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Ressources fourragères et représentations des éleveurs, évolution des pratiques pastorales en contexte d'aire protégée. Cas du terroir de Kotchari à  la périphérie de la Réserve de biosphère du W au Burkina Faso

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par Issa Sawadogo
Museum national d'histoire naturelle de Paris (ED 227) - Docteur du museum national d'histoire naturelle spécialité physiologie et biologie des organismes  2011
  

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6.3.4. Représentations versus pratiques : les éleveurs et leurs troupeaux à l'épreuve du terrain

Divers travaux décrivent la chaîne de pâturage annuelle et permettent de suivre les différents milieux que les troupeaux occupent au fil de l'année. Les spécialistes qui se sont intéressés à la question (Guillaud, 1994 ; Daget & Godron, 1995 ; Kagoné, 2000 ; Petit, 2000a ; Diallo, 2006 ; Kièma S., 2007 ; Dongmo, 2009 ; Vall & Diallo, 2009) montrent qu'en saison pluvieuse (Ndungu / Ku siagu) les éleveurs se replient sur les hauteurs, en particulier

collines mais aussi plateaux et hauts glacis aux sols peu profonds, endroits généralement bien secs aux sols fermes et incultes. Ils évitent ainsi des risques notamment sanitaires (pathologies et accidents mécaniques) liés à l'humidité et des risques de conflits liés aux dégâts champêtres éventuels. Dès que ces risques commencent à diminuer du fait de la cessation des pluies et / ou de la récolte des cultures, les éleveurs commencent à descendre avec leurs troupeaux en direction des parties des terroirs les plus basses (plateaux et plaines susceptibles de regorger de l'eau ou de permettre d'en rechercher (puisards) en saison sèche chaude ou saison de soudure (Ceedu & Kotoga / Ku tontogu & A sakoana). En début de saison sèche (Dabunde), la vaine pâture va maintenir pendant un bon moment les troupeaux sur les zones cultivées (UPP5 et aussi UPP3 et UPP1). Lorsque la saison « de soudure » arrive, les unités pastorales sont toutes appauvries en fourrage et la plupart en eau. Les milieux pouvant proposer de l'eau ou permettant d'en rechercher par le creusage de puisards (Mbundu en langue peule) deviennent alors importants. Par ailleurs, les premières pluies (pendant Kotoga-Korse / A sakoana), vont occasionner l'émergence de jeunes pousses d'adventices très recherchées sur ces milieux cultivés et qui vont y attirer les troupeaux (Petit, 2000a).

Ce schéma général, qui est pratiquement celui que nous avons pu reconstituer théoriquement en focus group avec nos éleveurs (voir représentations ; figures VI-12a & VI-13a), est respecté dans la plupart des circuits que nous avons enregistrés. Quelques ajustements révèlent des situations particulières locales relatives à la conformation du terrain, aux pratiques et à la personnalité du bouvier.

Le troupeau gourmantché du groupe d'éleveurs sédentaires (TrpC1-2G) se trouve dans un secteur où en saison des pluies, la concentration des champs est importante surtout sur les bas-fonds (UPP1 : Ku bagu), les plaines et bas-glacis (UPP3 : Li tinbuali) et une bonne partie des plateaux et hauts glacis (UPP4 : Li tinmuali et U gbanu). Le bouvier ne dispose alors en définitive que de la chaîne du Gobnangou sur laquelle il passe le maximum de son temps. La petite taille du troupeau, du coup plus facile à contrôler, permet au bouvier de prendre le risque de pâturer dans les espaces interstitiels surtout sur les plateaux nettement plus intéressants (plus forte biomasse de meilleure qualité). La prise de risque est claire puisqu'avant même les récoltes, les parties sèches des bas-fonds, encore occupés en grande partie de sorgho, sont visitées. De plus, ce troupeau, contrairement à ce qu'on aurait pu attendre, n'est pas présent dans les bas-fonds en fin de saison sèche (A sakoana). C'est parce qu'il a commencé à être complémenté (fourrage en stock ; boisson à base de son) dès le début de la saison sèche chaude (Ceedu), ce qui évite alors de s'éloigner de son campement. Le seul bas-fond situé à proximité est très dégradé parce que l'eau d'abreuvement encore présente y concentre un nombre élevé de troupeaux. Le troupeau étudié l'évite donc. Globalement, les unités les plus exploitées sont celles des buttes rocheuses (UPP6) (saison pluvieuse) et celle des bas-glacis et plaines non inondables (UPP3) (saison sèche).

a. Représentations chez les Gourmantché b. Pratiques chez le troupeau TrpC1-2G

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Figure VI-12. Comparaison entre représentations et pratiques saisonnières de conduite des troupeaux au pâturage chez les éleveurs gourmantchés

D_Ku fowagu (début Ku fowagu): mi-octobre à début-novembre P_Ku fowagu (plein Ku fowagu): novembre à février

Ku tontogu : mars à début mai

A sakoana : fin mai à début juin

Ku siagu : juin à début octobre

Ku bagu= UPP1 (unité de savane arborée sur sol profond hydromorphe à pseudogley de surface)

Ku pugu= UPP2 (unité de savane boisée claire sur plaine inondable et sol hydromorphe à pseudogley de surface) Li tinbuali = UPP3 (unité de savane arbustive de moyen et bas glacis sur sols ferrugineux tropicaux à tâches et concrétions)

U gbanu / Li tinmuali = UPP4 (unité de savane arbustive claire de plateaux et hauts glacis sur sols ferrugineux tropicaux lessivés indurés)

U gbanu / Li tinmuali (champs) = UPP5 (UPP 4 cultivé ; unité de mosaïque agroforestière sur sols ferrugineux tropicaux lessivés indurés)

Li guali / Ku tankiangu = UPP6 (unité de savane arbustive claire de buttes rocheuses et cuirassées).

Le troupeau peul du groupe d'éleveurs résidents sédentaires (TrpC1-2P), pendant la saison pluvieuse (Ndungu), a fréquenté les bas-fonds et plaines voisines dont l'abord est en principe délicat à cause de nombreux champs. Ceci montre que les éleveurs exercent une surveillance continue des ressources du terroir qu'ils exploitent dès qu'une possibilité leur est offerte. Dans le cas considéré, une poche de sécheresse a rendu cette solution possible, certains secteurs de ces unités étant devenus momentanément praticables. Ceci est une preuve que les buttes rocheuses de la chaîne sont plutôt perçues comme une zone refuge (ou zone de repli) que comme un pâturage à part entière, à même de subvenir convenablement aux besoins des animaux. Par ailleurs, la très grande distance qui sépare les plaines inondables de ce secteur, n'encourage pas les bouviers à y conduire le troupeau en début de saison sèche (Dabunde) alors qu'elles sont susceptibles de regorger d'énormes ressources.

Le troupeau peul résident transhumant (Trp) se trouve dans un secteur assez hydromorphe et cloisonné en saison pluvieuse par la forte concentration de champs (sauf sur UPP2) et sans possibilité de repli. L'unité UPP2 prend du coup un rôle capital dans l'alimentation du troupeau à laquelle elle contribue énormément notamment en fin de saison des pluies (Yaamde) et pendant la vaine pâture (Dabunde) où elle vient en complément des parcelles cultivées. Par ailleurs, malgré le risque que représente la fréquentation des unités des plateaux

(UPP4) qui sont, dans ce secteur, en grande partie cultivées, le troupeau s'y rend pendant le Ndungu. C'est parce que les espèces fourragères y sont assez diversifiées et productives (forte biomasse) pour que le risque vaille la peine d'être pris.

Le troupeau peul transhumant non résident (TrpC3) se contente pendant le Dabunde de l'espace que veulent bien lui laisser les agroéleveurs gourmantchés riverains dans les espaces cultivés. Par ailleurs, avec les feux de brousse, assez présents dans le secteur, le troupeau se trouve confiné et il est contraint à de longs déplacements sur les espaces épargnés par le feu ou sur des filets de broussaille entre les champs et surtout sur les parties cultivées et ouvertes à la vaine pâture. En saison sèche chaude, la pression sur les points d'eau du secteur est très élevée et les puisards creusés sont éphémères (nappe phréatique assez basse), ce qui contribue à allonger davantage les distances journalières.

a. Représentations chez les Peul b. Pratiques chez le troupeau TrpC1-2P

c. Pratiques chez le troupeau Trp d. Pratiques chez le troupeau TrpC3

Figure VI-13. Comparaison entre représentations et pratiques saisonnières de conduite des troupeaux au pâturage chez les éleveurs Peuls

Yaamde: mi-octobre à début-novembre Dabunde: novembre à février

Ceedu : mars à début mai

Kotoga / Korse : fin mai à début juin Ndungu : juin à début octobre

Celol= UPP1 (unité de savane arborée sur sol profond hydromorphe à pseudogley de surface)

Loubal= UPP2 (unité de savane boisée claire sur plaine inondable et sol hydromorphe à pseudogley de surface) Loubare = UPP3 (unité de savane arbustive de moyen et bas glacis sur sols ferrugineux tropicaux à tâches et concrétions)

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Banouol / Djolde = UPP4 (unité de savane arbustive claire de plateaux et hauts glacis sur sols ferrugineux

tropicaux lessivés indurés)

Banouol / Djolde (champs) = UPP5 (UPP 4 cultivé ; unité de mosaïque agroforestière sur sols ferrugineux

tropicaux lessivés indurés)

Waamde = UPP6 (unité de savane arbustive claire de buttes rocheuses et cuirassées).

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