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Le web 2.0 et l'édition juridique. Le droit peut-il se passer d'éditeur ?

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par Armelle Nianga
Université Paris 2 Panthéon- Assas - Master 2 sociologie du droit et communication juridique 2009
  

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Partie II: Le web 2.0 et l'information juridique.

Le web 2.0 a non seulement facilité l'accès à l'information juridique et à son actualité, mais a également et surtout libéralisé et démocratisé sa diffusion et son partage. Avec lui, tous les individus dont tout naturellement les auteurs de l`édition peuvent diffuser, partager, échanger, librement et gratuitement des informations juridiques, et en débattre de façon quasi instantanée.

Il est un espace de totale liberté et gratuité, qui parce qu'il permet de lever certains des obstacles engendrés par la diffusion des informations juridiques par le truchement des éditeurs, a dans les premiers temps et dans sa première manifestation: le blog, suscité un engouement majeur chez les juristes.

Au point que certains aient pu y voir un vecteur de transformation de la doctrine131(*) et que ce soit posée la question de savoir s'il n'en viendrait pas à concurrencer ou compléter les revues des éditeurs juridiques et à intégrer le « paysage éditorial juridique français »132(*).

Quatre ans plus tard, malgré toutes ces promesses de succès, le bilan à tirer semble bien loin de l'enthousiasme qui a présidé à l'émergence des blogs...

Les juristes-blogueurs se seraient, dit-on, épuisés...

« La "prédiction" qu'ont faites mes collègues Rolin et Houtcieff l'a été dans une période d'effervescence dans la "prise de plume électronique" et l'émission d'opinions. Quatre années plus tard, on se rend compte que cette période de bouillonnement est passée, les auteurs s'étant épuisés - à commencer par Frédéric et Dimitri »

Echanges de mails avec le professeur Cedric Manara.

Et les attentions, elles, se seraient reportées vers d'autres applications web 2.0, sans que l'on puisse cette fois clairement distinguer la part des juristes séduits de celle qui ne l`est pas.

I) Le blog de juriste ou l'exemple le plus abouti d' « intégration des outils web 2.0 au « paysage éditorial juridique français »133(*).

De tous les outils du web 2.0, le blog est celui qui a le plus suscité la controverse et les critiques.

Sans doute son antériorité -il est le premier outil web 2.0 à avoir émergé- n'y est pas étrangère, mais cela semble avant tout tenir à cette très grande similitude qu'il présente avec les revues des maisons d'édition juridiques : il est comme elles une tribune d'expression susceptible de toucher un large public et, qui ajoutée à la gratuité, l'instantanéité et à la grande liberté qui l'entourent, en a immédiatement fait une alternative attrayante.

Pour autant, à l'heure du bilan, il semble, que l'impact réel des blogs sur l'accès et la diffusion des informations juridiques n'ait pas été à la hauteur des espérances qu'ils ont pu susciter.

A) Le blog ; une alternative aux revues des éditeurs juridiques ?

On a parfois tendance à l'oublier, mais les éditeurs juridiques sont avant tout des entreprises qui cherchent par leurs ventes à faire du profit.

Et dans l'édition, le chiffre, ce qui fait vendre: ce sont « les signatures »134(*), les « opinions [qui font] autorité ». « Celles, dans la très grande majorité des cas, de professeurs de droit, de magistrats, de hauts fonctionnaires, [et] d'avocats » dont la notoriété acquise avec l`âge semble faire échec aux prédications de Corneille135(*).

Les autres et les jeunes auteurs éprouvent eux ainsi beaucoup de mal à se faire entendre, s'exprimer et être publiés.

Et ce, d'autant plus que les principaux supports et espaces de liberté; ceux qui permettent aux auteurs de se démarquer les uns des autres, de marquer leurs empreintes et de pleinement révéler leur potentialités: les revues, sont également les principaux vecteurs et véhicules des marques des éditeurs, que ces derniers ne peuvent bien évidemment confier à n'importe qui.

Aussi parce que les blogs ont paru pouvoir nourrir les besoins des auteurs rejetés de l'édition et également satisfaire aux envies de liberté des auteurs publiés136(*), leurs avantages par rapport aux revues ont fait l'objet de nombreux éloges de ceux que leur principal détracteur : Félix Rome, a qualifié de « zélateurs de la doctrine virtuelle »137(*).

a) Une alternative attrayante aux revues.

Créer un blog est facile et à la portée de tous138(*), mais ce n`était pas là pour les zélateurs de la doctrine virtuelle son seul avantage...

Les blogs recélaient pour eux de potentialités qui en faisaient de véritables concurrents des revues des éditeurs juridiques.

1. Leur gratuité et leur capacité à capter les auteurs des revues :

Contrairement aux produits de l'édition juridique traditionnelle, « l'accès aux blogs et leur diffusion se font sans bourse délier »139(*).

Aussi, leur gratuité est très vite apparue comme un atout majeur susceptible de séduire à la fois les auteurs et les publics de l'édition :

· Les auteurs de l'édition qui parce qu'ils « ont besoin [d'être publiés] pour se faire un nom et progresser dans leur carrière » écrivent pour les revues « sans être payés » ou pour des rémunérations très faibles et sont ainsi exclus des profits que réalisent les maisons d'édition juridiques, pourtant, essentiellement assis sur eux: la valeur ajoutée140(*) qui justifie le coût élevé des produits des éditeurs juridiques est « fonction de la richesse d[es] contenus »141(*)elle-même fonction de la compétence des auteurs.

Ainsi, pour les « zélateurs de la doctrine virtuelle », les tribunes gratuites et faciles à élaborer d'audience a priori équivalentes à celles des revues, que semblaient constituer les blogs ne pouvaient que détourner les auteurs de l'édition qui faute d'y trouver un intérêt financier n'auraient aucune raison de s'y maintenir.

· Les publics de l'édition qui au bénéfice de cette fuite des auteurs, pourraient trouver dans les blogs des contenus équivalents à ceux de l`« édition juridique » et n'auraient plus aucune raison de continuer de rémunérer, cher de surcroît, les éditeurs pour une information qui leur serait mise à disposition gratuitement par une « doctrine virtuelle ».

2. Leur réactivité.

Le blog a fait émergé l'éventualité d'« une doctrine instantanée » qui réagirait aux actualités juridiques « quasiment en temps réel», « là où une revue classique fait patienter, des jours, des semaines ou des trimestres »142(*).

3. « La liberté qui irrigue » leur « conception »143(*).

« Les blogs offrent » aux auteurs « une totale liberté de formats et de sujets ». Ils sont des espaces de liberté qui contrastent avec la grande rigidité des revues. De là, est née l'idée que les auteurs de l`édition « ne [pourraient] qu'apprécier n'être soumis à d'autres contraintes que celles qu'ils fixe [raient] eux-mêmes. »144(*)

Dans les revues, il leur faut, en effet, sans cesse composer avec les exigences [...] des éditeurs »145(*):

· Respecter les délais, qui leur sont impartis :

Si le blogueur blogue quand il veut, les revues sont des périodiques qui paraissent à des intervalles réguliers et sont soumis à des contraintes de temps.

· Répondre « aux exigences scientifiques de la revue »:

Si les « zélateurs »  comme les détracteurs de « la doctrine virtuelle » s`accordaient à dire que la censure des comités des lectures et des conseils scientifiques était quasi inexistante, les auteurs n'en sont pas moins soumis à des exigences de fond.

Leurs articles doivent s`inscrire dans la « ligne éditoriale [des] revue[s]  », « dans la thématique [des] numéro[s] »146(*) et sont, de plus, soumis au contrôle des éditeurs qui parce qu'ils assument la responsabilité des écrits se posent en « gardien[s] vigilant[s] du langage juridique », imposent « l'objectivité et la neutralité du discours » et censurent « les critiques exagérées et les opinions sectaires ».

· Respecter les contraintes « d'ordre quantitatifs »:

Le style n'est pas la seule contrainte à peser sur les auteurs, leurs articles doivent également respecter les dimensions imposées par les éditeurs147(*).

4. Son ouverture.

On l'a vu, la confiance et le succès des revues juridiques reposent en partie sur l'assise des auteurs qui écrivent pour elles et, qui pour les éditeurs « ne s'acquiert qu'avec l'âge. »

Aussi, bien que conscients que « les auteurs augmentent en nombre, comme progresse le[ur] besoin de communiquer »148(*), ceux-ci les sélectionnent essentiellement « par le notoire » et n'ouvrent leurs tribunes aux « jeunes enseignants » et aux « praticiens, dont « l'accès à la première publication demeure [...] délicat », que par « souci d'efficacité »149(*) et au prix d'un renforcement de leurs exigences et emprises.150(*)

Ainsi parce que les revues juridiques sont réservées à une élite de juristes essentiellement agrégés, l'ouverture du blog qui donne la parole aux « étudiants novices, [aux] doctorants en herbe, [aux] juristes sans titres universitaires » et même « [aux] parfait anonymes »151(*)s'est présenté comme « une chance et une opportunité »152(*) pour les rejetés de l'édition qui auraient, dès lors, pu se consacrer à leurs écrits et à leurs carrières, sans avoir à s'inquiéter de la question de savoir s'il serait accorder « un moindre égard »153(*) à un article rédigé par un anonyme.

5. Son aspect pratique et interactif.

En ce qu'il est un outil du web 2.0, le blog permet l'échange le débat et « la discussion collective »154(*).

Et, si tout naturellement il couvre le besoin d'échanger et de débattre des publics du premier marché qui n'était à l'époque que très peu couvert par les éditeurs, il favorise également «  le travail en réseau »155(*).

On a ainsi pu y voir un vecteur de développement de communautés de juristes essentiellement universitaires, qui auraient pu y soumettre « à la discussion et à la réflexion collective » « [des] versions de [leurs] travaux et articles en cours ».

* 131 Félix Rome, « Propos iconoclastes sur la "bloghorrée" », Recueil Dalloz; .Jean-Baptiste Solum, « les transformations de la doctrine juridique sous l'influence des blogs »; Geneviève Koubi, « Les écrans de la doctrine du droit lundi 21 juillet 2008 »; Alexandre Claudo, « Multiplication des Blogs juridiques. Vers un déclin de la doctrine ? »

* 132 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, « Blogs juridiques contre Edition juridique traditionnelle concurrence ou complémentarité ?», Dalloz 2006.

* 133 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, « Blogs juridiques contre Edition juridique traditionnelle concurrence ou complémentarité ?», Dalloz 2006.

* 134 Pierre Seydoux, « La vie du recueil Dalloz ».

* 135 Dans l'édition la valeur semble bien attendre le nombre d'années.

* 136 Etre publié par un éditeur juridique, se fait, on, l'a vu, au prix d'un certain encadrement.

* 137 Félix Rome, « Propos iconoclastes sur la "bloghorrée". »

* 138 « Le « blog » est un système d'utilisation très simple qui permet à tout néophyte de disposer de son propre site internet pour exprimer ses opinions, donner des informations ou relater sa vie privée.» : Guillaume Kessler, « Aspects juridiques du blog ».

* 139 Félix Rome, « Propos iconoclastes sur la "bloghorrée" » Recueil Dalloz.

* 140 « L'édition juridique nous offre un cas d'école très intéressant pour étudier la notion de "valeur ajoutée" sur des documents publics, qui reste le critère justifiant l'édition privée de tels documents. »« Chaque éditeur peut puiser dans [le] domaine public et fabriquer des produits éditoriaux nouveaux et les vendre sur un marché transparent et pleinement concurrentiel? » « On conçoit bien l'apport de valeur ajoutée que constituent « les commentaires [...] et les recueils par domaine assemblant la Loi, la jurisprudence et des documents plus théoriques.»: Hervé Le Crosnier, L'édition juridique : valeur ajoutée et bien public en questions.

* 141 André Dunes précité.

* 142 Félix Rome, précité.

* 143 Emmanuel Barthe, « Où est la doctrine de demain ? Sur le Web ! Que font les auteurs de demain ? Ils bloguent. »

* 144 Félix Rome, opus précité.

* 145 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, « Blogs juridiques contre Edition juridique traditionnelle concurrence ou complémentarité ?», Dalloz 2006.

* 146 Pour que l'article qu'un auteur soumet à une revue, soit publié, celui-ci doit s`inscrire « dans la thématique du numéro », « la ligne éditoriale de la revue » et répondre« aux exigences scientifiques de la revue». (FAQ de la revue Jurisdoctoria »).

* 147 Ce qui renvoie à ce qui est pour André Dunes le cinquième commandement des éditeurs : « Les livres tu limiteras à des dimensions bien précises ».

* 148 André Dunes, opus précité.

* 149 André Dunes, opus précité.

* 150 Leur « moindre fiabilité [est] compensée par des délais abrégés de production » et des « conseils plus directement profitables »: André Dunes, opus précité.

* 151 Félix Rome, « Propos iconoclastes sur la "bloghorrée" », Recueil Dalloz.

* 152 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, « Blogs juridiques contre Edition juridique traditionnelle concurrence ou complémentarité ?», Dalloz 2006.

* 153 Alexandre Claudo, opus précité.

* 154 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, opus précité.

* 155 Dimitri Houtcieff et Frédéric Rolin, opus précité.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo