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Les types de médiations de l'œuvre révélés par la gestualisation du corps-signifiant du visiteur. Pour une ethnographie de l'expérience de visite

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par Audrey PEREZ
Université Pierre Mendès France, Grenoble II  - Master 2 recherche en médiation, art et culture 2012
  

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IV. Analyse des images liées à l'environnement Trame:

Les propositions inférentielles socio--sémiotiques concernant l'environnement Trame semblent globalement liées tout d'abord à l'expression du « rejet » à travers des images faisant référence à « l'enfermement » telles que (Annexe 74 p. 60) : Prison (visiteur n° 4), Rideau de Fer (n° 5), Chambre d'hôpital psychiatrique (n° 8).

Visiteur n° 4 -- Gilles : « Prison »

Là, je n'arrive pas, je sais pas, c'est non définissable ! J'ai pas de... non, y a rien qui me fait penser à quelque chose. Y a rien qui se dégage de précis. « J'arrive pas à voir quelque chose de... » m'a t--il dit en retournant sur ses pas pour essayer de revivre l'expérience de l'environnement Trame. Dès qu'il y est entré à nouveau, il s'est frappé la cuisse pour affirmer qu'il n'arrivait pas à comprendre, à connaître la signification de cette oeuvre : « Nan, c'est... Sans toucher, je peux me rapprocher ? » Je lui ai fait comprendre qu'il le pouvait. Il s'est rapproché du mur de droite, les mains dans les poches et la tête légèrement inclinée vers l'avant, le regard fixe et les sourcils froncés.

Visiteur n° 5 -- Hédia : « Rideau de fer »

« Non, ça me met mal à l'aise, c'est vrai que ce sont des barres (en me montrant les lignes), des rideaux foncés, des choses qui sont interdites, un truc... voilà ! » Elle a fait un geste prompt des mains, de haut en bas, pour signifier la distance qu'elle mettait entre elle et son ressenti de l'oeuvre.

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« Des stores qui sont... un truc fermé, qui fait un peu comme si... c'était interdit d'y aller, interdit de voir... C'est vrai, en plus! Ce sont des stores, tu peux rien voir à l'intérieur... Ça m'évoque pas quelque chose de joyeux! J'ai senti comme si mon coeur se pressait. C'est comme s'il y avait un enfermement, un truc qui... hop ! Stop ! n'avance plus (...) je sens comme si c'était fermé... qu'il ne fallait plus avancer... C'est bon, j'avancerai pas! » m'a-t-elle dit en riant.

J'ai appris plus tard, pendant notre conversation, que cet espace souvent dédié à la production de dispositifs d'installation ou d'environnement, lui était régulièrement interdit d'accès durant les périodes d'exposition. Car il ne fallait pas faire le ménage dans ce lieu, en raison de la fragilité ou bien de la saleté des oeuvres qui y étaient présentées.

Elle me donna comme exemple l'exposition d'Alain Bublex en 2012, qui avait décidé d'exposer une moto avec des torchons sales au milieu, pleins de cambouis. Ce qui l'avait laissée alors assez perplexe, compte tenu de sa relation professionnelle avec ce lieu.

Les visiteurs n° 2 et 3 ont ressenti une proximité avec l'expression d'un langage presque imperceptible, proche d'une vibration d'un message codé, en référence aux images: Parchemin (visiteur n°2) et Ondes extra-terrestres (n° 3).

Visiteur n°2 - Laurence: « Parchemin »

Elle a soupiré à nouveau, et s'est avancée vers le haut du dispositif, puis elle a fléchi les genoux et a regardé à nouveau le mur du centre. « C'est comme si j'étais dans un livre ! » m'a-t-elle dit face à l'oeuvre, avec des mouvements de la main de haut en bas, comme pour me décrire la répétition de la trame et l'effacement de son écriture. « Y a des signaux, mais je ne les comprends pas ! » Elle a continué à déambuler dans l'espace d'exposition, en essayant de créer une jonction visuelle entre les trois pans de mur. Avec un regard haut-bas, elle m'a dit: « C'est dingue ce truc, c'est impressionnant, c'est comme si y avait un message que je ne comprends pas... »

« En fait, c'est peut-être à moi de l'écrire! C'est... soit ça a été écrit... » m'a-t-elle dit avec les paumes ouvertes vers le ciel, pour m'expliquer sa théorie. « Je ne sais pas si ce sont des lettres ou des chiffres... comme si c'étaient des signaux tous délavés. »

« C'est comme s'il y avait une empreinte et qu'il manquait quelque chose, pour... Ça me fait bizarre, en fait... Comme une trace... » Elle a claqué des mains: « Quelque chose! Tu t'éloignes de quelque chose et puis, ben... » Elle s'est mise à souffler « ... C'est comme si c'était caché derrière, c'est quelque chose qui est caché. »

Visiteur n°3 - Isabelle: « Ondes extra-terrestres »

Elle m'a dit: « Y a une sorte de vibration dans le dessin, ça me fait penser à des ondes, pas des ondes cardiaques», en dessinant de la main un mouvement de haut en bas reproduisant de façon gestuelle le schéma d'un électrocardiogramme.

« Mais des ondes radio, des trucs où tu peux capter les messages de l'au-delà... tu vois, un truc qui vienne de je ne sais où... » m'a-t-elle dit un peu amusée, avec des gestes horizontaux de la main.

Enfin, l'image Les Abysses (visiteur n°7) relate bien l'émotion rencontrée par ce visiteur à l'intérieur de l'espace de l'environnement Trame.

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Visiteur n°7 - Gabrielle : « Les Abysses »

Lorsqu'elle a pénétré dans cet espace, elle a essayé d'entrer en immersion dans l'oeuvre, mais a été obligée de reculer comme si elle ne s'y sentait pas en sécurité: elle l'a fait progressivement jusqu'au coin gauche (côté fenêtre) en regardant au passage par la fenêtre, de manière un peu perplexe.

« Y a un peu une idée de... d'enfermement... d'enfermement pas complet, hein ! Euh... parce qu'on n'est pas dans une cage, on n'est pas dans un quadrilatère fermé... Et voilà, j'ai l'impression d'être au pied d'un mur de béton, et d'être fragile et vulnérable: un peu perdue dans quelque chose que je n'identifie pas. Ça peut être... je ne sais pas... cette oeuvre moi, j'aurais pu l'intituler « Rien » ou bien « La peur ». C'est-à-dire voilà, on est là... on n'avance pas, on ne recule pas: une sensation d'écrasement de mon individu. Et en fait, ça pourrait signifier... l'Univers, et avec tout ce que cela suppose de notions parfaitement... des tas de choses que l'on ignore sur l'Univers, en fait!

Y a plein de choses à découvrir que la Science ignore, dont il faut nécessairement... Il y a une obligation d'humilité et de questionnement, bah... voilà ! Je pars un petit peu loin dans la métaphysique, parce que je ne retrouve rien de ce que je connais...

Il n'y a pas de trace de vie, c'est tout à fait abstrait, c'est abstrait et c'est vide, aussi ! J'ai l'impression qu'on peut le regarder pendant des heures... de presque voir le mur d'en face reculer... C'est, je ne sais pas... une certaine vastitude... Ce n'est pas cafardeux, ce n'est pas triste... Il n'y a aucune réponse à mes questions, aucune identification possible dans ce lieu. Si j'avais à l'intituler, je dirais: « l'Individu et l'Infini», ou bien « L'Homme face à l'Infini! »

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery