I.1.2. Problématique
Le changement climatique est un processus naturel qui a lieu
simultanément à différentes échelles chronologiques
(astronomique, géologique et décennale). Il concerne la variation
au
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fil du temps du climat mondial ou des climats
régionaux, et peut être causé à la fois par des
forces naturelles et des activités humaines (BATIONON, 2009). Or, il
semblerait que le climat actuel à l'échelle mondiale est en
pleine mutation.
Ce changement climatique serait consécutif
d'après les données du GIEC (2001) à l'augmentation des
températures mondiales moyennes observée depuis la moitié
du vingtième siècle, phénomène connu sous le nom de
réchauffement de la planète. Celui-ci serait
probablement dû, dans une large mesure, à l'activité
humaine, notamment le brûlage des combustibles fossiles et la
déforestation qui ont accru la quantité de gaz à effet de
serre présents dans l'atmosphère. Le réchauffement est,
à son tour, responsable des changements spectaculaires auxquels nous
assistons : cyclones de plus en plus violents, sécheresses
fréquentes, inondations, hausse du niveau de la mer, etc.
Comme le soutient BATIONNON, en un siècle, la
température moyenne du globe a augmenté de 0,74 °C. Ce
chiffre apparemment faible est pourtant lourd de conséquences. Ce sont
surtout les régions de l'hémisphère Nord qui se sont
réchauffées ; elles connaissent moins de jours très froids
en hiver et plus de journées très chaudes en été.
Depuis 1993, le niveau de la mer monte en moyenne de 3,1 mm par an. Depuis
l'ère industrielle et les années 1900, il pleut nettement plus en
Amérique du nord et du sud, en Europe du nord et en Asie centrale, et
moins en Asie du sud-est, sur le pourtour méditerranéen et au
Sahel. Les cyclones tropicaux intenses sont plus nombreux en Atlantique Nord.
Si ces faits sont maintenant avérés et les chiffres formels, les
causes précises, elles, sont plus difficiles à déterminer
(CTA, 2008 in BATIONON, 2009).
L'Afrique de l'Ouest est l'une des zones les plus
vulnérables au changement climatique, l'évolution des
températures dans cette zone et plus spécifiquement au Sahel, a
suivi une tendance plus rapide que le réchauffement mondial.
L'augmentation varie de 0,2 à 0,8 °C depuis la fin des
années 1970.Selon le CILSS, cette même partie de l'Afrique a connu
au cours de la seconde moitié du XXème siècle, une forte
diminution des précipitations avec une rupture nette dans les
années1968-1972. La réduction importante des
précipitations apparaît clairement au Sahel. Elle s'est traduite
par un processus historique d'aridification du climat caractérisé
par les grandes sécheresses des années 1970 et 1980.
«L'Afrique de l'ouest et en
particulier sa partie sahélienne, est non seulement un domaine de
l'aridité, mais a connu ces dernières décennies des
perturbations majeures de ses conditions climatiques (ruptures des
séries pluviométriques et hydrométriques) »
(MADIDIO, 2007, in AMOUKOU, 2009).
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Pour le futur, les scénarios climatiques
prédisent pour le Sahel une augmentation de la température et une
baisse ou augmentation des précipitations suivant les zones (HELLMUTH et
al, 2007 in AMOUKOU, 2009). On assistera ainsi à une
augmentation des phénomènes extrêmes comme les
sécheresses et la pression anthropique sur les ressources naturelles du
fait de l'accélération et de l'amplification de la
dégradation des terres.
Au Niger, les projections faites pour les températures,
font apparaître que malgré une grande variabilité, tous les
modèles s'accordent à prédire une augmentation moyenne des
températures maximales (de 2,3 à 2,6°C) à l'horizon
2020-2049. Cette hausse est moins marquée au cours des mois de juin,
juillet, août et septembre correspondant à la saison des
pluies.
Les prévisions pour les précipitations font
ressortir une légère hausse du cumul des précipitations
à l'horizon 2020-2049 et un démarrage plus tardif de la saison
des pluies. Il est prévu une forte augmentation des
précipitations sur la station de Tillabéry et une très
légère diminution sur les stations de Gaya, Niamey et Mardi
(AMOUKOU, 2009).
Ces dérèglements climatiques ont de plus en plus
de conséquences évidentes sur les activités
économiques notamment l'agriculture.
Face à cette situation et surtout pour lutter contre
l'insécurité alimentaire, les pays d'Afrique subsaharienne ont
développé les cultures irriguées avec un accent
particulier pour les cultures maraîchères qui, au fil des
années ont pris de l'ampleur et s'imposent aujourd'hui comme une
véritable activité génératrice de revenus
majeurs.<< De ce fait le développement de l'agriculture
irriguée s'est imposé comme moyen indispensable en
complément à l'agriculture pluviale pour la recherche de la
sécurité alimentaire. Ainsi dans les années 1980, le
gouvernement du Niger a fait de la mise en valeur des milieux humides, une
question prioritaire dans la politique d'intervention pour atténuer les
effets de la sécheresse de 19831984>> (MONCHALIN, 1992 in
MAMAN, 2010).
En 1993 le gouvernement du Niger et la banque mondiale ont
appuyé les agriculteurs à créer une association à
but non lucratif dénommée Association Nigérienne pour la
Promotion de l'Irrigation Privée (ANPIP). De 1993 à 2002 l'ANPIP
a exécuté le projet pilote de l'irrigation privée sous la
tutelle du Ministère du développement agricole (NYSSA, 2008).
Selon YAMBA et AMADOU (1996), « la pratique des cultures
irriguées de contre-saison vient combler partiellement le déficit
vivrier et autorise même dans certains cas à dégager
un
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surplus. Elle apparaît par conséquent comme
la manifestation d'une réelle stratégie de diversification
alimentaire ».
Ensuite, à partir de 2011 le gouvernement a fait de la
mise en valeur du milieu humide, une question prioritaire dans sa politique
d'intervention à travers l'initiative 3N (les Nigériens
Nourrissent les Nigériens) pour atténuer conjointement les effets
de l'insécurité alimentaire, ceux de la variabilité et des
changements climatiques qui sévissent dans le pays durant plusieurs
décennies.
Ainsi, à l'instar des autres régions, les
populations du sud-est du Niger, pour assurer l'autosuffisance alimentaire
(credo des paysans et des autorités politiques) et résorber les
déficits de la production sous pluie, ont aussi mis l'accent sur
l'agriculture irriguée par la mise en valeur des milieux humides
(bas-fonds, mares et cuvettes) qui sont à fortes potentialités
exploitables.
La cuvette de Doungou objet de notre étude est
exploitée en culture maraichères. La canne à sucre,
principale culture dans le site fait la fierté des populations
grâce aux revenus générés (HAROU, 2011).
Etant donné que cette dernière joue un
rôle prépondérant dans la vie socio économique de la
population, il s'avère nécessaire d'étudier les liens qui
existent entre le changement climatique et l'activité de la canne
à sucre dans cette cuvette. La présente étude porte sur :
« Perception du changement climatique sur la culture de la canne
à sucre dans la cuvette de Doungou (Département de
Kantché, Région de Zinder)».
Notre réflexion sera guidée par les questions
suivantes :
1. Comment se manifeste le changement climatique et comment
il est perçu par la population ?
2. Comment se pratique la culture de la canne à sucre
dans cette cuvette et quel est l'impact du changement climatique sur cette
activité ?
3. Comment les producteurs de la canne à sucre
s'adaptent aux effets du changement climatique ?
4. Quel serait le devenir de la pratique de la culture de la
canne à sucre dans cette cuvette avec le changement climatique en cours
?
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