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L'arbitrage en droit de la propriété intellectuelle dans l'espace oapi

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par Charles Marcel DONGMO GUIMFAK
Université de Yaoundé I - SOA - Master 2 en Droit de la propriété intellectuelle 2009
  

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c - La notion de l'ordre public et ses effets

L'ordre public, chacun le sait, est protéiforme109(*). Il a été impossible jusqu'ici de donner aux mots d'ordre public une définition uniforme110(*). La notion en effet, est abstraite et difficile à cerner avec précision, car elle est fonctionnelle, aux contenu et objectifs variant suivant le temps et l'espace. Le flou de la notion serait consubstantiel au rôle que l'ordre public est appelé à jouer.

Le second obstacle à la compétence arbitrale est que la question soumise soit de la nature de celles qui « intéressent l'ordre public ». Encore faut-il s'efforcer de relier la notion de l'arbitrabilité à l'ordre public. L'enjeu est qu'une sentence arbitrale serait nulle non pas en raison de ce que l'arbitre décide, mais en raison du fait que la sentence serait intervenue là où seule la juridiction étatique est compétente111(*). En ce sens, en matière de l'arbitrage commercial international et de l'ordre public, l'accent est mis sur le point de savoir si un différend peut faire l'objet d'un recours devant un arbitre international. C'est l'ordre public qui constitue le fondement à retenir pour apprécier le caractère arbitrable ou inarbitrable d'un différend.

La liaison de l'ordre public à l'arbitrage international pose d'intéressantes questions d'intervention de l'ordre public à différentes phases respectives de la procédure arbitrale. Dans une première phase, il est évident que l'ordre public joue un rôle prépondérant dans l'appréciation de l'arbitrabilité du litige et de la validité de la convention d'arbitrage. Dans une seconde phase, l'ordre public est devenu la référence nécessaire dont l'arbitre international ne peut méconnaître le contenu lors de la détermination du droit applicable. Dans une dernière phase, l'ordre public peut intervenir dans le contrôle éventuel par le juge étatique sur la sentence rendue.

Les articles 36 et 577 du code de procédure civile camerounais, en excluant d'une manière générale l'arbitrage dans un certain nombre de causes qui intéressent l'ordre public, visaient donc l'ordre public au sens premier, c'est-à-dire certaines règles qui ont pour finalité directe d'assurer le respect d'intérêts supérieurs de la société dont une partie de ces intérêts sont jugés trop importants pour être soustraits aux arbitres.

Il faut noter que le Code de procédure civile parle bien de causes un peu à l'image du code civil du Québec qui parle de « questions » et non de « matières », comme le prévoit l'article équivalent du Code civil français. Cela signifie qu'il faut regarder l'objet du litige - ce qui renvoie à la mission de l'arbitre - et non la sphère plus globale dans laquelle il s'inscrit. D'ailleurs, en France, c'est ainsi que l'article 2060 est interprété pour des raisons évidentes : « L'arbitrage serait ainsi cantonné aux matières qui relèvent exclusivement de l'autonomie de la volonté et des règles supplétives. Or il est clair que l'encadrement des conventions privées par un droit économique impératif est aujourd'hui tel que bien peu de litiges pourraient encore être valablement soumis à l'arbitrage »112(*).

Du prime abord, il est constant que l'inarbitrabilité d'un différend n'est pas conditionnée par la seule présence des règles à caractères d'ordre public.113(*) Autrement dit, le fait que les règles d'ordre public soient mises en cause dans le litige, ne fait pas obstacle à l'arbitrabilité,114(*) même si certains auteurs ont prétendument déduit de l'article 2060 du Code civil que la seule présence en la cause d'une disposition d'ordre public rendait les droits litigieux ipso facto indisponibles, et dès lors, que le litige était inarbitrable115(*).

L'important réside dans la question de savoir si l'arbitre peut juger auparavant sur sa propre compétence et qu'en raison du principe d'autonomie de la clause compromissoire, il est judicieux de reconnaître le pouvoir de sanctionner la violation d'ordre public aux arbitres commerciaux internationaux. La volonté présumée des parties ne peut servir de justification au principe qui veut que le tribunal arbitral décide lui-même sur les objections à sa compétence116(*).

En jurisprudence, le sujet est très abordé. Deux arrêts de principe ont été rendus en la matière : Il convient de citer ici la formule qu'a jugée la Cour d'appel dans l'arrêt Ganz : « en matière internationale, l'arbitre a compétence pour apprécier sa propre compétence quant à l'arbitrabilité du litige au regard de l'ordre public international et dispose du pouvoir d'appliquer les principes et règles relevant de cet ordre public, ainsi que de sanctionner leur méconnaissance éventuelle, sous le contrôle du juge de l'annulation »117(*).

La portée de l'arrêt Labinal est toute autre. La cour y ajoute que « l'arbitrabilité du litige n'est pas exclue du seul fait qu'une réglementation d'ordre public est applicable au rapport de droit litigieux »118(*). Il met ainsi fin au principe, qui était la source de difficulté, selon lequel la juridiction arbitrale ne pouvait sanctionner une violation d'ordre public car une telle prérogative n'appartenait qu'aux tribunaux de l'Etat119(*).

Depuis les arrêts Ganz et Labinal, il n'y a plus de distinction à faire entre ordre public interne et ordre public international, l'arbitre interne et l'arbitre international sont habilités à sanctionner toute violation de l'ordre public120(*). Ainsi, l'arbitre qui constate une contrariété à l'ordre public, a le pouvoir de la sanctionner lui-même, par exemple en prononçant la nullité du contrat. Plus généralement, il est compétent pour appliquer les règles d'ordre public121(*). Lorsqu'un arbitre est appelé, dans le cadre de son mandat, à appliquer les règles d'ordre public, il doit les appliquer correctement, de la même façon que les tribunaux étatiques.

Ces arrêts dégagent ainsi le principe de compétence-compétence en droit français de l'arbitrage international. En vertu de ce principe, ce n'est qu'a posteriori que les juridictions étatiques contrôlent une sentence sur la compétence ou vérifient si le tribunal arbitral a bien respecté les limites de sa mission.122(*) Ainsi, il est également important de souligner que la question du contrôle sur les sentences ne porte pas sur la question de révision au fond du litige. Toutefois, force est de constater que l'efficacité du choix opéré par les arbitres connaît également, comme le cas du droit applicable choisi par les parties, une exception qui est l'exception de l'ordre public. Le juge arbitral afin de rendre sa sentence internationalement efficace, doit se préoccuper de la conception locale de l'ordre public international et de celle qui résulte de l'ordre public transnational ou réellement internationale123(*).

Mais il est nécessaire, et en plus difficile, de donner une certaine et exacte définition de l'ordre public transnational. On peut la définir comme un mécanisme défendant des valeurs, non pas propres à un ordre juridique national, mais adoptées par « la communauté internationale »124(*). Il serait lors plus prudent et plus sage pour les arbitres, de se placer du point de vue des exigences de la conception de l'ordre public international du Juge étatique du contrôle de la sentence que du point de vue de l'ordre public purement international. Cela paraît évident à partir du moment où l'arbitrabilité va dépendre au bout du compte des exigences de la conception de l'ordre public international dont tient compte le Juge du contrôle de la sentence. Comme c'est ce Juge qui aura le dernier mot, c'est cette conception qui doit prévaloir en effet aux fins de la reconnaissance et de l'exécution de la sentence, et non les exigences d'un ordre public réellement international hypothétique125(*). Ceci est d'autant plus vrai que le Professeur GAILLARD admet lui-même que l'arbitre international doit se placer du point de vue des exigences d'un ordre public réellement international « sous réserves de considérations d'efficacité de sa sentence ».126(*)

Finalement, il est exact que l'existence d'une règle d'ordre public ne suffit pas à rendre le différend inarbitrable. Décider le contraire reviendrait à retirer tout intérêt à l'arbitrage. L'appréhension de ces généralités conduit à l'étude des particularités de l'arbitrabilité des différends relatifs à la propriété intellectuelle.

* 109 Idem, p. 3.

* 110 Henri MOTULSKY, Etudes et notes sur l'arbitrage, Dalloz, 1974. p. 64.

* 111 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 386.

* 112 J.B. BLAISE, note sous Cass. Com. 21 oct. 1981 : Rev. Arb. 1982, p. 279. Voir aussi É. LOQUIN, op. cit., note 20, paragr. 3 et s.

* 113 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 388.

* 114 Nicolas NORD, Ordre public et lois de police en droit international privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003. p. 138.

* 115 Charles JARROSON, op.cit., p. 3.

* 116 Homayoon Arfazadeh, Ordre public et arbitrage international à l'épreuve de mondialisation, LGDJ, 2005. p. 46.

* 117 C.A Paris, 1re ch. Suppl., 29 mars 1991, Rev. Arb. 1991.478, note L. Idot.

* 118 C.A Paris, 1re ch. Suppl., 19 mai 1993, Rev. Arb. 1993.645, note C. Jarrosson.

* 119 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, op. cit., p. 387.

* 120 Antoine Kassin, L'autonomie de l'arbitrage commercial, l'Harmattan, 2006, n°319, p. 189.

* 121 J. Béguin, G. Bourdeaux, A. Couret, B. Le Bass, D. Mainguy, M. Menjucq, H. Ruiz Fabri, C. Seraglini, J.M. Sorel, Traité du droit du commerce international, Litec, 2005. p. 908.

* 122 Voir les article 11 de l'AUA, 10.3 du règlement d'arbitrage de la CCJA, 10 du règlement d'arbitrage de la CACI, 15.3 du règlement d'arbitrage du GICAM et 29 du règlement d'arbitrage de la CCIAD.

* 123 P. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996. p. 854 et p. 895.

* 124 Nicolas NORD, Ordre public et lois de police en droit international privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003. p. 146.

* 125 Antoine Kassin, op. cit., p. 186.

* 126 GAILLARD, traité, n°559.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus