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Enjeux des nouvelles pratiques religieuses dans l’église catholique romaine à  Cotonou.


par Yaovi Martin CAPO
Université d'Abomey-Calavi - Maîtrise en Sociologie-Anthropologie 2018
  

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1.4. Clarification des concepts

Emile Durkheim (1937, p. 34) nous enseigne que « la première démarche du sociologue doit être de définir les choses dont il traite, afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question ». Alors, afin d'éviter tout malentendu au sujet des concepts utilisés dans cette recherche, certains vont être définis. Il s'agit entre autres de : religion, religieux, religiosité pratiques religieuses, église, secte, nouveaux mouvements religieux, marché de la religion et enjeu.

La religion est une notion dont la définition est problématique. « La littérature sur le sujet est immense et indique que l'unanimité est loin d'exister sur une définition de la religion... Les définitions abondent et renvoient en fait à des écoles et des auteurs de référence » (Peloux et Pian, 2010). Néanmoins, l'étymologie latine nous indique que le mot religion vient de religio c'est-à-dire «  attention scrupuleuse  », d'où « respect religieux, vénération  ». Selon Cicéron4(*), le terme religion vient de relegere qui signifie «  recueillir, rassembler  » ou, selon Lucrèce, de religare qui veut dire «  relier  ». Willaime (2012, p. 60) précise qu'une telle étymologie est hésitante, mais soutient que la conception de Cicéron permet de définir la religion comme une « activité symbolique traditionnelle ». Même si cette étymologie n'est pas satisfaisante, elle donne tout de même l'idée d'une activité qui rassemble des personnes autour de quelque chose qui mérite scrupule, respect, vénération. Sur ce, nous abondons dans le même sens que Willaime dont nous adoptons la définition. Selon lui, la religion est « une activité sociale régulière mettant en jeu, en lien avec un pouvoir charismatique se référant à des entités invisibles, des représentations et des pratiques relatives à la vie et à la mort, au bonheur et au malheur. » Cette définition a l'avantage de saisir toute religion et ses effets sociaux sous un triple niveau des acteurs (qui sont en lien avec un monde symbolique et vivent une expérience singulière), des organisations (dispositif qui met en place des procédures de fonctionnement et de pouvoir) et des idéologies (un ensemble de représentations et de pratiques qui sont dites, consignées dans des textes, et constamment commentées). Lorsque nous considérons la religion chrétienne, les trois niveaux sont repérables : les fidèles sont en lien avec Dieu comme entité invisible, une liturgie assure le fonctionnement de tous les cultes ou célébrations et l'idéologie est consignée dans le livre de référence qu'est la Bible. Au cours de cette activité religieuse, à grande portée symbolique, les hommes et les femmes interagissent entre eux et « ont le sentiment d'être rassemblées au nom d'un Autre » (Willaime, 2003). C'est l'intersection des différentes relations qui fait surgir le religieux (Caillé, 2003).

Le religieux est l'ensemble des relations créées et entretenues par la société des humains vivants et visibles avec l'ensemble des entités invisibles (défunts, non-nés, esprits des animaux, des minéraux ou des corps célestes, esprits flottants et non affectés). Ou encore « la relation de la société des humains avec la société universelle des invisibles étendue jusqu'à l'infini et à l'éternité » (Caillé, 2003, p. 318). Le religieux manifeste ainsi la religion dans sa matérialité pour rendre compte des convictions et des croyances sacralisées propres à chaque acteur, autrement dit sa religiosité, selon qu'il appartient à tel ou tel groupe religieux.

D'après le dictionnaire Grand Robert, la religiosité signifie aspect sentimental de la religion chez une personne ou attirance pour la religion en général, avec ou sans adhésion formelle à une religion précise. Autrement dit, la religiosité traduit la soif du religieux chez l'homme. Elle est dite populaire pour désigner les comportements religieux de la masse (Sabuni Kitutu, 2011), qui se déploient et s'extériorisent sous diverses pratiques religieuses.

Alors, les pratiques religieuses désignent l'ensemble des exercices extérieurs de la piété, de la dévotion religieuse propres à une religion. L'expression « nouvelles pratiques religieuses » a été envisagée pour signaler que ces pratiques sont inspirées ou influencées par la mondialisation du religieux. Sous ce vocable, on peut ranger les demandes de bénédiction diverse, les messes de guérison, les campagnes d'évangélisation, les séances d'exorcisme, les prières de protection, les ressourcements spirituels, la quête de l'émotionnel et du sensationnel, etc. Il s'agit des « pratiques collectives de haute intensité émotionnelle, observables dans bien des cultures non-occidentales où, précisément le pentecôtisme rencontre des succès. » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 81). Il faut noter que les anciennes pratiques religieuses seront évoquées quand elles sont impliquées dans le processus d'une quête particulière d'autant plus qu'elles sont de plus en plus redynamisées et donc toujours en vogue (les pèlerinages, les processions de Christ roi ou de la Vierge Marie, le chemin de croix, les visites de sanctuaires, le culte des saints, l'utilisation de l'huile sainte et de l'eau bénite, etc.). Ces pratiques religieuses se vivent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Eglise catholique Romaine.

Le mot « église » vient du latin ecclesia, issu du grec ekklesia, qui signifie assemblée. Pris dans ce sens, le mot désignerait avec Durkheim (2002, p. 48) « une société dont les membres sont unis parce qu'ils se représentent de la même manière le monde sacré et ses rapports avec le monde profane, et parce qu'ils traduisent cette représentation commune dans des pratiques identiques ». Cette définition générale peut s'appliquer à toutes les formes de religion qui existent dans le monde, puisqu'il n'en existe pas sans Eglise. Néanmoins, utilisé dans le contexte du christianisme, le mot « église », signifie une communauté locale et l'institution qui regroupe les chrétiens d'une même confession. De ce fait, l'Église catholique, ou Église catholique, apostolique et romaine, est l'ensemble des Églises locales ou particulières, c'est-à-dire ayant chacune un territoire et un évêque à sa tête. Celles-ci sont chacune pleinement l'Église catholique dans la mesure où elles sont en communion avec le pape, qui est l'évêque de Rome et considéré comme étant le successeur de saint Pierre, et en communion les unes avec les autres. Mais il faut noter que l'harmonie n'a pas toujours régné au sein de cette institution, les groupes dissidents qui y avaient émergé depuis Martin Luther5(*) avaient donné naissance aux sectes ou mouvements sectaires.

D'un point de vue étymologique, le mot secte vient de deux mots latins « secare » qui veut dire séparer ou couper et « sequi » qui signifie suivre. L'aspect « suivre » un nouveau maître est plus fort que l'aspect « se séparer » d'un autre mouvement. Alors la secte est un groupe qui se coupe d'un tronc originel, d'une Eglise établie, pour suivre un nouveau maître inspiré, un prophète, ou un guide spirituel. Le terme a pris une dimension polémique, et désigne de nos jours un groupe ou une organisation, souvent à connotation religieuse, dont les croyances ou le comportement sont jugés obscurs ou malveillants par le reste de la société. A ce sujet, Altglas V. (2008) écrit en note 64 que « pour le sens commun, le terme « secte » a un sens péjoratif et disqualifiant. [Elle est définie] par la déstabilisation mentale, le caractère exorbitant des exigences financières, la rupture induite avec l'environnement d'origine, les atteintes à l'intégrité physique, l'embrigadement des enfants, le discours anti-social, les troubles à l'ordre public... ». Alors, pour éviter de tomber dans ce jugement négatif et dévalorisant, et à l'instar de certains sociologues, nous préférerons employer dans cette recherche l'expression Nouveaux Mouvements Religieux (NMR).

L'expression fut inventée par Eileen Barker dans les années 1970, sociologue britannique, pour désigner aussi bien les groupes réellement nouveaux que les anciens : néo-chrétiens, judéo-chrétiens d'inspiration orientale, para-religieux (mormons, adventistes et témoins de Jéhovah). « L'hétérogénéité de ces groupes est considérable... En effet, par la simultanéité de leur émergence et la dynamique commune de leur développement, ils relèvent d'un même mouvement. », affirme Champion F.(1988). Mais dans cette recherche, seront privilégiés les NMR chrétiens où dominent les Eglises évangéliques et pentecôtistes. Ils sont caractérisés par leur dynamisme et leur aptitude à innover. Malgré leur taille réduite, ils ont une dimension internationale et fonctionnent en réseaux pouvant se répandre d'un pays à l'autre et s'adapter aux circonstances particulières ; ce qui fait leur succès sur le marché de la religion.

Permettant de décrire le nouveau paysage du croire, le marché de la religion, est un espace qui offre à l'individu la possibilité de choisir, en fonction des offres disponibles et des besoins spirituels particuliers, le service religieux désiré. Ainsi le marché de la religion fonctionne exactement comme un marché financier où les différents mouvements religieux cherchent à s'adapter aux réalités des populations. C'est pour cela que Amouzouvi (2005, p. 16) dira qu'il est « l'ensemble des activités économiques (qu'elles soient intentionnelles ou non) et des transactions (production - circulation - consommation) de ressources économiques qui trouvent leur origine et leur développement dans la religion. » Selon lui, « l'une des conséquences de ce marché de la religion est l'individualisation des affaires religieuses et la commercialisation des positions des responsables religieux. » (2005, p. 58). De ce fait, les pratiques de religiosité modernes se caractérisent par des enjeux qui crédibilisent et nourrissent la concurrence entre les différents prestataires de sorte que seules les stratégies bien élaborées parviennent à maintenir les Eglises sur le marché en drainant beaucoup de membres.

Accroître son effectif, déstabiliser les autres, conserver son hégémonie, constituer sa crédibilité sont autant d'enjeux qui font mouvoir tant d'institutions religieuses de nos jours. L'enjeu, c'est donc, d'après le dictionnaire Robert, ce que l'on peut gagner ou perdre (mais que l'on ne veut surtout pas perdre) dans une entreprise ou une compétition. Voilà ce que nous voudrons bien saisir à travers la recherche sur les nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise catholique Romaine.

* 4 Cicéron et Lucrèce sont cités par Willaime J.-P. (2012)

* 5 Martin Luther avait écrit 95 thèses en 1517 contre la « vertu des indulgences » (indulgences censées permettre la remise de peine de certains péchés). Mais il y avait aussi le pouvoir temporel de plus en plus hégémonique de l'Église catholique en Europe qui faisait soulever beaucoup de critiques contre les pesanteurs et les compromissions de l'appareil clérical. Les thèses de Martin Luther ont marqué le début de la Réforme, qui donne naissance aux Églises protestantes. Ce mouvement de contestation aspire à une simplification et à une personnalisation de la religion, en préconisant notamment la lecture directe de la Bible par le croyant.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein