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La dynamique du discours nationaliste au Gabon.

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par ADIELA BOUSSOUGOU KASSA
Université Omar Bongo - Master de sociologie 2016
  

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Section II : La gabonité au prisme de la mondialisation

L'essor de la réflexion sur la nation et le nationalisme est sans cesse actualisé depuis les années 1980. Alors qu'à partir du XXe siècle, l'Occident semblait franchir le seuil du «postcolonial«, outre les conflits identitaires dans les Balkans, après la chute du mur de Berlin ; l'Afrique s'interroge continuellement sur le retour des nationalités. Ces débats s'opèrent autour du multiculturalisme, du cosmopolitisme et de la mondialisation qui d'emblée, se pose comme cadre de questionnement par excellence du postnationalisme.

Guerre du Biafra. De ce fait l'illégalité vient de ce que la Constitution interdit au gabonais d'adoption de candidater à la magistrature suprême.

281 Mouvement de la société civile « ça suffit comme ça » cité par Georges Dougueli, « Gabon : le poison xénophobe », in www.JeuneAfrique.com , publié le 01 septembre 2015, Consulté le 08 novembre 2015.

282 Jonas Moulenda cité par G. Dougueli, op.cit.

283 Matsiegui-Mboula, L'Etat et le tribalo-régionalisme au Gabon, op.cit. p. 253.

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Le multiculturalisme est déjà mis à mal par la construction difficile des Etats africains. Les politiques de l'identité et les stratégies identitaires des leaders politiques flirtent parfois avec la xénophobie.

Un double processus apparemment contradictoire caractérise notre époque : la persistance des nationalismes et la croissance du multiculturalisme, du transnationalisme et du cosmopolitisme. Ce propos s'attachera à décortiquer cette dialectique. Il s'agira d'examiner la validité de la logique métisse en corrélation avec les stratégies nationalitaristes, d'exclusion des binationaux, en dépit des redéfinitions des concepts de nation et de territoire entre autres, opérées par le droit international et la mondialisation.

1. Pour une critique de la raison métisse

Dans Logiques métisses, composé d'essais qui portent notamment sur ses terrains d'Afrique de l'Ouest, Amselle, réfute la « raison ethnologique » qui extrait, classifie, « purifie », et qui sépare les cultures ou les ethnies, de la même façon qu'elle avait jadis séparé les « races ». En effet, pour cet auteur, les cultures sont d'abord des constructions ethnologiques et historiques, bien souvent instrumentalisées à des fins politiques et le multiculturalisme, paré de bonnes intentions, procéderait, selon lui de ce « fondamentalisme culturel », visant en réalité à séparer hermétiquement les minorités culturelles afin de les protéger. Ainsi, Amselle propose donc d'adopter désormais une « raison métisse », c'est-à-dire une approche continuiste mettant l'accent sur l'indistinction et le syncrétisme originaire, mélange dont les parties sont indissociables284.

La réalité empirique nous amène à réfuter l'idéalisme de cet auteur, car, la logique métisse ne consiste guère en l'indistinction. Syncrétisme certes, elle consiste plutôt à la création d'une nouvelle « race », d'une nouvelle catégorie sociale. L'analyse sur la pertinence de la binationalité, sous le prisme de la logique métisse révèle, et dénis d'appartenance et exclusions, qui ébranle la raison métisse.

Le holisme pur évoqué en filigrane à travers les positions d'Amselle, est en réalité une confortation de la racialité nouvelle de la logique métisse. L'indissociabilité des parties

284 Jean-Loup Amselle, Logiques métisses. Anthropologie de l'identité en Afrique et ailleurs, Paris, Payot, 1990, rééd. Payot & Rivages, 1999.

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constituantes de la « raison métisse » est en effet, non pas une marginalisation de la distinction, mais plutôt, un déni d'appartenance.

Au Gabon comme ailleurs, la binationalité est perçue comme une anationalité. La binationalité désigne une double ou une multi-appartenance nationalitaire. Elle s'acquière par la filiation, par le mariage, la naturalisation ou l'adoption. Cependant, la fonctionnalité de ce principe est problématisée du fait de son déni, au nom parfois, du purisme idéologique.

Les cas de déni d'appartenance sont légion au Gabon. Il en va du Président de la république à sa « légion étrangère ». La lecture de cet extrait d'article de presse peut nous servir de terrain d'expression du déni d'appartenance. « «Maixent contrôle tout et bouffe tout...il a installé ses hommes à tous les postes clés. Il se fait épauler sur ces questions par le général Alioune Ibaba, un Congolo-Sénégalais. Le « Shebab », c'est-à-dire le Gabono-Somalien Liban Souleymane, Parmi eux, Seydou Kane, un Malien patron de deux sociétés au Gabon, Vincent Miclet, affairiste français qui a commencé à bâtir sa fortune en Angola, et, jusqu'à une époque récente, Michel Tomi, tout-puissant patron des casinos et des jeux... »285

Cet extrait présente comme « étranger » des individus pourtant juridiquement Gabonais. Il convient de poser comme le fit jadis Nathan, la question de savoir, « A qui appartient le métis?»286

»287.

Rappelant tout d'abord que si dans les sociétés précoloniales, l'exogamie fondait la conjugalité, pour externaliser le choix des partenaires outre le cercle parental, la filiation elle a toujours été plus complexe. En effet, le matriarcat en exergue chez les « Commi » dispose que les successions proviennent du chef de la mère. Du Chaillu rapporte que « le fils d'un Commi et d'une femme étrangère n'est pas réputé Commi. D'après ce principe appliqué aux familles, pour être un véritable Abouya (citoyen de Goumbi), il faut être né d'une femme Abouya. Si le père seul est Abouya, les enfants sont regardés comme de «demi-sang«

L'enfant issu d'un couple mixte se construit dans un contexte où les parents appartiennent à deux ensembles culturels. Ceux-ci peuvent se différencier sur les plans religieux, linguistique, phénotypique, etc. Aussi l'une des questions qui fait actuellement débat

285Marc Ona Essangui, « Maixent, chef de la «Légion étrangère« » in www.facebook.com, publié le 21 décembre 2014, consulté le 22 avril 2015.

286 Tobie Nathan, « À qui appartiennent les métis ? » in Nouvelle Revue d'Ethnopsychiatrie, Paris, La pensée Sauvage, 1993, p. 13-21.

287 Ibid. p.200.

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dans la communauté scientifique est de comprendre comment ce sujet va réussir à combiner au sein d'un agencement fonctionnel, ses éléments parentaux divergents. Selon les partisans de la non « métissabilité » des cultures tels que Tobie Nathan288, le métis est contraint de réaliser le choix, souvent imposé du dehors par les pressions familiales, d'appartenir à l'un des deux systèmes culturels. En revanche, pour ceux qui envisagent la possibilité de mélanges entre les cultures tel que Kroeber ou François Laplantine289, le sujet métissé se construirait à partir de combinatoires d'éléments appartenant aux deux systèmes culturels. Malgré leurs divergences de fond quant au mode de « fabrication » du métis, ces deux hypothèses se basent sur le même postulat : le métis se développe dans un environnement familial culturellement duel. La variété des origines parentales y produit des visions du monde divergentes, complémentaires ou incompatibles. Et celles-ci se trouvent habituellement séparées par des frontières géopolitiques.

Pour notre part, nous pensons comme Jankélévitch qu'« en principe, et dans le cas du mélange le plus simple, qui est le mélange à deux, la séparation devrait faire d'une pierre deux coups, c'est-à-dire du même coup, purifier les deux substances... »290.

Ainsi, Barack Obama n'est ni un Blanc et ni un Noir. Il est plutôt métis. Le métis n'opère pas le choix de son appartenance. Il subit par attribution catégorielle et par déni, une identification à une catégorie, qui n'est ni l'une, ni l'autre, l'appartenance des géniteurs.

La corrélation éclairante que Gilles Bui-Xuân, Roy Compte et Jacques Mikulovic établissent entre la notion de métissage et celle de culture du handicap explique de façon pertinente la réalité qui sous-tend la logique métisse. « C'est d'abord la stigmatisation et l'exclusion qui sont à l'origine du regroupement des personnes handicapées, et par là de leur identité, de leur culture. Si la revendication du groupe constitué est de faire valoir son droit à l'indifférence, elle est paradoxalement aussi celle du droit à la différence. C'est d'ailleurs cette différence qui sera d'abord reconnue par le droit même, avant de fonder l'illégitime et les mesures pour y faire face »291.

288 Ibid. L'auteur affirme que « Les métis n'ont que le choix d'être d'un côté ou de l'autre, d'appartenir au groupe du père ou de la mère. »

289 François Laplantine, Alexis Nouss, Le métissage, Paris, Flammarion, « Non pas l'un ou l'autre (l'Arabité ou l'appartenance à la France seulement) mais l'un et l'autre », 1997 p. 79.

290 Vladimir Jankelevitch, 1960, Le pur et l'impur, Flammarion, Paris, p. 103.

291 Gilles Bui-Xuân, Roy Compte et Jacques Mikulovic, « La culture du handicap peut-elle être une culture du métissage ? », Corps et culture [En ligne], Numéro 6/7 | 2004, mis en ligne le 12 octobre 2007, Consulté le 23 décembre 2015. URL : http://corpsetculture.revues.org/839

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Les thèses que nous évoquions à l'instant sont une invalidation de la raison métisse. Le métis est étranger à ses composantes germinales. Ramener à la problématique de l'identité nationale, la binationalité peut être assimilé à une apatridie de fait.

La Convention de 1930 concernant certaines questions relatives aux conflits de lois sur la nationalité, dispose que le droit souverain des Etats de déterminer qui sont leurs ressortissants est limité par le droit international, ainsi que par le droit des autres Etats. En outre, en vertu de la législation sur les droits de l'homme, il faudrait tenir compte à la fois des intérêts légitimes des Etats et de ceux des individus. Il note que le fonctionnement d'une loi sur la citoyenneté dépend de la loi sur la citoyenneté d'un autre Etat.

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