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La dynamique du discours nationaliste au Gabon.

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par ADIELA BOUSSOUGOU KASSA
Université Omar Bongo - Master de sociologie 2016
  

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2. La nationalité dans le droit international

«La citoyenneté est pour l'homme un droit fondamental car elle n'est rien moins que le droit d'avoir des droits»

Chief Justice Earl Warren (Etats-Unis, 1958)

Dans la tradition wébérienne, l'Etat se définit par l'autorité et le pouvoir qu'il exerce sur un territoire donné. Il dispose du monopole de la violence légitime. Mais, l'Etat moderne et sa notion sous-jacente de territorialité n'ont pas de valeur universelle, car sa « juridiction » est limitée par la notion de frontière qui lui est associé. L'Etat est donc une communauté doté d'un territoire d'exclusion défini par des frontières physiques et pourvu de compétence spécifiques qui lui confère sa souveraineté, affirmé par le monopole de la violence légitime. Toutefois, l'existence de l'Etat est tributaire d'un consensus entre l'ensemble des Etats. Ce consensus, le détermine, le définit et le reconnait entant que tel. Les traités de Westphalie(1648), dont l'objet fit de sortir de la guerre de Trente ans, affirment la souveraineté des Etats et le principe de non-ingérence à l'intérieur des frontières précises et reconnus par le concert des nations. La nation moderne est donc un concept juridique de l'apanage du droit international westphalien.

Par ailleurs, L'article 15 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 dispose que « tout individu a droit à une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité ». Ces dispositions confèrent à chaque individu, partout dans le monde, le droit à un lien juridique avec un Etat., c'est-à-dire, la citoyenneté ou la nationalité non seulement donne à chaque individu le sens de son identité

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mais, en outre, lui donne droit à la protection de l'Etat et lui confère de nombreux droits civils et politiques. De fait, la citoyenneté a été décrite comme «le droit d'avoir des droits».

Malgré l'imposant corpus d'instruments internationaux relatifs à l'acquisition, la perte, ou le déni de citoyenneté, des millions de personnes dans le monde n'ont pas de nationalité. Selon des estimations récentes, quelques onze millions de personnes sont apatrides à travers le monde292. Elles sont apatrides. L'apatridie peut découler de diverses causes dont des lois contradictoires, des cessions de territoires, les lois sur le mariage, les pratiques administratives, la discrimination, le défaut de déclaration de naissance, la déchéance (lorsqu'un Etat retire sa nationalité à une personne), et la renonciation (lorsqu'une personne refuse la protection d'un Etat). Les homologies entre les lois nationales et le droit international et la déterritorialisation supposé des Etats à travers le processus de mondialisation devraient a priori contribuer à homogénéiser les lois, afin de réduire ce phénomène. Mais la réalité est au prorata de la subjectivation d'un Etat, vis-à-vis du système international de la mondialisation. La mondialisation n'a donc pas rendu désuet l'Etat comme certains auteurs veulent bien le montrer293. C'est donc à juste titre que Samy Cohen indique effectivement que face à la mondialisation, les démocraties résistent et sont mêmes les « maitres du jeu »294. La critique politique de la globalisation de Bayart le conduit à postuler une subjectivation politique295.

Alors que les Etats collaborent pour traiter les problèmes que pose l'apatridie, il se trouve aujourd'hui encore dans le monde des millions d'individus sans véritable nationalité, car, à ce jour, seulement cinquante-sept Etats ont ratifié la Convention de 1954 relative au statut d'apatride296.

Dans son opinion consultative sur les décrets de nationalité de la Tunisie et du Maroc de 1923, la Cour internationale de Justice dispose que: «La question de savoir si une affaire relève exclusivement ou non de la souveraineté intérieure d'un Etat est une question essentiellement relative; elle dépend du développement des relations internationales»297.

292 UNHCR et Union interparlementaire, Nationalité et apatridie, un guide pour les parlementaires. Guide pratique à l'usage des parlementaires n°11 - 2005, p.3.

293 Lire à ce sujet, Bernard Cassen, Tout a commencé à Porto-Alegre : mille forums sociaux !, Paris, Mille et une nuit, 2003.

294 S. Cohen, La résistance des Etats : les démocraties face aux défis de la mondialisation, Paris, Seuil, 2003.

295 Sylvain Allemand et al. Comprendre la mondialisation II. Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de la Bibliothèque publique d'information, 2008 (généré le 20 janvier 2014). Disponible sur www.books.openedition.org/bibpompidou . pp.10-14.

296 UNHCR et Union interparlementaire, op.cit. , p.7.

297 Ibid. p.8.

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En fait, la Cour permanente a estimé que si les questions de nationalité relèvent, en principe, de la juridiction interne, les Etats doivent néanmoins honorer leurs obligations vis-à-vis des autres Etats telles qu'elles sont prescrites par les dispositions du droit international. Cependant, plusieurs décalages sont tributaires de la non-ratification par des Etats de la Convention de 1954. Le Gabon n'en est d'ailleurs pas signataire.

Cette approche a été réitérée sept ans plus tard dans la Convention de La Haye sur certaines questions relatives aux conflits entre les lois sur la nationalité. Beaucoup d'Etats ont commenté cette opinion consultative de la Cour permanente de 1923, car elle touchait à la préparation de la Convention de La Haye sur la nationalité de 1930. Pour la plupart, cette opinion consultative apparaissait comme une limitation de l'applicabilité des décisions d'un Etat en matière de nationalité, en dehors dudit Etat, surtout, lorsque ces décisions vont à l'encontre de décisions d'autres Etats relativement à la nationalité.

La Convention de La Haye de 1930, tenue sous les auspices de l'Assemblée de la Société des Nations, était la première tentative internationale visant à assurer à chacun une nationalité. L'article 1 de cette convention dispose: «Il appartient à chaque Etat de déterminer, conformément à sa propre législation, qui sont ses citoyens. Cette législation doit être reconnue par les autres Etats dans la mesure où elle est conforme aux conventions internationales, aux usages internationaux et aux principes de droit généralement reconnus en matière de nationalité».

L'apatridie, reconnue pour la première fois comme un problème mondial durant la première moitié du 20e siècle, peut être le résultat de différends entre Etats sur l'identité juridique d'individus, de la succession d'Etat, de la marginalisation durable de certains groupes sociaux, ou de la déchéance de nationalité frappant individus ou groupes. L'apatridie est généralement liée aux périodes de mutation profonde des relations internationales. Le redécoupage des frontières, la manipulation des systèmes politiques par des dirigeants nationaux poursuivant des objectifs politiques douteux, et/ou le refus ou la déchéance de la nationalité visant à exclure et marginaliser des minorités raciales, religieuses ou ethniques mal aimées, ont fait des apatrides partout dans le monde. Ces 20 dernières années, un nombre croissant de personnes ont été privées de leur nationalité ou n'ont pas pu acquérir une citoyenneté298

298 Ibid. p. 6.

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Les propos de Lara témoignent des problèmes suscités par le déni d'appartenance dont l'une des finalités peut conduire à l'apatridie : « S'entendre dire «Non» par le pays où je vis; s'entendre dire «Non» par le pays où je suis née; s'entendre dire «Non» par le pays d'où mes parents sont originaires; s'entendre dire encore et encore «vous n'êtes pas des nôtres»! On a l'impression de ne plus exister, de ne plus savoir même pourquoi on vit. Etre apatride, c'est avoir en permanence le sentiment d'être sans valeur »299

L'article 15 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 qui dispose le droit de tout individu à une nationalité peut-être sujet à de vives critiques. Ce droit, en se fondant sur l'existence d'un lien authentique et réel entre la personne et l'Etat, ne laisse qu'une marge de manoeuvre minimale au principe de jurisprudence. Ce lien a été pour la première fois reconnu comme le fondement de la citoyenneté dans une affaire soumise à la Cour internationale de Justice en 1955, l'Affaire Nottebohm. La Cour avait alors estimé que:

«Conformément aux usages des Etats, aux décisions arbitrales et judiciaires et à l'opinion des commentateurs, la nationalité est un lien juridique fondé sur un fait social d'attachement, un rapport authentique d'existence, des intérêts et des sentiments, ainsi que sur l'existence de droits et d'obligations réciproques»300. Cette authenticité du lien n'est pas sans analogie à « la France, tu l'aimes ou tu la quitte » de Nicolas Sarkozy.

Les principes qui sous-tendent cette loi, la naissance, la résidence ou l'ascendance entre autres, sont malgré leur prise en compte, dans la plupart des lois des Etats sur la nationalité ainsi que dans les textes internationaux récents en la matière, ne permettent pas de mesurer l'authenticité du lien et encore moins les intérêts et les sentiments des individus vis-à-vis de l'Etat. L'arbitraire dans ce « flou juridique » devient la seule mesure pertinente pour juger de l'authenticité du lien.

La définition de la Cour interaméricaine des droits de l'homme est certainement sur ce point nettement avancée, elle s'éloigne du concept d'authenticité qu'on peut assimiler à un purisme cher à Hitler. La nationalité y est définit comme «le lien politique et juridique entre une personne et un Etat donné, qui unit l'une à l'autre par des sentiments de loyauté et de fidélité, donnant à la personne concernée droit à la protection diplomatique dudit Etat».301

299 Ibid.

300 Ibid. p. 8.

301 Castillo-Petruzzi et al. Pérou, Jugement de mai 1999, IACHR [ser.C] No 52, 1999.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery