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Du fondement d'atteintes aux droits et libertés fondamentaux en droit positif congolais. Cas du droit d'investissements privés.

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par Nephtaly ABASSA BYENDA
Université Libre des Pays des Grands Lacs - Licence 2013
  

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§.2. L'existence de limitations au droit à un procès équitable.

Le droit d'accès au juge constitue un élément inhérent au droit à un procès équitable tel que prévu par l'article 19 de la Constitution congolaise. Cependant, ce droit n'est pas sans limitations. « Néanmoins, les limitations appliquées ne sauraient restreindre l'accès ouvert à la personne indexée d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même136(*) en l'occurrence l'exercice». Plus précisément, la Cour européenne des droits de l'Homme, selon une jurisprudence constante, considère que le fait « qu'un Etat puisse sans réserve ou sans contrôle des organes de la Convention soustraire à la compétence des tribunaux toute une série d'actions civiles ou exonérer de toute responsabilité civile de larges groupes ou catégories de personnes ne se concilierait pas avec la prééminence du droit dans une société démocratique ni avec le principe fondamental qui sous-tend l'article 6§1 - à savoir que les revendications civiles doivent pouvoir être portées devant un juge137(*)». En l'espèce, c'est, contrairement à ce qu'affirme la Cour, une telle immunité qui prévaut pour les actes de gouvernement (A). En outre, il s'agit d'une immunité générale et absolue (B).

A. Une immunité procédurale.

Dans l'arrêt Markovic contre Italie, la Cour a considéré que l'irrecevabilité opposée aux requêtes dirigées contre les actes de gouvernement ne constituait pas une immunité mais découlait des principes régissant le droit d'action matériel en droit interne138(*). Ce faisant, elle distingue l'espèce du cas de l'affaire Ashingdane, qui présentait pourtant de frappantes similitudes. En effet, dans l'affaire Ashingdane contre Royaume-Uni, la Cour européenne des droits de l'homme a considéré que le fait, pour un requérant, d'avoir accès à un tribunal uniquement pour entendre déclarer son action irrecevable ne satisfaisait pas nécessairement aux impératifs de l'article 6 de la Convention139(*). L'irrecevabilité constitue donc une barrière procédurale limitant le droit d'accès au tribunal garanti par la Convention.

L'argument du gouvernement italien dans l'affaire Markovic, selon lequel la théorie des actes de gouvernement, ne crée pas d'obstacle procédural au droit d'accès au juge car, il s'oppose in limine à l'action contre l'Etat, semble bien faible139(*). Parce qu'en droit judiciaire du système romano-germanique, l'irrecevabilité d'une requête, est belle et bien une question de procédure. S'il s'était réellement agi de définir la portée du droit matériel des requérants, c'est sur le fond que la requête aurait dû être rejetée. Le fait que le résultat final soit concrètement le même ne change rien à ce que, en droit, irrecevabilité et rejet au fond soient complètement différents.

Si l'irrecevabilité est bien une barrière procédurale à la défense d'un droit fondamental comme le droit d'investissement privé, il conviendrait pour la Cour, de vérifier qu'une telle limitation poursuit un but légitime et assurer un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. Quant au but légitime d'une telle limitation, le gouvernement défendeur invoque l'Etat de droit et le principe de séparation des pouvoirs.

L'Etat de droit, on l'a vu, ne saurait justifier une irrecevabilité. Bien au contraire, il tend à ce que tous les actes juridiques soient potentiellement soumis à un contrôle juridictionnel et à ce que soit assurée leur conformité aux normes et valeurs supérieures. Le principe de séparation des pouvoirs apparaît sur ce point bien plus pertinent. Que le juge ne s'immisce pas dans les décisions prises par les autres organes constitutionnels dans l'exercice de leurs fonctions propres, est un principe accepté et admis dans les démocraties libérales contemporaines. Mais, étrangement, le gouvernement italien en vient à se contredire en affirmant que les actes de gouvernement sont des « actes "politiques" qui concernent l'Etat dans son unité, par rapport auxquels le pouvoir judiciaire ne peut être considéré comme une "tierce personne" 140(*)». La loi constituerait un tel acte. Quant aux actes de sécurité publique ou de sureté intérieure de l'Etat, le pouvoir judiciaire, « par définition dépourvue de légitimité démocratique141(*)», ne saurait en connaître. Il est très étonnant, alors que les progrès du constitutionnalisme au cours du siècle écoulé ont été si grands, de voir soutenir à nouveau la thèse légicentriste de la souveraineté de la loi, pour justifier la souveraineté d'actes de l'exécutif, même contre la loi, la constitution et le droit international.

Si le but poursuivi, à savoir éviter le tant redouté « gouvernement des juges » en laissant aux autorités démocratiquement désignées le soin d'assumer la responsabilité politique de certaines décisions engageant l'Etat, apparaît légitime, il semble néanmoins que les moyens employés, du fait du caractère général et absolu de l'interdiction, soient quelque peu disproportionnés.

Est-il possible d'opérer une limitation au droit d'investissement privé comme droit fondamental de façon absolue, par acte de gouvernement ?

* 136 CEDH, aff. Ashingdane contre Royaume-Uni, 28 mai 1985, par. 57.

* 137 CEDH, arrêt Markovic, par. 97 ; CEDH, aff. Fayed contre Royaume-Uni, 21 septembre 1994, par. 65

* 138 Arrêt Markovic, par. 114.

* 92 La limitation ne portait donc pas atteinte à la substance du droit et n'était pas disproportionnée.

* 139 Arrêt Markovic, par. 78.

* 140 Arrêt Markovic, par. 80.

* 141 Ibid., par. 81

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