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Ressources fourragères et représentations des éleveurs, évolution des pratiques pastorales en contexte d'aire protégée. Cas du terroir de Kotchari à  la périphérie de la Réserve de biosphère du W au Burkina Faso

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par Issa Sawadogo
Museum national d'histoire naturelle de Paris (ED 227) - Docteur du museum national d'histoire naturelle spécialité physiologie et biologie des organismes  2011
  

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4.3.3.2. La diversité floristique des unités paysagères pastorales : les

diversités alpha (richesse S, équitabilité E) bêta (J) et gamma (S Chao2)

La richesse moyenne locale (S) en espèces herbacées des unités paysagères est de 19 à 52 espèces (tableau IV-8). Bien que la richesse spécifique soit très variable entre relevés, on observe qu'elle est plus faible dans l'aire protégée (19 à 23) qu'en dehors de l'aire protégée (29 à 52). En dehors de l'aire protégée, cette richesse en espèces est plus élevée sur sols moyennement ou peu profonds (UPP3, UPP4, UPP5) que sur sols profonds hydromorphes (UPP1 et UPP2). Toutefois, la richesse des buttes et cuirasses (UPP6) est relativement faible et équivalente à celle des unités sur sols profonds (UPP1 et UPP2). Dans l'aire protégée l'unité UPw4 peut être considérée comme unité de transition, sa richesse en espèces herbacées est plus grande que celles des unités de savane arborée et boisée à pérennes (UPw3) et des affleurements rocheux et cuirassés (UPw1).

L'indice d'équitabilité E de Pielou varie d'un minimum de 0,62 pour les savanes arborées et boisées à pérennes de sols profonds de l'aire protégée (UPw3) à un maximum de 0,89 pour les mosaïques agroforestières sur sols ferrugineux lessivés indurés ou unités cultivées (UPP5) (tableau IV-8). Les valeurs enregistrées indiquent que les unités sont presque toutes homogènes car elles sont soit légèrement inférieures ou alors supérieures à 0,80, valeur considérée comme traduisant une forte homogénéité de la végétation d'un milieu (Daget, 1976). De manière générale, la composition floristique des unités paysagères est plus équitablement répartie en périphérie (0,79 à 0,89) que dans l'aire protégée (0,62 à 0,73). Enfin, que ce soit dans l'aire protégée ou en dehors de celle-ci, plus les sols sont superficiels et secs, plus la valeur de l'équitabilité augmente.

L'indice de similitude de Jaccard (J) qui traduit la similitude spécifique entre les relevés d'une même unité paysagère varie entre 0,46 (forte diversité â) pour l'unité de savane arbustive de l'aire protégée (UPw4) qui est la plus hétérogène et 0,91 (faible diversité â) pour l'unité d'affleurements et de cuirasse de la même entité (UPw1) qui est la plus homogène. La diversité entre placeaux reflète ici la diversité des unités paysagères en termes de groupes agrostologiques, les unités les plus hétérogènes (UPW4, UPW3, UPP4, UPP6) étant composées de plusieurs groupements agrostologiques, les plus homogènes (UPW1, UPP1,

Chapitre IV. Les unités agrostologiques UPP3, UPP2, UPP5) n'en comportant qu'un seul. Ceci confirme les observations faites précédemment (tableau IV-6).

Tableau IV-8. Valeurs de diversités intra placeau (S, E) et inter placeaux (J) des unités paysagères pastorales du terroir de Kotchari (moyenne #177; écart-type).

Unité paysagère
pastorale

Richesse
spécifique (S)

Equitabilité
de Pielou (E)

Indice de similitude
de Jaccard (J)

UPP1

35,20 #177; 1,48ab

0,79 #177; 0,01abc

0,88 #177; 0,06c

UPP2

29,25 #177; 3,30 ab

0,81 #177; 0,01abc

0,80 #177; 0,08bc

UPP3

45,33 #177; 1,53b

0,83 #177; 0,02bc

0,85 #177; 0,21bc

UPP4

45,50 #177; 12,88b

0,84 #177; 0,04c

0,66 #177; 0,11b

UPP5

51,67 #177; 1,53b

0,89 #177; 0,01c

0,82 #177; 0,06bc

UPP6

32,00 #177; 7,55ab

0,82 #177; 0,01abc

0,73 #177; 0,04b

UPw3

19,00 #177; 3,16a

0,62 #177; 0,06 a

0,55 #177; 0,19ab

UPw4

23,00 #177; 3,91a

0,69 #177; 0,03ab

0,46 #177; 0,14 a

UPw1

20,00 #177; 1,73a

0,73 #177; 0,07abc

0,91 #177; 0,03c

Sur la même colonne, les valeurs portant les mêmes lettres ne sont pas significativement différentes au seuil de 5%.

La diversité régionale, ou diversité ã, évaluée par le calcul de la richesse estimée (Schao2) (tableau IV-9) est plus élevée en dehors de l'aire protégée (143,6) qu'à l'intérieur 80,6). Il est ainsi confirmé à cette échelle d'observation que la diversité spécifique des herbacées est moindre dans l'aire protégée.

Tableau IV-9. Diversité gamma (ã) dans le terroir de Kotchari. Comparaison des secteurs dans et hors du Parc du W (valeurs moyennes et écart-type)

Unités Paysagères
pastorales

SChao2

SChao2 moyen SChao2 min (95% IC) SChao2 sup (95% IC)

Parc W 80,56 #177; 4,62a 76,34 98

Hors Parc W 143,64 #177; 1,91b 142,27 152,1

Les valeurs portant les mêmes lettres ne sont pas significativement différentes au seuil de 5%.

Nos résultats indiquent que la richesse spécifique herbacée est plus élevée à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'aire protégée. Des observations analogues ont été faites par plusieurs auteurs dans l'est burkinabé et dans le terroir même de Kotchari (Hahn-Hadjali et al. 2006; Ouédraogo, 2008 ; Sodré, 2009), mais aussi dans l'ouest burkinabé (Kièma S., 2007). Dans cette dernière région, Devineau et al. (2009) donnent des résultats plus nuancés pour de petites aires protégées très anthropisées.

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La richesse la plus forte en espèces herbacées est observée sur les terres situées entre les parties les plus basses (bas-fonds et plaines) et les plus hautes (buttes rocheuses ou cuirassées) du terroir, qui correspondent aux milieux les plus anthropisés (UPP5, UPP4, UPP3) (milieux les plus aptes à la culture, jachères de divers âges bien pâturées). La richesse spécifique des milieux équivalents à l'intérieur du Parc est moindre, ainsi que leur équitabilité. Ce dernier indice atteint des valeurs particulièrement élevées dans l'unité la plus cultivée (UPP5). Ce qui indique qu'il s'y déroule une faible compétition entre espèces se traduisant par une dominance d'espèces peu affirmée. Par ailleurs, la grande richesse floristique qui y est observée serait la résultante de perturbation modérée ou intermédiaire (Connell, 1978 ; Sousa, 1979). D'après Connell (1978), en effet, dans les formations naturelles ou peu transformées, quelques espèces les plus compétitives dominent sous le seul effet de l'exclusion compétitive51, à l'inverse, une communauté continuellement perturbée, n'atteint jamais l'équilibre et les espèces endémiques ont une forte probabilité d'extinction. Les deux cas de figure conduisent à une faible diversité floristique. Entre les deux extrêmes (état de perturbation intermédiaire), la diversité est généralement, mais pas toujours (Lubchenco, 1978), plus élevée. Travaillant dans un terroir voisin de Kotchari, Hahn-Hadjali et al. (2006) font des observations comparables. Hors de l'aire protégée, la richesse en herbacées est plutôt faible sur les sols à hydromorphie superficielle, argileux à argilolimoneux humides (UPP1, UPP2) comme cuirassés (UPP6). Devineau et al. (2009) parviennent à des résultats semblables dans l'ouest burkinabé : ils mettent en évidence l'influence des facteurs édaphiques mais aussi celle de l'usage des terres sur la diversité des peuplements herbacés. Ils montrent que la perte de fertilité chimique par lessivage n'affecte pas la richesse de la strate herbacée, celle-ci reste élevée sur les terres les plus exploitées. César (1991) explique d'ailleurs que les phorbes ubiquistes, notamment les légumineuses fixatrices d'azote, s'accommodent de tels milieux épuisés (baisse de la richesse en azote) tandis que les graminées ne peuvent y subsister. L'effet d'enrichissement de la strate herbacée qui résulte de la pratique de la jachère a par ailleurs été clairement démontré. En zone soudanienne en effet, la reconstitution de la strate herbacée des jachères, sur 10 à 30 ans selon le contexte, se fait par une succession d'espèces messicoles (les adventices) puis savanicoles ; les mêmes observations ont été faites dans les savanes du nord de la Côte d'Ivoire par César (1991) et dans l'ouest burkinabé par Hien (1996), Fournier et al. (2001) et Botoni-Liehoun et al. (2006). À chaque étape de ce processus, dont la première phase (1 à 10 ans) est marquée par un remaniement (Zoungrana, 1993), le milieu s'enrichit en espèces diverses, qui cohabitent momentanément sans dominance affirmée (phénomène de chevauchement) avant de se substituer aux précédentes. La dissémination par le bétail y joue un rôle important comme vectrice d'espèces colonisatrices d'espaces ouverts (Devineau 1999). Ce qui pourrait être le cas de certaines espèces comme Zornia glochidiata, Tephrosia pedicellata, Crotalaria spp., Indigofera spp. (Légumineuses), Spermacoce spp. Sida spp., Commelina spp. (C. diffusa, C. forskalaei & C. benghalensis) qui sont bien représentées avec parfois de fortes

51 Le principe d'exclusion compétitive ou principe de Gause (ou encore principe d'exclusion réciproque) (Gause, 1935 ; Dajoz, 1982) est un concept central en écologie fondamentale (biologie des populations) selon lequel des populations de deux espèces partageant exactement la même niche écologique dans un milieu stable ne sauraient cohabiter indéfiniment. A plus ou moins long terme, l'espèce la plus adaptée (ie : la plus compétitive) éliminera l'autre.

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contributions spécifiques. Dans l'aire protégée, nos observations indiquent que l'unité UPw4 est l'unité la plus pâturée illégalement, en témoigne la présence d'espèces herbacées de milieux anthropisés comme Digitaria spp., Brachiaria spp. et même Tephrosia pedicellata. La contribution de ces espèces est cependant infime indiquant alors que cette présence animale est nettement moindre qu'en périphérie du parc. Ces espèces indicatrices d'anthropisation s'observent également en des proportions encore plus faibles sur les affleurements (UPw1), Ceci suggère que les éleveurs fréquentent surtout les plateaux puis les affleurements et évitent les bas-fonds. L'enrichissement en espèces herbacées est perceptible tant à l'échelle locale (á) lors des phases de chevauchement de la succession post culturale qu'à l'échelle du paysage (â et ã) par diversification des milieux qui présentent chacun un stade différent de reconstitution.

L'ensemble de ces observations confortent l'idée souvent exprimée que la pression anthropique, jusqu'à un certain niveau, est un facteur d'accroissement de la richesse spécifique (Connell, 1978 ; Sousa, 1979; Bourlière & Hadley, 1983; Cole, 1986; César 1992; Scholes & Walker, 1993; Huston, 1994; César 1994 & 2005; Rakotoarimanana et al. 2001; Rakotoarimanana et al. 2008). Sous d'autres climats ou avec une anthropisation - notamment une pression de pâture - plus intense une diminution de la richesse floristique peut être observée comme par exemple au Sahel (Hiernaux, 1998) ou dans une savane humide de Madagascar (Rakotoarimanana et al. 2008). Quand aux valeurs plus élevées de l'équitabilité hors des espaces protégés, elles s'expliquent par une perturbation relativement plus importante qui limite la dominance des espèces.

Le rôle des aires protégées dans la conservation de la diversité biologique en région de savane est diversement apprécié. Si des études mettent en évidence une dégradation floristique due à la pression anthropique dans les terres exploitées et la préservation de la flore dans les aires protégées (Guinko et al. 2000), d'autres montrent que la diversité végétale, et plus précisément le nombre d'espèces, ne diffère pas ou est même supérieure en dehors des aires protégées (Shackleton, 2000; Hahn-Hadjali et al. 2006; Gardner et al. 2007). Il importe cependant de ne pas oublier que l'évaluation de la diversité végétale peut varier en fonction de l'échelle à laquelle elle est étudiée ou encore selon les critères pris en compte (Devineau et al. 2009). Ainsi, dans le cas de Kotchari, malgré le nombre d'espèces herbacées plus important hors de l'aire protégée, on y note la régression drastique des espèces caractéristiques de la savane soudanienne, notamment les herbes pérennes, sous l'effet de la pression d'exploitation, en particulier la pâture. Cette pression favorise l'installation des herbes annuelles qui, par ailleurs, s'adaptent mieux aux conditions pédoclimatiques médiocres ou perturbées (César, 1992 ; Fournier & Nignan, 1997).

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery