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La communication participative communautaire au Sénégal

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par Sébastien Froger
Universite Stendhal Grenoble 3 - Institu de la communication et des médias - Master 2 communication scientifique et technique 2005
  

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I. 2. Historique de la communication pour le développement à travers ses différents modèles

Jusqu'à aujourd'hui, on peut noter deux grandes tendances qui se sont développées successivement.

La diffusion massive d'informations reposant sur les médias, et la communication à l'échelle communautaire, exploitant plutôt des médias « légers » (affiches, vidéos, diapositives...) ou traditionnels (contes, théâtre...).

a. Le paradigme de la modernisation et la théorie de la diffusion

Dans les années 1950 et suite à la décolonisation, beaucoup de grands organismes de développement comme l'United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization (UNESCO), la FAO, le PNUD ou encore l'Agence américaine pour le développement international (USAID), ont lancé de grands projets reposant sur l'utilisation des médias de masse en vue de faciliter le développement des pays du sud.

Alors que la guerre froide s'annonçait, Etats-Unis et Union Soviétique projetaient de faciliter le développement de ces pays pour accentuer leur influence et imposer leur modèle de société à ces Etats ayant récemment acquis leur indépendance.

C'est dans ce contexte que les travaux de Lerner se sont effectués. Pour lui, seules les attitudes modernes (modèle occidental) sont capables de sortir un pays du sous développement et les moyens de diffusion de l'information de masse sont les plus appropriés pour faciliter ce développement.

Cette approche qui constitue le paradigme de la modernisation (Lerner, The Passing of Traditional Society, 1958) 14, est basé sur un transfert de technologie des pays industrialisés vers les pays pauvres, l'acquisition de ces nouvelles techniques se faisant par l'intermédiaire des médias de masse (presse, radio, télévision).

Dans ce modèle, on considère que le processus de communication se fonde sur des messages allant d'un émetteur vers un récepteur. On se limite à informer la population sur les projets, à illustrer les avantages de ces projets et on incite à les soutenir.

Il s'agit d'un schéma classique de communication verticale, allant de l'émetteur vers le récepteur.

En 1962, Everett Rogers introduit la théorie de la diffusion dans le contexte de développement15. Il considère la modernisation comme un processus de diffusion qui permet aux individus de passer d'un mode de vie traditionnel à un mode de vie différent, plus développé sur le plan technologique et plus adapté aux changements rapides.

14 Daniel L ERN ER, The passing of traditional society. Modernizing the Middle East, New-York, The Free Press cité par SERVA ES J. et MAL IK HAO P., Communication et développement durable [en ligne] in 9ème Table ronde des Nations Unies sur la communication pour le développement, 2004, FAO, Rome, Italie, p. 5 disponible sur http://www.fao.org/sd/dimkn1/docs/kn1040701a1fr.doc `consulté le 04/08/2005.

15 ROGERS E., Communication and Development, Critical Perspectives, Beverly Hi lls, London, Delhi, Sage Publications, 1976 cité par Bessette G., la communication participative communautaire : un agenda ouest-africain, CRD I, 1996, p 9.

Cette théorie prenait en compte trois éléments principaux : le public cible de l'innovation, l'innovation même à transmettre et les sources et canaux de communication.

Ses travaux étaient principalement axés sur la transmission de techniques agricoles vers les pays en développement par l'intermédiaire d'une personne ressource. Rogers a insisté sur le processus d'adoption et de diffusion des innovations culturelles.

Dans cette théorie, les médias de masse jouent un rôle important pour sensibiliser le public sur les nouvelles possibilités et pratiques, mais c'est la communication interpersonnelle qui est considérée comme la plus efficace (cette théorie aura beaucoup évolué au cours du temps).

Ce modèle a vite été critiqué car trop simpliste, ne prenant pas en compte les types de public cible. Il ignorait également le pouvoir de l'influence des structures politiques et économiques, de la culture, bref du contexte sur l'adoption d'une innovation.

Enfin, la diffusion de l'information dans ce modèle se fait toujours de façon verticale, du haut vers le bas, ce qui n'est évidemment pas satisfaisant, car trop réductionniste et autoritaire.

Chin Saik Yoon nous souligne avec humour les aberrations issues de cette approche, ne prenant pas en considération le contexte et la manière dont pouvaient êtres perçues les actions menées ainsi :

« Plusieurs projets de vulgarisation agricole ont échoué parce que les agriculteurs hésitaient à abandonner leurs façons de faire éprouvées en faveur de nouvelles méthodes bizarres. Cela les rendait également inquiets de planter des cultures exotiques qu'ils ne pouvaient manger, mais devaient vendre en échange d'argent avec lequel acheter de la nourriture au marché. Lorsque les gens ont obtenu l'eau courante, ils s'en sont souvent servi pour laver et non pour boire et manger parce qu'ils n'en aimaient pas le goût. On leur a demandé de cesser de croire aux esprits et aux démons et de faire confiance à la science, qui parlait de choses comme les « germes » qu'on ne peut voir, mais auxquels on peut attribuer la plupart des douleurs et des maladies. On leur a également demandé de faire attention à une chose nommée « azote », elle aussi invisible mais ayant des effets sur le rendement des cultures. N'était-ce pas là justement une autre forme de sorcellerie? » 16.

Cependant, malgré les critiques soulevées, ce paradigme de la modernisation reste vivant et continue à influencer le discours des principaux acteurs de la communication pour le développement en matière de politique et de planification sur le plan théorique comme sur le terrain.

16 YOON C. S., La communication participative pour le développement [en ligne] in La communication participative pour le développement, Un agenda ouest-africain CRD I, Montréal, 1996, disponible sur http://www.idrc.ca/fr/ev-30910-201-1- DO_TOPIC.html (consulté le 04/08/2005).

Parallèlement à cette prise de conscience des lacunes du modèle diffusionniste, sont apparus deux paradigmes de développement dont ont découlé de nouveaux modèles de communication.

b. Le paradigme de dépendance

A l'origine ce paradigme est l'idée que les obstacles au développement proviennent de sources externes, le système économique international, ce qui expliquerait cette incapacité des médias à induire des changements.

Si l'on suit le raisonnement de ce paradigme, les médias ne peuvent servir de véhicule de développement puisqu'ils transmettent des messages occidentaux, c'est-à-dire une idéologie basée sur le capitalisme. Appliqué au Sénégal, le panorama télévisuel illustre parfaitement ces propos. En dehors de la Radiodiffusion Télévision Sénégalaise (RTS) qui diffuse quelques informations locales, les chaînes privées disponibles sont occidentales et inadaptées au contexte local. On peut noter parmi celles-ci Canal horizons ou TV5.

Mais ce paradigme, bien qu'aujourd'hui encore actif, est critiqué pour sa vision uniquement internationale qui néglige les contradictions nationales ou locales.

Suite à la naissance de cette nouvelle vision du développement, Freire 17 présente un modèle de communication pour le développement dans La Pédagogie des opprimés en 1973. Selon ce modèle, on est bien loin de la théorie diffusionniste puisque la communication est considérée comme un outil au service de la population.

En se politisant, la population dégage elle-même les problèmes auxquels elle est confrontée, s'organise et agit contre ces problèmes, propose des solutions et se dote d'outils pour les appliquer.

Mais comme les modèles précédents, il a fait l'objet de critiques, en particulier concernant la politisation des communautés.

En effet, s'il existe de nombreux pays où ce genre d'initiatives populaires par l'intermédiaire
des médias sont tolérées, l'action politique dans certains pays en développement peut mener
au renversement de l'élite gouvernante, sans laisser les moyens aux populations par la suite de

17 FREI RE P., La pédagogie des opprimés, Paris : La Découverte / Maspéro, «Petite Collection Maspéro», 1983, 202 p.

changer la situation. Ces actions menant possiblement au soulèvement populaire se soldent parfois par la répression et le recul des droits démocratiques.

c. Le paradigme d'un autre développement

Contrairement aux précédents, ce dernier paradigme ne porte pas uniquement sur des considérations matérielles ou économiques, voire politiques. Il inclut le développement des valeurs et des cultures.

A l'origine de plusieurs modèles de communication pour le développement, il privilégie les réseaux et les approches de communication à la base (groupements de base et couches sociales les plus défavorisées) à travers les «petits» médias, ou médias «légers» (radio communautaires, affiches, vidéos, etc.)

Dans ces modèles, les adeptes considèrent que la participation aide à faciliter l'adoption d'activités appropriées, puisque issues des cibles de cet objectif de développement.

La méthodologie des médias communautaires est un des modèles se rattachant à ce paradigme.

d. Les nouveaux modèles de communication

D'autres modèles proposent des conceptions issues des différents paradigmes, en combinant l'approche communautaire avec d'autres pratiques.

On peut noter des approches issues du marketing social, combinant des techniques de communication utilisées pour de petits groupes à l'utilisation de médias à grande échelle.

La conscientisation 18 également, qui tente de donner la parole aux plus démunis dans le but de promouvoir la démocratie et la justice sociale.

Il existe encore bien d'autres modèles et pratiques, influencés tout ou partie par ces trois paradigmes du développement.

18 FREI RE P., La pédagogie des opprimés, Paris : La Découverte / Maspéro, «Petite Collection Maspéro», 1983, 202 p.

Mais malgré cette diversité dans les approches de la communication participative, révélant un champ vaste et complexe, tous les acteurs de la communication s'accordent aujourd'hui sur la nécessité d'inciter les populations à participer à leur propre développement.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo