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La dynamique du discours nationaliste au Gabon.

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par ADIELA BOUSSOUGOU KASSA
Université Omar Bongo - Master de sociologie 2016
  

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2. La Conférence de Berlin de 1884 à 1885

La Conférence de Berlin de 1884-1885 réglementait la colonisation européenne et le commerce en Afrique au cours de la période du Nouvel Impérialisme, et a coïncidé avec l'émergence soudaine de l'Allemagne en tant que puissance impériale. Pensée par le Portugal et organisée par Otto Von Bismarck, le premier Chancelier de l'Allemagne, la conférence donna lieu à l'Acte générale de la Conférence de Berlin, l'origine d'une vraie bousculade pour l'Afrique. La conférence a marqué le début d'une période d'activité coloniale accrue de la part des puissances européennes, tout en éliminant la plupart des formes actuelles de l'autonomie de l'Afrique et surtout de l'auto-gouvernance.

À la fin du 19ème siècle, les puissances impériales européennes s'étaient entraînées dans une bousculade territoriale importante et occupaient la majeure partie du continent africain, créant ainsi de nombreux Etats-nations coloniaux et ne laissant que deux nations indépendantes

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: le Libéria, un Etat indépendant en partie contrôlé par les Afro-Américains, et la nation chrétienne orthodoxe d'Ethiopie, connu des Européens comme l'Abyssinie).

Dans les pays qui comptent d'importantes populations européennes comme la Rhodésie (aujourd'hui connue comme le Zimbabwe), l'Angola, la Mozambique, le Kenya et l'Afrique du Sud, les systèmes de citoyenneté de seconde classe ont souvent été mis en place afin de donner aux Européens, le pouvoir politique bien au-delà de leur nombre. Dans l'Etat libre du Congo, propriété personnelle du roi Léopold II de Belgique, la population autochtone a été soumise à des traitements inhumains, avec un statut proche de l'esclavage et un assortiment de travail forcé. Au Libéria, les citoyens qui étaient des descendants d'esclaves américains avaient un système politique qui durant plus de 100 ans a donné aux anciens esclaves et aux indigènes de la région un pouvoir législatif à peu près égale, malgré le fait que les anciens esclaves soient plus nombreux que la population générale.

Les Européens ont souvent modifié l'équilibre du pouvoir local, créé des divisions ethniques où ils n'existaient pas auparavant, et introduit une aliénation culturelle au détriment des indigènes dans les zones qu'ils contrôlaient.

Le continent africain qui compte actuellement une cinquantaine de pays. Or, 87% des frontières de ces Etats ont été décidées à l'époque coloniale, et la plupart ont été dessinées, « à la règle », lors de la conférence de Berlin, en 1885. Seulement un sixième de ces frontières ont pris en compte la configuration ethnique des peuples africains, alors que le continent comprend plus de 200 groupes ethnolinguistiques distincts.

Depuis les indépendances, les frontières ont été sources de conflits. Elles ont séparé des peuples habitués à vivre ensemble, mais ont surtout regroupé des ethnies différentes, dont la cohabitation a engendré des violences comme au Nigeria, au Tchad ou encore au Soudan. Au Gabon, elles ont suscités des tentatives de division ethnique tel que l'extrait qui suit le présente : « La vérité, aujourd'hui, est pourtant limpide. Ce sont les Bongo qui, étant nés Batékés congolais, se sont installés parmi les Batékés du Gabon par imposture. Dès lors, quand les Gabonais disaient à Bongo qu'il n'était pas Gabonais, mais Congolais, Bongo utilisait cela comme une arme ethnique pour faire croire aux Batékés du Gabon que les autres Gabonais les accusaient d'être Congolais. Or, cette stratégie de Bongo était indécente car le Gabon a d'autres ethnies comme les Fangs qui ont des attaches ethniques en Guinée Equatoriale et au Cameroun. Ce n'est pas pour autant qu'on va dire des Fangs du Gabon qu'ils sont

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Camerounais ou Equato-guinéens. On ne peut pas donc dire que les Batékés du Gabon soient Congolais car les frontières coloniales ont décidé que certains Batékés seraient du Gabon et d'autres du Congo, tout comme certains Fangs sont du Cameroun et d'autres du Gabon.»

Cependant, signalons qu'entre le Gabon et le Congo, qui partagent plus de 1918 Km de frontière (entre le nord-est, l'est, le sud et le sud-est), plusieurs zones, entre autres la zone du Haut-Ogooué (Gabon) et la zone de la Cuvette-Ouest(Congo), restent querellées188. Ainsi, la délimitation définitive de ces frontières aboutira probablement à un redéploiement des populations de ces zones, qui changeraient de facto, de nationalité.

Par ailleurs, le mercredi 28 novembre, à Addis Abeba, la France remettait officiellement à l'Union africaine des copies papiers et numérisées d'archives françaises relatives aux frontières africaines. Les documents remis correspondent à 45 traités, concernant une vingtaine de pays d'Afrique de l'Ouest, du Nord et de l'Est, pour une période allant de 1845 à 1956.

Signalons en passant que cette organisation panafricaine a adopté comme principe depuis sa création que les frontières héritées de la colonisation sont intangibles pour les territoires devenus Etats indépendants. Pour le Programme frontière de l'Union africaine, créé en 2007, les frontières coloniales doivent demeurer intangibles, et qu'il s'agit plutôt de faire du continent africain, un espace d'échanges commerciaux et culturels, où les frontières ne représenteront plus une séparation, mais une zone de partage.

Pour Aguibou Diarrah189 « L'intangibilité des frontières africaine repose sur les archives. Ce sont les frontières héritées de la colonisation. Donc ces archives sont des documents qui permettront de façon certaine à démarquer ces frontières sans créer de problèmes. »190

Jose Elias Mucombo, Directeur de l'Institut National de la Mer et des Frontières de Maputo, au Mozambique ajoute que «Ces frontières font partie de notre identité. Elles ont souvent plus de 60 ans. Pour beaucoup d'Africains ce sont les seules frontières qu'ils ont

188 D.-C. Dzonteu, « Litiges frontaliers Gabon/Congo : vers des solutions définitives », in Politique, sur www.gabonreview.com , publié le samedi 24 octobre 2015 à 1h 16 min. consulté 11/11/2015.

189 Aguibou Diarrah est Responsable du programme frontière de l'Union Africaine.

190 www.rfi.fr/afrique/20131129-archives-frontières-africaines-AddisAbeba , le 29 novembre 2013, consulté le 19/04/2015 à 19h 08.

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connues. Je ne pense pas qu'il soit possible de les modifier. Cela créerait encore plus de confusion et de problèmes»191.

La récente partition du Soudan représente donc une exception dans la ligne de conduite africaine. Par la même occasion, ce pays devient le laboratoire des partisans des modifications des frontières africaines. Contre la position de l'U.A., certains penseurs africains pensent à un retour aux sources qui intègre les configurations précoloniales. En effet, le paradoxe, c'est que pour intégrer, il faut d'abord séparer clairement les Etats. Il faut définir, dessiner et concrétiser les frontières. «Il n'y a aucun intérêt à insister pour garder les frontières dessinées par les pouvoirs européens. Si un Etat comme le Soudan se met d'accord pacifiquement pour mettre terme à une très longue guerre, je suis d'avis qu'il se sépare. La séparation n'est pas le divorce. Les deux pays peuvent gérer conjointement leur frontière pour assurer leur sécurité et leur développement économique »192, suggère Anthony Asiwaju, Président de l'Institut Régional Africain Imeko de Lagos, au Nigeria.

La lecture de ces positions divergentes illustre les problématiques qui sont souvent liées aux conflits ethniques en Afrique. Un des défis majeurs de l'Afrique subsaharienne consiste à faire cohabiter pacifiquement des ethnies arbitrairement réunies à l'intérieur des frontières des États, créés par les puissances coloniales sans la moindre attention pour le substrat humain.

Le partage de l'Afrique, dans les années qui suivirent la Conférence de Berlin (18841885), a complètement dépossédé les Africains de leur propre destin. Il en est résulté une situation très particulière, dans laquelle le tracé des frontières des États a été réalisé avant la mise en place des institutions administratives destinées à contrôler des populations dont les puissances coloniales ignoraient parfois jusqu'à l'existence.

En outre, il est indéniable que les entités territoriales créées par la colonisation - qui, ne serait-ce que de ce point de vue, a représenté une bifurcation décisive de l'histoire de l'Afrique noire - ont servi de support à l'émergence d'authentiques identités nationales transcendant les appartenances ethniques, auxquelles les compétitions sportives donnent l'occasion de s'exprimer bruyamment dans les stades.

191 Ibid.

192 Ibid.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon