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La médiation sanitaire: une réponse à  l'insatisfaction du patient

( Télécharger le fichier original )
par Isabelle Jeanneret
Institut universitaire Kurt Bosch IUKB, CH-Sion - Master européen en médiation 2009
  

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2. ETAT DES LIEUX DE LA MEDIATION SANTE EN

EUROPE

La déclaration des droits des patients par l'OMS55 de 1994, issue d'une consultation de 36 pays, poursuit l'objectif de promouvoir le développement de ces droits en Europe selon des principes et des stratégies communs. Fin 2002, une charte européenne émanant du Conseil de l'Europe et de l'OMS réaffirme cette volonté en précisant quatorze droits qui semblent menacés56. Dès la fin des années 90, leur intégration dans les cadres législatifs respectifs s'amorce. Cependant, l'enjeu est complexe : non seulement ces nouveaux droits redéfinissent la relation thérapeutique et les rapports entre les institutions hospitalières et les citoyens, mais ils questionnent aussi la pertinence des dispositifs usuels de régulation sociale. En cas d'insatisfaction ou d'erreur médicale, le droit de plainte remet en cause leurs aspects normatifs administratifs ou juridiques ne répondant pas aux cas particuliers du contexte sanitaire singulièrement complexe. Le constat du gouvernement belge à cet égard est probant :

«... le patient qui rencontre des problèmes à la suite d'une intervention d'un praticien professionnel ignore souvent à qui les soumettre et quelle action entreprendre. De nombreux problèmes restent donc sans solution et un sentiment de malaise s'installe chez le patient. Si le patient entreprend [...] des démarches, il est rare qu'il bénéficie de toute l'écoute souhaitée [...] en justice, les procédures sont souvent très longues et très onéreuses et ne débouchent que rarement sur une solution»57.

La protection des intérêts du patient appelle donc les politiques à rechercher de nouveaux moyens non juridictionnels d'envisager la création de cohésion sociale :

55 A. Jacquerye, «Etude exploratoire de la médiation hospitalière », Fondation Roi Baudoin, Belgique, 2007, p. 11 : « Droits des patients composés de 5 thèmes : les droits humains et valeurs dans les soins de santé, l'information, le consentement, la confidentialité et la préservation de l'intimité, les soins et le traitement»

56 14 droits essentiels de l'individu sont réaffirmés dans cette charte : droit à des mesures de prévention, droit

d'accès, droit à l'information, droit au consentement, droit au libre choix, droit à la vie privée et à la confidentialité, droit à la rapidité, droit à l'observance de standards de qualité, droit à la sécurité, droit à l'innovation, droit d'éviter les souffrances inutiles et la douleur, droit à un traitement personnalisé, droit à la réclamation, droit de compensation

http://www.activecitizenship.net/index2.php?option=comdocman&task=docview&gid=22&Itemid=86

57 E. Volckrick in «Médiation et santé : actes du colloque CEMAJ-IDS, O. Guillod et C. Guye-Ecabert, 1er juin 2007, Ed. Weblaw Berne, Schülthess Zürich-Bâle, 2008, p 22

«La médiation se présente comme un dispositif qui ne pose pas à priori un modèle de pertinence normative. Elle convoque différents registres normatifs et cognitifs et ouvre l'espace non pas à une objectivation mais à une co-construction interprétative58».

Se référant à une recherche belge sur «l'évolution des politiques publiques» dans le domaine de la santé mentale, Elisabeth Volckrick décrit le modèle de «l'Etat-réseau» qui tend à prendre forme et à remplacer «l'Etat-providence» :

«Premièrement, il s'accompagne d'une nouvelle sémantique : y apparaissent des termes comme négociation, proximité, contrat, projet, efficacité, flexibilité, management, satisfaction, responsabilisation, citoyenneté, client, partenariat, ... et aussi médiation. Deuxièmement, si on associe l'Etat-réseau à des droits, ce serait à une extension et à une complexification des droits de l'homme vers ce que l'on a appelé des droits moraux, des droits de participation, des droits culturels ... mais aussi vers une nouvelle manière d'envisager d'anciens droits [...] l'action de l'Etat-réseau [...] s'appuie sur de nombreux intervenants aux statuts très différents : des associations, par exemple, vont accompagner des exigences éthiques de respect des usagers59».

Les mutations sociales profondes et les nouveaux repères qui se dessinent renvoient à l'autonomisation et à la responsabilisation du citoyen-patient, censé désormais prendre en charge sa santé et faire respecter ses droits, nouvelle posture qui interroge sa relation de dépendance face au professionnel de la santé. L'idée de médiation dans le domaine sanitaire est le reflet de cette évolution - passage entre la modernité et la post-modernité que Jacques Faget n'hésite pas à qualifier de «rupture»60 - et de la recherche d'un nouveau mode de gouvernance de «sociétés complexes». Son expansion dans tous les champs sociaux rappelle à l'auteur la fluidité de l'eau s'infiltrant dans tous les espaces sociaux en se conformant aux conditions environnementales auxquelles elle est soumise :

«Adoptant les lois de la propagation des fluides, cet outil des temps brouillés, affranchi des adhérences institutionnelles et des logiques d'ordre, se répand à la manière d'une matière mouvante, élastique, s'immisçant dans les interstices, épousant les formes de son contenant, se coulant dans des contextes sociaux et institutionnels très diversifiés. La nécessité d'aménager des jeux de passage entre des échelles, des espaces et des temporalités multiples et enchevêtrées, conduit à concevoir des modalités flexibles, adaptables, modulables de régulation61».

58 Ibidem, p 20

59 Ibidem, pp. 20-21

60 J. Faget, «Médiation et action publique - La dynamique du fluide», Ed. Presse universitaire de Bordeaux, 2005, p. 19

61 Ibidem, p. 12

Pour lui, la légitimité d'un pouvoir s'acquière aujourd'hui par ses efforts qui traduisent «sa capacité à produire du flux, du mouvement, à créer de nouveaux espaces où se bricolent des micro-ajustements62».

L'état des lieux présenté vise à identifier, sous l'angle de sa «dynamique fluide», l'essor et les modalités d'adaptation de la médiation sanitaire articulée au respect des droits des patients dans le contexte de l'Union Européenne et en Suisse, plus précisément dans sa partie francophone.

2.1 Expériences au sein de l'Union européenne (UE)

L'analyse porte sur la Norvège, le Royaume-Uni, la Belgique et l'Italie, choix représentatif de l'UE dans une logique Nord-Sud et repose sur les cadres légaux relatifs aux droits des patients, la place de la médiation dans les procédures de gestion des plaintes et la typologie des modèles implantés. Les sources d'informations proviennent d'une étude exploratoire belge de la Fondation Roi Baudoin, éditée fin 2007 et les actes du colloque «Médiation et santé» organisé par l'Institut suisse du droit de la santé en juin 2007. Nous tenterons de classifier ces modèles selon trois profils distincts décrits par Jacques Faget63: l'approche nominaliste, normative et substantialiste de la

62 Ibidem, p. 12

63 Ibidem, pp.13-14-15 :

« Une approche nominaliste : la médiation c'est ce que l'on baptise ainsi. Rentrent alors dans son champ tous les programmes qui s'en réclament. On peut citer, entre autres exemples, la médiation des apprentissages, la médiation culturelle ou la médiation thérapeutique [...]. Le terme médiation semble convoqué pour authentifier le caractère novateur des projets développés [...] adopter une approche normaliste présente l'avantage d'éviter le débat complexe sur la ligne de démarcation entre ce qui est et ce qui n'est pas de la médiation et d'avoir une vue d'ensemble des usages d'un terme qui doit probablement son succès à son imprécision[...].

Une approche normative : sont qualifiées de médiations les pratiques sociales qui correspondent à des critères éthiques, élaborés par des praticiens et des universitaires, constituant une «doxa». Ce qui fonde la médiation, c'est avant tout la posture du tiers. Elle est un processus consensuel de construction ou de réparation du lien social et de gestion des conflits dans lequel un tiers impartial, indépendant (mediare, étymologiquement être au milieu) et sans pouvoir décisionnel, tente, à travers l'organisation d'échanges entre les personnes ou les institutions, de les aider soit à améliorer, soit à établir une relation ou régler un conflit. Dans cette conception restrictive sont disqualifiées toutes les pratiques qui s'affranchissent de cette éthique et le concept de médiation - et donc les techniques d'intervention qui s'en réclament - est inaltérable, quelles que soient ses niches institutionnelles ou sociales. La posture du tiers est rigoureusement la même dans tous les champs de la médiation et ne saurait fluctuer au gré de leur fragmentation [...]. Ce courant est représenté en France par Jean-Pierre Bonafé-Schmitt [...], M. Guillaume-Hofnung [...], J-F. Six .

Une approche substantialiste : la médiation est un terme générique dans lequel il faut inclure toutes les façons non verticales (par opposition à la force, au jugement, à l'arbitrage...) de réguler les conflits ou d'établir la communication. On nomme ainsi tout processus qui participe à la résorption des antagonismes et facilite la production d'un monde commun. Le terme est alors souvent confondu avec la négociation, le compromis, la conciliation, la régulation ... Cette approche qui définit la médiation par ses objectifs la considère comme un processus de production d'une vision du monde dont la fonction est de maintenir de la cohésion, de produire du global dans une société qui part en morceaux. De ce point de vue, largement adopté par les politologues, l'Etat est un médiateur et ses représentants ou les élus ont une double fonction : cognitive, ils aident à comprendre le monde, le rendent intelligible, lui donnent du sens et normative, ils définissent des critères d'action pour sa transformation ».

médiation. A noter que l'analyse du Royaume-Uni et celle de l'Italie se limitent aux exemples spécifiques de l'Angleterre et de la Toscane.

2.1.1. En Norvège

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote