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Le conte et l'éducation chez les Lokpa du Bénin

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par Akéouli Nouhoum BAOUM
Université d'Abomey- Calavi (Bénin ) - Maà®trise en lettres modernes 2010
  

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Conclusion partielle

La revue des genres que nous venons d'entreprendre nous apprend qu'il est théoriquement possible de tracer les frontières entre les genres oraux proches du conte. Seulement, dans la pratique celle-ci s'avère plus ardue. Pourtant, aujourd'hui il existe des contes, des fables, des épopées, des mythes, des légendes, des chantefables reconnus tel quel. Cependant, à cause de la difficulté de classement, on retrouve parfois dans des recueils de contes, d'autres genres proches qu'un examen minutieux permet de classer ailleurs. Pierre N'DA nous dit « Dans Légendes africaines de Dadié, il y a confondus, de véritables légendes (la légende baoulé, par exemple) et de véritables contes (la bataille des oiseaux et des animaux, par exemples) ; de même Contes et légendes d'Afrique noire de Socé ; de même dans Contes et légendes du Sénégal de Terrisse, ainsi que dans Contes et légendes de l'Afrique noire de Vallerey et Contes et légendes du Niger de Boubou Hama ; aucune différence n'est faite entre les textes. Qu'est-ce qui est conte ? Qu'est-ce qui est légende ? »61 L'auteur, après ces deux dernières interrogations, constate qu'aucune précision ne vient marquer la différence entre les textes. Aussi en Afrique, certains chants prennent l'allure d'histoires contées. On écoute certains chants et on reconnaît très vite un conte qui raconte une histoire pareille. La seule différence c'est que l'histoire est chantée. Ce qui nous prouve que dans une société où vit l'oralité, les classifications théoriques héritées de chercheurs occidentaux sont insufisantes. Mais il faut tout de même reconnaître que les travaux de ces chercheurs ont permis de faire la lumière sur la richesse de l'oralité africaine. Grâce à ces travaux, le conte, genre très important dans l'oralité, est mieux appréhendé et classifié.

Après ce grand tour de l'horizon du conte à la recherche d'une définition qui le représenterait, il nous apparaît clair que la plus simple est celle qui fait du conte un récit. Le conte un récit imaginaire qui met en scène des êtres imaginaires (humains, surhumains ou animaux). Mais il est loin d'être un récit gratuit qui distrait juste. C'est un récit qui amuse en même temps qu'il édifie l'homme. Sa structure simple, apparemment facile d'accès est une arme éducative. Amadou Hampâté Bâ nous dit que « le conte est le message d'hier transmis à demain à travers aujourd'hui62i

61 Pierre N'DA K., op. Cit. p.19.

62Cécile Bénoist, Les médiathèques à l'heure du conte, enquête ethnographiques et regard socioanthropologique, Presses universitaires de Bordeaux, 2007, p.6.

Ainsi dans certaines sociétés, africaines notamment, la réalité conte, peut renvoyer aussi bien à la fable, au mythe, à la chantefable, qu'à une épopée. Chez les Lokpa dont nous étudions ici les contes, le conte (M?t?) peut recouvrir plusieurs autres sens si nous lui appliquons les critères standards. La définition adéquate qui nous séduit c'est celle qui définit le conte comme un récit imaginaire ou réel recouvrant en son sein les manifestations culturelles de la société d'où il est issu.

1.3 Classification des contes

Le conte, longtemps considéré comme vulgaire parce qu'oral, est un genre qui ne cesse de nous révéler ses secrets. Après une longue discussion sur ses origines, sur la définition qu'il convient de lui donner, ou plutôt comment le distinguer de ses cousins (mythes, légendes, fables, chantefables, épopées), le moment est venu de nous pencher sur le conte lui-même. En admettant avec Emmanuelle Saucourt que « le conte est le lieu où s'articule différents champs des préoccupations des anthropologues, il est un espace impalpable et intemporel de la parole en performance, où se côtoient tradition et modernité, enseignement et divertissement, savoir technique et artistique, croyance et connaissance, organisation sociale et représentation de la personne, représentation du monde et symbolisme »63, il apparait que le conte fait partie de la vie de tous les jours et intervient dans plusieurs domaines et influe aussi sur le mode de vie de ceux qui le pratiquent. Sa valeur littéraire et sociale restaurée, il est aussi important pour nous de nous intéresser au conte dans toutes ses formes. Quelle typologie pouvons-nous faire des contes ? Est-il possible de classer les contes ? Quels sont les travaux déjà effectués dans ce sens ?

Nous allons dans cette partie donner ou exposer quarte grands travaux qui à notre sens sont complémentaires et ont permis une approche à la fois sociale et littéraire du conte. Il s'agit des travaux de François-Victor Equilbecq, d'Aarne Amatus Antti et Stith Thompson, de Vladimir Propp et de Denise PAULME.

1.3.1 La classification d'Equilbecq

François-Victor Equilbecq était en son temps administrateur colonial dans l'AOF (AfriqueOccidentale Française) quand il a publié son Essai sur la littérature merveilleuse des noirs, suivi de Contes indigènes de l'Ouest africain français, un essai « pour bien connaître la race noire, pour apprécier sa mentalité, pour dégager ses procédés de raisonnement, pour

comprendre sa vie intellectuelle et morale »64, si nous pouvons ainsi paraphraser Maurice Delafosse, Administrateur en Chef des Colonies dans la préface qu'il a faite du livre pour l'édition de 1913. C'est donc dans le but de mieux connaître ses sujets et mieux les gouverner que le colonisateur a entrepris la collecte et l'examen des contes africains en occultant au passage la beauté de la parole qui produit ces contes. Equilbecq s'attache plutôt à ce qu'il appelle caractère dominant pour établir sa classification. Il trouve au total sept (07) classes de contes réparties comme suit :

- Légendes cosmogoniques, ethniques, héroïques et sociales.

- Contes de science fantaisiste (histoire naturelle, astronomie, etc.).

- Récits d'imagination pure et dépourvus d'intentions didactiques.

- Contes à intentions didactiques, tant de morale pure que de morale pratique.

- Fables. Geste burlesque du lièvre et de l'hyène.

- Contes égrillards. Contes à combles (se confondant souvent avec les contes égrillards). - Contes-charades

Cette classification, comme nous pouvons constater, est très peu viable. Elle se cramponne au sujet traité dans le conte, alors que certains contes pourraient facilement se retrouver en même temps dans plusieurs catégories. N'DA K. Pierre à ce sujet écrit : « la classification d'Equilbecq n'est pas rigoureuse et ne peut donc pas servir de base à une typologie générale des contes. Comment classer par exemple les contes qui sont à la fois moraux, merveilleux et étiologiques65 ? » Même si cette classification semble être une copie mal faite des recherches Antti Amatus Aarne dont les travaux étaient déjà connus en son temps dans les cercles occidentaux des chercheurs en littérature orale, et malgré les avis durs dont elle fait l'objet, la classification d'Equilbecq a, à une époque de l'histoire de la littérature orale, éclairé les esprits sur le "folklore des indigènes africains". A travers la comparaison qu'il établit entre les productions épiques occidentales et celles africaines, l'auteur montre consciemment ou inconsciemment la richesse de l'oralité africaine. Il écrit par exemple dans la partie intitulée Le chevaleresque dans la littérature des noirs ce qui suit : « Noms donnés aux armes et aux montures des héros. Le fusil de Samba s'appelle Boussalarbi, tout comme l'épée de Charlemagne avait nom : Joyeuse et celle de Siegfried : Balmung. Le cheval de Samba s'appelle Oumoullatôma et celui de Birama NGourôri : Golo, de même que celui des 4 fils Aymon était appelé: Bayard et ceux de Gradlon, roi de Kérys : Morvarc'h et Gadifer. » Ce rapprochement des personnages légendaires occidentaux à ceux africains montre ainsi la

64 Extrait de la préface de Maurice Delafosse, In Essai sur la littérature merveilleuse des noirs, suivi de Contes indigènes de l'Ouest africain français, 1913

65 Pierre N'DA K., op. cit. p.32.

beauté et la grandeur des récits oraux africains. Le mérite lui revient alors de s'être aventuré sur un terrain où nul n'osait aller : oralité africaine comme littérature à part entière.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus