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Le respect des sauvegardes sociales relatives aux droits des populations locales et autochtones dans la préparation et la mise en œuvre du REED+ au Cameroun et en république démocratique du Congo. Essai d'analyse comparative

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par Samuel Mathieu TANG
Université de Limoges - Master 2 en droit international et comparé de l'environnement 2012
  

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II. LE DOMAINE FORESTIER ET DES RESSOURCES NATURELLES ISSUES DE LA FORET

A- Les peuples autochtones et leurs liens à la forêt

La forêt est lieu de vie par excellence des peuples autochtones forestiers. La forêt a à la fois une fonction socio-économique, culturelle et religieuse ou spirituelle chez ces peuples.

1) Les fonctions des forêts pour les peuples autochtones

1.1) La Fonction socio-économique

La forêt est le milieu de vie par excellence des pygmées du Cameroun. Ils vivent essentiellement de la pêche, la chasse et de la cueillette. Beaucoup d'études sociologiques ou anthropologiques sur les peuples autochtones de l'Afrique centrale identifient les peuples autochtones à partir de ce critère-là. Il s'agit généralement des peuples pygmées en tout cas. Mais la plupart de ces études rencontrent parfois quelques limites : premièrement, beaucoup de peuples non autochtones vivant dans les forêts notamment dans les régions côtières du pays pratiquent ce mode de cultures (pêche, chasse et la cueillette). Deuxièmement, avec le temps, les pygmées pratiquent petit à petit l'agriculture et à force d'être en contact avec les autres cultures développent déjà d'autres modes de vie. Troisièmement, les Mbororos et les Kirdi sont considérées comme étant des autochtones sans toutefois habiter dans la forêt.

1.2) La Fonction religieuse

En forêt, la vie rituelle et religieuse est marquée par divers esprits ou mânes. La plupart, incarnés par des masques, apparaissent dans les campements et les villages pour présider des danses. « Seuls les initiés peuvent les approcher. Il est ainsi de Kose qui préside à la danse de la divination du Nganga, de Joboko, l'esprit qui préside au rite Yéli, qui précède la chasse à l'éléphant. La religion participe de la cristallisation des échanges et des relations entre les hommes, les animaux et la forêt et de la construction d'un monde vivant où tous peuvent communiquer, donner et recevoir »42(*).

1.3) La fonction socioculturelle

La forêt étant considérée comme le biotope des peuples autochtones (pygmées), elle permet de créer leurs spécificités.

La culture des communautés autochtones du Cameroun se distingue de manière fondamentale de celles de leurs voisins. Ainsi, alors que la sédentarité et l'agriculture caractérisent les modes de vie des communautés au Cameroun, le système de production des populations autochtones est fortement dépendant des ressources naturelles : des produits de la chasse et de la collecte pour ce qui est des populations autochtones des forêts, et des ressources en pâturage pour les éleveurs Mbororos43(*).

2) La mise en place d'une législation forestière

La loi n°94/01 du 20 janvier 1994 reconnaît plusieurs droits aux peuples autochtones notamment : les droits d'usage ou coutumier des produits forestiers à titre personnel,44(*) l'attribution des forêts communautaires sous réserve d'une Convention de gestion entre une communauté villageoise et l'administration chargée des forêts,45(*) et le dédommagement des personnes ayant réalisées des investissements avant le démarrage de la procédure de classement d'une forêt en une forêt domaniale.46(*) Fort est de remarquer cependant que ces droits sont précaires. En effet, il n'est pas reconnu un droit de propriété (individuelle ou collective) aux peuples pygmées sur les forêts qu'ils habitent.

3) Les textes d'application de la loi forestière et les droits peuples autochtones

Le décret n° 95-53- PM du 23 Août 1995 fixant les modalités d'application du régime des forêts met en application la loi de 1994. Ce décret accorde plusieurs droits aux communautés riveraines tels que prévus dans la loi n°94/01 du 20 janvier 1994. Celui-ci précise entre autre les conditions d'octroi des forêts communautaires. Par exemple, l'article 28.- (1) « Toute communauté désirant gérer une forêt communautaire doit tenir une réunion de la concertation réunissant l'ensemble des composantes de la communauté concernée, afin de désigner le responsable de la gestion et de définir les objectifs et les limites de ladite forêt...  (3) Cette communauté doit avoir la personnalité morale, sous la forme d'une entité prévue par les législations en vigueur». Cette disposition est très difficile à mettre en oeuvre par les peuples autochtones (les pygmées). Car ces derniers se caractérisent par le nomadisme (pygmées) ou le semi-nomadisme sans oublier aussi qu'ils sous éduqués et très pauvres. Pourtant sur le plan international, l'approche de la foresterie communautaire est considérée aujourd'hui comme une alternative viable et nécessaire pour un développement efficace et soutenable des forêts.

Depuis le 3 juin 2010, un nouvel arrêté conjoint47(*) réglemente la gestion de tous les revenus provenant de l'exploitation des ressources forestières et fauniques destinés aux communes et aux communautés villageoises riveraines. Ce nouveau texte aborde différentes catégories de revenu et essaie d'apporter des réponses aux limites liées à l'ancien système. Parmi ces réponses, on peut relever les innovations ci-après:

Un effort d'encadrement de tous les revenus forestiers et fauniques destinés à ces entités auparavant éparpillés dans différents textes; la réparation de la frustration du MINFOF en le réintégrant dans la gestion de la RFA dont seuls le MINADT et le MINFI jouaient un rôle visible ; l'harmonisation du mécanisme de partage des avantages avec le processus de décentralisation en cours ; l'adoption d'une nouvelle péréquation de la RFA, sans doute en vue d'instaurer plus de solidarité avec les communes non forestières ; l'adoption de la péréquation des revenus issus de la forêt communale entre affectation pour le développement des communautés ; villageoises riveraines (30 %) et pour les actions de développement de tout le territoire de la commune (70 %) ; l'instauration d'un plafond pour les frais de fonctionnement dans l'optique d'orienter davantage de fonds aux investissements et de créer plus d'impact ; le renforcement des mesures pour assurer la transparence et l'information du public ; le renforcement des mesures pour assurer la reddition des comptes48(*).

III. AUTOGESTION OU AUTO-DETERMINATION

Le Cameroun comme tous les pays de l'Afrique centrale n'a pas toujours ratifié la convention 169 de L'OIT jusqu'à l'heure actuelle, spécifiquement consacrée aux peuples autochtones, indigènes et tribaux. Cela démontre à suffisance que le Cameroun, comme les autres pays d'Afrique centrale, est opposé à toute idée d'autodétermination des populations autochtones installées sur son territoire49(*). Il faut dire que cette question est susceptible de remettre à l'ordre du jour le débat, plus délicat, des revendications territoriales et identitaires et pourrait, à terme, conduire à une remise en cause de l'intangibilité des frontières50(*).

Cependant, le législateur camerounais laisse une marge de manoeuvre aux peuples autochtones de s'autogérer au Cameroun notamment en leur donnant la possibilité d'organiser la gestion de leurs institutions, de manière autonome à travers la consécration de la liberté d'association51(*). En dehors de la liberté d'association, les peuples autochtones ont la possibilité de participer au suffrage universel en votant les représentants de leurs localités ou de leurs circonscriptions administratives52(*), sans oublier enfin le processus de décentralisation en cours.

Malgré tout cela, on constate que les communautés autochtones auront du mal à mettre en place des institutions politiques et à les gérer en toute autonomie. Cette difficulté est liée au faible niveau d'alphabétisation des communautés autochtones, qui ne leur permet pas de peser sur la vie politique locale. Par exemple que le nombre d'autochtones dans les conseils municipaux et dans les instances locales des partis politiques reste faible53(*). Et quand ils sont présents, le rôle qui leur est assigné est proche de la figuration54(*).

IV. LE DOMAINE DE LA SANTE ET DE LA SECURITE SOCIALE

Les peuples autochtones des forêts accèdent difficilement aux soins de santé. Cela dû à l'absence de moyens financiers, à l'absence ou à l'insuffisance des équipements sanitaires, à l'insuffisance qualitative et quantitative du personnel de santé, à l'insuffisance des structures de distribution des médicaments, à l'enclavement de leurs villages qui ne favorise pas toujours l'accès des différents programmes de santé mis sur pied afin de contribuer à l'éradication de certaines maladies55(*). Ces derniers accordent encore une grande importance à leur médecine traditionnelle qui tire ses sources dans la forêt. La généralisation de l'exploitation forestière non durable à l'heure actuelle au Cameroun pose de sérieux problèmes de survie pour ces groupes sociaux56(*).

Par ailleurs, la maladie du Sida fait beaucoup de ravages actuellement dans les localités où vivent les peuples autochtones. Il faut d'ailleurs rappeler que le droit à la santé et à la sécurité sociale est reconnu par plusieurs dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Cameroun. Il s'agit notamment de l'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de l'article 5 e) de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, des articles 11.1, 12 et 14.12 de la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard de la femme, et des articles 24, 3, 17, 23, 25, 28 et 32 de la Convention sur les droits de l'enfant. Au niveau régional, il existe également l'article 16 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi que l'article 14 de la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant, ratifiée par le Cameroun le 5 septembre 199657(*). Le Cameroun a pris plusieurs mesures en matière de santé58(*). Mais ces mesures manquent encore d'efficacité.

* 42CF LES DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES, LEGISLATIVES ET ADMINISTRATIVES RELATIVES AUX POPULATIONS AUTOCHTONES AU CAMEROUN Samuel Nguiffo et Nadine Mballa, P.4

* 43CF LES DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES, LEGISLATIVES ET ADMINISTRATIVES RELATIVES AUX POPULATIONS AUTOCHTONES AU CAMEROUN Samuel Nguiffo et Nadine Mballa, P.3

* 44Art. 8(1) de la loi de 1994

* 45Art 37 (1) de la loi de 1994

* 46Art 27 de la loi de 1994

* 47 Arrêté conjoint n° 0520/MINADT/MINFI/MINFOF du 3 juin 2010 fixant les modalités d'emploi, de suivi et de la gestion des revenus provenant de l'exploitation des ressources forestières et fauniques destinés aux communes et aux communautés villageoises riveraines

* 48  Guy Patrice Dkamela, le contexte de la REDD+ au Cameroun, causes, agents et institutions, CIFOR, 2011, Indonésie, P. 57

* 49Samuel Nguiffo et Nadine Mballa, Ibid P.26

* 50Cette position avait été exprimée par des officiels d'Afrique centrale à l'occasion du premier Forum International des Populations Autochtones d'Afrique centrale, tenu à Impfondo (République du Congo) en 2005.

* 51 Chez les Bakola-Bagyéli, quelques initiatives associatives ont eu un effet remarquable et connu une durabilité au sein des communautés Bakola-Bagyéli de Bipindi et de Lolodorf.

* 52 Pour illustration, « Elections cameroon » a pu inscrire les peuples autochtones issus de la région de l'Est du Cameroun aux élections municipales et municipales de 2013 en mettant des traducteurs dans des bureaux de votes proches de leurs différentes localités.

* 53 Il n' y a que deux candidats pygmées aux prochaines élections municipales et législatives prochaines prochaines alors qu'elles sont autour de 09 milles dans les villes de Djoum et Mintom.

* 54Samuel Nguiffo et Nadine Mballa, Ibid, P. 28

* 55 Tuberculose, paludisme...

* 56 Cf. Rapport au Conseil des Droits de l'Homme sur la situation des droits des peuples autochtones des forêts du Cameroun en vertu de la procédure d'Evaluation Périodique Universel:

Soumis par: le Centre pour l'Environnement et le Développement(CED), P.5

* 57 Barume (Albert K) Ibid, OIT, 2005, P. 102

* 58 Il s'agit notamment de la Déclaration de politique sectorielle de décembre 1992 affirmant la volonté du gouvernement d'assurer une décentralisation réelle du pouvoir de décision en vue d'une gestion efficace, de la Déclaration de mise en oeuvre des soins de santé primaires du 25 mai 1993, du décret présidentiel du 7 février 1995 portant organisation des services de santé de base en districts de santé, et de la loi 96/03 du 4 janvier 1996 portant loi-cadre dans le domaine de la santé. Le Cameroun a également adopté un Plan pour les peuples autochtones et vulnérables, dans le cadre du projet pipeline Tchad-Cameroun. Ce programme a un volet sanitaire comprenant quatre axes d'intervention, à savoir : la prévention, le contrôle de la tuberculose et autres maladies contagieuses, la formation des membres des communautés concernées, l'ouverture des pharmacies communautaires et l'approvisionnement en eau potable. La question des peuples autochtones relève du ministère des Affaires sociales (MINAS), dont les attributions consistent à assister les couches sociales particulièrement vulnérables, notamment les personnes handicapées, les minorités, et groupes similaires affectés entre autres par les problèmes d'accès aux soins de santé.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo