deuxième alinéa. Ce dernier dispose : « les contre-mesures sont limitées à l'inexécution temporaire d'obligations internationales de l'Etat prenant les mesures envers l'Etat responsable ». Cette disposition pose une limite temporaire, c'est-à-dire de la durée des contre-mesures. Elle vise à limiter l'usage des contre-mesures dans le temps, elle interdit la prolongation des contre-mesures au delà de la cessation du fait illicite.

De façon concrète, lorsqu'un Etat décide de sanctionner un autre par des contre-mesures, il ne doit pas pérenniser cette sanction si l'Etat visé cesse les faits reprochés. Cette disposition a été affirmée sinon reprise du juge international dans l'affaire Naulilaa((*)1). La limitation de la durée de la sanction constitutive d'une contre-mesure vise à éviter une conséquence néfaste qui serait celle de maintenir l'Etat responsable en état d'assujettissement ou celle de prolonger les effets de la sanction dans le temps, les rendant ainsi irréversibles. Même si les effets du fait illicite sont continus dans le temps, leur cessation oblige également la cessation de la contre-mesure.

Ce garde-fou doit cependant être relativisé. On reconnaît un droit à un Etat de persister dans ses contre-mesures lorsque l'Etat défaillant persiste, quant à lui, sur l'irrespect de ses obligations. Tant que la violation n'a pas cessé, la contre-mesure doit être maintenue. Il résulte donc qu'un Etat peut maintenir ses contre-mesures tant que l'Etat défaillant poursuit les faits incriminés ou n'accepte pas de réparer les préjudices subis, résultant de ses actes.

Il y a, enfin,: une dernière limite apportée à l'objet des contre-mesures par ce même article. C'est celle posée par son alinéa 3 qui interdit en quelque sorte les contre-mesures irréversibles. Cet alinéa dispose en effet que « les contre-mesures doivent, autant que possible, être prises d'une manière qui permette la reprise de l'exécution des obligations en question ». Il vise une seule chose : limiter l'aggravation de la situation déjà créée par l'autre partie défaillante.

On interdit l'Etat qui prend des contre-mesures de durcir sa sanction d'une manière à rompre manifestement l'équilibre international. Les contre-mesures doivent être provisoires et réversibles. C'est une autre obligation qui résulte de la disposition précédente. La réversibilité des représailles est en « conformité avec leur finalité qui est en principe la coercition »((*)1).

Il résulte donc que des contre-mesures qui ne permettent pas à l'Etat défaillant de s'acquitter de ses obligations constituent une violation du droit international, car elles sortent du cadre de la finalité des contre-mesures. On peut citer, par exemple, le cas où l'Etat lésé gèle les avoirs de l'Etat responsable à l'étranger et lui demande de s'acquitter de ses obligations en réparant le dommage. C'est également le cas d'un Etat qui, en prenant des contre-mesures, ne donne pas une marge de manoeuvre à l'autre Etat de pouvoir s'acquitter de ses obligations. Cette limite se rapproche plus précisément de l'obligation de proportionnalité. On interdit également aux Etats de prendre certaines contre-mesures qui ont une nature illicite ou de les diriger contre un Etat tiers, différent de l'Etat défaillant.

Paragraphe 2

Limites apportées à la nature de certaines contre-mesures

Deux sortes de contre-mesures sont généralement interdites : les représailles armées (A) et les contre-mesures dirigées contre un Etat tiers, neutre au conflit (B).

A- Les représailles armées

Les représailles armées ne sont pas admises en tant que contre-mesures par le droit international. Elles sortent largement du contexte pacifique des contre-mesures qui, malgré leur aspect illicite et unilatéral, ne font pas usage de la force armée((*)2). Les contre-mesures armées ou, plutôt les représailles armées, ne sont prises qu'en réponse à des actes similaires. Elles ne constituent que la réponse à des actes de même nature d'un Etat tiers qui sont, eux-mêmes, illicites au regard du droit international. Autrement dit, c'est un exemple de la « loi du Talion » dans l'ordre international »((*)3).

L'usage des représailles armées est soumis à des conditions très précises. Dans l'affaire Naulilaa tranchée par la sentence arbitrale du 31 juillet 1928 entre le Portugal et l'Allemagne, le tribunal arbitral condamna les actions allemandes en estimant qu'elles étaient illicites au regard du droit international car ne remplissant pas les conditions des représailles. Les représailles armées sont interdites en droit international car elles sont incompatibles avec l'interdiction du « recours à la menace ou à l'emploi de la force » posée par l'article 2, § 4 de la Charte des Nations Unies.

L'Assemblée générale des Nations Unies a, elle aussi, condamné de telles représailles comme réponse adéquate et licite à une violation du droit international. Cette interdiction s'explique du fait que, souvent, des Etats dits forts les utilisent abusivement contre d'autres Etats faibles. C'est, par exemple, le cas des Etats-Unis d'Amérique contre le Mexique en avril 1914, et d'Israël contre le Liban en décembre 1968((*)1). Récemment, dans un avis consultatif, la Cour internationale de justice reconnut l'illégalité des représailles armées en temps de paix((*)2).

L'étude des représailles armées relève cependant d'une étude spéciale, qui est celle de l'usage de la force dans les relations internationales. La seconde catégorie des contre-mesures interdites, ce sont les contre-mesures qui visent des Etats tiers. En effet, quelque soit la gravité du fait, on interdit à l'Etat qui prend les contre-mesures de diriger sa sanction contre un Etat qui ne lui a causé aucun préjudice.

B- L'interdiction de prendre des contre-mesures contre des Etats tiers

C'est une interdiction qui vise à protéger les Etats qui seraient liés par un traité d'amitié et dont l'un serait la cible de contre-mesures pour ses faits et actes portant préjudice à un autre. Pratiquement, un Etat qui se sent lésé par un autre et qui décide de le sanctionner par des contre-mesures ne doit sanctionner que celui-ci, et non d'autres Etats qui sont liés à ce dernier par amitié, par contrat. L'interdiction de prendre un Etat tiers comme cible des contre-mesures est affirmée de longue date par la doctrine((*)1).

Elle a, par ailleurs, été posée par la jurisprudence internationale à l'occasion de plusieurs affaires. Ce fut d'abord par la sentence arbitrale rendue le 30 juin 1930 dans l'affaire Cysne, dans laquelle le juge arbitral a répondu que les « les représailles ne sont admissibles que contre l'Etat provocateur »((*)2). Une autre affaire confirma cette ancienne jurisprudence, c'est l'affaire Gromyko en 1983. Le sieur Gromyko, ministre des Affaires étrangères de l'Union soviétique de l'époque, devait se rendre aux Etats-Unis avec sa délégation pour participer à la 38e session de l'Assemblée générale des Nations Unies. Il se vit refuser l'autorisation d'atterrir à New York et New Jersey par les gouverneurs de ces Etats, en guise de réprobation de l'attaque militaire soviétique contre un Boeing sud-coréen en 1983. L'ONU condamna ces actes en estimant qu'en refusant au ministre soviétique le droit d'entrer dans la circonscription administrative de New York, les Etats-Unis n'ont pas sanctionné seulement l'Union soviétique mais un autre sujet tiers, à savoir l'Organisation elle-même, en méconnaissant l'accord de siège signé entre l'ONU et les Etats-Unis en 1947((*)3).

Il y a cependant une problématique cruciale que nous nous devons de souligner. C'est le pouvoir donné aux Etats tiers de prendre des contre-mesures contre un Etat qui viole le droit international. Si on interdit à un Etat de sanctionner un Etat tiers au conflit, celui-ci a le droit de sanctionner cet Etat même si le préjudice qu'il a fait subir ne l'a pas touché. Ce droit est de plus en plus reconnu aux Etats. Il résulte soit du souci de protéger les dispositions obligatoires du droit international, soit d'une solidarité entre Etats. La violation des droits de l'Homme peut, par exemple, justifier la sanction d'un Etat par d'autres Etats qui ne sont concernés par cette violation mais qui décident tout de même de sanctionner une telle violation((*)4). L'atteinte aux droits d'un Etat membre d'une alliance peut également expliquer les contre-mesures décidées par cette alliance contre l'Etat défaillant même s'il n'a porté atteinte qu'aux intérêts d'un seul Etat((*)1).

A part la limitation de l'objet et de la nature de certaines contre-mesures, on interdit également aux Etats de prendre des contre-mesures dans certains domaines du droit international. Ce sont, en effet, les contre-mesures dites illicites.

Section 2

Les contre-mesures illicites

Les contre-mesures illicites sont ces contre-mesures qu'à aucun moment un Etat ne peut se déroger du droit international et les prendre pour sanctionner un autre. Les contre-mesures sont des sanctions unilatérales, certes, mais elles sont strictement réglementées dans cet aspect. L'interdiction de l'usage de ces contre-mesures en droit international répond à un triple souci. C'est la protection des obligations erga omnes du droit international, la protection des droits de l'homme et la protection des relations inter-étatiques résultant de certaines obligations conventionnelles.

Sont interdites en droit international public, les contre-mesures portant atteinte à certaines absolues du droit international public (Paragraphe 1) et celles portant atteinte à certaines obligations conventionnelles (Paragraphe 2).

Paragraphe 1

Les contre-mesures portant atteinte aux obligations absolues du droit international

Certaines contre-mesures sont en effet interdites. Cette interdiction découle du projet de la C.D.I. mais également elle est posée depuis longtemps par le droit international public. On interdit catégoriquement aux Etats qui prennent des contre-mesures de porter atteinte aux dispositions du droit international général (A), mais également du droit international humanitaire (B).

A- Le respect des obligations découlant du jus cogens

Les normes absolues du droit international général sont des normes qu'aucun Etat ne peut s'en déroger dans l'exercice de son droit de recourir aux contre-mesures. C'est ce qu'on appelle l'applicabilité du jus cogens.

Pratiquement, un Etat lésé par un autre a le droit, certes, de décider des contre-mesures contre ce dernier. Mais dans l'exercice de ce droit, lorsque, par exemple, il décide de suspendre le traité ou la convention qui les lie, il doit prendre en compte l'existence des règles du droit international public qui sont inviolables par leur nature. C'est une interdiction posée par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1963((*)1). Prenons l'exemple d'un Etat A qui porterait atteinte aux intérêts d'un Etat B avec qui il est lié par un traité bilatéral ou multilatéral. Lorsque l'Etat B, pour sanctionner l'Etat A, décide de suspendre leur traité, il doit le faire dans le respect des normes du jus cogens, même lorsque l'Etat A a été lésé par une violation substantielle du droit international par l'autre Etat. Il ne doit pas suspendre l'application dudit traité lorsque celui-ci contient des règles absolues du droit international général.

Il n'y a aucune précision quant aux dispositions qu'on peut qualifier de jus cogens. C'est une notion qui a fait l'objet de beaucoup de débats sur la scène internationale. Ces présents développements n'ont pas pour objet d'éclaircir cette notion qui, rappelons-le, a fait l'objet de nombreux arguments dont on connaît les positions des uns comme des autres((*)2).

Dans son projet sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite, la CDI précise dans l'article 50 "les obligations ne pouvant être affectées par des contre-mesures". Cet article constitué de deux alinéas, interdit carrément les contre-mesures portant atteinte à l'ordre juridique international((*)1). A travers ce texte, on relève bien le souci de la Commission qui a voulu paralyser l'usage abusif des contre-mesures par les Etats.

Le Commission leur reconnaît, certes, le droit de recourir aux contre-mesures mais aussi l'obligation de veiller au respect du droit international, au maintien de l'équilibre de l'ordre public international. Ce souci s'explique, en général, par celui de vouloir protéger les droits de l'homme.

B- L'interdiction de porter atteinte aux droits de l'homme

Les contre-mesures ne doivent pas porter atteinte au droit international humanitaire, aux droits humains. L'Etat qui prend des contre-mesures doit penser au respect des droits de l'homme. Les droits humains, d'un côté, sont une justification de l'adoption des contre-mesures par certains Etats.

Le texte sus-cité de la CDI dispose : « les contre-mesures ne peuvent porter atteinte... aux obligations concernant la protection des droits fondamentaux de l'homme, aux obligations de caractère humanitaire excluant les représailles... ». En dehors même de ce projet, « le principe selon lequel les obligations conventionnelles ou coutumières concernant les droits de l'homme ne sont pas susceptibles d'être transgressées par voie de contre-mesures est bien ancré depuis longtemps en droit international contemporain »((*)2).

Dans sa résolution sur le régime des représailles en temps de paix, l'Institut de droit international a affirmé dans l'article 6 que « dans l'exercice des représailles, l'Etat devait limiter leurs effets à l'Etat contre qui elles sont dirigées, en respectant... les droits des particuliers... et s'abstenir de toute mesure de rigueur qui serait contraire aux lois de l'humanité... »((*)1). La protection des droits de l'Homme a expliqué plusieurs mesures prises par les Etats-Unis qui s'estiment "investis d'une mission de protection de ces droits"((*)2).

Le dernier aspect de cette interdiction est qu'on interdit aux Etats de prendre des contre-mesures entraînant la violation des droits humains en réponse à des mesures similaires de la part d'un autre Etat. On interdit la réciprocité des contre-mesures si elles ont pour objet l'atteinte à ces droits. On dit que la protection des droits fondamentaux de l'homme ne relève pas d'une obligation conventionnelle et synallagmatique, elle est une obligation générale découlant du jus cogens. C'est ce qui fait que leur violation par une partie n'explique pas une autre transgression par une autre((*)3).

Paragraphe 2

Les contre-mesures portant atteinte à certaines obligations conventionnelles

On interdit aux Etats de porter atteinte à certaines obligations conventionnelles lorsqu'ils décident de recourir à des contre-mesures. Les obligations découlant du droit diplomatique (A) et celles découlant du droit communautaire (B) ne peuvent faire l'objet d'aucune violation par des contre-mesures.

A- L'interdiction de porter atteinte au droit diplomatique

Dans le projet de la CDI, l'article 50 qui porte sur les « obligations ne pouvant être affectées par des contre-mesures », dispose dans son alinéa 2 que « l'Etat qui décide de prendre des contre-mesures n'est pas dégagé des obligations qui lui incombent de respecter l'inviolabilité des agents, locaux, archives et documents diplomatiques et consulaires. »((*)4).

Cette disposition reprend la jurisprudence de la Cour internationale de justice sur l'affaire du personnel diplomatique américain à Téhéran((*)1). On interdit aux Etats de prendre des contre-mesures qui auraient pour effet de déstabiliser ou de porter gravement atteinte aux obligations diplomatiques à moins que l'acte faisant l'objet de la contre-mesure ne soit, lui-même, une violation desdites obligations. Pratiquement cela veut dire que si un Etat veut sanctionner un autre par des contre-mesures, il doit tenir compte des règles régissant le droit diplomatique posées par la Convention de Vienne de 1961 sur le droit des traités. La CIJ a décidé dans son arrêt que le droit diplomatique « constitue un régime se suffisant à lui-même » en ce sens qu'il prévoit les sanctions à prendre en cas de violation par une partie. La Cour a déclaré que le « droit diplomatique, lui-même, fournit les moyens de défense nécessaires ainsi que les sanctions contre les activités illicites des membres des missions diplomatiques et consulaires((*)2).

Il est difficile de qualifier certaines pratiques de violation du droit diplomatique. Par exemple, l'expulsion des agents diplomatiques et la restriction à leur liberté de déplacement ne constituent pas des atteintes au droit diplomatique((*)3), pendant que d'autres actes le sont. En effet, la détention d'un diplomate ou un d'un agent de mission bénéficiant de l'immunité diplomatique constitue une violation dudit droit tel que l'a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies dans une lettre qu'il adressait à la Côte d'Ivoire suite à la détention par le gouvernement ivoirien d'agents d'une mission guinéenne en provenance d'une assemblée générale à New York((*)4).

L'interdiction de porter atteinte au droit diplomatique ne pèse pas que sur le personnel. Elle porte aussi sur les biens. C'est le cas des locaux (inviolabilité des locaux diplomatiques), des archives ou autres documents. L'article 22 de la Convention de Vienne de 1961 pose une interdiction quasi absolue en stipulant : « les archives et documents de la mission sont inviolables à tout moment et quelque lieu qu'ils se trouvent ». C'est une règle impérative et n'admettant aucune dérogation car, même en cas de rupture des relations diplomatiques, de rappel temporaire ou définitif de la mission, « l'Etat accréditaire est tenu, même en cas de conflit armé, de respecter et de protéger les locaux de la mission, ainsi que ses biens et ses archives. »((*)1).

L'interdiction de déstabiliser les relations diplomatiques vise à maintenir en équilibre les relations inter-étatiques dans la société internationale. C'est le même souci qui explique l'interdiction de recourir aux contre-mesures dans les relations communautaires.

B- L'interdiction de porter atteinte au droit communautaire

L'interdiction de prendre des contre-mesures à l'encontre du droit humanitaire, du droit diplomatique ou du jus cogens, en général, s'explique sur l'existence d'une norme supérieure internationale au regard de laquelle la contre-mesure va être confrontée. Il n'en est pas le cas dans le droit communautaire.

« La mise à l'écart des contre-mesures portant atteinte aux obligations communautaires est, en revanche, d'origine conventionnelle »((*)2). Si le droit international permet à ses sujets de recourir facilement à des contre-mesures, le droit communautaire prévoit lui-même l'interdiction aux Etats membres de prendre des contre-mesures entre eux. On dit que les relations intra-communautaires sont des relations initialement de réciprocité, tel que l'a déclaré la Cour de justice de la communauté européenne qui précisa que « l'ordre juridique communautaire a été accepté au départ sur une base de réciprocité. »((*)3). Ceci est compréhensif, en ce sens que les obligations communautaires tendent à promouvoir et protéger des intérêts collectifs, d'où leur qualification d'obligations solidaires. Chaque membre partie ou adhérent est soumis en conséquence à cette obligation de sanction réciproque par des contre-mesures.

L'interdiction de recourir à des contre-mesures entre Etats parties à une convention communautaire est absolue. Elle interdit même le recours d'un Etat membre à des contre-mesures face à l'inobservation de ses obligations par un autre. La convention communautaire prévoit, elle-même, les mécanismes de règlement des différends entre Etats membres et les sanctions possibles en cas de non-respect de ses obligations par un Etat. La Cour de Justice des Communautés européennes a eu à le rappeler dans son arrêt du 13 novembre 1964 rendu à propos d'un recours de la Commission contre le Royaume de Belgique et le Grand Duché de Luxembourg.

Dans cette affaire, les deux gouvernements ont invoqué l'inexécution par le Conseil de l'Europe des obligations lui incombant en vertu du droit communautaire. En rejetant cet argument, la Cour a déclaré que « "le traité [CEE] ne se borne pas à créer des obligations réciproques entre les différents sujets auxquels il s'applique, mais établit un ordre juridique nouveau qui règle les pouvoirs, droits et obligations desdits sujets ainsi que les procédures nécessaires pour faire constater et sanctionner toute violation éventuelle " et "que, partant, en dehors des cas expressément prévus, l'économie du traité comporte interdiction pour les Etats membres de se faire justice eux-mêmes" »((*)1).

Ce n'est pas la seule affaire où la Cour européenne a eu à sanctionner un Etat contrevenant aux obligations diplomatiques en prenant des contre-mesures contre un autre. Elle a eu à le rappeler dans plusieurs affaires((*)2).

Dans son projet relatif à la responsabilité des Etats pour fait internationalement reconnu illicite, la CDI n'a prévu aucune disposition interdisant le recours aux contre-mesures entre sujets membres d'une même communauté. Les traités communautaires prévoient expressément eux-mêmes, l'interdiction formelle de prendre des contre-mesures entre Etats membres car ils prévoient des mécanismes parallèles. Le souci est de bannir totalement et catégoriquement les réactions unilatérales.

« Les réactions unilatérales dans les relations intra-communautaires provoqueraient un cloisonnement des marchés, aboutiraient à des détournements de trafic et à des distorsions de concurrence, incompatibles avec l'idée d'un même Marché commun. »((*)1).

Conclusion du chapitre 2

En interdisant l'usage de certains types de contre-mesures et dans certaines circonstances, la CDI a porté un coup à l'arbitraire des Etats. Elle a créé par cette occasion un vrai dispositif qui met en protection l'ordre juridique international. Les Etats sont limités dans l'usage des contre-mesures. Les différentes conditions posées par le projet de la CDI et les différents textes internationaux l'attestent clairement. La limitation de leur objet et de leur nature, l'interdiction formelle de porter atteinte au jus cogens, aux droits de l'homme et aux obligations diplomatiques et communautaires, ont fait le contour des relations internationales.

La canalisation des contre-mesures dans un usage précis et restreint affirme une fois de plus que ces dernières sont un outil efficace dans la recherche de la stabilité de l'ordre juridique international.

CONCLUSION 2ème PARTIE

La tendance des Etats à abuser de leurs prérogatives pour protéger leurs intérêts est une évidence. Il est donc dans la nature des Etats à vouloir utiliser les contre-mesures dans ce but, encourant ainsi le risque de glisser dans l'illégalité. Le risque de perversion des contre-mesures en un instrument dangereux à la disposition des Etats économiquement et militairement puissants est réel. C'est pourquoi leur réglementation a paru nécessaire pour éviter des abus. Cette réglementation a pour but essentiel de maintenir l'ordre public international et d'équilibrer les relations internationales.

La précision des conditions de recours aux contre-mesures et la précision de leurs limites légales vont dans ce sens. En traçant soigneusement les lignes de conduite c'est-à-dire les conditions de recours aux contre-mesures par les Etats, tant dans le fond que dans la forme, en imposant aux Etats de nombreuses interdictions et en leur précisant clairement les procédures à suivre sous peine de tomber dans l'illégalité, la réglementation des contre-mesures a servi de base à l'équilibre de l'ordre juridique international. Aucun Etat ne peut et ne doit recourir à des contre-mesures sans se conformer aux conditions clairement énoncées de leur usage ; aucun Etat ne peut et ne doit ignorer ces conditions.

Les contre-mesures permettent de justifier le comportement illégal d'un Etat mais dans une bonne finalité et avec bonne foi : celle de combattre une autre illégalité et de rétablir l'ordre rompu par un Etat sans avoir à recourir à la force. On peut dire, enfin, que la réglementation des contre-mesures est bénéfique au maintien de l'équilibre de l'ordre juridique international.

CONCLUSION GENERALE

Quel rôle jouent les contre-mesures dans le droit international public ? Telle est la question à laquelle nous sommes attaché à répondre tout au long de la présente étude.

La question n'est pas dénuée de controverses. Les nombreuses contributions des experts qui ont eu à intervenir sur cette question depuis l'inclusion dans un projet de la Commission du Droit International, d'un régime juridique relatif aux contre-mesures, le confirment indéniablement. Un certain nombre de membres de la communauté internationale ont estimé que celles-ci ne sauraient trouver place dans le droit international car elles sont le reflet d'une justice privée, arbitraire et inégalitaire, donc dangereuse. Mais si l'on se tient à la nature et la fonction des contre-mesures, nous estimons que ce serait faire preuve d'un pessimisme faussement béat d'affirmer tel propos aujourd'hui.

Les contre-mesures sont ce qu'elles sont mais nous devons concéder qu'elles sont d'abord pacifiques et ensuite respectueuses des principes fondamentaux du droit international public : la paix et l'égalité entre les Etats. Les rétorsions prises par des Etats faibles contre des superpuissances l'ont affirmé.

Quant au souci de leur finalité dite belliqueuse, on a vu que les contre-mesures ont pour but de faire cesser une illégalité internationale, de faire réparer le mal qui a pu découler de cette violation du droit international. Les contre-mesures sont donc une réponse à un acte internationalement illicite. Parce que, plutôt que d'infliger des sanctions punitives, il s'agit d'exercer des pressions afin de faire cesser la violation des droits de l'homme, par exemple, et de rétablir la légalité et le respect des obligations internationales. Certes, le risque de débordement n'est pas à ignorer. Il est réel mais amoindri par la réglementation des contre-mesures.

Après quarante années de travaux, la Commission du droit international des Nations Unies a achevé en 2001 son examen de la question de la responsabilité internationale des Etats, et par là, celle des contre-mesures. S'il est possible pour chaque État de réagir à la violation d'obligation internationale par un autre État en adoptant des contre-mesures, cette possibilité est soumise sous réserve de respecter plusieurs conditions posées par ce projet, mais également par le droit international public d'une manière générale. Le but est d'empêcher qu'en répondant à un fait internationalement illicite, les contre-mesures ne produisent des effets en dehors de la sphère du droit. C'est pourquoi ces conditions sont suffisamment strictes pour décourager le recours abusif des contre-mesures, en les limitant dans le temps, dans l'espace, dans l'objet et dans leur substance.

A notre humble avis, les contre-mesures sont un meilleur outil pour la régulation des relations internationales. Bien encadrées par le droit international public, elles contribuent également à son développement et son but, l'équilibre de l'ordre juridique international, pour un monde meilleur avec des relations internationales stables et pacifiques.

Mais, si l'on sait que les résolutions de la Commission du Droit International n'ont qu'une valeur incitative, et comme jusqu'à lors on n'a pas abouti à la conclusion d'un traité international portant sur la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite, peut-on dire que ce régime juridique est assez effectif ? L'introduction des contre-mesures dans ce projet suffit-il à réduire les risques qu'elles présentent à l'égard du droit international, ou faut-il créer une « commission des contre-mesures » comme l'a préconisé Calero Rodrigues ? Nous ne spéculons pas, seul l'avenir nous le dira.

TABLE DES MATIERES

____________________

Page

Sommaire ........................................................................................................................... 03

Introduction ............................................................................................................................... 08

1ère Partie :

Intérêt de l'introduction des contre-mesures en droit international public ................. 17

Chapitre 1èr :

Des mesures de sanctions unilatérales conformes au droit international .................... 20

Sect. 1 : Une conformité reposant sur le respect des principes

fondamentaux du droit international public ........................................................ 21

Par. 1 : Le respect du principe de non usage de la force ................................................. 21

A : Les mesures de rétorsion et de représailles .................................................................. 22

B : Les autres types de sanctions économiques et financières ........................................ 24

Par. 2 : Le respect du principe de l'égalité et de la souveraineté des Etats ................. 25

A : Une égalité de droit et de fait reconnue aux Etats ....................................................... 26

B : Le pouvoir de qualification unilatérale du fait illicite et sa sanction ........................ 28

Sect. 2 : Une conformité reposant sur l'intention de l'Etat

auteur d'une contre-mesure ..................................................................................... 28

Par. 1 : La philosophie principale du recours aux contre-mesures .................................. 29

A : Le recours aux contre-mesures à fin de négociation .................................................... 29

B : Le recours aux contre-mesures à fin de dissuasion ....................................................... 30

Par. 2 : Le fondement de la légitimité et la légalité des contre-mesures ......... ............. 32

A : La légitimité de chaque Etat à protéger lui-même ses intérêts ................................. 32

B : Le fondement de la licéité des contre-mesures ............................................................. 33

Chapitre 2 :

Un outil de régulation des relations internationales ............................................................. 35

Sect. 1 : Les Etats, gendarmes du droit international ......................................................... 36

Par. 1 : Les fonctions des contre-mesures .............................................................................. 36

A : Obliger un Etat à cesser un fait illicite ou licite mais dommageable............................ 37

B : Obliger un Etat à réparer le dommage résultant de ses actes ..................................... 38

Par. 2 : Les finalités des contre-mesures ................................................................................. 39

A : La finalité coercitive ............................................................................................................... 39

B : La finalité corrective ................................................................................................................ 41

Sect. 2 : Les contre-mesures, sanction de l'illicite en droit international ........................ 42

Par. 1 : La justice internationale aux mains des Etats,

un palliatif aux carences de la société internationale ........................................... 42

A : Les contre-mesures individuelles ........................................................................................ 43

B : Les contre-mesures collectives ............................................................................................. 44

Par. 2 : L'affirmation des contre-mesures par les instances internationales ................... 44

A : Les contre-mesures et des organisations internationales .............................................. 44

B : Les contre-mesures et les Cours et tribunaux internationaux ...................................... 46

Conclusion 1ère Partie ..................................................................................................................... 48

2ème Partie : Le maintien de l'ordre juridique international par la réglementation

des contre-mesures ........................................................................................ 49

Chapitre 1èr:

La précision des conditions de recours à des contre-mesures .................................... 52

Sect. 1 : La précision des conditions formelles ............................................................... 53

Par. 1 : Conditions préalables à tout recours aux contre-mesures ............................. 53

A : L'exigence d'une mise en demeure infructueuse ....................................................... 54

B : L'exigence d'une notification et d'une offre de négociation .................................... 55

Par. 2 : L'inexistence d'un mécanisme de règlement de différends ........................... 57

A : L'absence d'une procédure de règlement prévue entre les Etats .......................... 57

B : L'absence de saisine d'un organe juridictionnel international ................................. 58

Sect. 2 : La précision des conditions matérielles ............................................................... 60

Par. 1 : la précision du fait générateur ................................................................................ 60

A : La condition sine qua non d'un fait illicite préalable ................................................. 61

B : L'exigence d'une lésion ...................................................................................................... 62

Par. 2 : La substance de la réaction ..................................................................................... 64

A : L'obligation de proportionnalité ....................................................................................... 64

B : L'obligation de cessation après la disparition du fait litigieux .................................. 65

Chapitre 2 :

Les limites légales apportées aux contre-mesures ............................................................ 67

Sect. 1 : Les limites apportées à la substance des contre-mesures ............................. 68

Par. 1 : La limitation de l'objet des contre-mesures ......................................................... 68

A : L'interdiction de détourner les contre-mesures à d'autres fins ................................ 68

B : La limitation de la durée et la cohérence des contre-mesures ................................. 70

Par. 2 : Les limites apportées à la nature de certaines contre-mesures ...................... 71

A : Les représailles armées ...................................................................................................... 71

B : L'interdiction de prendre des contre-mesures contre des Etats tiers ...................... 72

Sect. 2 : Les contre-mesures illicites ..................................................................................... 74

Par. 1 : Les contre-mesures portant atteinte aux obligations absolues

du droit international .................................................................................................. 74

A : Le respect des obligations découlant du jus cogens .................................................... 75

B : L'interdiction de porter atteinte aux droits de l'Homme .............................................. 76

Par. 2 : Les contre-mesures portant atteinte à certaines

obligations conventionnelles ..................................................................................... 77

A : L'interdiction de porter atteinte au droit diplomatique ................................................ 77

B : L'interdiction de porter atteinte au droit communautaire ........................................... 79

Conclusion 2ème Partie ................................................................................................................. 81

Conclusion générale .................................................................................................................... 83

Bibliographie ................................................................................................................................. 85

* (1) Denis ALLAND,  Les contre-mesures dans l'ordre juridique international. Etude théorique de la justice privée en droit international public, Pédone, Paris, 1992

* (2) Tribunal arbitral, sentence du 9 décembre 1978, R.S.A, vol. II, 2ème partie, p. 131.

* (1) Gérard Cornu, Dictionnaire de vocabulaire juridique, Association Henry Capitant, 13e édition.

* (2) Louis DUBOUIS « l'embargo dans la pratique contemporaine », AFDI, 1967, p. 99-152

* (3) Comme embargo total, on peut citer par exemple la décision de la CEE du 16 avril 1982 interdisant les importations en provenance d'Argentine à la suite de l'intervention armée de ce pays contre les îles Falkland (Malouines), et pour l'embargo partiel, l'embargo de la même communauté sur les armes dirigé contre le Soudan en 1994.

* (4) En effet, les Etats-Unis ont refusé de participer aux jeux olympiques de Moscou en 1979 et de leur part les pays de l'Est ont boycotté ceux de Los Angeles de 1984.

* (1) Charles LEBEN « Les contre-mesures inter-étatiques et les réactions à l'illicite dans la société internationale », In : Annuaire Français de Droit International, 1982, p. 14.

* (2) Raymond JULIEN et Jean VINCENT, Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13ème édition, 2001.

* (3) Gérard Cohn, « La théorie de la responsabilité internationale », R.C.A.D.I, 1939, II, vol.68, p.318.

* (4) Ann. I.D.I, 1934, Paris, Pédone, p. 162-166

* (5) Linos Alexandre SICILIANOS, Les réactions décentralisées à l'illicite. Des contre-mesures à la légitime défense, Paris, LGDJ, 1990.

* (1) Paul DEMARET, « Aides et mesures de sauvegarde en droit international économique, XXXII ème séminaire de la Commission droit et vie des Affaires », Feduci, 1980, p. 112.

* (2) L'article XIX du GATT et l'article 22 de l'Accord de l'OMC relatif aux sauvegardes ont autorisé leur mise en oeuvre mais tout en les encadrant très strictement.

* (1) Charles LEBEN, op. cit., p. 12

* (2) Face à la prise en otage du personnel diplomatique de l'ambassade américaine à Téhéran (1979-1980) les Etats-Unis d'Amérique ont adopté une politique de contre-mesures qui a reçu le soutien de leurs alliés européens, comme l'embargo céréalier et technologique qu'ils ont décidé à l'encontre de l'URSS et le boycott des jeux olympiques de Moscou lors la crise afghane de décembre 1979. Dans cette même période ils ont également décidé un embargo technologique contre la Pologne (crise polonaise de décembre 1981) et un boycott de leurs relations commerciales avec l'Ouganda en 1978.

* (3) En effet, ces pays ont décidé d'utiliser massivement l'arme du pétrole à l'encontre des Etats-Unis d'Amérique et certains Etats européens considérés comme alliés à Israël en réduisant leurs exportations pétrolières, augmentant considérablement les prix et instituant un embargo de plusieurs mois à l'encontre de ces pays.

* (4) En effet, en 1982, l'Argentine a attaqué militairement les îles Malouines ou Falkland, sur lesquelles elle réclamait sa souveraineté face à la Grande Bretagne. Face à cette attaque, les Etats européens, membres de la communauté ont fermement décidé des contre-mesures contre l'Argentine par des embargos commerciaux.

* (1) Tribunal arbitral, sentence du 9 décembre 1978, R.S.A, vol. II, 2ème partie, p. 131.

* (2) Arrêt du 24 mai 1980, Recueil CIJ 1980, p. 42 et 43

* (3) Mr Ali Hafrad, membre de la délégation algérienne, a en effet montré sa réticence sur l'acceptation des contre-mesures par le droit international, craignant ainsi l'introduction d'un régime de sanction entre les Etats dont les seuls vrais détenteurs de ce pouvoir seraient les Etats puissants (www.algeria-un.org/default.asp?doc=1345%20&lang=2 - 31k).

Quant à la délégation belge, Mr Evert Marechal a préconisé que la reconnaissance du droit de prendre des contre-mesures doit être accompagnée des limites appropriées à l'utilisation de celles-ci afin de ne les utiliser que dans des circonstances exceptionnelles sans pour autant remplacer la tentative sérieuse de règlement pacifique des différends (www.diplomatie.be/newyorkun/default.asp?id=57&mnu=57 - 22k).

* (1) Charles LEBEN, op. cit., p. 40

* (2) Adopté en 2001, lors de sa 53em session de la Commission du Droit International.

* (3) La première partie du projet, portant sur le fait internationalement illicite, consacre dans son chapitre 5, les circonstances excluant l'illicéité du fait d'un Etat et par conséquent sa responsabilité internationale. Parmi eux, il y a à part les contre-mesures (art. 22), le consentement (art. 20), la légitime défense (art. 21), la force majeure (art. 23), la détresse (art. 24) et l'état de nécessité (art. 25).

* (4) Soumis à l'A.G de l'ONU en 2001, celle-ci a décidé de l'insérer dans la question de l'ordre du jour lors de sa 59e session, en 2004. Elle a convié les gouvernements à faire tout leur nécessaire pour que ce projet aboutisse à un traité. A l'heure qu'il est on n'a toujours pas adopté ce traité sur la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite.

* (1) Denis ALLAND,  Les contre-mesures dans l'ordre juridique international. Etude théorique de la justice privée en droit international public, Pédone, Paris, 1992.

* (1) Charles LEBEN, op. Cit., p. 40

* (1) Article 33, alinéa 1er : "Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix."

* (2) Alphonse RIVIER, Principes du droit des gens, Rousseau, Paris, 1899, t. II, p. 189.

* (3) C'est le cas, par exemple, de l'expulsion d'étudiants iraniens et de certains membres du personnel diplomatique iranien à Washington lors du conflit entre les Etats-Unis et l'Iran lors de l'affaire de prise d'otages américains à Téhéran en 1980. Dans le cadre de cette même affaire, on a abouti à une rupture complète des relations diplomatiques entre les deux Etats.

* (4) Les Etats-Unis ont suspendu ou réduit leur aide publique à certains Etats qui avaient nationalisé des investissements américains sans aucune indemnité, à d'autres qui ne respectent pas les droits de l'homme ("politique Carter" de 1977 à 1980) ou, enfin, à ceux dont ils désapprouvaient les orientations (comme le Nicaragua entre 1981 et 1989).

* (1) Dans la décision de la CIJ intervenue en 1986 entre les Etats-Unis et le Nicaragua, le juge international a qualifié de représailles l'appui des Etats-Unis aux activités militaires et paramilitaires des contras au Nicaragua (soutien financier, entraînement, fourniture d'armes, de renseignements et de soutien logistique) parce que cet appui constituait une violation du principe de non-intervention, alors qu'il a considéré que l'interruption de l'aide économique à ce même Etat ou la réduction du quota d'importation du sucre étaient des mesures de rétorsion.

* (2) Annuaire I.D.I, 1934, p.708

* (3) Marcel SINKONDO, Droit International Public, Ellipses, 1999, p. 128.

* (4) L'usage des représailles armées est strictement interdit par le droit international. Elles ne peuvent découler que d'un cas de légitime défense ou être décidées que par le Conseil de Sécurité de l'ONU en application du chapitre VII de la Charte (art. 42). Par ailleurs, la CDI a exclu la légitimité des représailles armées dans sa définition des contre-mesures. Toutefois, dans un aspect terminologique, le terme "représailles" tend aujourd'hui à n'être utilisé que pour désigner, en général, les politiques de contrainte comportant un recours à la force (rapport 2001 de la CDI, p. 181).

* (5) Infra, 2ème partie, chapitre II

* (6) V. résol. 2131 (XX) et 2625 (XXV) de l'Assemblée Générale de l'ONU ; la résol. 36/103 et l'art. 32 de la Charte des droits et devoirs économiques des Etats.

* (1) Les Etats-Unis ont décidé de ne pas participer aux Jeux Olympiques de Moscou de 1979 et, en réponse, les Etats du bloc de l'Est ont boycotté ceux de Los Angeles de 1984. Dans cette même période, le Sénat américain a refusé de poursuivre les négociations et la signature des accords SALT II avec le régime soviétique.

* (2) Charles LEBEN, op. Cit., page 48

* (3) Embargo de la communauté européenne sur les armes contre le Soudan en 1994, ou l'interdiction par le gouvernement français de tout investissement en Afrique du sud en répression de leur système d'apartheid.

* (4) Un Etat peut décider de rompre totalement ses relations commerciales avec un autre comme l'ont fait les Etats-Unis vis-à-vis de l'Iran en 1980 dans l'affaire de la prise d'otages, et contre le Nicaragua en 1985.

* (1) L'embargo technologique a été initié par les Etats-Unis contre les pays se réclamant du communisme. Il consistait à interdire toute importation vers ces pays des matériels pouvant avoir une utilisation technologique à haute importance militaire.

* (2) Depuis les attentats du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont saisi les avoirs des hommes d'affaires saoudiens soupçonnés d'avoir financé les activités de Ben Laden. Récemment, ils ont aussi obtenu le blocage des comptes nord-coréens en Chine.

* (3) C'est le cas du F.M.I et du G.A.F.I. Le F.M.I. impose aux Etats bénéficiaires de son aide financière des normes à suivre pour assainir les finances publiques. Face à un Etat qui ne respecte pas ces normes, le F.M.I. le sanctionne par des contre-mesures consistant par exemple, à réduire ses aides ou à lui refuser des prêts. Pour le G.A.F.I., il adopte souvent des contre-mesures à l'égard des Etats qui ne font aucun effort pour lutter contre le blanchiment d'argent, qu'il qualifie de pays ou territoires non coopératifs (PTNC). Il a décidé ainsi des contre-mesures contre le Myanmar ou contre l'Ukraine et des menaces de contre-mesures contre le Nigeria

* (1) Art. 22-2 du Mémorandum d'accord de l'OMC instituant la technique de «suspension des concessions ou d'autres obligations au titre des accords visés».

* (2) Art. 41 de la Charte : "Le Conseil de Sécurité peut décider quelles mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent être prises pour donner effet à ses décisions, et peut inviter les membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Elles peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et d'autres moyens de communication ainsi que la rupture des relations diplomatiques".

* (3) En effet, le projet de la CDI ne pose aucune condition pouvant contraindre un Etat faible ou favorisant un Etat puissant dans le recours à des contre-mesures. Les conditions sont allégées pour permettre à chaque Etat de pouvoir y recourir selon quoique ses moyens.

* (1) Supra, Section 1.

* (2) En 1982, l'Argentine envahit militairement les îles Malouines (Falkland Island) sur lesquelles elle réclamait sa souveraineté face à la Grande Bretagne. Une courte guerre éclata entre les deux pays en faisant plus de 900 morts. Sous l'égide de la Grande-Bretagne, la communauté européenne décida de sanctionner l'Argentine par une série de contre-mesures visant à la faire revenir sur sa décision. Celle-ci décida, à son tour, des contre-mesures à l'égard de l'Angleterre. Dans le même sens, la Corée du Nord menaça de prendre des contre-mesures à l'égard des Etats-Unis lorsque ceux-ci ont décidé de la sanctionner sur la base de ses activités nucléaires. L'Iran adopta le même comportement lors du conflit américano-iranien relatif à la prise d'otages de l'ambassade américaine à Téhéran.

* (3) La Russie (propriétaire de la société Gazprom) a décidé d'augmenter de quatre fois le prix de livraison du gaz à la Biélorussie depuis le 1er janvier 2007 si celle-ci ne lui cède pas les 50% des actions de Beltransgaz (société publique biélorusse qui gère le gaz). Face à de telles mesures, la Biélorussie a menacé d'interrompre le transit du gaz russe vers l'Europe. Ce qui priverait l'approvisionnement en gaz de nombreux pays européens (Belgique, Allemane et Pologne) qui ont appelé la Russie à revenir sur sa décision. Cet incident montre bien que les contre-mesures ne sont pas l'apanage des seules superpuissances mais aussi des Etats moins influents.

* (1) C'est le premier rôle des contre-mesures. A l'exemple du boycott ou des représailles, le but de l'Etat qui y recourt est de dissuader l'Etat défaillant à cesser les hostilités ou à négocier une issue de la crise. On peut citer un exemple, celui des Etats-Unis contre la France dans l'affaire des services aériens. Les Etats-Unis ont pris des contre-mesures à l'encontre de la France dans le seul but de le dissuader à recourir à un arbitrage.

* (1) AFP, 29 mai 2007 (www.afp.com). Face à l'influence des Etats-Unis qui ont demandé à l'ONU et à la communauté internationale de prendre des sanctions internationales, les autorités soudanaises ont fini par céder en acceptant l'intervention des forces armées mixtes ONU-UA.

* (2) C'est le cas, par exemple, de l'article 41 de la Charte de l'ONU qui prévoit le recours aux contre-mesures pour chercher à régler pacifiquement un conflit avant d'en venir à l'application de l'article 42. Le texte n'a pas nommément cité les contre-mesures mais le caractère des mesures qu'il préconise laisse entendre que ce sont des contre-mesures.

* (3) ) Alexandre SICILIANOS, op. Cit., p. 61 ;

* (4) Les autorités nord-coréennes ont déclaré que "la RDPC ne manquera pas de prendre des contre-mesures pour réagir aux sanctions japonaises supplémentaires". Dans sa politique nucléaire, la Corée du Nord entend faire pression à l'égard des Etats-Unis et du Japon afin que ceux-ci lèvent les sanctions décidées contre elle depuis quelques années. Ces sanctions comprennent le blocage des avoirs coréens à Macao par les Etats-Unis et l'arrêt des importations de tout produit fabriqué en Corée du Nord, le refus de visa d'entrée au Japon à tous les citoyens de la RDPC, l'interdiction des ports japonais à tous les navires nord-coréens, l'expulsion de tous les bateaux nord-coréens des eaux japonaises. Le président de l'Assemblée populaire suprême (parlement) de la Corée du Nord, Kim En Nam, a déclaré que son pays était prêt à revenir à la table des négociations après la levée des sanctions financières décrétées par les Etats-Unis et le Japon et que la poursuite des essais nucléaires de la Corée dépendra de la position des Etats-Unis.

* (1) Exemple pris sur les Etats-Unis en particulier qui n'hésitent pas à adopter des contre-mesures pour faire pression sur les Etats qu'ils estiment liés au terrorisme (voir à ce sujet la déclaration de Francis Taylor, coordonnateur des mesures antiterroristes au Département d'Etat américain, (http://usinfo.state.gov/journals/itps/1101/ijpf/frtaylor.htm). Dans d'autres cas, c'est pour faire pression contre des Etats proches du communisme (contre-mesures prises à l'égard des pays communistes lors de la guerre froide (Corée du Nord, Iran, Cuba, ...) ou ne respectant pas les droits de l'homme (Exemple de l'embargo contre l'Ouganda dans les années 1979) ; ces contre-mesures consistant en des mesures d'embargo ou des sanctions financières ont un but dissuasif.

* (1) Le droit international condamne le fait pour un Etat d'utiliser des sanctions économiques ou financières dans le seul but de contraindre un autre Etat à subordonner l'exercice de sa souveraineté au moyen d'une pression quelle que soit sa forme. Voir dans ce sens, les résol. 2131 (XX) et 2625 (XXV) de l'Assemblée Générale de l'ONU, la résol. 36/103 et l'art. 32 de la Charte des Droits et devoirs économiques des Etats.

* (2) Il faut qu'il y ait au préalable un fait illicite qui va justifier la réaction de l'Etat.

* (3) Cf. infra,

* (4) « Chaque Etat a le droit, sous réserve de respect des règles générales du droit international relatives aux contraintes armées, de faire respecter son droit par des contre-mesures » (Tribunal arbitral, sentence du 9 décembre 1978, R.S.A, vol. II, 2ème partie, p. 131). 

* (1) Il y a beaucoup d'exemples où des Etats ont sanctionné d'autres alors qu'ils n'étaient pas directement touchés par leurs actes illicites. On cite, en général, l'embargo et le boycott des Etats-Unis contre le régime soviétique face à l'invasion de l'Afghanistan en 1979.

* (2) Catherine KOSMA, op. cit.,

* (1) Marcel SINKONDO, Op. Cit., p. 127.

* (2) Pour une étude approfondie, voir l'article de Charles LEBEN, les contre-mesures inter-étatiques et les réactions à l'illicite dans la société internationale, in A.F.D.I, 1982, p. 9-77). Le problème s'est également posé au sein de la CDI où les Etats du Tiers-Monde ont manifesté leur souci face à la reconnaissance des contre-mesures.

* (3) Charles LEBEN, Op. Cit.

* (1) Tel a été le cas des Etats-Unis contre l'Union Soviétique en 1979 lorsque cette dernière a envahi l'Afghanistan. Le Secrétaire d'Etat américain a déclaré que les mesures adoptées par son pays contre l'URSS tendaient à inciter le gouvernement soviétique à « retirer » ses forces armées de ce pays. (V. le discours prononcé par le secrétaire d'Etat, C. Vance, (3 mars 1980) devant le Conseil des relations étrangères, reproduit in Dpt. Of State Bull., avril 1980, p. 12.

* (2) Cas, par exemple, d'une illicéité découlant d'une omission lorsque les autorités iraniennes n'ont rien fait pour arrêter les étudiants qui avaient pris en otage le personnel de l'ambassade américaine de Téhéran. Washington a décidé de punir Téhéran par des contre-mesures.

* (3) Exemple : le blocage des fonds appartenants à l'Etat défaillant ou à ressortissants, l'expulsion réciproque des ressortissants ou diplomates, la rupture d'une aide économique ou l'embargo d'un produit commercial particulier.

* (4) Cas américain pré-cité contre l'Union Soviétique.

* (1) CIJ, Rec. 1980, p. 44.

* (1) Dans cette affaire, la CPJI décida que "le principe essentiel qui découle de la notion même d'acte illicite et qui semble se dégager de la pratique internationale, est que la réparation doit, autant que possible, effacer toutes les conséquences de l'acte illicite et rétablir l'état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n'avait pas été commis" (CPJI série. A, N° 17, p. 47).

* (1) Supra.

* (2) Cette obligation peut consister en une restitution in integrrum, réparation par équivalent ou par satisfaction.

* (3) Cas des Etats-Unis qui ont décidé de sanctionner le régime d'Idi Amin Dada (Ouganda). Le Congrès américain entendait se dissocier de tout gouvernement étranger s'engageant dans des pratiques comme le génocide. C'est la même chose pour la politique Carter contre l'URSS lorsqu'elle a envahi l'Afghanistan en 1979.

* (4) Alexandre SICILIANOS, op. Cit., p. 64.

* (5) C'est le cas des USA qui ont décidé de prendre des contre-mesures à l'encontre de la France lorsque, dans leur différend concernant l'interprétation de l'accord des services aériens de 1946, la France a refusé de recourir à un arbitre, clause pourtant incluse dans l'accord.

* (6) Alexandre SICILIANOS, Ibid, p. 57.

* (1) Ibid, p. 65.

* (2) Dans la sentence rendue sur l'affaire concernant l'accord relatif aux services aériens, le tribunal arbitral a reconnu une finalité corrective dans les contre-mesures américaines en considérant qu'elles avaient "pour objet de reconstituer l'égalité entre les parties".

* (1) Infra, 2ème partie.

* (1) Catherine KOSMA, La sanction en droit international, in la sanction en droit, colloque de l'Université de Lyon 3, (27/11/2003 (http://www.net-iris.fr/veille-juridique/espace-auteurs/14-catherine-kosma.php).

* (2) Jean COMBACAU et Serge SUR, Op. Cit., p. 212.

* (3) Idem.

* (4) Dans la sentence arbitrale du 9 décembre 1978 intervenue entre la France et les Etats-Unis dans l'affaire relative à l'interprétation de l'accord des services aériens, le juge arbitral a indiqué que les contre-mesures "...ont pour objet de reconstituer l'égalité entre les parties et de les inciter à poursuivre la négociation avec le désir mutuel d'aboutir à un résultat acceptable..."

* (1) Jean COMBACAU et Serge SUR, Ibid

* (1) L'article 41 de la Charte dispose : « le Conseil de Sécurité peut décider quelles mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent être prises pour donner effet à ses décisions, et peut inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Celles-ci peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques ». Ce sont, en réalité, les contre-mesures dont on fait mention dans cet article.

* (2) Charles LEBEN, op. Cit., p. 28

* (3) La Rhodésie fut la cible de plusieurs contre-mesures depuis 1965. Cet Etat n'était pas membre de l'ONU alors que le Conseil de Sécurité lui imposa plusieurs sanctions par des résolutions qui étendaient de plus en plus les peines. Obligation fut faite aux Etats de rompre les relations économiques et diplomatiques, les échanges commerciaux et les communications avec ce pays (de 1968 à 1970). L'embargo s'est étendu aux assurances, aux noms et franchises commerciaux (en 1976) et a atteint des restrictions financières (en 1977). Pour une étude approfondie de ces sanctions, voir P.M. EISEMANN, Les sanctions contre la Rhodésie, Paris, Pédone, 1972 et Ch. CADOUX, « L'Organisation des Nations Unies et le problème de l'Afrique australe », A.F.D.I., 1977, p. 127-174.

* (1) Alexandre SICILIANOS, op. Cit., p. 216.

* (1) Tribunal arbitral, sentence du 9 décembre 1978, R.S.A, vol. II, 2ème partie, p. 131.

* (2) CIJ, Rec. 1980, p. 44.

* (3) CPJI, série. A, N° 17, p. 47.

* (1) Infra, 1ère partie.

* (2) Soit on assisterait à une série de règlements de comptes sans commune mesure entre Etats, et la conséquence immédiate serait le risque d'une recrudescence des hostilités dans la communauté internationale, remettant ainsi en cause tout le système juridique international, soit on observerait un usage inégal des contre-mesures. Comme l'a souligné Alain Pellet, "derrière les contre-mesures se profilent, en effet, les rapports de puissance entre les États" (Alain Pellet, "Remarques sur une révolution inachevée : le projet d'articles de la CDI sur la responsabilité des États", AFDI, 1996, p.27). En effet, un Etat fort utilisera facilement les contre-mesures pour amener un autre Etat faible à composition alors que celui-ci en aurait du mal car se trouvant dans une situation de demandeur qu'apporteur.

* (3) Après 40 ans de réflexion, la Commission aboutit à l'élaboration d'un projet final en 2001, projet adopté par l'Assemblée générale de l'ONU dans sa résolution 56/83 du 12 décembre 2001. Le projet a été adopté finalement lors de la session de 2004 mais jusqu'à l'heure actuelle on n'a pas abouti à la conclusion d'un traité.

* (1) Art. 52, al. 1, par. 1.

* (2) RSANU, vol II, p.1027.

* (1) Ibid, p. 1028.

* (2) Alexandre SICILIAONS, op. cit., p. 186.

* (3) RSANUI, vol. XVIII, pp. 484-485 par. 91.

* (1) Alexandre SICILIANOS, op. cit. p. 189.

* (2) Dans son communiqué, le gouvernement français énonça que "la libération des cinq autres détenus n'intervenant pas, et les démarches de notre légation à Bucarest demeurant sans effet, le ministre des Affaires étrangères fait part à la légation de Roumanie à Paris... sur le fait que le gouvernement français se verrait obligé ... d'envisager la suspension de l'application de l'accord commercial" (A. -Ch. KISS, Répertoire de la pratique française en matière de droit international public, Paris, CNRS, t. I 1962, t. VI 1969.

* (3) "Dans l'impossibilité où nous sommes de régler nos différends avec les Pays Bas par voie de négociation, il nous faut prendre d'autres mesures sans pourtant aller jusqu'à la guerre." AGDO, 13e session, 762e séance plénière, 29 septembre 1958, p. 219 par. 83.

* (1) C'est le cas des délégations de l'Allemagne, du Mexique, de la Nouvelle-Zélande, de l'Inde, du Brésil, de l'Australie, du Venezuela, d'Israël, de la Bulgarie et de la Fédération de Russie. (AG/J/297 Communiqué de presse du 2 novembre 1999).

* (2) Infra, Chapitre 2, Section 2.

* (3) Art. 52, par. 3, al. 2.

* (4) Alexandre SICILIANOS, op. cit., p. 231.

* (1) G. de LACHARRIERE, La politique juridique extérieure, Paris, Economica, 1983, p. 137.

* (2) V. les déclarations du Secrétaires des Affaires étrangères de l'époque, Mr Morrison, dans Parlementary debates, vol. 488, col. 43 (29 mai 1951).

* (3) Ch. ROUSSEAU, "Chronique", 77 RGDIP (1973), pp. 282-287, 876-878, Compétence en matière de pêcheries (Royaume-Uni c. Islande).

* (4) V. Plateau continental de la mer d'Egée (Grèce c. Turquie), ordonnance du 11 septembre 1976, CIJ Rec. 1976.

* (5) La Cour déclara que "quels qu'en soient les motifs, une opération entreprise dans ces circonstances est de nature à nuire au respect du règlement judiciaire dans les relations internationales", en rappelant que, par une ordonnance du 15 décembre 1979, elle avait indiqué qu'"aucune mesure de nature à aggraver la tension entre les deux pays ne devait être prise" (V. 74 AJIL (1980), et le résumé des faits par la CIJ dans son arrêt du 24 mai 1980, CIJ Rec. 1980, pp. 16-18.

* (1) Art. 52, par 3, al. 4.

* (1) L'article 22 du projet de la CDI prévoit que "l'illicéité du fait d'un Etat non conforme à l'une de ses obligations internationales à l'égard d'un autre Etat est exclue si, et dans la mesure où, ce fait constitue une contre-mesure prise à l'encontre de cet autre Etat conformément au chapitre II de la troisième partie". Voir également nos développements sur Infra, 1ère partie, chap. 1, sec. 1, par. 1.

* (1) Il y eut une grande controverse sur la qualification de l'infraction (délit et crime) en droit international. Nous recommandons les commentaires de Mr R. Ago sur la question.

* (2) G. Cohn, "La théorie de la responsabilité internationale", R.C.A.DI. 1939, II, vol.68, p.318.

* (3) Alphonse RIVIER, Principes du droit des gens, Rousseau, Paris, 1899, t. II, p. 189.

* (1) Affaire américano-iranienne de la prise d'otages à Téhéran.

* (2) Cas par exemple de l'affaire qui opposait les Pays Bas à la Chine dans l'assassinat des techniciens chinois en mission aux Pays Bas.

* (1) Claude RUCZ, Les mesures unilatérales de protection des droits de l'homme devant l'Institut de droit international, 1992, p.581.

* (2) Art. 51 du projet de la CDI sur la responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite.

* (3) V. art. 6 par. 2, 38 AIDI (1934), p. 710.

* (4) Affaire Naulilaa, RSANU, vol. II, p. 1028.

* (1) Affaire de l'accord des services aériens entre la France et les Etats-Unis, RSANU, vol. XVIII, p. 483.

* (2) Cas de l'Allemagne dans l'affaire Naulilaa alors qu'elle était elle-même la défenderesse. Les Etats-Unis et la France ont reconnu ensemble cette obligation dans l'affaire pré-citée.

* (3) Algérie, Ethiopie, Maroc,...

* (4) L'exercice du droit de représailles "ne doit pas être, dans ses effets, manifestement disproportionné par rapport à la gravité du fait internationalement illicite". M. Riphagen.

* (1) Alexandre SICILIANOS, op. cit., p. 264.

* (2) ACDI 1979, vol. II, 2ème partie, p. 130 par. 7.

* (3) Alexandre SICILIANOS, Idem.

* (1) Art. 6 par. 5, 38 AIDI (1934), p. 710.

* (2) Par exemple, on condamne certaines mesures ayant pour but de contraindre un Etat à subordonner l'exercice de ses droits souverains. Tel est le cas de l'A.G. de l'ONU dans ses résolutions 2131 (XX) du 21 décembre 1965, sur l'inadmissibilité de l'intervention dans les affaires intérieures des Etats et la protection de leur indépendance et de leur souveraineté ; 2625 (XXV) du 24 octobre 1970 ; et la résolution 36/103 du 9 décembre 1981.

* (3) Dans l'affaire opposant le Nicaragua eux Etats-Unis, La CIJ a qualifié d'ingérence et d'atteinte au droit international, le fait pour les Etats-Unis de fournir une assistance matérielle et financière aux contras de Nicaragua.

* (1) Dans l'affaire Naulilaa, le tribunal arbitral a décidé que les représailles ont "pour effet de suspendre momentanément.... l'observation de telle ou telle règle du droit des gens", RSANU, vol. II, p. 1026.

* (1) Alexandre SICILIANOS, op. cit., p. 264.

* (2) Supra,

* (3) Dominique CARREAU, Droit international, 5ème édition, Paris, Pédone, 1997, p. 559.

* (1) Dans la première affaire, les Etats-Unis occupèrent le port de Vera-Cruz au Mexique à la suite du refus par les autorités mexicaines de saluer le drapeau américain (Hackworth International Law, vol. I, 151, 1940). Dans la seconde, l'armée israélienne bombarda les avions libanais en guise de représailles de l'attaque terroriste de deux Libanais contre un avion israélien faisant deux morts (voir R.A. Falk, "The Beirut raid and the international law of retaliation", A.J.I.L. 1969, p. 415 et s.).

* (2) Avis consultatif relatif à la "licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires" (§ 46 de l'avis).

* (1) Voir les développements de E. ZOLLER in Peacetime unilateral remedies: An analysis of countermeasures, Dobbs Ferry, New York, Transnational Publishers, 1984, mais aussi l'art. 6 par. 3 de la résolution de l'I.D.I. sur les "Régimes en temps de paix", in 38 AIDI.

* (2) Dans cette affaire, pendant la 1ère guerre mondiale, un sous-marin allemand décida de couler un bateau portugais (le Portugal alors neutre) estimant que celui-ci transportait une contrebande. Devant le tribunal arbitral, la partie portugaise soutint que cet acte était illicite au regard du droit international et le gouvernement allemand répondit que cette mesure était prise en guise de « représailles licites » contre des violations analogues commises par l'Angleterre et ses alliés. A la question de savoir si l'Allemagne pouvait prendre des mesures de représailles contre des navires neutres au même titre que contre ses ennemis, le juge arbitral répondit par la négative.

* (3) L'art. VI, section 11 de cet accord dispose que "les autorités fédérales, d'Etat ou locales des Etats-Unis ne mettront aucun obstacle au transit à destination ou en provenance du district administratif... des représentants des membres... de l'Organisation des Nations Unies" RTNU, vol. 11, p. 11.

* (4) Cas, par exemple, des Etats-Unis qui s'érigent toujours en gendarmes des droits de l'Homme et se permettent de sanctionner les Etats qui les méconnaissent.

* (1) Cas, par exemple, des Etats membres de la CEE, lesquels en solidarité avec la Grande-Bretagne, ont décidé de sanctionner l'Argentine dans l'affaire dite des Iles Falkland (Malouines). Ce même principe est présent également dans le cadre de l'OTAN.

* (1) L'art. 43 portant sur les obligations imposées par le droit international indépendamment d'un traité, dispose que « la nullité, l'extinction ou la dénonciation d'un traité, le retrait d'une des parties ou la suspension de l'application du traité, lorsqu'ils résultent de l'application de la présente Convention ou des dispositions du traité, n'affectent en aucune manière le devoir d'un Etat de remplir toute obligation énoncée dans le traité à laquelle il est soumis en vertu du droit international indépendamment dudit traité."

* (2) Pour une étude approfondie de la notion de jus cogens, voir parmi tant d'autres, le résumé doctrinal sur la question fait par A. GOMEZ ROBLEDO, Le jus cogens international : sa genèse, sa nature, ses fonctions, 172 RCADI (1981 III), pp. 69 s.

* (1) L'article dispose : « les contre-mesures ne peuvent porter atteinte à l'obligation de ne pas recourir à la menace ou à l'emploi de la force telle qu'elle est énoncée dans la... Charte des Nations Unies, aux obligations concernant la protection des droits fondamentaux de l'homme, aux obligations de caractère humanitaire excluant les représailles, aux autres obligations découlant de normes impératives du droit international général. » (al. 1er) et « L'Etat qui prend des contre-mesures n'est pas dégagé des obligations qui lui incombent, en vertu de toute procédure de règlement des différents applicable entre lui et l'Etat responsable, de respecter l'inviolabilité des agents, locaux, archives et documents diplomatiques ou consulaires. » (al. 2).

* (2) Alexandre SICILIANOS, op. cit. p. 351.

* (1) Art. 6, par. 3 et 4, 38 Ann. IDI (1934), p. 710.

* (2) Le Congrès américain a arrêté une série de mesures à partir de 1973 pour refuser son assistance aux gouvernements qui ont porté atteinte aux droits de l'homme. En 1977, dans une série de déclarations, le président Carter a fait connaître la résolution de son administration de faire des progrès des droits de l'homme un élément central de sa politique. Il a souligné que les États Unis "ont une responsabilité et un droit légitime à exprimer leur désapprobation face aux violations des droits de l'homme" (conférence de presse, 23 février 1977, 71 American journal of international law 517 (1977).

* (3) Avis consultatif de la Cour Internationale de Justice de 1951, CIJ Rec. 1951, p. 23.

* (4) Article 50 al. 2 par. 2 du projet de la Commission du droit international.

* (1) Dans cette décision, la Cour a jugé que les arguments avancés par le gouvernement iranien n'expliquent pas la violation de ses obligations diplomatiques avec les Etats-Unis. En effet, l'Iran soutenait que la prise en otage du personnel diplomatique américain répond aux différentes ingérences que les Etats-Unis ont entrepris sur son territoire (CIJ Rec. 1980, p. 40 par. 86).

* (2) CIJ Rec. 1980 p. 38 par. 83. Ces sanctions sont au nombre de deux : - la possibilité pour l'Etat accréditaire de déclarer persona non grata un membre d'une mission étrangère qui se livrait à des actes d'espionnage ou d'ingérence dans les affaires intérieures à tout moment et sans avoir à se justifier ; - le pouvoir de l'Etat accréditaire de rompre ses relations diplomatiques avec l'Etat accréditant au cas où les abus du statut diplomatique prendraient une ampleur sérieuse (Art. 9 par. 1 de la Convention de Vienne de 1961 ; art. 23 par. 1 de la Convention de Vienne de 1963).

* (3) V. par ex. les restrictions imposées par le Sénat américain le 7 octobre 1987 au déplacement des agents diplomatiques de plusieurs pays socialistes en poste aux Etats-Unis (Ch. ROUSSEAU, "Chronique", 92 RGDIP (1988), p. 386).

* (4) En effet, des ressortissants ivoiriens étaient détenus arbitrairement en Guinée en 1967. Face au refus des autorités guinéennes de relâcher ces hommes, la Cote d'Ivoire retient des diplomates guinéens en provenance de New York où ils revenaient de l'assemblée extraordinaire des l'Assemblée générale des Nations Unies, pendant leur escale à Abidjan. Le Secrétaire général des Nations Unies adressa une lettre au gouvernement ivoirien dans laquelle il sanctionne ces actes et demande la libération des diplomates.

* (1) Art. 45, Convention de Vienne de 1961.

* (2) Alexandre SICILIANOS, op. cit. p. 361.

* (3) Affaire Costa c. ENEL, aff. 6/64, arrêt du 15 juillet 1964, Rec. CJCE, 1964, p. 1141 à 1159.

* (1) Affaires jointes 90-91/63, Rec. 1964, p. 1217.

* (2) V. Commission c. France, aff. 232/78, arrêt du 25 septembre 1979, Rec. 1979, p. 2729 ; Commission c. Italie, aff. 39/72, arrêt du 7 janvier 1973, Rec. 1973, p. 101.

* (1) Alexandre SICILIANOS, Ibid, p. 362.






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