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Droit au respect de la vie privée des personnes et droit de l’information en Côte d’Ivoire.


par AKA MARCELLIN KOFFI
Université de Cocody Abidjan Cote d'Ivoire - Diplome d'Etudes Approfondies (DEA) en droit privé fondamental 2005
  

Disponible en mode multipage

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MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT REPUBLIQUE DE COTE D'IVOIRE

SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE Union - Discipline - Travail

UNIVERSITE DE COCODY ANNEE ACADEMIQUE

2005-2006

UFR des Sciences Juridique Administrative et Politique

MEMOIRE

EN VUE DE L'OBTENTION DU DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES (DEA) EN DROIT PRIVE FONDAMENTAL.

THEME :

DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE

DES PERSONNES ET DROIT DE L'INFORMATION EN CÔTE D'IVOIRE.

Présenté par :

Sous la Direction de :

M. KOFFI Aka Marcellin

M. COULIBALY Climanlo Jérôme
Maître de Conférences,
agrégé des facultés de droit
Avocat au barreau d'Abidjan

Jury

Président : Professeur COULIBALY Climanlo Jérôme Maître de Conférences, agrégé des facultés de droit Avocat au barreau d'Abidjan

Suffragants

M. ASSI Assepo Eugène, Docteur d'Etat en droit privé, Maître -assistant, Vice-Doyen chargé de la recherche.

M. BROU Kouakou Mathurin, Docteur d'Etat en droit privé Maître-assistant Magistrat.

KOFFI Aka Marcellin i

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

SOMMAIRE

DEDICACE III

REMERCIEMENTS IV

LISTE DES ABREVIATIONS V

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE DES PERSONNES ET DROIT DE L'INFORMATION : DEUX NOTIONS OPPOSEES MAIS CONCILIBALES. . 11

Chapitre I- DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT DE L'INFORMATION :

DEUX NOTIONS OPPOSEES. 14

Chapitre II- DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT DE

L'INFORMATION : DEUX DROITS CONCILIABLES OU COMPLEMENTAIRES. 25

DEUXIEME PARTIE : LES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE DES

PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE ET LEURS SANCTIONS. 64

Chapitre I- LES MODES D'ATTEINTES A LA VIE PRIVEE DES PERSONNES PAR

VOIE DE PRESSE ET LEUR INCIDENCE SUR LA VIE DES VICTIMES. 67

Chapitre II- LES SANCTIONS DES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE DES

PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE 86

CONCLUSION GENERALE. 115

ANNEXES 120

BIBLIOGRAPHIE GENERALE. 126

TABLE DES MATIERES 133

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

« Verba volant, scripta manent »1

KOFFI Aka Marcellin ii

1 Les paroles s'envolent (il ne reste aucune trace) ; les écrits restent et font preuve. Voir lexique des termes juridiques, 10ème édition, Dalloz, Paris, 1995, p. 560

KOFFI Aka Marcellin iii

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

DEDICACE

A

Toute ma famille

En particulier :

Ma mère AKA Andjoua Odette

Ma tante KOUADOU Ebah Thérèse

Mon cousin ABBE Adjé André

Mes grands parents KOUADOU oi Kouadou Albert et AKA Amenan

Mes amis et bienfaiteurs, spécialement :

FOTTO N'da Marius Silvestre. ETTIEN Hervé Georges

, EHOUE Pierre Vergnet, BROU Ehu Emmanuel,

KOUAME Aka Laurent, EDJA Jean-Baptiste...

Mes frères et soeurs en christ.

Mes condisciples de DEA de l'année académique 2004-2006

KOFFI Aka Marcellin iv

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

REMERCIEMENTS

Nos remerciements vont à tous ceux qui ont contribué, par leur soutien juridico-intellectuel, moral, matériel et financier, à l'élaboration du présent mémoire.

Nous pensons notamment :

Aux professeurs :

COULIBALY Climanlo Jérôme, pour avoir accepté de nous encadrer et guider nos premiers pas sur la voie de la recherche. Travailler avec vous fut un réel plaisir. Veuillez trouver, ici, l'expression de notre profonde gratitude. Puisse Dieu vous assister et vous donner la force d'encadrer tous ceux qui seront dans l'aventure combien malaisée mais merveilleuse de la recherche ;

MELEDJE Djedjro Francisco, Doyen de l'UFR des Sciences Juridique, Administrative et Politique de L'Université de Cocody,Abidjan.

ACKA Sohuily Félix, pour ses conseils en méthodologie ;

Jacqueline Lohoues-OBLE ; à travers elle, tous les enseignants qui ont participé à notre formation scolaire et universitaire.

Aux professionnels de la presse, en particulier :

Monsieur KONE Samba, alors président de l'OLPED-CI

Monsieur Franck Anderson KOUASSI, secrétaire général du CNCA.

Que Dieu vous bénisse tous sans exception et vous rende au centuple tout ce que vous avez fait à un rejeton.

Amen !

KOFFI Aka Marcellin v

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

LISTE DES ABREVIATIONS

al. Alinéa

art. Article

Bull. civ. Bulletin des arrêts des chambres Civiles de la cour de cassation

Française

C.A. Cour d'Appel

C. cass. Cour de Cassation

Chron. Chronique

Civ. Chambre civile de la cour de cassation

CNCA Conseil National de la Communication Audiovisuelle

CNP Conseil National de la Presse

D. recueil Dalloz

D.S. Recueil Dalloz-Sirey

Gaz-Pal Gazette du Palais

Ibid. au même endroit

In à l'intérieur de, dans (tel ouvrage)

J.O. Journal Officiel

J.C.P. Juris-Classeur Périodique

L.G.D.J. Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

L.I.D.J. Librairie Ivoirienne de Droit et de Jurisprudence

Obs. Observations

O.L.P.E.D. Observatoire de la Liberté de la Presse de l'Ethique et de la

Déontologie

Op. Cit. dans l'ouvrage cité ou déjà cité

R.I.D. Revue Ivoirienne de Droit

T.G.I. Tribunal de Grande Instance (France)

Trib.P.I. Tribunal de Première Instance(Côte d'Ivoire)

U.N.J.C.I. Union Nationale des Journalistes de Côte d'Ivoire

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

INTRODUCTION GENERALE1

KOFFI Aka Marcellin 1

A mesure que la civilisation se développe, les rapports sociaux deviennent

de plus en plus complexes , le cercle de l'activité juridique de chacun d'entre nous pénètre plus avant celui de ses semblables.Nous sommes si voisins les uns des autres qu'il nous devient impossible d'agir sans risquer de causer un dommage à autrui .Dans une société moderne ,tant d'intérêts se croisent et s'enchaînent , tant de relations s'établissent entre les hommes ,que le droit de chacun, sans cesse en contact avec les entreprises d'autrui , reçoit fréquemment des atteintes . Cette activité s'est trouvée centuplée, et avec elle les dangers qu'elle fait courir, le jour où le machinisme est venu seconder les efforts de l'homme.

En effet, les caractères de notre civilisation dont on dit volontiers qu'elle est celle de la prééminence de la personne humaine dans la hiérarchie des valeurs, l'expression véritable des moyens de communication à travers le monde et l'accroissement certain du nombre de décisions de justice , sanctionnant ou non l'exploitation ou la diffusion des droits des personnes, attestent l'importance, la nécessité de l'étude1 des rapports entre la dignité des personnes et le droit de l'information, aujourd'hui.

Pour expliquer l' importance toujours plus grande que prend cette question , avec le nombre sans cesse croissant des procès en responsabilité pour violation des droits des personnes physiques , il faut tenir compte d'une tendance moderne des esprits à exiger la sécurité. On veut être garanti contre toute atteinte.

En effet, l'homme ne se nourrit pas seulement d'information. Il se nourrit aussi de paix, de tranquillité, d'honneur, d'intimité et partant de dignité.

Ainsi le droit ne protège pas seulement les intérêts pécuniaires, la liberté de l'information. Il protège également les intérêts qui ne se traduisent pas forcement en argent. C'est pourquoi, à côté des droits patrimoniaux, du droit de l'information, la personne humaine est titulaire de droits extrapécuniaires appelés communément

1 J. Ravanas, La protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, Paris, LGDJ, 1978, p.9

.

KOFFI Aka Marcellin 2

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

droits de la personnalité stricto sensu. « Ce sont des droits tout aussi fondamentaux que les premiers cités mais leur particularité est qu'ils sont indissolument liés à la personne humaine. Qui les viole donc porte atteinte à la dignité de l'homme1 ».

C'est dans ce sens que Royer-Collard, parlant de l'un des droits de la personnalité les plus précieux, en l'occurrence, le droit au respect de la vie privée disait ceci : « la vie privée doit être murée »2. C'est dire que selon son propos, la vie privée revêt une importance capitale de sorte qu'elle doit être préservée, respectée par tous.

Aussi ce propos exprime-t-il le besoin depuis longtemps ressenti par les hommes de mettre une partie de leur vie à l'abri des regards aussi bien des autorités publiques que de leurs concitoyens. Il en a été ainsi sans grande difficulté.

Mais avec l'avènement des progrès des sciences, et surtout des techniques, de graves menaces pèsent sur le droit au respect de la vie privée. La presse3 permet aujourd'hui de rassembler des informations illimitées sur chacun des hommes et de les communiquer à un nombre aussi illimité de personnes publiques et privées à travers le monde, surtout à l'ère de l'informatique et de l'Internet.

La diffusion de la vie privée des personnes par les moyens de l'information suscite des appréhensions légitimes dans le monde et particulièrement en Côte-d'Ivoire, notre pays.Quotidiennement, des personnes physiques sont confrontées à des problèmes inhérents à cette matière.

C'est en guise de réponse à ces inquiétudes que nous avons choisi de réfléchir sur les rapports entre le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information, de nombreux conflits ayant trait à leur coexistence.

Pourquoi concilier droit au respect de la vie privée et droit de l'information ? Pourquoi défendre l'intimité, le secret, de notre vie privée et familiale ?

1 H. Mazeaud, in préface « la protection de la vie privée » de Pierre Kayser, Economica, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2e édition, Paris, 1990

2 R. Collard cité par P. Kayser, la protection de la vie privée, Paris 1990, édition Economica, quatrième de couverture .

3 La Presse, ici, est saisie comme l'ensemble des moyens d'information quelque soit le mode d'expression (Presse écrite, parlée, audiovisuelle).

KOFFI Aka Marcellin 3

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Qu'a donc à cacher l'homme qui vit selon la loi ?

Notre existence ne doit-elle pas être transparente ?

N'est-il pas souhaitable que nous habitions une « maison de verre »1 ?

Ce sentiment profond de discrétion et de pudeur qui existe au fond de chaque

être humain exige la protection du secret de la vie privée : vie personnelle et familiale. Sans un minimum de secret ou respect, il n'y aurait plus de liberté. Le respect de la vie privée est l'un des aspects de la liberté de notre existence2.

Le législateur ivoirien et son peuple, à l'instar de ceux du monde entier, en ont pris conscience. La nouvelle constitution, adoptée par référendum du 23 au 24 juillet 2000 et promulguée le 1er août 2000, ne manque pas de reprendre puis de développer les libertés naguère proclamées par celle qui l'a précédée. Dans son préambule et dans son titre I, notamment, il précise : « chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement ses idées pourvu que l'exercice de ses droits ne porte pas atteinte ni à l'honneur et à la considération d'autrui, bref à la dignité humaine ou à l'ordre public ». En témoignent également les deux nouvelles lois du 14 décembre 2004 sur la presse écrite et la communication audiovisuelle3.

Aux termes de ces deux lois, l'exercice de la profession journalistique doit se faire dans le respect des droits et libertés d'autrui et partant dans le respect de la dignité de la personne humaine.

En posant ce principe, le législateur n'a pas innové. Il s'est contenté de consacrer une jurisprudence, déjà abondante à l'époque, qui sanctionnait les violations du droit au respect de la vie privée par le recours aux principes des constitutions et par l'application des règles de la responsabilité civile ; également des règles de la responsabilité pénale dans les domaines où la loi pénale érigeait en infraction de telles atteintes.

1 H. Mazeaud, op.cit.

2 Idem .

3 J.O. numéro spécial accords de Linas Marcoussis du 30 décembre 2004, n°2.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Outre les textes du droit interne, les tribunaux peuvent devoir appliquer les conventions internationales auxquelles la Côte d'Ivoire a adhéré et qui ont été approuvées et publiées.

La plus importante est la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, ratifiée par la Côte- d'Ivoire.

. Tous ces textes sont l'objet d'une étude approfondie. Cependant, l'un des problèmes les plus délicats parmi ceux que soulèvent les rapports entre le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information est celui de leur conciliation : jusqu'à où le journaliste peut-il donner des informations sur la vie d'une personne ?-

Où s'arrête la liberté du journaliste en ce qui concerne l'information sur la vie d'une personne ?--

En droit ivoirien, la question présente un intérêt, par exemple quand il s'agit de savoir dans quel cas la vie privée doit être respectée face à la liberté du journaliste dans le traitement de l'information ?-

En étudiant le contenu des rapports entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information, on aura souvent l'occasion de faire appel au droit français et à d'autres droits étrangers sur des points particuliers compte tenu de la rareté des opinions doctrinales, des décisions jurisprudentielles et de l'insuffisance de la législation en cette matière dans notre droit -

Mais avant même de pénétrer au coeur des rapports reflétant ceux-ci, il importe, si ce n'est de définir, au moins de donner quelques explications sur le sens des deux notions.-

En clair, que faut-il entendre par « droit au respect de la vie privée et droit de l'information ?-

Concernant le droit au respect de la vie privée, on observera qu'aucun texte en droit interne et en droit international ne se hasarde à le définir précisément. Le droit au respect de la vie privée est une création jurisprudentielle permanente dont il est fort malaisé d'en donner une définition satisfaisante.

A la différence des catégories classiques telles que celles des droits patrimoniaux à savoir les droits de créance et les droits réels, éprouvés par une

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

longue pratique1, le droit à la vie privée, est un concept qui n'a reçu une consécration que tardivement dans la législation (début XXe siècle-)

Avant la révolution française, l'idée de personne et de sphère privée était difficilement compréhensible .Seule la collectivité humaine dans son ensemble revêtait un sens. Les valeurs individualistes de la révolution bourgeoise ont constitué le terreau qui a permis de révéler une autre facette de la personne. L'individu ne fait plus corps avec la masse .On lui accorde sa place, à lui de la prendre .On lui reconnaît une dimension intime qu'il peut faire respecter .On ne parlait pas encore de droit de la personnalité .Il aura fallu près de deux siècles pour que s'affirme le droit à la vie privée .Ce sont les affaires Picasso, Brigitte Bardot qui ont quelque peu forcé le législateur français de l'époque à intervenir pour venir consacrer légalement ce qui était désormais dans tous les esprits :les droits individuels .

Ainsi appréhendé, l'idée générale que recouvre la notion de droit à la vie privée est sans doute assez simple en dépit de sa complexité.

Le droit à la vie privée peut donc être défini comme « le droit qu'a l'individu vis-à-vis de toute personne, au respect de sa dignité d'homme et de sa personnalité propre. Autrement dit, c'est ce que la personne physique en elle-même (et pour tout être humain) a de propre et d'essentiel2.

En ce sens ,le droit à la vie privée est synonyme de droit qui appartient ou qui est réservé à un individu , à un groupe d'individus et non à la collectivité, de droit qui concerne la vie personnelle , familiale d'un individu. Il se rapporte à tout ce qui fait la singularité, la particularité de chaque être humain, de ce qui donne à chaque individu ses caractéristiques propres.

Il s'oppose, de ce fait, à tout ce qui peut le dégrader et l'humilier car ayant fait l'objet d'une reconnaissance et d'une protection juridique3.

1 G. Goubeaux et P. Birh, les épreuves écrites du droit civil, LGDJ, Paris, p.82.

2 G. Cornu, vocabulaire juridique, PUF, avril 2002 .

3 P. Mistretta, doctrine droit des personnes, JCP, la semaine juridique, édition générale n°12-12 janvier 2005, p.15.

KOFFI Aka Marcellin 6

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

En revanche, le droit de l'information, produit de la philosophie des lumières du monde occidental, a connu, depuis sa proclamation aux XVIIIe et XIXe siècles, une évolution quant à son contenu.

Le droit de l'information est apparu très tôt comme un bienfait pour l'être humain. Les systèmes politiques qui l'ont mis en valeur l'ont immédiatement consacré, à côté de la liberté d'aller et venir, la liberté de pensée mais aussi d'expression.

Encore que longtemps déjà les philosophes, écrivains (on ne parlait pas en ce moment de journalistes) avaient assimilé liberté de pensée et liberté d'expression. Ils proclamaient la liberté de l'auteur de dire, d'écrire ce qu'il pensait des puissants du jour, des vérités les plus solidement affirmées, voire des simples préjugés.

Le XVIIIe siècle vit ainsi se répandre un moyen de communication,

d'information, « la presse » synonyme de liberté d'expression dont le
fonctionnement et la parution se révélaient comme un instrument de propagande formidable contribuant ainsi à l'apparition d'une opinion publique dans l'Europe des lumières qui précède de si peu celle des révolutions. Dès lors prenant conscience du rôle de cet instrument, les écrivains organisaient déjà la lutte pour la liberté de la presse au nom de la liberté tout court. C'est pourquoi Voltaire en écrivant à l'un de ses correspondants pouvait dire : « y a-t-il rien de plus tyrannique, par exemple que, d'ôter la liberté à la presse ? Et comment un peuple peut-il se dire libre quand il ne lui est pas permis de penser par écrit ? »1.

A l'origine donc, le droit de l'information se ramenait essentiellement aux différentes formes de l'imprimé (livres, affiches, journaux) c'est-à-dire à la presse écrite. Il se définissait par l'ensemble des publications imprimées et publiées, périodiques ou non2.

Progressivement, cette conception du droit de l'information a évolué pour atteindre aujourd'hui une définition lato sensu.

1 J. Mazars, Conseiller à la Cour de Cassation, la liberté d'expression, l'information, un droit fondamental ; la loi et le juge, site : www.hirondelle.org.

2 G. Cornu, vocabulaire juridique, op.cit.,

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Le droit de l'information, dans son acception actuelle englobe la radio, la télévision, le cinéma, récemment l'Internet c'est-à-dire l'ensemble des moyens classiques et modernes de la communication quelqu'en soit le mode d'expression et s'attache au principe de la liberté comme la vie privée des personnes.

Selon Me André Bertrand, « l'information comprend non seulement l'ensemble des messages informationnels transmis par les médias traditionnels (presse écrite ,radio, télévision)mais également ceux exprimés par des moyens plus primaires(tracts, affiches...)

Dans cette optique, le droit de l'information est "la libre communication des pensées et des opinions. Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de rechercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit."1

En d'autres termes, le droit de l'information est « le droit pour chacun d'utiliser librement l'organe de presse de son choix pour exprimer sa pensée en la communiquant aux autres ou pour accéder à l'expression de la pensée d'autrui quelle que soit la forme et la finalité »2.

En Côte d'Ivoire et partout ailleurs, il est l'un des droits les plus précieux de l'homme3 par le rôle primordial qu'il joue dans la société. Il est devenu au fil du temps un principe fondamental, une valeur constitutionnelle et universelle dont la protection ne souffre d'aucune contestation dans ses rapports avec les autres phénomènes sociaux comme la vie privée des personnes.

Le journaliste bénéficie d'un intérêt légitime d'information .Lequel intérêt prend sa source directement dans le droit de savoir et le droit de dire ce qui est ou a été .L'oeuvre journalistique poursuit ainsi une volonté, celle de renseigner, d'informer .L'information se définissant comme tout fait ou évènement susceptible d'accroître la connaissance du citoyen sur un sujet donné.

1 Déclaration universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, article 19.

2 Ve BOUA, extrait de la communication au séminaire sur la presse de Yamoussoukro du 28 août 1992, in la presse ivoirienne face aux défis des temps nouveaux, p.8.

3 Déclaration universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, article 12.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Par conséquent le droit de l'information permet au journaliste d'écrire, de parler, de montrer, de commenter les événements sociaux ou culturels à l'égard du citoyen et pour le citoyen.

La liberté d'informer et le droit de chacun de savoir autorisent le journaliste à rapporter, diffuser divers éléments relatifs à la vie des personnes naguère considérés comme une propriété privée inaccessible, une voie interdite au public.

Ainsi, les journalistes pourront divulguer des informations normalement protégées par le droit au respect de la vie privée sur toutes les personnes mêlées à un évènement public passé ou présent. Les hommes politiques, les vedettes du show-business, les membres des familles royales, les sportifs reconnus seront particulièrement concernées même si à l'occasion d'un drame (catastrophe aérienne, prises d'otages, maladie etc.)des anonymes sortent du rang pour être placés, souvent malgré eux, sous la lumière de l'actualité.

Reste que la liberté accrue du journaliste ne doit pas aboutir à méconnaître les droits de la personnalité. La jurisprudence en est ainsi venue très rapidement à poser un certain nombre de limites de façon à éviter les dérives .Le droit d'informer ne saurait justifier, en effet, toutes sortes d'atteintes dans la vie privée.

C'est pourquoi, pour éviter que les professionnels des médias n'utilisent la notion de liberté à leur guise en abusant de cette dernière que les rédacteurs de la D.D.H.C de 1789 ont pris le soin de donner un contenu clair et précis à ce concept.

En effet, son article 4 dispose : « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui »1.

Cette limitation de la liberté du journaliste dans l'exercice de son métier a pour fondement, à certains égards, l'article 12 de la D.U.D.H2 qui dispose : « nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. »

1 Déclaration universelle des Droits de l'Homme et du citoyen du 26 décembre 1789, article 4.

2 Déclaration universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, article 12

KOFFI Aka Marcellin 9

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Ainsi appréhendés, le droit à la vie privée et le droit de l'information renvoient irrémédiablement à des libertés ou droits relevant d'horizons différents. C'est dans ce sens que dans une approche concrète de la matière, l'examen des rapports entre le droit à la vie privée et le droit de l'information est un excellent révélateur de ces nuances, voire de ces oppositions.

Nécessaire au bon fonctionnement de la vie politique et sociale1, la presse n'est pas pourtant sans menace, danger, et notamment son exercice pose de délicats problèmes dans ses rapports avec le particulier. Celui-ci apparaît bien faible en face d'une presse qui peut à tout moment le grandir aux yeux de ses concitoyens ou ternir sa réputation par ses publications ou diffusions2.

Cette dernière est la plus fréquente. Ce qui rend, de nos jours, assurément difficile la coexistence, la cohabitation entre droits des personnes et liberté de communication et d'information.

Est-ce à dire que ce qui semblait être un acquis de l'humanisme n'était qu'illusoire, que le journaliste dans le souci d'information et de formation « corrompt-il tout »3 et étend-il son empire sur la personnalité d'autrui ?

L'exercice de la liberté de la presse se heurte toutefois aux droits de la personnalité, en l'espèce le droit à la vie privée, apparaissant apparemment comme deux droits incompatibles.

Ainsi l'un des problèmes les plus délicats qui existe entre le droit à la vie privée et le droit de l'information à travers la planète et de façon spécifique en Côte d'Ivoire est celui de leur conciliation.

Comment notre droit positif s'efforce-t-il de concilier cette opposition ?

Comment notre droit s'efforce-t-il de protéger le droit à la vie privée des personnes et en même temps tente-t-il de donner une liberté à la presse ?

A partir de quel moment, tout citoyen ou particulier peut-il revendiquer le droit légitime d'être laissé tranquille ou seul ?

1 G. Biolley, le droit de réponse en matière de presse, LGDJ, Paris 1963, p.15.

2 Idem, p.15.

3 G. Goubeaux et P. Birh, op.cit, p.82.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

En d'autres termes, comment le journaliste peut-il exercer son métier d'information sans porter atteinte à la vie privée des individus ?

Telles sont les questions majeures qui vont être abordées dans la présente étude.

Dans certains cas, en effet, il apparaît une opposition entre droit à la vie privée et droit de l'information faisant ainsi ressortir des problèmes délicats de partage entre la sphère des droits extrapatrimoniaux et celle du droit de l'information.

Dans d'autres hypothèses, en revanche, le droit de l'information et le droit à la vie privée peuvent se recouvrer pour former un couple interdépendant, conciliable au point de renforcer la formation et la protection des individus.

Un examen des rapports entre le droit à la vie privée et le droit du journaliste d'informer et d'éduquer passe nécessairement par cette séparation essentielle.

C'est pourquoi, dans une première partie, il serait intéressant pour nous de démontrer que le droit au respect de la vie privée des personnes et le droit de l'information sont deux notions opposées mais conciliables ou complémentaires (première partie). Cependant cette conciliation peut donner souvent lieu à des conflits dont le règlement peut faire appel à des sanctions ( (deuxième partie)

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE DES
PERSONNES ET DROIT DE L'INFORMATION :
DEUX NOTIONS OPPOSEES MAIS CONCILIBALES.

KOFFI Aka Marcellin 11

PREMIERE PARTIE :

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

L'importance accordée au droit à la vie privée est sans doute un des traits les plus caractéristiques de notre système juridique depuis un certain nombre d'années. C'est peut être le développement d'une civilisation dominée par les progrès des moyens de communication et d'information qui ont suscité le besoin d'équilibrer la dictature du droit de l'information par l'affirmation de la place éminente revenant à la personne humaine.

Pourtant, sans beaucoup forcer le paradoxe, on peut dire que la liberté de l'information est au centre de la plupart des questions classiques relatives au droit à la vie privée et partant aux droits de la personnalité.

Lorsque, par exemple, un journal publie la photographie d'un citoyen célèbre ou non, c'est assurément en vue d'attirer des lecteurs, donc traiter de l'information légitime du public. Et souvent, si la personne représentée proteste contre l'utilisation faite de son image, c'est parce qu'elle entend fixer les conditions de l'exploitation de sa notoriété. De tels cas d'interférences entre intérêts patrimoniaux ou informationnels et protection de la vie privée sont extrêmement nombreux.

La civilisation de masse permet, aujourd'hui, l'accès de tous aux messages véhiculés par les multiples canaux d'information, qu'il s'agisse d'événements essentiels ou quelconques survenus ça et là. La place ainsi prise par l'information dans nos sociétés a fait parfois oublier que sa liberté renforcée, par la légalité internationale1 et nationale2, a été voulue essentiellement pour garantir l'Etat contre toute dérive totalitaire ou tentative dissimulatrice du pouvoir politique.

Ainsi la médiatisation de la société incite les journalistes à utiliser de plus en plus la personnalité d'autrui3 à titre d'information du public.

Mais le droit de l'information qui est le droit d'écrire, de parler, de montrer, de commenter les événements culturels à l'égard du citoyen est parfois invoqué en dehors de ces finalités par les journalistes. Ils réclament en fait « la faculté de

1 V. art. 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, art. 19 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques de 1966 et art. 9 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples de 1981.

2 Art. 9 et 10 de la Constitution du 1er août 2000.

3 P. Auvret, doctrine - droit des personnes - l'utilisation de la personnalité d'autrui, illustrations et exemples de presse, JCP, la semaine juridique, éd. générale n°12, 23 mars 2005, p.551.

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

pouvoir décider librement de ce qu'ils rendront public, de la façon dont ils le feront, et du moment auquel ils le feront »1.

Il s'ensuit que le principe selon lequel toute personne est seul maître de la divulgation d'un élément de sa vie privée ou du souci légitime de tout citoyen d'être laissé tranquille sera bafoué, écorché par les journalistes.

Ce qui constituerait une violation ou une atteinte au principe de l'inviolabilité de la vie privée des individus. En conséquence, par rapport à la conception qui appréhende le droit à la vie privée et le droit de l'information comme étant deux droits antinomiques, nous pensons dans un raisonnement à contrario qu'il y a une combinaison harmonieuse entre eux lorsqu'on envisage la fonction informer, toujours informer de la presse.

En d'autres termes, ils sont juridiquement conciliables. C'est pourquoi pour comprendre notre raisonnement sur le processus de l'utilisation de la vie privée par la presse, il serait plus qu'indispensable de proposer deux moments successifs qui bien que distincts, opposés (Chapitre I) sont aussi complémentaires et interdépendants (Chapitre II).

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1 E. Dérieux, Droit de la communication, D. 1964, p.314.

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Chapitre I :

DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT DE L'INFORMATION : DEUX NOTIONS OPPOSEES.

« Le libéralisme, c'est d'abord la non ingérence de l'Etat dans la vie privée, le respect d'une sphère individuelle où chacun obéit à sa propre conscience »1.

Cependant, l'Etat n'est pas le seul « ennemi » du libre épanouissement de chacun : la société civile toute entière exerce une pression diffuse, qui peut devenir explicite si chacun n'est pas protégé dans sa vie privée des immixtions de l'autre2. En l'espèce et dans le cadre de notre étude, c'est le droit de l'information pour ne pas dire la presse qui exerce une pression explicite dans ses rapports avec la vie privée des individus. Toute situation qui semble entretenir un conflit entre ces deux droits de l'homme à savoir droit au respect de la vie privée des individus et droit de l'information. La transparence sociale est revendiquée de toute part. Mais chaque citoyen souhaite en ce qui le concerne personnellement rester opaque aux autres.

Il est vrai que la ligne de partage entre la vie privé et la vie publique est incertaine, voire difficile à déterminer, surtout que ce qui est privé chez l'un ne l'est pas forcément chez l'autre. Toutefois tout acte (privé ou public) retentit sur la société. L'histoire du droit positif, à chacune de ses étapes, détermine un espace privé plus ou moins vaste, reflet d'un régime politique et d'une société civile travaillée en permanence par des forces contradictoires allant dans le sens de l'élargissement ou d'un rétrécissement de cette sphère d'intimité3.

1 R.G. Schwartzenberg, in les libertés publiques, dossiers et documents du monde, févr. 1975, p.4.

2 Il est banal de considérer que le progrès technique (dans le domaine de l'information, de l'électronique, de la photographie, etc.) est une menace nouvelle pour la vie privée de l'individu (V. par exemple, Th. Maulnier, liberté et organisation : Le Figaro, 7 juillet 1970). Or il apparaît, qu'en tout état de cause, il n'y a pas une sorte de fatalité, ce n'est que l'homme qui toujours menace l'homme, et non ses techniques.

3 Il n'est pas certain, contrairement à la démarche universaliste à la mode, que l'élargissement de cette sphère d'intimité face aux pouvoirs publics, à la presse, soit valide et appréciée dans toutes les civilisations. Le confucianisme, par exemple, qui a imprégné profondément diverses sociétés d'Asie, conduit à ce que la formation sociale, la société civile toute entière, soit vécue comme une sorte de grande famille, basée sur la piété filiale et la protection absolue de l'enfant, sans distinction entre le privé et le public. Il y a là, à la fois une autre conception de l'individu (élément indissociable de la société, et des rapports entre les hommes. On s'étonne de découvrir, en revanche, que jusqu'au milieu du XIXe siècle, la caricature était interdite en France ... sauf autorisation de l'intéressé (voir J.M.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

En tout état de cause, le droit au respect de la vie privée est le droit dont dispose le citoyen de vivre à l'abri des regards d'autrui. En d'autres termes, toute personne est seul maître de la divulgation des secrets de sa vie privée. Il est libre de mener sa propre existence avec le minimum d'ingérences extérieures.

A côté du droit au respect de la vie privée, coexiste un autre droit qui lui est concurrent : le droit de l'information. En effet, le droit de l'information est le droit pour chacun d'utiliser librement l'organe de presse de son choix pour exprimer sa pensée en la communiquant aux autres ou pour accéder à l'expression de la pensée ou de la vie d'autrui quelle que soit la forme et la finalité1.

A première vue, donc, la distinction définitionnelle (section I) et fonctionnelle (section II) entre le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information consacre a priori, l'antinomie apparente entre ces deux notions de sens opposé.

Section I- Le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information, deux libertés opposées dans leur nature.

Saisi stricto sensu, le droit au respect de la vie privée est la règle en vertu de laquelle chacun a droit au respect de sa vie privée. Toute immixtion ou intrusion non autorisée d'autrui dans sa sphère d'intimité serait en contradiction flagrante avec le principe du droit au respect de la vie privée. Or les droits de la personnalité dans leur ensemble et de façon particulière le droit à la vie privée se situent au centre de l'activité journalistique qui n'est que le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, par l'écrit, par l'image et de s'informer librement.

De ce point de vue, le droit au respect de la vie privée et droit de l'information s'opposent en ce sens que le premier semble s'enfermer sur lui-même, c'est-à-dire un droit introverti (Paragraphe I) tandis que le second semble être porté sur l'extérieur c'est-à-dire un droit extraverti (Paragraphe II). Il s'agit là d'une opposition concernant le sens, la signification des deux notions.

Cotteret et C. Emeri, vie privée des hommes politiques in mélanges, J. Ellul, 1983, p.675).

1 Ve BOUA, extrait de la communication au séminaire sur la presse de Yamoussoukro du 28 août 1992 in la presse ivoirienne face aux défis des temps nouveaux, p.8.

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Paragraphe I- Le droit à la vie privée, un droit introverti.

Le droit au respect de la vie privée est d'apparition relativement récente, à l'instar des autres droits de la personnalité. La jurisprudence a commencé à le protéger de façon effective et sur la base de textes légaux mais de portée internationale que depuis 19481. Cette légalité internationale susmentionnée trouve son application en Côte d'Ivoire, dans le préambule de la constitution lorsqu'elle affirme « ... proclame son adhésion aux droits et libertés tels que définis dans la Déclaration Universelle des Droits de l'homme de 1948 et dans la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples de 1981... »

En France, le droit au respect de la vie privée est protégée par la jurisprudence sur la base d'un texte législatif interne depuis la loi n°70-643 du 17 juillet 1970 qui a donné naissance au nouvel article 9 du Code civil qui dispose comme suit : « chacun a droit au respect de sa vie privée ».

Le Code civil, en Côte d'Ivoire, ne lui fait pas explicitement référence comme c'est le cas en France. Cependant, cet article est non applicable en Cote-d'Ivoire. Malgré cette absence de texte précis , le droit au respect de la vie privée existe tout de même et est protégé.

Mais au fond, que faut-il entendre par droit au respect de la vie privée ?

Aucun texte ne donne une définition de ce droit . La jurisprudence ne donne pas non plus de définition précise mais s'attache en cerner les contours. De ses appréciations successives, le droit au respect de la vie privée est, comme les autres droits subjectifs, sanctionné par une violation. Ce droit étant le droit de toute personne à ce que sa vie privée ne soit pas l'objet de divulgations ni d'investigations. En d'autres termes, le droit au respect de la vie privée est le droit pour toute personne d'être libre de mener sa propre existence avec le minimum d'ingérences extérieures.

Malgré cette approche définitionnelle, il faut, au regard de la presse, faire la distinction entre la vie privée et la vie publique. La frontière entre ce qui ressort de

1 Voir art. 12 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, 10 décembre 1948. Art. 5 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et de Peuples de 1981.

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ces deux notions est parfois difficile à cerner, voire étroite. La seule attitude d'ostentation ou de discrétion adoptée par l'individu peut bouleverser l'analyse1. Tenons-nous à quelques développements.

En effet, ne ressortit pas évidemment de la vie privée et par conséquent ressortit de la vie publique, ce qui constitue l'exercice d'activités officielles ou professionnelles, de manifestations publiques ou ce qui survient à cette occasion2. C'est le cas par exemple du récit d'un déplacement d'une personnalité étatique (ministre) ou politique (le leader d'un parti politique), personnalités rencontrées, lieu et menu d'un repas officiel, nom des convives, de manifestations d'activités socioculturelles ou sportives3. Ces éléments sus indiqués font partie de la vie publique. En conséquence, ils peuvent être portés à la connaissance générale ou du public sans préjudice de poursuites judiciaires.

En revanche, appartiennent, par nature, à la vie privée, et ne peuvent être divulgués, du moins auprès de quiconque qui n'a aucun intérêt à en connaître, et quelles que soit l'exactitude ou la tonalité de la présentation, la plupart des éléments identificateurs ou localisateurs de la personne4. Il s'agit, en l'espèce, de la date et lieu de naissance, nom d'origine, adresses, numéros de téléphone, références bancaires5.

En outre, les domaines inclus dans la vie privée comprennent l'intimité corporelle comme un handicap, l'état transsexuel, un traitement médical suivi, la santé (physique ou psychique), l'attente d'un enfant au moins au début ; la vie sentimentale et familiale (la liaison, la mésentente avec le conjoint, la paternité (exacte ou erronée), les moeurs sexuelles ; les appartenances philosophiques ou religieuses ; l'image, les conversations, les correspondances et plus généralement, tout ce qui relève du comportement ou de la vie intime. Telle est la liste

1 J.P. Gridel, chronique - doctrine - presse, liberté de la presse et protection civile des droits modernes de la personnalité en droit positif français. Recueil Dalloz 2005, n°6, p.391.

2 Idem.

3 Ibid.

4 Ibidem, p.392.

5 J.P. Gridel, op.cit, p.392.

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schématique de la vie privée et de ses composantes que permet une lecture des recueils consultés.

Par contre, les événements relevant de la sphère intime comme le mariage, la naissance, le décès échappent à la notion de vie privée. Ce sont, en effet, certes des faits privés mais ils tombent dans le domaine public du fait de leur caractère social.

Le contenu de la vie privée est vaste et rencontre des difficultés dans ses rapports avec le droit de l'information surtout lorsqu'il s'agit des personnes publiques ou politiques .Ainsi, on admet généralement que le domaine de la vie privée d'une personnalité publique puisse, en certaines circonstances, être plus restreint que celui d'un simple citoyen. Leur vie publique se mêle pratiquement avec leur vie privée. Comment faire donc la part des choses dans le souci de l'information ?

La vie privée, au-delà de ce que nous venons d'analyser se compose également du droit à l'image et du droit à la présomption d'innocence.

Il suit de ce qui précède que la vie de toute personne comporte une part repliée sur la personne elle-même, sur les membres de sa famille, sur ses amis. Elle ne se confond donc pas avec la vie publique car elle est cette partie de la vie qui a pour siège principal la demeure, lieu de sécurité et de bien-être personnel.

Ainsi, elle ne doit pas être l'objet d'investigations ni de divulgations parce que les unes et les autres blessent le sentiment de la pudeur à l'égard de la vie personnelle et familiale1.

En définitive, le droit à la vie privée s'oppose au droit de l'information dans la mesure où la vie privée est un sentiment personnel, individuel et paisible qui dispose chaque citoyen à s'isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l'écart avec sa famille et ses amis de telle sorte que, après s'être ainsi créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même2.

1 V.M. Scheler, la pudeur, édition Aubier. La permanence du sentiment de la pudeur n'est pas infirmée, mais au contraire attestée, par les variations de son objet, in P. Kayser, la protection de la vie privée, op.cit, p.6 .

2 Cité par M. Perrot, Histoire de la vie privée, de la révolution à la Grande Guerre, Tome 4, p.612.

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La vie privée, en somme, est un vase clos, une vie introvertie c'est-à-dire repliée sur elle-même à l'abri des luttes d'intérêts sociaux. Une telle conception nous semble, à coup sûr, opposée à la notion de droit de l'information.

Au contraire du droit au respect de la vie privée qui est un droit relevant de l'intimité du foyer, de la vie conjugale et sentimentale, et donc un droit personnel, individuel, le droit de l'information est un droit ouvert sur l'extérieur, voire un droit extraverti.

Paragraphe II - Le droit de l'information, un droit extraverti.

La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, adoptée le 10 décembre 1948, dispose en son article 19 que : « tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions, et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

Le corollaire de cette liberté de communication est le droit pour chacun d'utiliser librement les médias de son choix pour exprimer sa pensée en la communiquant librement à autrui ou pour accéder à l'expression de la pensée d'autrui. Ainsi chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, par l'écrit et par l'image et de s'informer librement1.

Le principe susmentionné trouve son application en Côte d'Ivoire, depuis la loi n°91-1033 du 31 décembre 1991 portant régime juridique de la presse écrite, modifiée par la loi n°99-436 du 6 juillet 1999 et telle que modifiée par les deux nouvelles lois portant régime juridique de la presse écrite et de la communication audiovisuelle du 31 décembre 20042.

Au-delà de cette consécration légale, le principe de la liberté de l'information trouve son fondement dans la constitution du 1er août 2000, de façon expresse,

1 Les cahiers de l'Olped, projet de réforme de la loi portent régime juridique de la communication audiovisuelle, Abidjan, 16 juin 2004, p.53.

2 Voir J.O. de la République de Côte d'Ivoire, 30 décembre 2004, 46e année N°2, Numéro spécial Accords de Linas Marcoussis, p.67 à 91.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

notamment en son article 10, lequel dispose que « chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement ses idées ».

Il suit de ce qui précède et en considération des définitions afférentes à la liberté de l'information issues des différents textes nationaux et internationaux que ce droit, est, d'une manière générale, tourné vers l'extérieur, à l'opposé du droit à la vie privée, son concurrent. Il apparaît comme un projecteur braqué sur la vie d'autrui. Il est les yeux, les oreilles et la bouche de la société. Ainsi le droit de l'information est le droit dont l'objet est tourné vers les rapports sociaux, vers les comportements des individus dans la société. Il est un instrument permettant d'accéder à la pensée d'autrui, voire d'accéder à la vie des citoyens par les moyens aussi modernes que sophistiqués qu'il utilise pour son expression.

En résumé et après analyse de ces deux notions, nous constatons effectivement qu'elles s'opposent dans leur essence en ce que le droit à la vie privée mérite respect de la part d'autrui. Ce qui fait de lui un droit introverti alors que le droit de l'information est un droit à vocation investigative surtout que les comportements sociaux, voire la vie des individus constitue la matière première de l'activité journalistique. La vie des citoyens est située au centre de l'information.

Mais si le droit à la vie privée et le droit de l'information semblent s'opposer dans leur essence, qu'en est-il de leur rapports dans leur fonctionnement ?

A première vue, aussi, le droit à la vie privée et le droit de l'information s'opposent dans leurs fonctions .

Section II- Droit au respect de la vie privée et droit de l'information : deux libertés opposées dans leurs fonctions.

Toute personne est seul maître de la divulgation des secrets de sa vie privée. Ce qui signifie que la diffusion d'un élément de la vie privée d'une personne suppose l'autorisation ou le consentement de cette dernière. Dans cet état de fait, deux principes gouvernent l'utilisation des éléments de la vie privée d'une personne dans le cadre de la diffusion d'une information. Le principe de l'interdiction de divulguer la vie privée des personnes sans leur consentement (Paragraphe I) et celui de l'inviolabilité du domicile, siège privilégié d'expression de la vie privée

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(Paragraphe II) limitent l'exercice de la liberté d'expression. Ces deux principes opposent donc le droit à la vie privée au droit de l'information.

Paragraphe I- Le principe de l'interdiction de divulguer la vie privée des personnes sans leur consentement, obstacle à l'expression du droit de l'information.

Le consentement est, selon le dictionnaire1, un assentiment donné à une proposition ou une réponse favorable que l'on veut bien donner à une demande d'autorisation.

Dans la création d'un acte juridique, le consentement est une adhésion d'une partie à la proposition ou à la pollicitation faite par l'autre2.

En somme, le consentement est l'adhésion d'une personne à une proposition à lui faite par autrui mais aussi et dans certains cas, une manifestation de volonté en vue de l'accomplissement d'un acte ou une autorisation donnée de façon expresse ou tacite à un tiers d'accomplir tel ou tel acte sans qu'il y ait pourtant naissance d'une quelconque obligation.

Ainsi les hommes des médias ne peuvent transmettre des informations concernant la vie privée des individus, qu'il soit des personnalités connues soit des anonymes, sans leur consentement.

Dans cette perspective, il est admis qu'une personne dont certains détails de sa vie intime sont publiés par la presse, puisse s'opposer à une telle diffusion. Cette solution est parfaitement juste à notre avis en ce sens qu'il est normal que les droits de la personnalité, consubstantiels à une existence paisible prévalent sur la liberté de l'information lorsqu'il s'agit de sauvegarder ou de protéger l'intimité des individus. La vie intime d'un individu est sacrée, en Afrique et particulièrement en Côte d'Ivoire. Par conséquent, le journaliste, dans le traitement de l'information, doit respecter l'intimité de la vie personnelle, familiale des citoyens.

Leur ingérence dans les aspects intimes de la vie privée des individus, au nom du droit du citoyen à l'information et à une information vraie ne peut être motivée

1 Dictionnaire de la langue française, volume I, A-H, éd. Bordas, Paris, 1986, p.560.

2 Lexique des termes juridiques, 10e éd., Dalloz, Paris, 1995, pp.146-147.

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que pour des raisons extrêmement graves et d'intérêt national ou général. La loi garantit le (( droit à l'intimité du foyer » et le (( droit à la vie conjugale et sentimentale » au nom de la sauvegarde d'une certaine morale ou des droits d'autrui.

La jurisprudence ivoirienne et française vont dans le même sens et sanctionnent les atteintes à la vie privée et sentimentale qui mettent en cause la personnalité des individus concernés et leur portent préjudice1.

Cette protection se manifeste davantage à l'égard des journalistes qui relatent, diffusent avec indiscrétion les relations sentimentales, intimes des tiers.

Face à cette situation des rapports entre le droit à la vie privée et le droit de l'information, nous sommes en droit de dire sans nous tromper qu'il y a une opposition entre ces deux droits.

En effet, le droit au respect de la vie privée limite l'exercice de la liberté de l'information.

Le journaliste ne peut donc utiliser des aspects de la vie privée d'une personne sans que cette dernière n'ait donné son accord. Le consentement de l'individu constitue la porte d'entrée du journaliste dans la vie intime de celui-ci. Sans cette manifestation de volonté, il serait en droit de s'opposer à toute publication ou diffusion de sa vie privée. Deux droits apparemment incompatibles dans leur exercice assurément.

A côté du principe de l'interdiction de divulguer la vie privée des individus sans leur consentement limitant ainsi le principe de la liberté de l'information ,se trouve également un autre principe agissant dans le même sens que le premier cité. Il s'agit du principe de l'inviolabilité du domicile, lieu de prédilection et d'expression de la vie privée.

1 Trib. Première instance Abidjan, 3e ch. Civile, 29 janvier 1976 n°228, Dame Kamé N'Daw c/ Editions Jean-claude Nourault et Librairie de France, RID, Cirej Abidjan 1976, 1-2, pp.34-36.

Trib. P.I., Abidjan (Plateau), 7e ch. Civile n°502 du 20/06/2001, affaire Bohouri Kobena Jose Marius c/ Gecos Formation et M ? Koné Laman, Abidjan le 29 janvier 2003 (inédit).

Cass. Civ. 2e, 26 novembre 1975, sociétés éditeurs parisiens associés c/ Gary : JCP 78, II, T. 8811.

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Paragraphe II- Le principe de l'inviolabilité de la vie privée.

Situé à l'opposé du droit de l'information, le principe du respect de la vie privée constitue un élément décisif à l'effectivité de la tranquillité des individus dans un Etat de droit. Saisi dans un sens strictement doctrinal, le droit à la vie privée est un droit de propriété. Il est une référence substantielle en ce qui concerne la confiance des citoyens dans leurs rapports interpersonnels ,sociaux.

En effet, le droit à la vie privée est le principe selon lequel chaque personne dispose d'un droit exclusif et absolu sur sa vie privée et peut s'opposer à sa violation. Le droit exclusif reconnu à chaque personne constitue un obstacle à l'exercice de la liberté de l'information et vise à protéger chaque individu contre toute atteinte, toute violation à son intégrité physique, intellectuelle, morale et partant à sa vie privée.

La vie privée est donc inviolable. Elle est le corollaire du principe découlant de l'inviolabilité du domicile, sphère de manifestation de la vie intime.

L'inviolabilité du domicile (consacrée par la constitution1 et par le code pénal2) complète ce droit au respect de la vie privée, d'autant plus qu'elle est le support d'expression et de protection de la vie privée.

Par ailleurs, le droit à la vie privée, attribut de la personnalité, confère à tout individu, quelque soit sa notoriété, le pouvoir de disposer de sa vie privée et de s'opposer à sa diffusion sauf si cette révélation relève de la légitime information du public. Le droit de l'information s'éteint donc a priori face au droit au respect de la vie privée, l'individu, seul titulaire de ce droit.

C'est ainsi que le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information se recouvrent négativement ou que le premier l'emporte sur le second et inversement .Lorsque la personne dont les paroles, l'image, ont été révélées, captées, se trouve dans un lieu privé, l'opposition entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information est nette. Peu importe, en revanche, le lieu où se trouve le journaliste qui révèle l'information. Il peut être indifféremment dans un lieu privé ou dans un

1 Constitution du 1er août 2000, art. 4.

2 Code pénal art. 384 et suivants.

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lieu public1. Dès lors que l'individu se trouve dans un lieu privé comme le domicile, il existe de droit ou de facto une antinomie, une incompatibilité entre droit au respect de la vie privée et droit du journaliste à communiquer toute information en sa possession

Conclusion

Toute personne peut s'opposer à la divulgation de faits concernant sa vie privée. Chaque individu est maître des faits présentant un caractère intime .Il est libre d'en autoriser ou non la divulgation .Dans pratiquement toutes les hypothèses, les informations qui ressortent de la vie privée ont trait aux relations sexuelles, à l'état de santé, aux histoires de famille ,à la situation financière aux souvenirs personnels aux convictions politiques ou religieuses.

Cependant, la divulgation d'information intéressant ces domaines n'est pas toujours constitutive d'une atteinte, voire d'une opposition.

En fonction des situations ou des circonstances, droit à la vie privée et droit de l'information se dissocient ou s'associent.

Ainsi en dehors de leur rapport d'opposition, droit au respect de la vie privée et droit de l'information se complètent positivement. Ils entretiennent, de ce fait, un rapport d'association, de conciliation et partant de complémentarité (Chapitre II).

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1 J. Ravanas, op.cit., n°449, p.519.

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DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT
DE L'INFORMATION : DEUX DROITS CONCILIABLES
OU COMPLEMENTAIRES.

Chapitre II :

L'activité journalistique est, comme toute autre, dans une société organisée, soumise au respect de la règle de droit. Loin de porter atteinte à la liberté, et notamment à la liberté de l'information, le droit en est, dans un système démocratique, comme le notre, soucieux du respect des droits et libertés de chacun. En l'espèce, le droit est soucieux du respect des droits de la personnalité en général et du droit à la vie privée en particulier. Dans cette perspective, il s'agit, pour la loi, de poser des principes et de définir les droits et obligations réciproques entre l'exercice de l'activité journalistique et le droit au respect de la vie privée des individus.

En effet, chaque personne dispose d'un droit exclusif sur sa vie privée. Celle-ci ne peut être portée à la connaissance d'autrui par voie de presse que si le détenteur ou le titulaire de ce droit en a donné l'autorisation. Toute chose qui paralyserait l'activité journalistique à bien des égards car la vie privée de certaines personnes souvent se mêlent avec l'actualité et mérite d'être traitée par la presse puis portée à la connaissance du public au nom du droit du public à l'information. Le droit positif vient d'intégrer ce phénomène et tente de le réguler pour établir un équilibre, une conciliation entre la liberté de l'information et partant la presse et le droit des personnes1 . En ce sens, certains détails de la vie privée peuvent être révélés par la presse. Et cela s'ils sont conforme à l'idéal journalistique qui n'est que la recherche de la vérité, le respect des individus et le bien-être de la communauté. Quelle attitude doit donc adopter celui qui prétend parler de ses contemporains, qui choisit de juger leurs actes ?

La marge de manoeuvre est étroite entre la liberté d'expression de la presse, telle que l'exige le droit du public à l'information et le droit de chacun au respect de

1 P. Auvret, droit des personnes, JCP, n°12, 23 mars 2005, p.551.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

sa vie privée. Il est vrai que la ligne de partage entre la vie privée et la vie publique est incertaine. Tout acte privé retentit sur la société alors que la presse est le reflet de la société. Aujourd'hui, il faut dire que il y a une médiatisation de la société. Cependant, la dignité humaine et partant la vie privée doit être préservée, respectée par le journaliste dans l'expression de sa liberté de l'information.

D'où la nécessaire conciliation entre les droits des individus concernés par l'actualité ou non et d'observer certaines règles communes de bienséance.

Droits de la personnalité et droit de l'information sont donc conciliables.

Le journaliste peut, par conséquent, s'immiscer dans la sphère d'intimité d'une personne sans forcément lui porter atteinte.

Ils s'enrichissent mutuellement ou sont complémentaires. C'est ainsi que pour une meilleure compréhension des manifestations de la conciliation entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information, il convient de dire que devenus indissociables, dans leurs fonctions ambivalentes respectives, le droit à la vie privée engendre et renforce l'activité journalistique (Section I) tandis que le droit de l'information consolide et protège la vie privée des individus (Section II).

Section I- Les faits justificatifs de l'immixtion du journaliste dans la vie privée des personnes.

Selon la composition des différents textes régissant respectivement le droit de l'information et le droit au respect de la vie privée, ceux- ci peuvent se combiner, se concilier.

En effet, la liberté de l'information et le droit de chacun de savoir autorisent les journalistes à rapporter divers éléments inhérents à la vie des personnes surtout que la presse puise son fondement, son existence dans les faits de société. Et c'est l'ensemble des comportements des citoyens qui forment les événements sociaux, matière à spéculation de la presse.

Ainsi la vie des individus va de paire avec l'objet de la presse à savoir rechercher des faits qui pourraient avoir une influence sur la vie ou la marche de la communauté. Voilà pourquoi droit à la vie privée et droit de l'information se

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

complètent. Dès lors, comment leur coexistence ou conciliation se manifeste telle ?

Quels facteurs favorisent- ils la conciliation ?

En d'autres termes, la conciliation nécessite que certaines conditions ou circonstances soient réunies (Paragraphe I) mais que cela soit fait dans le respect des règles de l'éthique et de la déontologie de la profession des médias (Paragraphe II).

Paragraphe I- Les conditions de la diffusion de la vie privée d'une personne par le journaliste.

Les conditions de la diffusion d'un élément de la vie privée d'un individu à titre d'information sont de deux ordres. Certaines sont communes à toutes les personnes (A) tandis que d'autres sont liées à une catégorie de personnes (B).

A- Les conditions générales de la diffusion de la vie privée d'une personne par le journaliste.

Il s'agit de faits ou d'événements qui motivent l'exploitation de la vie privée d'un individu, du moins d'un de ses éléments.

Ils sont au nombre de quatre (4) que la doctrine et la jurisprudence retiennent.

L'un est traditionnel et individualiste : le consentement de la personne concernée (1) ; l'autre plus récent dans son ampleur et plus collectif : l'information légitime du public ou le droit du public à l'information (2).

A ces deux (2) critères précités, il faut ajouter, depuis peu, le caractère anodin de l'élément révélé (3) et la divulgation antérieure des faits1 (4).

Reprenons ces critères de façon successive, en les scrutant en confrontation avec le droit au respect de la vie privée des individus pour en ressortir leur rapport de conciliation.

1 J.P. Gridel, liberté de la presse et protection civile des droits modernes de la personnalité en droit positif français in Recueil Dalloz, 2005, n°6, pp.292 et s.

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Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

1) Le consentement de la personne concernée.

Ce n'est qu'après avoir analysé la notion qu'il recouvre c'est-à-dire sa nature juridique (a) que nous pourrons dégager son exacte portée sur la conciliation entre droit de l'information et droit au respect de la vie privée d'un individus (b).

a) La nature juridique du consentement

Le consentement n'est pas seulement l'accord de deux ou plusieurs volontés, nécessaire à la formation du contrat. Il est aussi, dans certains cas, une autorisation donnée à un tiers d'accomplir tel ou tel acte sans qu'il y ait pourtant naissance d'une obligation quelconque.

L'individu a, en particulier, la faculté, sous certaines réserves bien sûr, de permettre la diffusion de certains détails de sa vie intime. Il a notamment la possibilité d'autoriser de façon expresse ou tacite la révélation et la divulgation d'une scène de sa vie sécrète. Un tel comportement est généralement analysé comme une permission. Il autorise, en l'espèce, la publication d'un détail ou d'un élément de sa vie privée (par exemple sa vie sentimentale, son état de santé, etc....).

Ce qui signifie, dans un raisonnement à contrario et comme on le sait, qu'en son absence, ces opérations tombent sous le coup de la sanction juridique. Mais comment expliquer que le consentement rende conciliable ou licite la diffusion de la vie privée d'un citoyen ?

b) La portée du consentement dans la conciliation entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information

Le consentement doit être effectif, c'est-à-dire donné de façon expresse. Tel est le cas bien entendu lorsque la personne autorise expressément la publication de ses attributs essentiels et distinctifs comme son image, son nom ou une relation amoureuse qu'elle entretient avec son amant(e) en dehors de sa vie conjugale.

En est-il de même lorsque le consentement est tacite ?

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La réponse à cette interrogation trouve son unique fondement, en ce cas, dans l'intérêt légitime de l'information publique.

Retenons, à ce stade de notre réflexion, qu'il n'y a pas de faute à révéler des faits relevant de la personnalité d'autrui si l'individu concerné a permis de les révéler1.

On se trouve, en effet, en présence d'un intérêt personnel à la protection duquel chacun peut renoncer. Le consentement prive la divulgation des droits intimes d'une personne de tout caractère illicite par ricochet. Et cela en application de la maxime romaine « volenti non fit injuria »2.

En effet, cet adage signifie que la personne dont la vie privée a été exploitée par les moyens de l' information ne peut se plaindre ou saisir le juge d'une éventuelle dénaturation, tout simplement d'une publication de sa vie privée à laquelle elle a, elle-même, consenti.

Nous pouvons également adapter à cette maxime romaine la règle du droit civil, en l'occurrence, « Nemo auditur propriam turpitudinem allegans ». Ceci pour dire que nul ne peut se plaindre ou être entendu (par un juge) lorsqu'elle allègue sa propre turpitude.

Par contre, le consentement de certaines personnes, en particulier les tops modèles, dans les contrats portant sur la publication de leur image, connaît une interprétation stricte par la jurisprudence qui est d'ailleurs constante par une application du principe adage « exceptio est strictissimae interpretationis »3. Il en résulte que le consentement du top modèle et partant de tout autre personne ne doit pas être interprété extensivement.

La convention qui a pour objet la reproduction et la publication de son portrait, un détail de la vie privée est d'interprétation stricte.

Cette application de cet adage tombe sous le coup du bon sens, car on ne voit pas comment la personne, qui consent à l'exploitation de sa vie privée,

1 J P Gridel---- ,op . cit* , p 292 et s .

2 J. Ravanas, La protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, LGDJ, Paris 1978, p.246.

3 J. Ravanas, p.95.

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accepterait, un mode d'altération de sa vie privée susceptible de compromettre le respect de sa personnalité. C'est la position du juge français depuis 1974-

En Côte d'Ivoire, le problème ne s'est pas encore posé. Mais s'il se posait au juge ivoirien, nous osons penser, au risque de nous tromper, qu'il analysera la question par une interprétation stricte du consentement donné par le top modèle ou tout autre personne. Toutefois, il est autonome et décide selon son intime conviction.

Nous sommes fascinés par la décision du juge français en ce sens que nous estimons que lorsqu'un individu consent à une simple publication d'un détail de sa vie privée comme l'effigie, il n'accepte pas, pour autant, sa reproduction ou sa diffusion dans des conditions particulières qui aboutiraient à dénaturer sa personnalité et partant sa vie privée.

Les contrats, que passent les top modèles, ont le plus souvent un objet particulier, telle la retransmission de leur image dans une séquence cinématographique, telle encore son utilisation à une fin commerciale. Il y a donc ici un intérêt supplémentaire à appliquer le principe de l'interprétation stricte du contrat ou du consentement.

Se posent seulement les questions relatives au contenu des confidences livrées, du respect par le journaliste, de l'esprit et des modalités de la publication ainsi permise. A ce niveau, la jurisprudence est constante.

Il doit avoir une adéquation, un lien direct avec les faits révélés et l'information diffusée. C'est dire que le journaliste, en dépit du consentement reçu ou du contrat, ne peut et ne doit publier ultra petita c'est-à-dire qu'il ne doit aller au-delà de ce qui lui a été consenti par l'intéressé.

Malheureusement, il est fréquent que le journaliste, co-contractant, invoque la convention pour utiliser, par exemple l'image de la personne représentée ou le détail de la vie privée obtenue de la personne dans un but sensiblement différent de celui auquel elle a consenti Nous retrouvons, de ce chef, les difficultés soulevées à l'occasion de l'interview d'une personne.

La jurisprudence décide que celui qui accepte d'être interviewé passe un contrat . ce contrat, comme elle le précise d'ailleurs, doit être interprété d'après les

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clauses expresses qu'il contient. La personne interviewée a donc la faculté de déterminer l'étendue de l'obligation qui pèsera sur elle : par de là la liberté qu'elle a de se soumettre ou non à une interview, elle peut poser les conditions de sa diffusion, publication ou retransmission.

Le réalisateur d'une émission télévisée ou radiodiffusée peut, de son côté, formuler certaines clauses précisant la manière dont l'interview sera utilisée. En cas de contentieux, il suffira pour le juge d'interpréter le contenu du contrat.

Malheureusement, les choses ne sont pas si simples car, dans la pratique, il n'intervient pas de contrat écrit entre la personne interviewée et le journaliste, mais simplement un accord verbal généralement peu explicite. La jurisprudence la plus récente reconnaît, en ce cas, au professionnel des médias « le droit d'utiliser librement les éléments sonores et virtuels recueillis et d'opérer parmi eux un choix », tout en précisant qu'une réserve s'impose cependant à lui : « celle de respecter les droits de la personnalité de celui dont le témoignage est utilisé, qui ne saurait, en aucun cas, être présumé y avoir renoncé1.

Ce qui nous parait premier, c'est le respect de la personnalité de celui qui est interviewé et non la liberté du journaliste.

Les juges, à défaut de stipulations précises, doivent d'abord être soucieux de protéger les intérêts moraux de la personne dont la vie privée a été publiée et non la liberté du professionnel des médias, qui, si nous pouvons nous exprimer ainsi, n'est qu'une liberté seconde, conditionnée par un accord de volontés. En tout état de cause, le fardeau de la preuve pèse sur le journaliste selon la jurisprudence2.

Il faut donc en conclure que le consentement permet de réussir à concilier droit au respect de la vie privée et droit de l'information .Tous les systèmes de droit, remarque M. Stroïnholm, admettent que « le consentement prive les ingérences dans la vie privée de leur caractère illicite »3. Cependant, le seul fait de publier, par

1 J. Ravanas, op.cit., p.96.

2 Trib. Gr. Inst. Paris, Référés, 22 mars 1973, Martineau c/ Arris et autres, JCP. 1973. II. 17416, Observations Raymond Lindon, et au principal Trib. Gr. Inst. Paris, 1ère ch. 1ère session, 10 juillet 1974, précit. in J. Ravanas, op.cit, p.96.

3 Le droit à la vie privée et ses limitations. Rapport général (section IV. C.I) pour le IXe Congrès International de Droit comparé, Téhéran, 31 août - 7 septembre 1974, p.54 in J. Ravanas, op.cit, p.247.

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exemple, la vie privée d'une personne, même connue du grand public, sans son consentement, au moins tacite, peut être considéré comme constitutif d'une faute1, donc répréhensible, sanctionnable.

Que dire de l'information légitime du public ?

2) L'information légitime du public .

Que pouvons-nous entendre concrètement par là ?

Le droit à la vie privée comprend trois (3) composantes. Le droit au respect de la vie privée proprement dit, le droit à l'image et le droit à la présomption d'innocence. Par exemple, la vie cachée d'une personne sera diffusé par voie de presse, malgré l'absence de consentement de la personne concernée, et même contre son consentement si elle est en liaison suffisamment étroite avec l'intérêt général2.

L'information légitime du public ou le droit de l'information est devenu un principe général de droit, voire un droit supérieur, dans certaines mesures, à cause du droit du public à l'information. En effet, avant l'on disait que la réussite était au bout de l'effort.

Aujourd'hui, compte tenu de l'importance de l'information dans notre société dite moderne, il serait plus intéressant de dire et plus correcte selon nous que la réussite ou le succès est au bout de l'information car comme le dit la Sainte Bible « le peuple de Dieu périt faute de connaissance »3 de même le citoyen se meurt faute d'information

Ce qui lui permet d'entrer dans l'univers des droits de la personnalité de façon générale et du droit au respect de la vie privée de façon particulière sans pourtant leur porter atteinte nécessairement.

1 J. Ravanas, op.cit, p.95.

2 J.P. Gridel, op.cit, p.392.

3 La Sainte Bible, Le livre du prophète Osée, Chapitre 4 versets 6.

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En conséquence, l'information légitime du public et le droit du public à l'information se concilient avec le droit a u respect de la vie privée qui leur servent de support.

Vérifions-le à travers les trois (3) composantes du droit au respect de la vie privée en dépit de l'autonomie aujourd'hui affirmée du droit à l'image.

a) Droit au respect de la vie privée proprement dit et droit de l'information.

L'intérêt public justifie la diffusion d'informations, même de nature privée. Des tribunaux recherchent toujours l'existence d'un lien logique entre le fait privé rapporté et l'intérêt du public à une telle information.

L'intérêt public, social ou général est présumé chaque fois que l'information divulguée est obtenue dans des lieux et documents publics.

Mais qu'est-ce qu'un lieu public ?

Un lieu public, en effet, est un lieu qui est ouvert à la circulation publique, un endroit où tout citoyen a accès sans autorisation préalable d'y pénétrer.

Les lieux dits publics sont, par exemple, la rue, les jardins publics, les marchés, les gares routières, ferroviaires, aéroportuaires, les établissements d'enseignement, et même, lieux privés mais ouverts au public.

En outre, on conçoit que la notion de lieu public, en dehors de son rattachement à la vie publique, comporte tous les moments où une personne se trouve dans un lieu public c'est-à-dire dès lors qu'elle serait placée hors de sa sphère d'intimité qui est un lieu privé ou une propriété privée.

Le lieu public, en somme et à l'inverse du lieu privé, est celui qui est régulièrement accessible à tous, sans autorisation de quiconque.

Toutefois, nous ne pouvons définir le lieu public sans faire cas du lieu privé en ce sens que c'est par opposition au lieu public qu'il faut définir le lieu privé.

Pour qu'un lieu ait un caractère privé, il suffit qu'il ne soit pas ouvert à toute personne sauf sur autorisation de celui qui l'occupe d'une manière permanente ou temporaire.

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Est donc un lieu privé, au sens de l'article 384 du code pénal, les domiciles et leurs dépendances.

A cela pourraient s'ajouter, par exemple, la partie d'une pharmacie où le public n'est pas admis et la partie de cette pharmacie où le public est admis, en dehors des heures d'ouverture. A ce caractère, la cantine où le ouvriers d'une usine prennent leur repas, un foyer de jeunes travailleurs, un magasin où un commerçant a des conversations téléphoniques ayant pour objet l'intimité de la vie privée.

Egalement, un lieu, public par nature, peut donc devenir un lieu privé par l'utilisation qui en est faite. Est aussi un lieu privé la cour d'une prison, son accès étant subordonné à une autorisation, le bureau d'un employeur1.

N'est pas, à l'inverse, un lieu privé une plage accessible à tous les estivants.

Il ne serait donc inexact, voire erroné de définir le lieu privé comme tout endroit clos, inaccessible aux regards de l'extérieur, et où l'entrée dépend de l'autorisation donnée par celui-là seul qui a la propriété, l'utilisation ou la jouissance, à un cercle déterminé.

Après avoir fait la distinction entre lieu public et lieu privé, il convient de revenir pour dire que le lieu public ou l'intérêt public enlève au fait concernant la vie privée son caractère intime, sacré.

Dans cette optique, les juges et la doctrine estiment que la divulgation d'une nouvelle, même si elle est préjudiciable à la réputation d'autrui, est licite pour peu que les informations soient vraies et que sa diffusion correspondre à une utilité sociale.

En effet, conformément à la jurisprudence allemande, l'intérêt public concilie la presse avec les droits de la personnalité et partant le droit au respect de la vie privée. Cela transparaît dans le code de déontologie du conseil allemand de la presse qui énonce dans son principe n°8 que « la presse respecte la vie privée et l'intimité de l'être humain. Cependant si le comportement en privé d'une personne affecte les intérêts publics, il peut être évoqué dans la presse »2.

1 P. Kayser, La protection de la vie privée, op.cit, pp.284 et s.

2 Anonyme, vie privée, droits de la personnalité, www.senat.fr.

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Par ailleurs, l'information se trouvant dans des dossiers ou documents publics permet de concilier les droits de la personnalité avec le droit de l'information. Ainsi si une information provient d'un document public (acte de naissance, rapport de police, mémoire, thèse...), les journalistes ne peuvent être poursuivis pour l'avoir rapportée. Peu importe que les personnes concernées aient été embarrassées par la publication de telles informations. Par exemple, en 1989, la Cour Suprême des Etats-Unis a jugé qu'un journal ne pouvait être poursuivi, pour avoir révélé le nom de la victime d'un viol obtenu dans un rapport de police, même si, en l'espèce, ce nom apparaissait par erreur dans le document1.

Il convient de dire, cependant, qu'en cas de conflit entre le droit au respect de la vie privée et la liberté de la presse, deux droits jouissant d'une protection constitutionnelle, la jurisprudence se refuse à donner la priorité à l'un ou à l'autre. Elle apprécie chaque situation de litige séparément selon l'intérêt en jeu.

De façon générale, elle est réticente à limiter la liberté d'expression propre au journaliste et qui consiste non seulement à diffuser des informations sur la société nationale et internationale, sur la vie publique ou privée des individus mais aussi à les commenter. Dans tous les cas, l'un ou l'autre primera selon que l'intérêt qu'il s'agira de sauvegarder ou de protéger est supérieur à l'autre et vis versa.

En revanche, la position des tribunaux est sans ambiguïté eu égard à certains faits spéciaux. En effet, ils condamnent sans hésitation la publication d'informations relatives à des faits qui se sont produits dans l'enceinte d'un domicile ou d'une maison, ainsi que la révélation d'informations initialement transmises par pli cacheté.

Il en est de même de la publication ou la révélation de contenu de lettres, mémoires ou autres écrits personnels de caractère intime, d'informations portant sur la sexualité ou la vie au foyer, les revenus, les antécédents criminels, les traitements médicaux.

En définitive, le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information vont de paire lorsque l'information donnée sur la vie privée d'une personne concerne légitimement le public. A défaut, point de conciliation et alors conflit ou opposition.

1 Idem.

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Au regard des développements ci-dessus, le droit à la vie privée et le droit de l'information peuvent coexister harmonieusement .La révélation de faits intimes doit poursuivre un but utile d'information. Vérifions ce travail avec une autre composante du droit au respect de la vie privée à savoir le droit à l'image qui a beaucoup d'interférences avec la vie privée proprement dite et qui lui est même incorporé.

b) Droit à l'image et droit de l'information.

L'image est un attribut essentiel de la personnalité. Elle est aussi un élément ou une composante de la vie privée. Le droit à l'image se définit comme étant le droit exclusif que toute personne a sur son portrait, son physique. C'est aussi le droit de toute personne sur la réalisation, la reproduction ou la publication de son effigie sous forme de dessins, de photos, de films ou de sculptures1. Il suit de là que toute personne est en droit d'interdire la prise et la reproduction de ses traits physiques2.

C'est là le sens du principe en la matière. Lequel principe stipule l'interdiction de photographier et a fortiori de publier la photographie d'une personne sans son autorisation3. Le corollaire de ce principe est que « chaque personne dispose d'un droit exclusif sur son image et peut de manière discrétionnaire en autoriser la reproduction ou la photographie »4. En conséquence, sans le consentement, la photographie d'un individu s'avère quasi impossible. Mais un constat s'impose, de nos jours, avec l'utilisation abondante de l'image d'autrui dans la presse.

A la télévision, sur les quotidiens ou écrits périodiques, magasines, sur Internet, l'image nous envahit. Qu'est-ce qui motive cela ?

La réponse émane de la doctrine journalistique qui elle-même s'interroge en ces termes : que serait l'information sans image ?

1 A. M. Assi-Esso, précis de droit civil ivoirien, Les personnes-la famille, LIDJ, 2e édition 2002, p.53.

2 Paris 14 mai 1975, D. 1976, 291, note Lindon, et, sur pourvoir, liv., 2e, 17 mars 1977. D. 1977, IR 316.

3 B. Hess-Fallon et A.M. Simon, aide-mémoire, droit civil, 5e édition Sirey, 1999, p.61.

4 J. Mazars, La liberté d'expression, la loi et le juge, source : www.telerama.fr.

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Cette interrogation montre combien de fois l'image est un élément incontournable, indispensable dans la transmission de l'information.

En effet, une émission à la radio n'intéresse pas trop le public. Par contre, une autre à la télévision attire beaucoup de monde devant leur petit écran. La différence est donc nette.

De même, un journal ou un magazine sans image serait difficile à intéresser ou attirer le lecteur ou le public.

D'où la nécessité de l'immixtion du journaliste dans la sphère d'intimité des personnes, singulièrement le cas de l'image.

Mais la question fondamentale surgissant est celle de savoir si le journaliste avant la publication de l'image d'autrui obtient de celui-ci nécessairement ou obligatoirement son consentement ?

Nous répondons par la négative dans la mesure où le droit positif, par dérogation au principe de l'interdiction de publier l'image d'autrui sans son autorisation, considère que s'agissant de l'intérêt général c'est-à-dire de l'information légitime du public ou du droit du public à l'information et de groupes de personnes dans un lieu public ou de scènes de rue, il n'est pas nécessaire d'obtenir le consentement des personnes photographiées pour la publication de leur image.

Autrement dit, le principe de l'autorisation préalable connaît des exceptions, lesquelles exceptions sont très limitées conciliant ainsi droit à l'image et partant droit à la vie privée et droit de l'information.

Deux exceptions retiennent notre attention.

Premièrement, l'intérêt public ou général justifie la publication de photographies de personnes concernées par l'actualité ou qui se trouvent impliquées par elle. Il s'agit des images illustrant l'actualité.

En effet, lorsque des photographies sont prises lors d'événements d'actualité ou de manifestations publiques, elles peuvent être publiées sans autorisation des personnes photographiées. Les personnes mêlées à des faits d'actualité ne sauraient se plaindre de l'utilisation de tel ou tel aspect de leur personnalité et, en particulier, de la diffusion de leur image ou d'un aspect de leur vie privée. La

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publication d'une photographie trouve, par exemple, sa justification dans la nécessité d'informer les lecteurs, les téléspectateurs sur l'existence d'un accident de la circulation particulièrement tragique1 ou d'un braquage de portée générale dont les auteurs seraient en fuite et donc recherchés par la police. Mais l'absence de lien avec l'actualité rend illicite, à défaut d'un motif valable, la reproduction des traits d'une personne ou la diffusion d'une information la concernant. C'est dire que cette liberté reconnue à la presse n'est pas absolue puisqu'il doit s'agir de l'illustration de l'actualité immédiate, et qu'il ne doit pas y avoir d'atteinte à l'intimité, à la dignité des personnes. L'actualité immédiate est le moment ou la période où se produit l'événement. La jurisprudence exige que la publication soit en rapport avec l'événement ou l'actualité et qu'en outre, qu'elle soit opérée dans un délai proche de l'événement.

Ainsi dans un jugement du tribunal de Grande Instance de Nanterre, en France, il a été jugé que l'attaque d'un fourgon blindé, relatée dès le lendemain, constitue incontestablement un fait d'actualité. La photographie ultérieure représentant un fonctionnaire dans l'exercice de sa mission de police judiciaire sur les lieux de l'information, n'illustre pas de façon spécifique les faits sur lesquels il enquête2.

La personnalité des individus mis en cause sert évidemment à illustrer l'affaire pour mieux la comprendre.

D'une façon générale, la notion « de faits d'actualité » induit le droit du public d'en connaître les événements et même les détails. Les journalistes peuvent évoquer la participation d'une personne à une cérémonie publique, diffuser son image, si l'épisode apparaît comme une illustration de l'événement.

La décoration d'un simple fonctionnaire ou d'un caporal pour un acte d'héroïsme accompli lors d'un incident comme celui auquel avait échappé le chef de l'Etat de Côte d'Ivoire lors de la commémoration de la fête nationale du Liberia,

1 P. Auvret, doctrine, droit des personnes, utilisation de la personnalité d'autrui, illustrations et exemples de presse in JCP. La semaine juridique, Edition générale n°12, 2-3 mars 2005, p.552.

2 Trib. Gr. Inst. Nanterre, 1ère ch., A., 28 octobre 2002 : Légipresse 2003, I, p.23. comp. à propos de la révélation du nom d'un enquêteur de police ; cass. 2e civ., 29 avril 2004 : juris.-Data n°2004-02 3439 ; JCP G. 2004, IV, 2252 ; Légipresse 2004, I., p.106 in JCP n°12 de 23 mars 2005, p.552.

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revêt indiscutablement le caractère de fait d'actualité, dont un magazine est en droit de rendre compte, même en l'accompagnant de la photographie d'autres quidams, en l'espèce un mineur, qui ont participé à la cérémonie.

Le public a un intérêt légitime à la connaissance non seulement de l'information abstraite mais des circonstances détaillées des faits d'actualité. L'image est notamment un moyen de diffusion des anecdotes. De surcroît, la divulgation de renseignements ou de photographies concernant des personnes liées à l'actualité est admise maintenant par la jurisprudence en vertu du droit du public à l'information et de son corollaire droit de l'information, dès lors que la dignité ou l'intimité n'est pas en cause1.

En outre, l'utilisation de la personnalité d'autrui, en marge de l'actualité, à titre d'exemples ou d'illustrations, ne se heurte pas non plus à l'intérêt légitime du public.

En effet, aujourd'hui, notre droit admet la publication d'informations ou d'images relatives à tout ce qui entre dans le champ de l'intérêt légitime du public, même en dehors de l'actualité proprement dite.

En résumé, sur ce point, tout organe de presse dispose du droit d'informer ses lecteurs, auditeurs, téléspectateurs sur les événements d'actualité ou d'intérêt public, même si la protection de la personnalité d'autrui doit en souffrir ou prendre un coup.

Habitué aux images proposées par la télévision et les journaux, le public souhaite se faire, lui-même, une idée des circonstances grâce aux clichés qui lui sont fournis2. Ainsi l'on s'aperçoit combien l'image, la vie privée et partant les droits de la personnalité sont devenus une pièce de l'information moderne.Et que le droit de chacun sur son image, sa vie privée doit se combiner avec la liberté de la presse, principe essentiel d'expression des journalistes.

Face à cette liberté donc, la protection de la vie privée, de la victime s'efface, à condition que l'information des lecteurs, des téléspectateurs justifie la diffusion de

1 Cass., 1ère civ., 23 avril 2003 in JCP n°12, 23 mars 2005, p.552.

2 I. Corpart, presse, La dignité de la victime photographiée face à la liberté de la presse, note de jurisprudence, Cour de cassation, 2e civ., 4 nov. 2004, Recueil Dalloz, 2005, n°10, pp.696 et s.

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tels clichés1. Nombreuses sont les espèces où a été dite licite la photo reproduite sans le consentement de la personne, dès lors que celle-ci était, volontairement ou fortuitement, impliquée dans l'information d'actualité, pourvu que l'image soit en liaison directe et étroite avec le fait et ait été fixée au moment suffisamment proche de lui dans le temps2.

Deuxièmement, il s'agit de l'image captée dans un bien public.

Mais que revêt la notion de lieu public dans le contexte du droit à l'image ?

En matière de droit à l'image et suivant la définition retenue par la jurisprudence, notamment celle de la Cour de cassation française, un lieu public est "un lieu accessible à tous sans autorisation spéciale de quiconque, que l'accès en soit permanent ou subordonné à certaines conditions, heures ou causes déterminées".

La voie publique et la rue sont, en effet, des lieux publics. Toutefois, une plage

privée même payante peut être un lieu public (le péage n'est qu'une condition de son accès, lequel reste ouvert à tous), que les lieux de culte sont considérés comme lieux publics. Ainsi des images captées dans un lieu public ne nécessite pas le consentement des personnes photographiées. Toute chose qui concourt à la conciliation des rapports entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information. En conséquence, la conciliation est présumée chaque fois que la photographie divulguée a été obtenue dans les lieux publics. Par exemple, il a été jugé, aux Etats-Unis, licite la publication dans un guide consacré aux plages nudistes, d'une photographie d'un couple sur une plage car ce livre était d'un intérêt public et que l'image du couple présentait un lien avec le sujet3. Le droit de `information entretient aussi des rapports de conciliation avec la présomption d'innocence.

1 Trib. G. Inst. Toulouse, 8 mars 2002 et Trib. G. Inst. Nanterre, 27 mars 2002, JCP 2002, n°27.

2 J.P. Gridel, op.cit, in Recueil Dalloz, 2005, n°6, p.395.

3 Anonyme, vie privée, droits de la personnalité, www.senat.fr.

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c) Droit à la présomption d'innocence et droit de l'information.

Le droit à la présomption d'innocence se définit comme le droit reconnu à toute personne accusée d'un acte délictueux d'être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées.

C'est ce qui ressort des deux déclarations des droits de l'homme du 26 août 1789 et 10 décembre 1948 respectivement aux articles 9 et 11 et de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des peuples de 1981 en son article 71.b1.

En Côte d'Ivoire, en dehors de la Constitution du 1er août 2000 qui fait cas de façon expresse du droit à la présomption d'innocence en son article 22, aucun texte législatif n'y fait référence.

En France, ce n'est q'en 1991 que le législateur a estimé nécessaire d'introduire dans le code civil un article lui afférent.

En effet, c'est l'article 9-1 créé par la loi du 24 août 1991 et remaniée par celle du 15 juin 2000 qui a affirmé, au plan interne et législatif, ce droit. Cet article 9-1 dispose dans son premier alinéa ceci : « chacun a droit à la présomption d'innocence », en l'alinéa 2 d'ajouter : « qu'il y a faute civile ou atteinte à présenter publiquement, et avant toute condamnation devenue définitive, une personne comme coupable de faits qui sont l'objet d'une enquête ou instruction judiciaire ».

Rappelons, toutefois, que ce droit de la présomption d'innocence était énoncé traditionnellement à l'intention de la police judiciaire et des juridictions, à l'encontre de quiconque. C'est dire que les journalistes n'échappent pas au respect de cette règle.

Mais comment le journaliste peut-il diffuser un fait sans que l'information véhiculée présente un individu comme coupable d'une infraction ?

La solution vient du fait que le droit à la présomption d'innocence ne se heurte pas au droit de l'information. Et inversement. Droit à la présomption d'innocence et droit de l'information peuvent donc se combiner.

1 Voir annexe 2, Textes internationaux relatifs aux droits de la personnalité.

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En effet, il est permis parfaitement, dans un article de journal, un livre, un reportage radiodiffusé ou télévisé, de relater et commenter les éléments connus d'une affaire pénale en cours de traitement policier ou juridictionnel. Le journaliste peut, par conséquent, énoncer les faits, donner les noms, prénoms, âges, photos des personnes concernées (sauf protagonistes mineurs), les soupçons pesant sur tel ou tel, les témoignages intervenus, la description du subtil mécanisme de la fraude reprochée, les divers points de vue possibles1.

Il est seulement exigé, en pratique, que la publication intervenue soit empreinte d'une tonalité laissant honnêtement place au doute possible dans l'esprit du lecteur, auditeur, téléspectateur mais aussi qu'elle soit permanente, c'est-à-dire ayant un rapport direct et utile avec l'actualité ou l'intérêt légitime du public. Cela signifie que la publication doit émaner de la légitimation puis de l'adéquation avec l'événement ou le fait2.

Tel est le cas de l'image d'une personne dont le visage apparaît distinctement sur une photographie reproduisant les traits d'une personne impliquée dans une affaire judiciaire3.

De même, à propos du démantèlement d'un trafic de stupéfiants, il n' y a pas d'atteinte illégitime ou illicite au droit à la présomption d'innocence à donner des éléments d'identification d'une personne arrêtée, à préciser qu'elle est fichée au grand banditisme et tenue par les enquêteurs pour l'un des responsables du réseau. Rien de tout cela ne relevant un sentiment personnel ou un préjudice du journaliste quant à sa culpabilité4.

La même solution a été donnée à propos d'émissions de télévision qui, après avoir fait une large place aux plaignants et témoins à charge, ont ensuite donné un suffisant temps de parole à la personne soupçonnée et à son avocat. De telle

1 J.P. Gridel, op.cit, p.396.

2 M. Dupuis, le droit à l'image face au droit d'informer : un effort de simplification, Revue Lamy, droit civil, décembre 2004, p.31 ; Cf. dans le sens de l'auteur, cass., 2e civ., 30 juin 2004, 2 arrêts, infra, note 31, in fine.

3 Cass. 1ère civ., 20 février 2001, Bull.civ., I., n°43 ; D. 2001, p.1199 et la note ; RTD, civ. 2001, p.329.

4 Cass. 2e civ., 13 nov. 2003, Bull. civ., II., n°335.

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façon, aucune conclusion tenant la culpabilité pour acquise n'en est résultée de l'émission1. Par ailleurs, concernant les personnes impliquées dans un procès, est-il possible de publier leur image ou leur nom ?

Cette question, qui, en pratique, concerne surtout les individus engagés dans un procès pénal, appelle, une réponse affirmative. C'est ce qu'on appelle le principe de la publicité de la justice, considéré, depuis sa consécration par la révolution française, comme une garantie de bonne justice.

Ce principe signifie que les débats de l'affaire qui ont lieu en audience publique et que le jugement ait également lieu en audience publique a pour conséquence d'autoriser les comptes rendus du procès dans la presse quotidienne.

Dans cette même veine, un délinquant est recherché par la police, un intérêt général rend licite, par exemple, la publication de son image, son nom et prénom, son activité professionnelle.

Cette divulgation, en effet, facilite les recherches. Toute situation qui est rare ; voire inexistante dans nos pays africains et particulièrement en Côte d'Ivoire. Néanmoins, certaines publications de photos d'individus ayant détourné des fonds et qui se sont volatilisés dans la nature ainsi que les photos de délinquants, braqueurs, meurtriers, sont courantes. Au total, l'information légitime du public conforte l'intrusion ou l'immixtion du journaliste dans la sphère du droit au respect de la vie privée .La reproduction d'une photographie n'est admissible, pour les nécessités de l'information, que si celle-ci a été prise dans des circonstances ayant un rapport direct et utile avec las évènements en cause ou les faits qui en ont été la suite.

Le droit a intégré ce phénomène et tente de réguler pour établir un équilibre entre la liberté de communication et le respect des droits des personnes. Un exemple ne peut être utilisé par la presse que s'il est utile et pertinent. La protection de la personnalité trouve des limites dans la liberté de communication et des nécessités de l'information.

La loi, la doctrine et la jurisprudence permettent que soit porté à la connaissance du public tout sujet d'intérêt général digne de la curiosité légitime du

1 Cass. 2e civ., 20 juin 2002, Bull. civ., II., n°142.

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public. Le droit du public à l'information autorise la publication d'images ou de nouvelles sur les individus impliqués dans un événement d'actualité et ne permet pas de faire « arbitrairement obstacle à la liberté de recevoir ou de communiquer des idées » ou des informations sous prétexte de défendre les droits de la personnalité1.

En tout état de cause, la dignité humaine doit être préservée. C'est le cas lorsque la diffusion d'un détail de la vie privée ridiculise la personne concernée ou la plaçait dans une situation dégradante. Hormis le consentement et l'information légitime du public justifiant la publication des droits privés des individus par la presse, une autre circonstance permet l'intrusion du journaliste dans la vie privée d'une personne. Il s'agit du caractère anodin de l'élément révélé.

3) Le caractère anodin de l'élément révélé

Le vocable « anodin » peut être appréhendé comme ce qui est insignifiant, ce qui est sans importance et par conséquent ne peut avoir d'effet ou d'influence sur la vie d'une personne lorsqu'il est porté à la connaissance du public.

On considéra par exemple la révélation d'un élément de la vie privée comme de simples illustrations d'activités, qui essentiellement n'ont pas d'incidence sur la vie du concerné.

Ainsi, dans un arrêt de la première chambre de la cour de cassation française, il a été décidé que la diffusion d'informations anodines ou de détails sans importance échappe même à la sanction du juge.2

Il faut dire que cette notion de caractère anodin est apparue en jurisprudence en 2003 à propos de deux époux, personnalités connues et en instance notoire de divorce, déjeunant ensemble dans un restaurant très fréquenté, information anodine, a dit la cour de cassation, ne méritant pas d'être qualifiée d'attentatoire à la vie privée. A ce niveau donc, la publication d'un fait de la vie privée ou d'un droit

1 P. Auvret, op.cit, p.551.

2 Cass.1ère civ. 3 avril 2002, JCPG. 2002, IV, 1871

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de la personnalité sans ou contre le consentement de la personne, selon que l'élément était anodin, ne constitue pas une atteinte aux droits de la personnalité. Cependant, il y a lieu de souligner que ce caractère intéresse plus les personnes connues du public ou les personnes publiques.

A côté du caractère anodin de l'élément révélé, l'existence d'une divulgation antérieure favorise la pénétration du droit de l'information dans les droits de la personnalité en vue de leur conciliation.

4- L'existence d'une divulgation antérieure.

A ce niveau, plusieurs cas de figure se présentent, selon que l'élément de la personnalité et partant de la vie privée avait été révélé par la personne concernée elle-même, ou bien s'était trouvé porter à la connaissance générale au nom du droit-devoir d'information du public.

L'élément de vie privée déjà confié par l'intéressé à fins de publication peut-il être librement repris dans un livre ou journal ? A cette préoccupation, la jurisprudence répondait traditionnellement par la négative, au nom de la spécificité de consentement initial donné. Mais depuis 2002, elle énonce que des faits devenus publics, sans précision apparente quant au mode (consentement initial, actualité ancienne), peuvent être repris sans constituer une atteinte1 aux droits de la personne.

Pour nous, une distinction s'impose. On considéra que la divulgation était permise lorsque l'élément, par exemple, de vie privée avait gagné le domaine public par le fait de l'intéressé ou par une appartenance à l'information légitime.

En revanche, elle était illicite lorsque la première diffusion avait été elle-même illicite, c'est-à-dire opérée sans l'autorisation de l'intéressé et sans relever d'un cas d'information légitime. Lorsqu'une information de vie privée intéressant l'intérêt général a déjà été publié par un organe de presse, elle peut être reprise tranquillement par d'autres organes de presse.

1 Cass. 1ère civ. 3 Avril 2002, précité, cass. 2ème civ, 3 juin 2004, n°03-11.533

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Toutefois ,cette analyse est fragilisée par l'arrêt rendu par la cour de Strasbourg le 18 mai 2004, à propos du livre "le grand secret" et qui semble proposer une autre distinction. La divulgation certainement illicite puisque faite en violation du secret médical, n'empêche pas sa reprise licite au bout de quelques mois. Il en va ainsi, dit la cour européenne, parce que, dès lors que le cancer du président Mitterrand s'est trouvé connu, par quelque mode de révélation que ce soit, ce fait sert à illustrer un débat d'intérêt général.

Ainsi, la divulgation de faits antérieurs est licite.

Par exemple, en 1980 aux Etats-Unis, un article publié dans le magazine "sports illustrated" et consacré à un champion de surf s'étendait sur divers aspects de sa vie privée, mentionnant notamment qu'il n'avait jamais appris à lire ou qu'il trompait les autorités pour toucher des indemnités de chômage. Le tribunal estima que les faits rapportés étaient peut-être embarrassants pour le demandeur, mais ne constituaient pas du sensationnalisme gratuit ; ils étaient qu'une tentative légitime du journaliste pour expliquer le style et les talents du sportif.1

Au total, droit au respect de la vie privée et droit de l'information peuvent se concilier parfaitement. Cette conciliation est plus accentuée lorsqu'il s'agit d'une certaine catégorie de personnes.

B- Les conditions particulières liées à une certaine catégorie de personnes.

Le contenu de la vie privée est variable selon les personnes concernées. Cette catégorie de personnes est connue du public. Elle regroupe, non seulement celles qui assument ou cherchent à assumer des fonctions officielles ou politiques c'est-à-dire les personnes publiques (1) mais également les personnes qui, sans exercer de fonctions publiques, ont acquis ou tout au moins désirent acquérir une certaine notoriété (2)

En effet, une analyse de la jurisprudence en général, amène vite, lorsqu'il s'agit de résoudre le conflit récurrent entre le droit au respect de la vie privée et le

1 Anonyme, vie privée, droits de la personnalité, protection jurisprudentielle à la vie privée, Etats-Unis, http// www. senat.fr.

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droit de l'information, à la constatation suivante : La vie privée ne serait pas la même pour tous. La jurisprudence a ainsi forgé une catégorie de personnes bénéficiant, en principe, d'une protection moindre : Celle des personnes dites « publiques » de manière générale.

1- Les personnes publiques.

Les personnes dites publiques attirent l'attention du public. Très souvent, elles le sollicitent volontiers en recourant à toutes sortes d'artifices. Elles sont en permanence, placées dans le champ de l'actualité ou de l'information légitime du public. L'actualité se définissant comme l'événement auquel assiste ou participe le sujet .Ceci dit , comment se concilient les droits privés des personnes publiques avec ceux des journalistes ?

Avant toute chose, qui peut être dénommées personnes publiques

a- Notion de personnes publiques.

Les personnes publiques sont celles qui décident, de leur propre chef ou en raison de circonstances particulières, de participer à des activités se déroulant en public ou pour lesquelles elles recherchent la confiance ,l'attention du public .Les personnes occupant une fonction publique ou exerçant un métier sollicitant l'attention du public sont en général soumises à un plus haut degré de transparence, en raison de l'importance des fonctions qu'elles occupent et l'idéal qu' elles sont censées véhiculer. IL s'agit, en l'espèce, des hommes politiques1, des élus de la nation ou des collectivités locales, ceux qui sont investis d'une charge officielle, bref, tous ceux qui exercent une fonction publique. A ces personnes, nous pouvons ajouter les candidats à une fonction publique ainsi que les personnes qui, dans une moindre mesure animent la vie sociale, économique ou politique d'un

1 Sur la définition de l'homme politique, voir D Gaxie, les professionnels de la politique, PUF, coll. Dossiers Thémis, Voir aussi A. Duhamel, les hommes dans la vie publique, « le monde » des 27 - 28 janvier 1974 p. 15

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pays1, et aussi les personnes qui orientent la plupart de leurs activités ( travaux , déclarations , idées ) vers la collectivité , le public .

Les personnes impliquées de leur plein gré ou involontairement dans un évènement public doivent aussi s'attendre à une vie privée moins étendue, du moins tant que dure cet évènement.

b- Droit à la vie privée des personnes publiques et droit de l'information, quelle conciliation ?

Le principe, en matière de protection des droits de la personnalité, est celui de l'autorisation préalable de l'utilisation des droits d'une personne.

Mais que serait le droit de l'information si les personnes publiques bénéficiaient d'une protection étendue comme les quidams ?

Les personnes particulières, de par leur titre, ont délimité volontairement ou involontairement la sphère de protection de leurs droits subjectifs. Par leurs activités, elles sont incorporées au droit de l'information car ce sont elles qui font fonctionner le plus souvent la presse. Elles intéressent le public et font l'actualité. Deux droits principaux de la personnalité guideront cette analyse : le droit à la vie privée et le droit à l'image.

Ceci dit, les personnes publiques bénéficient-elles d'un droit à la vie privée, d'un droit au respect de leur image ?

La réponse à cette question mérite une étude approfondie avant de pouvoir donner une réponse.

Les opinions sont diverses à cet égard.

Au vu de la lecture des recueils consultés et en considération de la distinction entre vie publique et vie privée et dans l'état actuel de nos moeurs politiques, la vie publique, remarque-t-on, couvre tant de choses, lorsqu'il s'agit d'un élu ou d'un candidat aux élections dites politiques, que la vie privée est réduite, pour l'intéressé, à peu de choses, par rapport à celui qui demeure à l'écart des

1 R. Lindon, la presse et la vie privée, n° 3 ; du même auteur, les droits de la personnalité, ouvrage précité n° 97 et s. p.48

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compétitions électorales. On pourrait se demander si la personnalité d'un homme politique ou d'une personne publique ne revêt-elle pas, elle-même un caractère public ? Ont-ils encore un droit de la à la vie privée ? N'est-elle pas tombée sans « le domaine public»?

Selon certains auteurs comme R. Savatier, l'homme politique ou public n'a plus de vie privée. Tout ce qui le concerne semble tomber dans le domaine public et partant dans la vie publique. L'élu ne détient-il pas ses pouvoirs de la confiance que lui ont accordé les électeurs ? Ces derniers ont, de ce fait un droit de regard particulièrement étendu sur sa vie : le public est en droit de connaître non seulement la vie publique de l'homme politique, de la personne publique, mais aussi « tout ce qui dans sa vie privée, peut apparaître comme la confirmation ou le démenti de ladite vie publique»1.

Dans cette optique écrivait R .Savatier« l'homme public..., affronte volontairement les regards, et se présente à tous. Il autorise la diffusion de ses traits et gestes, fût-elle pour lui fâcheuse... »2

En l'espèce, pour lui, « le roi ou la reine d'Angleterre n'a presque plus aucun secret pour le citoyen britannique ».

C'est dans ce contexte que le 05 mai 1974, après les résultats du premier tour pour l'élection du président de la République, Monsieur Valery Giscard d'Estaing déclarait sur les ondes de la radio et de la télévision française ceci : « chacun a le droit de savoir ce que je suis, ce que je fais, ce que je veux ».

Par delà ces considérations et sans aller cependant jusqu'à dire avec Gladstone que « la vie privée de l'homme public est publique »3, il faut en vérité, dire qu'il serait juste de retenir que l'homme public ne peut s'opposer, comme toute personne, à l'exploitation ou à la publication de ses droits de la personnalité qui le représentent dans sa vie publique, par opposition, dans certains cas seulement, à celle qui le montre dans sa vie privée. Par conséquent, dès lors que la personne

1 R. Lindon, note sous TGI, Paris, 25 avril 1974, Mitterrand c/ « France Martin »D. 1974, p. 698, 2ème coll.

2 R. Savatier, les métamorphoses économiques et sociales du droit privé d'aujourd'hui, seconde série, universalisme renouvelé des disciplines juridiques, Paris, D, 1959, n° 287, p. 284

3 Cité par P.O. Lapie, les aspects contemporains des atteintes à la vie privée, Revue des travaux de l'académie des sciences morales et politiques, premier semestre 1973, p. 40

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« publique » se trouve dans un lieu public, la publication de l'information obtenue dans ce cadre est présumée d'un intérêt légitime pour le public.

En Allemagne, la protection de la vie privée des personnes ayant une certaine notoriété ne peut être assurée que si elles démontrent qu'elles se trouvent, certes dans des lieux publics, mais néanmoins dans une certaine confidentialité. En tant que personnage public absolu, président de la république, autorités politiques et administratives, le consentement à la publication de photos n'est pas nécessaire, comme il n'est pas nécessaire de limiter la représentation de la personne dans l'exercice de ses fonctions. Selon la cour constitutionnelle allemande, l'essentiel est que les tribunaux mettent en balance la sévérité de l'atteinte et l'intérêt du public à l'information.

De même que les juridictions européennes, le droit positif estime qu'au stade de la mise en balance des intérêts en conflit, il convient de prendre en compte le caractère d'intérêt public de l'information publiée. Cette démarche est une fois encore proche de ce qui a cours en Côte d'Ivoire, où est normalement exigé un lien de pertinence entre l'évènement d'intérêt général et la révélation de faits de nature privée. Dès lors qu'il s'agit, en général, de satisfaire la seule curiosité d'un certain public, la protection des articles dont peut se prévaloir la presse est bien moindre.

Cependant le droit au respect de la vie privée des personnes publiques va de fort belle manière avec le domaine de la presse.

Ainsi, un mariage, une naissance dans une famille régnante ou prétendante, et par ses incidences dynastiques, concerne l'intérêt général et par conséquent peut-être révélé au public.

C'est encore dans ce sens que s'inscrit l'arrêt de la cour européenne des droits de l'homme du 18 mai 2004 statuant sur l'état de santé d'une personne qui exerce de très hautes fonctions.

Egalement a été jugé non fautif un article faisant état de l'intervention médicale subie par un monarque dont l'état de santé est susceptible d'avoir des retentissements sur le fonctionnement des institutions de son pays et le cas

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échéant sur l'avenir politique de celui-ci. Cette révélation, d'après le tribunal, relève de la légitime information du public.1

Les questions matrimoniales concernant une personne menant une vie publique tel un dirigeant d'une grande entreprise ne relève pas du domaine de la vie privée.2

Le droit au respect de la vie privée des personnes publiques est très limité en comparaison à ceux du simple quidam.

L'exercice d'une fonction officielle étant la cause de cette limitation. C'est pourquoi l'homme politique qui assiste à une manifestation publique, même s'il n'y prend aucune part active, en restant mêlé à la foule, ne peut pas empêcher par exemple, la publication et la réalisation de ses traits.

En d'autres termes, il est plus exactement licite de faire ressortir l'effigie d'un homme politique sur l'image d'une assemblée publique sans encourir de sanctions, alors que le simple particulier a le droit de s'opposer à devenir le principal sujet de la photographie représentant un groupe.

En de telles circonstances, les personnes publiques, eues égard à leurs fonctions, et contrairement aux « personnes privées », semble entrer presque automatiquement dans le champ de l'actualité. Sa vie ne lui appartient presque plus. Tout un chacun à un intérêt légitime à savoir si l'homme politique ou public, dont il combat ou approuve les idées, est présent ou absent à telle ou telle manifestation publique. D'une manière générale, la confiance que le public a pour toute personne publique a ses exigences. Le journaliste est en droit de faire connaître au public tout ce qui chez l'homme public, est susceptible d'exercer une influence légitime sur la confiance ou la méfiance dont il fait l'objet. Cependant, cette confusion de la vie publique et de la vie privée des personnes publiques ne laisse-t-elle pas une place à la vie privée, à l'intimité des personnes publiques ?

Peut - on écrire, dire, montrer, publier n' importe quoi sur la vie des personnes publiques ?

1 TGI, Nanterre, 31 mai 1995

2 Cass. Civ. 1ère, 20 octobre 1993, cour européenne des droits de l'homme, 21 janvier 1999, haut de page www. netpme.fr

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Un événement qui s'est produit dans une propriété privée sinon dans la vie privée d'une personne publique peut-il être porté à la connaissance du public en considération de son titre de personnes publiques ?

Pour certains, la vie publique de l'homme public se mêle avec sa vie privée. Tout en lui, est public et s'offre au public sans préjudice de sanction.

En conséquence, les personnes publiques n'ont pas de vie privée et sont, en permanence, exposées à la vindicte des journalistes. Et c'est la conception en vigueur aujourd'hui dans les pays occidentaux où il est affirmé expressément que la vie privée de l'homme public est publique. Elle peut être portée à la connaissance du public, de qui il tient ses fonctions et dont il est le miroir de la société. Il se doit, donc, dans l'exercice de ses fonctions ou dans sa vie privée, d'avoir un comportement exemplaire sinon il devra souffrir pour ses attitudes et faits malsains qui occuperont le champ de l'actualité.

Ainsi, des événements ou des faits qui se passeraient dans leur domicile, lieu privé par excellence et des endroits interprétés comme tels pourront être publiés sans aucune inquiétude de la part du juge. Le caractère public de l'homme prime sur ses intérêts personnels en cas de conflit.

C'est pourquoi un journaliste ou un rédacteur en chef pourrait être fondé à prétendre que les hommes politiques devraient mener une existence irréprochable car leur fonction doit leur permettre d'être les garants de la moralité.

En somme, ils doivent être les protecteurs des valeurs sociales et familiales. Toujours est-il que la moralité de ces hommes politiques devient l'affaire du public.

Le cas du président des Etats-Unis sir Bill Clinton et miss Monica Gate est édifiant. En effet, une affaire sentimentale entre ces deux personnes avait été médiatisée par la presse américaine et devenue même une affaire d'Etat. Cet événement ou ce fait a failli lui coûter son poste de président avant la fin de son mandat.

Toute chose qui nous fait dire que les personnes publiques dans les pays occidentaux n'ont pas de sphère d'intimité et partant de vie privée. Ces situations tendent à se combiner avec nos moeurs en ce sens que le pouvoir de l'information

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tend à corrompre tout sur son passage puis à avertir nos responsables politiques afin de ne pas faire n'importe quoi car leur avenir politique en dépend.

Cependant d'autres, des défenseurs de la vie privée et partant des droits de la personnalité affirment que le droit au respect de la vie privée existe malgré tout . Ils soutiennent également que les personnes publiques jouissent des mêmes droits de protection de la personnalité que les particuliers en la matière.

Pour eux, la vie privée des hommes politiques doit être exclue de leur vie politique et par conséquent doit être préservée.

C'est pourquoi le journaliste n'a pas le droit de publier des faits relevant du domicile, du domaine privé de l'homme public.

Nous retiendrons, pour notre part que, nous sommes pour la première assertion et nous souhaitons vivement qu elle prime sur la seconde afin d'avoir une société /*de bonne moralité car les personnes politiques sont le reflet de la société tout entière. Dans ces conditions, les hommes politiques ou tous ceux qui souhaiteraient avoir une carrière politique s'abstiendraient de certaines choses jugées perverses pour la société.

En tout état de cause, la divulgation de faits les concernant doit respecter la dignité de la personne humaine.

Nous mènerons une analyse analogue à l'égard des personnes qui, sans exercer une fonction publique, ont acquis ou recherchent la notoriété.

2- Les personnes célèbres ou recherchant la notoriété.

Il est, à coté des politiques, d'autres personnes qui occupent, de façon constante également, une grande place dans l'actualité: ce sont les champions sportifs, les écrivains, les artistes, les interprètes d'oeuvres dramatiques, musicales ou cinématographiques et d'une manière très générale, toutes les « vedettes l'écran et des revues »1 .

Ces personnes ont un point commun : elles recherchent ou ont obtenu la notoriété, en étant connues d'un très large public. Elles ont même besoin de la

1 R. Jeanne et Ch-Ford, les vedettes de l'écran, PUF, Coll. Que sais-je ? n° 1146, Paris 1964

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faveur des foules pour continuer à exercer leurs activités. Les « stars » et les « vedettes » s'efforcent d'entretenir cette faveur et de la faire croître par tous les moyens possibles dont le plus efficace est certainement la publication de leurs droits moraux, en l'espèce, leur image, leur vie privée, leur voix, leur nom par la presse .

En effet, par le truchement de la télévision, de la radiodiffusion, des journaux, la « star » sollicite l'intérêt des foules qui « n'adorent plus aujourd'hui des idoles de bois ou de pierre, mais des idoles en chair et en os »1 et aiguise chez beaucoup une curiosité sans limite ainsi que chez les médias. Ce goût du journaliste pour les vedettes et les artistes est un fait social important ou réel que la réalité juridique ne peut pas ignorer2, tout en restant fidèle aux principes supérieurs qui l'animent. Ce faisant, la notoriété doit seulement être considérée comme un facteur d'élargissement du domaine de la vie publique des personnes qui en bénéficient ou qui la recherchent.

Cependant, au contraire des personnes publiques c'est-à-dire celles qui exercent une fonction officielle ou politique, la notoriété des stars n'entraîne pas automatiquement la publication de leurs droits exclusifs comme l'image, leur voix, certains éléments de leur vie privée. Elle n'a qu'une incidence indirecte sur la licéité de la publication dont le véritable critère reste, à l'heure actuelle, le caractère public de la scène représentée.

La jurisprudence rappelle ces principes en ces termes « si les souvenirs de la vie privée d'une personne font partie de son patrimoine, et ne peuvent être publiés qu'avec son autorisation, il n'en est pas de même des faits de la vie publique d'un personnage ayant atteint la notoriété »3 ; ceux-ci peuvent être narrés, photographiés, voire divulgués, sans autorisation de l'intéressé.4

1 B. shaw, « le sauvage adore des idoles de bois et de pierre, l'homme civilisé des idoles de chair et de sang » cité par J. Ravanas, op. cit. p. 162

2 H, Fougerol « l'humanité, observe-t-on, a besoin de connaître et de conserver l'image des personnages en vogue, que l'actualité désigne à sa légitime curiosité », thèse, p. 49, cité par J. Ravanas, op. cit. p. 162

3 Paris, 30 juin 1961, Drouillet c/ Almary et autres, D. 1962, p. 208

4 Idem ; V. aussi paris, 1ère ch., 16 mars 1955, JCP 1955, II, 8656

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En d'autres termes, la notoriété du sujet n'anéantit pas, malgré les apparences, la distinction de sa vie privée et de sa vie publique. Toutefois, la ligne qui les sépare est nettement déplacée au profit de cette dernière : l'activité professionnelle des « vedettes » fait bien entendu partie de leur vie publique puisqu'elle est orientée vers le public.1

Les aspects de leur personnalité, qui présentent un lien avec cette activité, ne font également pas partie de leur vie privée ; il en va de même pour tous les moments de leur vie qui apportent une information légitime sur ce qu'elles prétendent être aux yeux du public.

Cette démarcation faite entre l'élément révélable au nom de l'information légitime et les détails ou commentaires, non publiables à raison du respect dû à la personnalité, nous conduit à évoquer la solution donnée au fameux conflit ayant opposé, en Grande Bretagne, pendant plusieurs années, le mannequin Naomi Campbell et le quotidien "The Miror". En mai 2004, la chambre des Lords, confirmant la sentence de la "Hight Court", après avoir rappelé que les personnes connues prétendaient valablement préserver une partie de leur vie privée, a estimé que le journal pourrait informer le public de ce que Miss Campbell se droguait, dès lors qu'elle avait menti sur ce point dans le passé et suivait une cure de désintoxication mais qu'il avait tort de révéler le lieu et les différents aspects et détails du traitement.2

Il suit de là que divers aspects de la personnalité des stars tombent dans le domaine public et sont susceptibles de publication sans préjudice d'intimidation de la part du juge. Les stars sont des modèles censés avoir de bons comportements dans leur vie professionnelle comme dans leur vie privée.

Cependant certains détails et commentaires sur leur vie privée pourraient engager la responsabilité de l'auteur de la divulgation. Tout n'est pas bon à dire concernant la vie de tous les citoyens et en particulier des personnes publiques puis des vedettes.

1 TGI, Seine, 3ème ch., 24 novembre 1965, dame Bardot c/ société Beaverbrook, JCP- 1966, II, 14521

2 P. Kamina, CCE, juillet-août 2004 p. 6 ; Recueil Dalloz 2005, n° 6 p. 393

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Par ailleurs, le consentement des Top modèles dans des contrats portant sur la publication de leur image, leur vie privée, leur nom par exemple connaît une interprétation restrictive de la part de la jurisprudence qui est d'ailleurs constante par une application du principe-adage « exceptio est strictissimae interpretationis»1

Au regard de ce qui précède et suivant l'analyse à nous mener jusqu'ici, il convient de retenir que les individus par leurs activités ou leurs volontés respectivement limitent leur sphère d'intimité en facilitant l'intrusion de la presse dans leur vie quotidienne par l'exploitation de leurs droits de la personnalité, droits chers à chaque être humain.

A coté de cette conciliation entre droits de la personnalité et droit de l'information autorisée par la loi et la jurisprudence, le droit de l'information, lui même en son soin, a permis une cohabitation indispensable car les deux sont le même revers d'une même réalité.

Le droit de l'information, en d'autres termes, se concilie avec le droit au respect de la vie privée lorsque la révélation de faits de vie privée est mesurée, prudente et objective puis conforme à ses propres règles.

Paragraphe II- L'objectivité de l'information et sa conformité à la législation qui lui est propre.

La divulgation de faits privés doit être mesurée, prudente et objective (A) puis elle doit être conforme aux règles propre du journalisme. (B)

A- La révélation de faits intimes doit être mesurée, prudente et objective.

Un souci d'objectivité s'impose aux journalistes. C'est vrai qu'il serait difficile, voire irréaliste d'exiger d'un journaliste qu'il fasse abstraction de ses opinions, de ses sympathies et antipathies. Mais il doit s'efforcer simplement d'être

1 J Ravanas, la protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, LGDJ, paris 1978, p. 95

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intellectuellement honnête et donc les sentiments qu'il éprouve ne doivent pas altérer ni la pureté de ses intentions, ni la sincérité de sa démarche.

Enfin, le récit ou la révélation doit également avoir été guidé par un souci constant d'exactitude .Le journaliste ne peut donc se dispenser de l'obligation impérieuse de ne livrer aux consommateurs de l'information que des faits exacts, vérifiés par lui-même et d'apporter une attention, une prudence particulière ,des lors qu'il porte à la connaissance du public des informations qui mettent en cause la vie privée ou professionnelle des particuliers. Cette condition s'impose aux journalistes et qui permet ainsi aux juges de sanctionner la divulgation d'informations erronées

B- Le respect, par le journaliste de ses propres règles dans ses rapports avec le droit au respect de la vie privée.

Les règles du droit de l'information applicables aux droits de la personnalité sont les règles de l'éthique et de la déontologie professionnelles. Le droit de l'information se trouve en harmonie avec le droit au respect de la vie privée lorsque le journaliste marque son attachement au respect de ses propres règles qu'il a lui-même volontairement consenties.

L'univers, en ses divers aspects, est commandé par des lois « Chaque discipline a ses lois propres, à raison de la spécificité de son objet et de ses méthodes... »1

Telle est la règle fondamentale à laquelle l'exercice du droit de l'information ne saurait échapper et qui, par conséquent, impose des exigences, voire des obligations aux journalistes dans le traitement de l'information. Dans une telle mesure, l'exercice du droit de l'information reste soumis au respect des règles propres et dont la transgression ne s'accorde guère avec les droits et libertés d'autrui. Car comme le disait Gandhi : « La véritable source du droit est le devoir. Si nous nous acquittons tous de nos devoirs, le respect de nos droits sera facile à obtenir. Si, négligeant nos devoirs, nous revendiquons, ils nous échapperons.2 »

1 Pr. F. Wodié, la loi, leçon inaugurale, université de Cocody, p. 1 § 1

2 Cité par Alpha Oumar Konaré, Président de l'Union Africaine in la diffamation dans les médias en Afrique p. 3

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En vérité, cette exigence fondamentale d'exactitude de l'information figure dans bon nombre de codes nationaux de déontologie et permet de sanctionner les abus toujours possibles du pouvoir de l'information. Ainsi, le pouvoir de l'information ne doit-il pas porter atteinte à la dignité de l'individu, au respect de la vie privée et d'une manière générale inciter à la violation des droits de l'homme.

Il s'agit d'une règle d'éthique professionnelle.

Conscients de cette nécessité, en Côte d'Ivoire, les journalistes ont, eux-mêmes, tenu à garantir le respect de celle-ci en adoptant le 03 mai 1993 un code de déontologie dont le respect s'impose à tout membre de leur corporation.

Dès lors, la responsabilité des journalistes et partant des médias apparaît dans le strict respect des règles d'éthique et de déontologie. Ce qui permet aux journalistes d'être responsables et d'avoir le souci scrupuleux d'une nécessité de conciliation entre son activité et les droits et libertés d'autrui.

C'est dans cette perspective que le code de déontologie précité a pris soin de mentionner certaines obligations à la charge du journaliste dans l'unique but de limiter ses droits et libertés quant à l'exploitation de l'information.

Ainsi, à la lecture des dispositions essentielles afférentes aux devoirs des journalistes dans la recherche, la rédaction, le commentaire de l'information qu'ils mettent à la disposition du public, ils doivent respecter les faits, qu'elles qu'en puissent être les conséquences pour eux-mêmes, et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité. En outre, le journaliste ne doit publier que des informations dont l'origine, la véracité et l'exactitude sont établies.Il ne doit altérer les propos, les textes et documents. Il ne doit user de méthodes déloyales pour obtenir des informations, des photographies ou des documents ni confondre son rôle avec celui du policier. Le journaliste aussi ne doit jamais confondre son métier avec celui de publicitaire ou de propagandiste. Il doit refuser d'exploiter sa qualité de journaliste à des fins personnelles.

Par ailleurs, il doit respecter la vie privée des personnes c'est-à-dire éviter de publier des informations qui violent l'intimité de la personne et enfin s'interdire le plagiat, la calomnie, la diffamation puis les accusations sans fondement.1

1 Code de déontologie des journalistes ivoiriens, voir annexe n° 3

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Dès lors, considérant ces exigences en faveur de la protection des droits de la personnalité, disons que ceux-ci et le droit de l'information sont associables ou peuvent se combiner si le journaliste, en dehors de la réglementation légale, respecte ses propres règlements dans l'exercice de sa profession.

S'il existe des journalistes qui, dans l'exercice de leur profession sont soucieux de se conformer à ces règles en recherchant l'excellence en permanence, il existe malheureusement un grand nombre qui, s'ils ne les ignorent pas vraiment, ne leur accorde aucune place, foulant au pied toutes les obligations mises à leur charge et jetant, en conséquence, un discrédit sur la corporation des médias hélas !

Au regard de ce qui suit, il y a un équilibre entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information à condition que le professionnel soit en phase avec les règles de la déontologie professionnelle.

En revanche, en cas de manquement à ces règles, il s'expose à des sanctions.

En somme, la conciliation droit au respect de la vie privée et droit de l'information ressortit de la délimitation des droits de la personnalité vis-à-vis du droit de l'information et inversement. En raison du droit du public à l'information, on permet que les personnes souffrent devant l'utilisation de leur personnalité ou que des éléments de leurs droits exclusifs soient portés à la connaissance du public, en l'absence de leur consentement et même contre leur gré. Toutefois, l'information légitime du public, tiré de l'intérêt général, trouve aussi ses limites lorsque recherchant l'agrément du public et non plus son information, la prestation de presse se fait voyeuriste1 en portant atteinte à la dignité d'autrui.

Par ailleurs, droit au respect de la vie privée et droit de l'information se concilient par le fait que le second constitue un complément indispensable aux droits de la personnalité et partant au droit au respect de la vie privée.

1 J P. Gridel, liberté de la presse et protection civile des droits modernes de la personnalité en droit positif français, in Recueil Dalloz, op. cit. p. 393

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Section II- Complémentarité du droit à la vie privée et droit de l'information à l'ère des nouveaux moyens de communication.

La presse joue un rôle d'importance capitale en Côte d'Ivoire, en Afrique comme partout ailleurs, en ce qu'elle est partie intégrante de l'évolution du genre humain. C'est vrai qu'elle est considérée comme un produit qu'il faut maîtriser en dépit de ces contraintes, de ces contrariétés envers autrui, mais elle joue un rôle moteur d'information universelle notamment dans la formation des citoyens aux idées libérales, civiques et culturelles puis à la connaissance de leurs droits et libertés individuelles. La presse est donc un outil de développement des droits de la personnalité.

Défini par le Professeur Pierre Trudel comme étant « un principe justifiant l'adoption des mesures destinées à forcer la recherche et la transmission des nouvelles, l'information sur les évènements du monde dans un sens favorable au public »1 et partant aux citoyens, la liberté de l'information influence positivement les droits de la personnalité à deux niveaux principalement. Il joue un rôle de développement de ceux-ci (paragraphe I) mais aussi un rôle de protection de ces derniers (paragraphe II)

Paragraphe I- Le droit de l'information, instrument de développement des droits privés.

Selon M. Virally, « l'information doit être utilisée comme un moyen au service de l'édification de la société et que, par conséquent, elle devrait avoir une finalité positive »2 la connaissance des faits, mais aussi la connaissance des autres et, bien entendu, la connaissance des progrès de la découverte scientifique et technique sont un des principaux vecteurs du développement de toutes les sociétés. Si l'on admet ce rôle de l'information, il apparaît que la nécessité pour l'information de passer, d'être transmise, d'être communiquée, d'être reçue devient vraiment une exigence de notre temps. L'information est donc utilisée pour le bien

1 Cité par Mario Cardinal, in l'état de la presse en Côte d'Ivoire, pp. 39-40

2 Colloque de Strasbourg, la circulation des informations et le droit international, éd. A pedone, 1978, p. 105

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de la société. Le droit de l'information dans ses rapports avec les droits des personnes facilite la communication entre les hommes, joue un rôle important dans la vie économique des sociétés. Elle le fait en procurant à tous une information commune, en améliorant les relations entre les individus et les groupes, et même en offrant un instrument pratique des rencontres. En clair, il existe une forte corrélation entre les droits de la personnalité et le droit de l'information, en ce sens, qu'ils s'embrassent et forment un ensemble cohérent. Et c'est ce qu'avait montré Bernard Berelson : « le journal valorise le lecteur, le convainc de son importance. Par la lecture de la presse, celui-ci sait ce qui se passe, a l'impression de pénétrer dans les secrets du monde, en tire éventuellement un surcroît de prestige intérieur. »1 Il en va de même de tous les autres moyens d'expression et de communication comme la radiodiffusion, la télévision et aujourd'hui l'Internet.

Cette valorisation de l'homme par la presse se rencontre aussi dans sa fonction de divertissement et de distraction. En effet, un organe de presse constitue un élément de distraction dans la mesure où il fait échapper l'individu du champ de sa solitude, de sa vie quotidienne pour lui apporter une ouverture sur l'extérieur.

Enfin, la presse joue un rôle de valorisation au service du droit au respect de la vie privée lorsqu'elle constitue un instrument d'identification de celui-ci, de cohésion sociale.

Au total, la presse est un complément des droits de la personnalité lorsqu'elle assure la formation des populations, favorise le développement économique, social et culturel de la nation, répond aux besoins et aux aspirations des populations en matière d'éducation, de culture et de diversement, fait la promotion des langues nationales.2

Autrement dit, c'est par exemple grâce au pouvoir de la presse que peuvent être connus les disfonctionnements des services administratifs ou judiciaires. C'est également grâce à elle que pourra être assuré un approfondissement culturel (historique, artistique, géographique) au profit du consommateur intéressé, tout

1 R, Cayrol, la presse écrite et audiovisuelle, paris, PUF, 1973, p. 15

2 J. O., op. cit., loi n° 2004-644 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la communication audiovisuelle p. 76, art. 3

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ceci grâce aux illustrations, commentaires et développements lorsque nécessite un traitement approfondi de ces questions.

En plus du rôle de valorisation ou de formation des droits de la personnalité, la presse constitue un instrument protecteur de ceux-ci.

Paragraphe II- Le droit de l'information, instrument de défense ou de Protection de la vie privée.

Les moyens d'expression et de communication constituent, de prime abord, le miroir des évènements qui se déroulent dans les sociétés, dans le monde. La presse a donc pour principale mission de mettre à nu, de porter à la connaissance des citoyens, en dehors des faits constructifs ou positifs participant de la formation, de la construction des droits de la personnalité, d'autres évènements qui lui sont défavorables.

C'est ainsi que la presse, en s'érigeant en défenseur des droits de l'homme, a choisi la meilleure part en dénonçant dans toutes les contrées du monde, toutes les violations des droits humains. En ce sens, elle joue un rôle d'intimidation pour tous ceux qui souhaiteraient porter atteinte aux droits des gens en les humiliant par une dégradation de leur personnalité physique ou morale.

La presse, dans cette optique, joue un rôle vraiment incontournable permettant aux individus de pouvoir jouir de leurs droits et libertés et de ne pas être inquiétés pour leurs opinions et leurs appartenances religieuses ou ethniques.

C'est, par exemple, grâce au pouvoir de l'information que certains régimes dictatoriaux, ségrégationnistes sont tombés pour une vie plus libre, valeur naturelle et fondamentale. A la vérité, le droit de l'information est plus qu'indispensable dans l'épanouissement des droits de l'homme car permettant à celui-ci de s'épanouir. L'apport de la presse se manifeste lorsqu'elle se soucie de protéger les libertés individuelles face à autrui et aux pouvoirs publics.

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Conclusion

Contrairement à ce que le profane pourrait penser, le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information sont conciliables. Tout organe de presse dispose du droit d'informer ses lecteurs, auditeurs, téléspectateurs sur les faits sociaux. Cependant, s'il en est ainsi, un équilibre mérite d'être trouvé entre ce qui peut être montré, diffusé par le journaliste et ce qu'il doit se garder d'exhiber ou de publier.

Si le juge est là pour contrôler, voire pour sanctionner l'effet des médias sur les droits de la personnalité, c'est qu'à certains égards, le journaliste abuse de son pouvoir d'information. Et c'est pour éviter que le journaliste abuse de son pouvoir d'information qu'il existe des organes chargés d'assurer le respect par la presse du droit au respect de la vie privée.

Les droits de la personnalité sont donc protégés face à la presse et leur transgression expose son auteur à des sanctions.

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LES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE DES PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE

ET LEURS SANCTIONS.

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DEUXIEME PARTIE :

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Tout être humain a des droits fondamentaux dont les Etats doivent assurer le maintien et le respect. Ces sont des droits que tout individu possède en tant qu'être humain. Ils incluent le droit à la vie, l'interdiction de la torture, l'interdiction des arrestations arbitraires ou sans raison valable, le droit à un jugement équitable, le droit de croire comme bon vous semble, le droit de parler et d'écrire librement mais aussi le droit de s'épanouir dans l'intimité de la vie privée.

Cette idée est enracinée dans la plupart des religions et civilisations du monde, et figure dans de nombreuses législations. Elle est fondée sur la conviction que tous les êtres humains, où qu'ils soient ou habitent, ont les mêmes besoins essentiels.

La vie privée constitue donc une chasse gardée de tout individu. Chacun a droit au respect de sa vie privée. Nul ne peut être arbitrairement privé de ce droit aux dires des différentes chartes et conventions internationales sur les droits de l'homme et libertés de la personne, notamment la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 27 juin 1981.

Consacrée donc par la légalité internationale1 et nationale2, c'est la jurisprudence qui détermine les frontières et les composantes de la vie privée. Du fait de son importance, dans la mesure où elle a besoin de paix et de tranquillité pour être épanouie, heureuse, la vie privée bénéficie d'une protection particulière contre toute intrusion de la part des pouvoirs publics, surtout dans ses rapports avec le droit de l'information. Dans la Charte ainsi que dans les deux nouvelles lois sur la presse écrite et la communication audiovisuelle, il est dit que tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Elles interdisent expressément toute forme d'information dégradante de la personne, traitement cruel, inhumain ou dégradant.

En conséquence, aucune circonstance ne saurait justifier que des individus et partant des journalistes ou professionnels des médias blessent ou humilient des

1 V. art. 12 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, art. 5 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, art. 17 du Pacte International des Nations Unies, art. 7 et 8 de la Charte Européenne des Droits Fondamentaux.

2 V. Constitution du 1er août 2000 art. 2, loi du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse, art. 26 al. 2, loi du 14 décembre portant régime juridique de la conviction audiovisuelle art. 1er.

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citoyens de quelque manière que ce soit, par exemple, en publiant n'importe quoi sur la vie privée des gens, à moins de danger immédiat pour leur vie ou la vie d'autres personnes, et seulement si des moyens plus modérés ne suffisent pas à écarter le danger. C'est pourquoi toute entrave à l'intimité physique et familiale d'un individu pourrait constituer une violation ou une atteinte au droit au respect de la vie privée des individus à l'issue de laquelle pourrait également découler des sanctions.

Dans cette partie, donc, il serait intéressant pour nous de mettre à nu les modes d'atteintes à la vie privée des personnes et leur incidence sur celles-ci d'une part (Chapitre I) et d'autre part lorsque le rubicond est franchi c'est-à-dire que quand l'atteinte est consommée, il est possible d'y mettre fin en sanctionnant les publications, réalisations illégitimes ou dénaturatoires de la dignité de la personne humaine (Chapitre II).

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Chapitre I :

LES MODES D'ATTEINTES A LA VIE PRIVEE DES PERSONNES
PAR VOIE DE PRESSE ET LEUR INCIDENCE SUR LA VIE
DES VICTIMES.

L'activité journalistique est, comme toute autre, dans une société organisée, soumise au respect de la règle de droit. Loin de porter atteinte à la liberté, et notamment à la liberté d'expression ou de communication, le droit en est, dans un système démocratique soucieux du respect des droits et libertés de chacun, la condition et la garantie.

Dans cette perspective, il s'agit, par les règles légales et éthiques, de poser des principes et de définir des droits et obligations réciproques, et sous le contrôle du juge, d'en assurer l'application et la conciliation.

Il suit de là que lorsque l'information véhiculée ou l'élément révélé concernant la vie privée d'un citoyen n'a pas une valeur journalistique, c'est-à-dire n'a pas un intérêt pour le public et pour l'Etat, une telle révélation constituerait une atteinte ou une violation au droit à l'intimité des personnes, valeur sacrée pour une vie personnelle et familiale épanouie.

Dans ces conditions , la personne dont un élément de la vie intime, privée a été publiée de façon abusive c'est- à - dire la victime peut ou est en droit de s'opposer à une telle publication . Laquelle publication certainement lui cause préjudice en utilisant les voies légales de l'opposition.

Nous voyons donc que la liberté d'expression dont jouit le journaliste n'est pas sans limites.

Un système a été monté pour garantir ou assurer le respect de la vie privée et partant des droits de la personnalité par les pouvoirs publics, qui sont aussi reconnus par les lois nationales et par les chartes puis conventions internationales relatives aux droits et libertés des personnes humaines.

Mais au-delà des considérations légales, jurisprudentielles ou doctrinales, à partir de quel moment, peut-on dire qu'il y a atteinte à la vie privée d'un individu, personnalité publique? En d'autres termes, dans quelles circonstances, les

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journalistes en faisant usage de l'exploitation de la vie privée des personnes peuvent-ils être considérés comme étant en porte à faux avec les règles en vigueur ? Mieux, comment se manifestent les atteintes par voie de presse contre les droits d'autrui, et quelles sont leurs incidences sur les personnes, victimes de ces atteintes ?

Deux points commandent donc cette partie .Ainsi nous analyserons dans un premier temps les atteintes à la vie privée par voie de presse (section I) et évidemment leurs conséquences sur l'existence de ces personnes, victimes d'atteintes de la part des journalistes (Section II).

Section I- Les atteintes à la vie privée des personnes par voie de presse.

Quelques exemples pour commencer.

? Une famille endeuillée par la perte d'un enfant, victime d'un assassinat sur la voie publique, est photographiée pendant la cérémonie des funérailles privées. Les clichés paraissent dans un quotidien ou dans des reportages radiotélévisés le lendemain.

? Un journaliste participe à l'action de locataires furieux qui mettent sur écoute leur propriétaire accusé d'avoir violé ses engagements locatifs. Il diffuse un reportage audiovisuel basé sur les informations obtenues dans ces circonstances.

? Les fils d'un maire ou d'une autorité publique, deux adolescents, sont accusés de consommer de la drogue et arrêtés. Deux de leurs camarades sont également incarcérés. Les journaux et les stations de radio et de télévision livrent les noms des quatre jeunes gens1.

Il n'y a pas de jour où il n'y a pas de plaintes sur la diffusion de ce genre d'articles. Cela, montre, à quel point la marge de manoeuvre est étroite entre la liberté d'expression de la presse, telle que la définissent la constitution et les dispositions législatives que règlementaires ou telle que l'exige le droit du public à l'information, et le droit de chacun au respect de sa vie privée.

1 H.H. Schulte, M.P. Dupresne, Pratique du journalisme, Paris, septembre 1999, réimpression avril 2002, p.325 et s.

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A partir de quel moment le droit légitime d'être laissé tranquille se trouve-t-il compromis par le droit tout aussi légitime qu'a le public d'être tenu au courant des faits ou événements sociaux ?

La collecte de données privées est un domaine délicat pour les médias. Un faux pas involontaire ou délibéré de la part d'un journaliste, d'un photographe reporteur, peut entraîner le dépôt d'une plainte dont les conséquences risquent d'être ruineuses pour l'organe de presse en cause ou pour le journaliste en question. Les atteintes à la vie privée, tout comme le renforcement de la protection accordée aux individus qui s'estiment lésés, peuvent faire l'objet d'une classification en quatre catégories fondamentales :

- l'intrusion dans la vie privée et le détournement de l'identité ou de l'image ;

- la représentation mensongère d'une personne ;

- la révélation de faits privés exacts mais embarrassants.

Certaines de ces catégories sont plus importantes que d'autres pour la presse, mais toutes méritent de retenir notre attention que nous regrouperons en deux grandes catégories.

Il s'agira, dans un premier temps des atteintes au secret de la vie privée des personnes par voie de presse (Paragraphe I) et dans une seconde perspective des atteintes portées directement à la liberté de la vie privée par voie de presse (Paragraphe II).

Paragraphe I- Les atteintes au secret de la vie privée des personnes par voie de presse.

Les atteintes au secret de la vie privée sont diverses, mais elles peuvent être ramenées à deux variétés. La première qui a attiré notre attention est la révélation de faits privés exacts mais embarrassants (A). Mais il n'importe pas moins de protéger les personnes contre l'intrusion ou l'immixtion dans la vie privée (B).

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A- La révélation de faits privés exacts mais embarrassants.

La vie personnelle et familiale ne peut s'épanouir que dans l'intimité de la maison et du foyer, siège principal de la demeure et partant de la vie privée. Elle a besoin de paix et de tranquillité pour être heureuse1. Elle est repliée sur la personne elle-même, sur les membres de sa famille, sur ses amis.

En principe, elle ne doit pas être l'objet de révélations ou de divulgations parce que les uns et les autres blessent le sentiment de la pudeur à l'égard de la vie personnelle et familiale2.

L'atteinte consiste donc à la divulgation d'un fait privé exact ou non mais embarrassant, c'est-à-dire le fait de porter à la connaissance du public, ou, à tout le moins, d'un nombre indéterminé de personnes, des événements relevant de la vie intime, personnelle et familiale.

De façon générale, si une personne publique ou non veut gagner un procès intenté pour atteinte à sa vie privée, notamment pour révélation de faits privés exacts mais embarrassants, elle doit prouver que les faits publiés :

1. seraient fortement offensants ou diffamatoires pour toute personne raisonnable, à savoir embarrassants pour cette personne ;

2. ne présentent pas d'intérêt légitime pour le public, et, par conséquent, n'ont aucune valeur journalistique ;

3. ont été publiés sans le consentement de la personne concernée.

Citons le cas d'une personnalité bien connue, qui confie à un journaliste certaines de ses habitudes favorites : éteindre une cigarette en la mettant dans sa bouche, manger des araignées ou sauter du haut en bas d'un escalier pour impressionner ses conquêtes féminines.

Ultérieurement, il s'avisa qu'il ne désirait pas laisser divulguer ces renseignements. Le journaliste s'entête et publie un article sur la personnalité en question. Est-il fondé à entamer des poursuites au titre du secret de la vie privée ?

1 P. Kayser, La protection de la vie privée, op.cit, p.3.

2 V.M. Scheler, la pudeur, édition Aubier. La permanence du sentiment de la pudeur n'est pas infirmée, mais
au contraire attestée, par les variations de son objet in la protection de la vie privée de P. Kayser, op.cit, p.6.

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En l'espèce, les faits sont exacts mais de caractère privé et embarrassant. Dans une telle situation, le juge serait amené à considérer qu'il s'agit d'une atteinte illégitime à la vie privée dans la mesure où le journaliste en cause s'entêta de révéler des faits bien sûr exacts mais sans autorisation de la personne concernée.

Que dire quand il y a un doute sur la véracité des faits révélés concernant la vie privée d'une personne ?

L'affaire Ezan Akélé mérite de retenir notre attention. Dans cette affaire, dénommée affaire pédophilie qui avait opposé Monsieur Ezan Akélé, ancien ministre et Mrs Diégou Bailly et Joachim Beugré alors respectivement directeur de publication et journaliste du quotidien "Le Jour" et auteur des articles incriminés, avait présenté M. Ezan Akélé, personnalité publique de notre pays comme étant un pédophile1. Il s'agit, là, de révélation de faits de caractère privé mais aussi embarrassants.Voici présentés les faits : dans parutions des 5et 6 octobre 1998, le quotidien « Le jour »publiait deux articles qui vont créer ce qu'on a appelé « l'affaire pédophilie ».Ces articles qui vont faire couler beaucoup d'encre et de salive, étaient ainsi libellés : « révélations sur la pédophilie en cote - d'Ivoire :un adolescent de 14 ans sodomisé à plusieurs reprises ; de hautes personnalités citées dont M.Ezan Akélé, alors ministre des infrastructures économiques.

Les journalistes n'ayant pas pu apporter la preuve de leurs propos augure de ce qu'une telle révélation exacte ou non ayant un caractère privé et sans que les preuves accompagnent constitueraient sans aucun doute une atteinte à la vie privée.

Toutefois, la jurisprudence ou du moins beaucoup de tribunaux précisent que les personnalités publiques devraient apporter aussi la preuve d'une véritable intention de nuire.

Dans ces conditions, le problème qui se pose au journaliste est de déterminer si l'information dont il dispose peut être considérée comme légitimement intéressante pour le public ou revêt un caractère d'intérêt général.

1 Fraternité Matin, jeudi 29 juillet 1999, faits divers, affaire pédophilie : le non lieu de la justice.

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Ainsi le fait d'avoir dit la vérité ne constitue pas une excuse en matière d'atteinte à la vie privée1. C'est pourquoi, la jurisprudence et la doctrine soutiennent, par exemple, que le public a le droit de connaître des faits embarrassants concernant un employé ou un personnage du secteur public, mais il en irait différemment si la personne en question appartient au secteur privé.

A côté de la révélation des faits exacts mais embarrassants constituant une atteinte au secret de la vie privée, se trouve l'intrusion ou l'immixtion dans la vie privée d'une personne.

B- L'intrusion dans la vie privée.

Une autre catégorie d'atteinte au respect de la vie privée est l'intrusion, généralement définie comme une invasion "physique", une investigation dans la sphère privée d'un individu.

Pour qu'une immixtion soit considérée comme une violation à la vie privée d'un individu, il faut un certain type d'empiétement non autorisé, mais c'est là un domaine délicat pour le journaliste. Si lui-même ou un photographe a pu obtenir le consentement de quelqu'un, voire seulement s'il a l'impression très nette d'avoir obtenu le consentement, il ne devrait pas être inquiété. C'est l'intrusion en soi et non la publication qui pourrait fonder la plainte, même si les tribunaux ne font pas toujours la distinction.

Depuis quelques années, la technologie a élargi ce genre de litige. Epier quelqu'un par sa fenêtre ou en se cachant derrière une porte, prendre connaissance des lettres ou correspondances confidentielles, s'immiscer dans le domicile d'autrui ne sont que l'exemple traditionnel d'une intrusion. L'utilisation de téléobjectifs perfectionnés sur des appareils photographiques ou de magnétophones électroniques qui tiennent dans la poche suscite d'autres types de plaintes pour intrusion. Tout comme l'usage non autorisé de documents privés. D'une manière générale, les tribunaux jugent que prendre une photo dans un lieu public ne constitue pas une atteinte à la vie privée, mais il en va tout autrement

1 A.A. Schulte, M.P. Dufresne, Pratique journalistique, Paris 1999, p.332.

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dans une propriété privée. C'est ainsi que le fait de grimper à un poteau électrique ou téléphonique ou tout simplement le fait de grimper à un arbre pour regarder par la fenêtre d'un particulier attente à sa vie privée.

Introduire des microphones ou autres appareils d'enregistrement chez autrui sans autorisation préalable est aussi considéré comme une intrusion.

En outre, les lois internationales, comme les lois nationales des Etats, interdisent l'enregistrement clandestin.

Les tribunaux ont jugé que la presse est en droit de publier une information obtenue par un tiers, coupable d'une atteinte à la vie privée d'un individu. Mais le journaliste qui aide ou encourage le tiers à envahir le domaine privé d'une personne sans le consentement de celle-ci risque lui aussi d'être tenu pour responsable.

Au total, il y a atteinte à la vie privée par intrusion lorsque le journaliste s'immisce dans la vie d'un individu au moyen d'une investigation illicite ou non autorisée.

La révélation de faits privés exacts mais embarrassants et l'intrusion constituent les atteintes au secret de la vie privée d'une personne.

Toutefois, elles ne sont pas les seules à attenter à la vie privée. D'autres facteurs ou circonstances portent directement atteinte à la liberté de la vie privée par le comportement ou l'instrument de travail du journaliste.

Paragraphe II- Les atteintes portées directement à la liberté de la vie privée par voie de presse.

La liberté de la vie privée s'oppose à toute représentation mensongère (A) et à tout détournement du nom ou de l'image (B). Il y a donc atteinte si le degré de gravité de l'atteinte à la vie privée la rend intolérable.

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A- La représentation mensongère d'une personne par voie de presse.

Donner à entendre que certains ne sont pas ce qu'ils paraissent être, même sans intention de nuire, c'est estime-t-on, « mettre la personne dans une situation fausse aux yeux du public »1, ce qui a coûté cher à certaines publications.

Présenter quelqu'un qui assiste à une réunion politique comme un partisan de la personnalité présente, alors que le badaud s'était arrêté sur les lieux, poussé par la seule curiosité, donne de l'intéressé une idée mensongère et pourrait justifier des poursuites judiciaires.

En effet, pour qu'une plainte fondée sur une représentation mensongère soit admise par un juge, elle doit satisfaire aux critères suivants :

1. L'article incriminé doit être mensonger,

2. l'article doit avoir été publié sans le consentement du plaignant,

3. dans les litiges concernant des personnalités publiques, il doit exister

réellement une intention de nuire ou mépris coupable de la vérité.

La représentation mensongère est souvent confondue avec la diffamation, bien qu'il existe une distinction entre l'une et l'autre. La diffamation suppose un tort causé à la réputation d'une personne, ce qui n'est pas le cas pour la représentation mensongère.

Ainsi, dans l'exemple de celui qui a assisté à une manifestation politique, cette personne a été victime d'un éclairage trompeur sans être diffamé pour autant.

Même un photographe reporter qui prend un cliché instantané anodin d'une personne, notamment une femme en train de sauter une flaque d'eau dans une rue de la ville risque une action en justice si le cliché la montre dans une situation embarrassante ou impudique. Retenons que l'atteinte à la vie privée par la représentation mensongère consiste à représenter un individu autrement que ce qu'il est en réalité ou à se tromper sur la conviction ou l'attitude réelle de la personne.

1 A.A. Schulte, M.P. Dufresne, op.cit, p.333.

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En conséquence, lui donner une nature, un caractère ou une conviction autre que la sienne est constitutive de voie de fait, donc d'infraction fragrante à la liberté de la vie privée.

Que pouvons-nous retenir en ce qui concerne l'atteinte à la liberté de la vie privée par le détournement du nom ou de l'image d'une personne ?

B- Le détournement du nom ou de l'image par voie de presse.

Nous étudierons d'abord l'atteinte à la vie privée par le détournement du nom (1) avant de nous attarder sur l'atteinte à la liberté de la vie privée par le détournement de l'image d'une personne (2).

1) Le détournement du nom.

Le nom est, d'une manière générique, un vocable qui sert à désigner une personne, un animal ou une chose. Il est soit commun à tous les membres d'une espèce donnée (exemple : l'homme, l'animal, le chien, le navire, etc.) soit propre à un seul des membres d'une famille donnée (exemple : Coulibaly, Aka, Koffi, Milou, Titanic...).

En droit civil des personnes, l'allusion au nom fait référence au nom propre d'une personne, voire au nom patronymique ou nom de famille.

A cet égard, le nom est défini comme « l'appellation qui sert à désigner une personne dans la vie sociale et juridique »1.

C'est le sens de l'article 1er de la loi ivoirienne n°64-373 du 07 octobre 1964, modifiée par la loi n°83-799 du 02 août 1983 relative au nom qui dispose que : « toute personne doit avoir un nom patronymique et un ou plusieurs prénoms »2.

Ainsi défini, le nom est assurément en Côte d'Ivoire comme partout dans le monde entier, l'élément fondateur ou de base de la personnalité3.

1 A. Bogler, Cours de droit civil, les personnes, la famille, première année licence 1997.

2 Code civil, loi relative au nom.

3 Anonyme, http\`www.savoir.scdi.cndp-pr\rencontrelyon\gauvin\?1

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Il n'y a donc pas de personne physique sans nom. Tout être humain a obligatoirement un nom qu'il se doit de défendre ou qu'il a le droit de protéger et de sauvegarder contre tout détournement d'autrui. C'est d'ailleurs cela qui a fait dire à certains auteurs que le droit de la personne sur son nom est un droit de propriété, un patrimoine. On dit qu'il y a patrimonisation, notamment de la vie privée et l'individu peut, en tant que propriétaire des éléments constitutifs de sa vie privée (paroles, images, voix, nom, etc.)1, les protéger et les faire protéger par les pouvoirs publics à chaque fois qu'un usage illicite ou illégitime en a été fait par autrui, surtout par le journaliste. Cependant, précisons que l'individu peut les aliéner et les introduire dans les rapports marchands2 même si les droits de la personnalité ont une valeur extrapatrimoniale. La tendance actuelle est à la commercialisation des éléments constitutifs de la vie privée. Il s'en déduit que le titulaire du nom bénéficie d'une protection absolue toutes les fois qu'il n'a pas donné expressément son assentiment pour l'utilisation qui doit être faite.

Il peut, par conséquent s'opposer à toute utilisation de son nom par autrui sans avoir besoin de justifier ni d'un intérêt ni d'un préjudice. Ainsi, toute personne qui se sert du nom d'autrui dans son propre intérêt peut faire l'objet de poursuites judiciaires pour atteinte à la vie privée et partant au nom car il y a détournement ou abus de la liberté d'expression dont dispose le professionnel des médias.

Trois facteurs sont donc indispensables à une demande de réparations. Il s'agit de la publication de l'identification, du profit commercial et de l'absence d'autorisation. Si ces trois facteurs sont réunis, l'atteinte au nom est incontestablement avérée et les tribunaux ne feront que constater leur existence certaine pour rendre l'auteur de la publication, responsable du détournement du nom d'autrui par voie de presse.

Quid de l'atteinte à la vie privée par le détournement de l'image ?

1 R. Charvin, J.P. Sueur, droits de l'homme et libertés de la personne, édition Litec, Paris 1994, p.99.

2 B. Edelman, le droit saisi par la photographie, dans les lois sur la presse, avec le consentement de l'individu (qui supprime l'infraction) et avec le fait que la répression existe indépendamment de tout dommage concret, la vie privée est, pour une part, une marchandise dont la vente peut être rentable, et comme dans un contrat de vente, celle-ci exige le consentement du vendeur in droits de l'homme et libertés de la personne, op.cit, p.99. Voir aussi F. et A. Demichel, M. Piquemal, pouvoirs et libertés, éd. Sociales 1978, p.275, 276.

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2) Le détournement de l'image d'autrui par voie de presse.

Toute personne a sur son effigie, son image, un droit exclusif et peut de façon discrétionnaire en autoriser la diffusion ou la reproduction. C'est dire qu'il est interdit aux tiers, en l'espèce les journalistes, d'une part de fixer ou de reproduire l'image d'un individu par quelques procédés ou moyens que ce soit, spécialement par photographie sans le consentement de l'intéressé et d'autre part de publier, voire de commercialiser le cliché sans son autorisation.

Ce consentement requis, en règle générale, doit être exprès, spécial, c'est-à-dire qu'il doit viser une reproduction ou une diffusion spécifique donnée.

Ainsi l'intention pour laquelle le consentement a été donné doit être respectée et non servir à d'autres fins, en dehors de la valeur journalistique de l'image divulguée ou de la pertinence du critère de l'illustration.

La conséquence qui en découle est que toute personne qui se sert de l'image d'autrui, qu'il soit une personne publique ou un simple quidam, dans son propre intérêt et non dans l'intérêt de la collectivité peut faire l'objet de poursuites judiciaires pour atteinte à la vie privée au moyen du détournement du portrait d'autrui sans son consentement.

Le consentement est exprès lorsqu'il figure sur un écrit, acte sous-seing privé ou acte authentique1. Mais à côté du consentement exprès, le consentement peut être tacite. C'est le cas des hypothèses ou exceptions au principe de l'interdiction de photographier et a fortiori de divulguer la photo d'une personne sans son autorisation. Ces dérogations, rappelons-le, concernent la photographie d'un lieu public, la photographie d'une personne célèbre dans l'exercice de ses fonctions ou de sa profession et enfin la photographie d'une personne se trouvant au coeur de l'actualité.

En dehors de ces cas exceptionnels précités, il y a faute sur l'image d'autrui chaque fois que la représentation à titre informatif ou commercial de l'image d'un individu est faite par les médias sans le consentement de l'intéressé.

1 A.M. Assi-Esso, précis du droit civil, op.cit, p.54.

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Tel fut le cas dans le jugement concernant la publication et la commercialisation de la photo d'une danseuse de cabaret, en l'occurrence dame Kamé N'Daw1.

Dans cette affaire dame Kamé N'Daw c/ Gilles Nourault et la librairie de France, dame Kamé N'Daw danseuse de cabaret travaillant à « la Boule Noire » se donnait tous les soirs en spectacle. Revenant à Abidjan après un séjour au Mali, elle eut la désagréable surprise de découvrir des cartes postales la représentant au cours de son numéro, ainsi qu'une brochure sur la Côte d'Ivoire reproduisant les mêmes photographies, brochure qui était vendue et non pas distribuée gratuitement. Elle assigne donc les auteurs desdites reproductions et la libraire de France en justice pour atteinte à sa vie privée par détournement de son image. La demanderesse eut gain de cause dans la mesure où les facteurs constitutifs de l'atteinte à la vie privée étaient réunis à savoir l'absence de consentement de dame Kamé N'Daw mais aussi la commercialisation de sa photo sans son autorisation.

Dès cette position jurisprudentielle, en l'absence de lois fixant les conditions de l'utilisation des éléments de la vie privée d'une personne, il est possible à tout individu de faire sanctionner en justice la reproduction de son image lorsqu'il n'a pas consenti. La liberté de la presse n'exonère donc pas les journalistes de toute responsabilité lorsqu'ils présentent dans les écrits périodiques ou sur les ondes la prestation d'un acteur comme un reportage ou l'image d'un individu. De même, la publication de photographie d'une comédienne, prise à son insu et divulguée sans son autorisation, en donnant au surplus l'image d'un être marqué par la souffrance et diminué physiquement, porte atteinte au droit à l'image, nonobstant le caractère bienveillant et optimiste du titre et du texte accompagnant ces photographies2.

Egalement, il y a atteinte lorsque même dans l'hypothèse où le consentement de l'intéressé a été obtenu de façon expresse par une agence de presse précise et que la photographie se retrouve publiée par un autre organe de presse ou d'autres

1 Trib. P.I. Abidjan, 29 janvier 1976, n°228, RID, 1976, n°1-2, p.35 .

2 Civ. 1ère, 10 juin 1978 : Bull. I, n°191, p.41.

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revues. C'est ce qui ressort des faits de l'arrêt de la Cour d'Appel d'Abidjan1. En l'espèce, le sieur Yattien Amigué avait donné son consentement pour que sa photo soit publiée dans une revue générale africaine dans le cadre d'une étude sur l'école des statistiques. A sa grande surprise, il découvre que sa photo a été utilisée à d'autres fins par des revues autres que la revue générale africaine. Saisie de l'affaire en second degré, la C.A. a retenu l'atteinte au droit à l'image en adoptant une interprétation stricte du consentement donné.

Il en va de même pour la publication d'un cliché représentant une artiste ou une personne dans une autre revue que celle pour laquelle elle a donné son consentement2.

Aussi, a-t-il été sanctionné, l'utilisation à des fins publicitaires, la photographie d'un président de la République pilotant un bateau mû par un moteur hors bord ; la publication de cette photographie, prise dans un lieu public, pour illustrer les vacances du Chef de l'Etat n'aurait sans doute encouru aucun reproche. Mais s'agissant de vanter un produit, l'atteinte au droit à l'image et partant à la vie privée n'a pu bénéficier d'aucun fait justificatif3.

En définitive, l'atteinte à la liberté de la vie privée est consommée en cas de détournement du nom ou de l'image d'une personne à d'autres finalités autres que celles pour lesquelles la victime a donné ou non son consentement.

Le consentement, est donc, à notre sens, le facteur ou l'élément déterminateur de l'atteinte ou non de la vie privée des individus.

L'exploitation d'un élément de la vie privée d'une personne est donc conditionnée par la volonté de l'intéressé. Et c'est cette volonté, encore appelée consentement (exprès ou tacite) qui permettra au juge de guider son verdict quant à l'exploitation licite ou illicite de la vie privée d'une personne publique ou non.

Le journaliste, a donc intérêt pour un meilleur exercice de son métier à cerner les contours ou les conditions de l'exploitation à but informatif des éléments,

1 C.A. Abidjan, 2 juillet 1982 (inédit). Voir Annexe 3.

2 C.A. Paris, 14 mai 1975, D. 1976, p.291 .

3 G. Goubeaux, P. Birh, Les épreuves écrites du droit civil (méthodes et modèles), 7e éd. LGDJ, Paris, 1993, pp.83-84.

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composant la vie privée des gens même si notre époque apparaît comme celle de décadence de la vie privée. Le journaliste doit, à cet effet, se tenir constamment au courant de l'évolution du domaine législatif et jurisprudentiel pour une meilleure aise de l'exercice de son métier.

« Le journalisme est un métier très noble. Par conséquent, son exercice doit se faire avec beaucoup d'attention ». Ce qui nous ouvre le champ à analyser les conséquences des atteintes par voie de presse sur la vie des personnes victimes, surtout que les atteintes aux détails de la vie privée des personnes se propagent à la vitesse de la lumière pour atteindre les lieux les plus reculés de notre planète. Alors question : quelle incidence des atteintes des médias sur la vie personnelle et familiale des victimes ?

Section II- L'incidence des atteintes à la vie privée par voie de presse sur la vie des personnes victimes.

Dans le but d'assurer le respect du droit à la vie privée des personnes, les pouvoirs publics ont clairement spécifié, par des lois, aux journalistes dotés d'armes de formation mais aussi de destruction en cas de dérapage ou de mauvais usage de l'exploitation de la vie privée d'une personne. Ainsi les médias se montrent coupables d'abus lorsqu'ils publient, par exemple, les détails de la vie privée des personnes, ou qu'ils font leurs gros titres avec des fausses nouvelles, voire des mensonges qui se propagent à la vitesse du vent. En ce sens, on connaît en Afrique les exemples de journalistes qui utilisent leur plume ou leur micro, pour dénigrer telle ou telle personnalité politique ou publique.

En Côte d'Ivoire, actuellement les médias illustrent ce phénomène en prenant ouvertement partie pour l'une ou l'autre personnalité, protagonistes de la crise que traverse, en ce moment, notre pays. Surtout que nous savons combien le moindre mot, le plus petit commentaire peut bouleverser négativement des situations, voire des vies.

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La responsabilité du journaliste est donc énorme car l'information est comme le sang du grand corps social1. Si elle est contaminée par des considérations ou des objectifs contraires à sa mission première, la société tout entière en pâtira.

Alors question : que peut être l'impact d'une atteinte à l'intimité ou au secret de la vie privée sur l'environnement personnel et familial, voire social d'un individu ?

Deux conséquences sont susceptibles de découler de la mauvaise utilisation de l'instrument de presse à savoir qu'il peut y avoir dévalorisation ou dénaturation de la personne, victime de révélation d'un aspect consubstantiel à sa vie privée par voie de presse (Paragraphe I) mais aussi la personne peut souffrir ou subir une destruction de sa personne (Paragraphe II).

Paragraphe I- La dévalorisation de la personne, victime d'une diffusion d'un secret de sa vie privée ou d'une information mensongère.

Il advient que de gros titres mensongers et des illustrations violentes ou indiscrètes visent directement certaines personnes, notamment des personnages publics, alors qu'il est admis que chacun a droit au respect de sa vie privée et que le public, de son côté, doit être informé des affaires qui lui importent. Les questions fondamentales qui se posent alors sont les suivantes : Que gagnerait le public à savoir des faits concernant la vie privée des individus ?

Jusqu'où peut aller ce droit à l'information et ce droit de l'information sans qu'il ne se transforme en ingérence malsaine dans les affaires d'autrui ?

Prenons pour exemple le cas d'un ancien ministre considéré comme une personnalité publique et dont les journalistes s'immiscent dans sa vie privée en le traitant de pédophile. Cette affaire dénoncée affaire pédophilie Ezan Akélé c/ Diégou Bailly et Joachim Beugré ,alors respectivement Directeur de publication du quotidien "Le Jour" et journaliste auteur de l'article incriminé a fait coulé beaucoup d'encre et de salive dans la société ivoirienne. Car elle apparaissait comme un scandale aux yeux du public. Mais les défendeurs n'ayant pas pu apporter la preuve, de ce que le demandeur, en l'espèce, le sieur Ezan Akélé avait réellement

1 J.L. -Martin-Lagardette, le guide de l'écriture journalistique, 5e éd. La découverte, p.14.

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commis cet acte de pédophilie sur le jeune, présumé comme victime, quelles pourraient être les conséquences d'une telle révélation mensongère ou non surtout que la justice a prononcé un non lieu ?

Le doute planant, cette révélation qui a défait la chronique est restée dans les esprits et a certainement marqué la personne incriminée. Ce qui justifie assurément son retrait de la scène politique ou dans la vie publique.

L'image de pédophilie est restée dans les esprits, voire son image est dévalorisée. La considération que les uns et les autres lui vouaient est tombée en désuétude car considéré comme un homme pervers et indigne.

Parfois, la violation de la vie privée atteint l'individu dans ses idées. Ce ne sera plus sa personnalité physique qui sera déterminée, mais sa personnalité sociale, voire politique.

L'individu est caricaturé, étiqueté par la société.

La jurisprudence nous donne le cas d'un chef d'Etat africain photographié au moment d'une élection, un bulletin oui dans sa main gauche, un bulletin non dans la droite. Sa photographie est, par la suite publiée avec un seul bulletin à la main1. On s'aperçoit ici qu'une simple retouche photographique peut attribuer à un homme politique ou à tout citoyen des idées éventuellement contraires aux siennes.

Dans cette espèce, l'altération ou la dénaturation de la personnalité provient également de ce que le trucage conduit à inférer , à ce chef d'Etat, un comportement, une manière d'agir, autres que ceux qu'il a eus et même entendait avoir au moment du vote. Plus que ses idées politiques, c'est donc une façon d'être de sa personnalité, précisément son comportement à l'occasion d'un vote, qui est altéré, dévalorisé.

Par conséquent, les victimes ou leurs ayant droits subissent un préjudice résultant de l'atteinte. La vie personnelle et familiale de la victime se trouve dénaturée aux yeux de la société à laquelle elle appartient et même à travers tout le monde entier surtout avec les nouvelles technologies de communication et de l'information qui véhiculent les nouvelles à une allure vertigineuse.

1 Cass. Crim., 7 décembre 1961, Bull. Crim., n°512, p.982.

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Ainsi, les révélations sur les rapports de police concernant la vie des individus, l'exhumation de faits et incidents anciens, les révélations sur la sphère intime (vie sentimentale, lettres ou correspondances confidentielles), les questions de santé, les affaires de divorce et de garde des enfants peuvent poser des problèmes concernant la vie privée des gens. Elles peuvent causer une nouvelle souffrance à une personne soucieuse de vivre seulement dans l'intimité de sa vie personnelle et familiale lorsque des révélations sur la vie privée d'une personne sont effectuées, qu'elles soient vraies , fausses ou mensongères. Hormis la dénaturation ou la dévalorisation comme première conséquence sur la personne, il faut souligner que ces situations créent une seconde conséquence, à savoir une souffrance morale ou une destruction morale de l'intéressé.

Paragraphe II- La destruction d'une personne par la révélation d'un détail ou secret de sa vie privée.

L'atteinte à la vie privée peut donner lieu à deux sortes de destruction. Il s'agit en premier lieu d'une souffrance morale (A) et dans une certaine mesure d'une destruction physique (B).

A- La destruction psychologique ou morale

Chaque fois qu'il s'abrite derrière « le droit du public », le journaliste doit se garder de confondre l'information qui sert l'intérêt public avec des détails que le public est curieux de connaître.

Lorsque cette démarcation n'est pas faite et que le journaliste effectue une intrusion dans des compartiments de la vie privée d'une personne, cela fait apparaître de nombreuses conséquences sur le moral de la personne concernée par la révélation exacte ou non. Surtout lorsque la révélation est erronée, l'individu en cause est abattu. Il est touché psychologiquement dans la mesure où quelque soit le droit de réponse qu'il enverra à l'organe de presse incriminé, il ne pourra pas rétablir la vérité dans l'esprit de tous ceux qui ont lu cet article, entendu ou vu ce reportage mensonger.

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Le rétablissement de la vérité est quasiment impossible et cette révélation poursuivra cette personne tout au long du temps qui lui reste pour achever sa vie sur terre. Et même après sa mort, certaines personnes transmettrons cette révélation mensongère à leurs progénitures.

Prenons l'exemple de l'exhumation de faits et incidents anciens. Un condamné qui a purgé sa peine a droit à un certain respect de sa vie privée. En exhumant un incident embarrassant, vieux de plusieurs années, le journaliste peut causer une souffrance nouvelle, en l'espèce morale, à une personne désireuse seulement d'oublier. Aussi, les vieilles photos devraient être utilisées avec prudence de la part des journalistes.

Il suit de ce qui précède que la révélation d'un détail de la vie privée, erronée ou exacte, peut causer de réelles difficultés aux citoyens et affecter par voie de conséquence leur vie personnelle et sociale. La liberté de la presse est une arme très tranchante lorsqu'elle pénètre dans la vie des gens de façon impudique ou malsaine. Et elle peut aller même jusqu'à la mort de certains individus, pas forts moralement.

B- La destruction physique.

La presse jouait et joue un rôle d'importance majeure en Côte d'Ivoire comme partout ailleurs en Afrique et dans le monde, en ceci qu'elle est fait partie intégrante de l'évolution politique, nationale, sociale et culturelle des sociétés.

Cependant, lorsqu'elle se détourne de cette mission première, c'est-à-dire lorsqu' aucune circonstance ne saurait justifier que des journalistes blessent ou humilient des citoyens de quelque manière que ce soit, par exemple révéler des faits privés qui n'ont rien à avoir avec l'intérêt public ou général, elle détruit la personne dont les éléments de la vie privée ont été révélés de façon abusive et si elle n'est d'une âme forte, cette révélation embarrassante ou dégradante peut la conduire au suicide.

En conséquence, lorsque les journalistes exercent mal leur profession, ils sont capables de détruire physiquement et partant de tuer. Ainsi le journaliste pourrait être aussi dangereux que le voleur qui pendant l'exécution de son forfait viole et tue

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avant de s'approprier des biens d'autrui. Le journalisme est un métier très noble, son exercice doit donc se faire avec beaucoup de sagesse et d'attention disait M Ezan Akélé à l'issue de son procès pour diffamation.(Soir Info n° 1498 du 10 août 1999)

Conclusion

C'est vrai qu'on ne peut pas faire des omelettes sans casser des oeufs, mais en ce qui concerne les rapports entre le droit au respect de la vie privée et le droit « de l'information », droit « du journalisme », « de la presse », « de la communication » ou « des médias », les limites juridiques et éthiques doivent permettre aux journalistes ou professionnels de médias de faire le moindre mal possible à autrui compte tenu de la puissance de leurs instruments de travail. Car comme l'écrit Me André Bertrand, « il n'y a pas d'information qui intrinsèquement porterait atteinte à la vie privée. »

En effet, les lois et règlements qui concernent les notions de « bien », de « mal » et de « devoir moral », sur la presse font peser une responsabilité particulière sur le journaliste. La société joue un rôle important dans l'établissement des règles du jeu en ce qui concerne la vie privée.

Par ailleurs, il appartient à chaque consommateur de la presse de se faire sa propre opinion et de construire son point de vue, en sachant que tout ce qui est écrit dans un journal, entendu à la radio ou vu à la télévision n'est et ne peut pas être la vérité absolue. A chacun de nous de chercher les moyens de passer au crible les divers sujets d'actualité que les médias nous présentent car le pouvoir, à la vérité, c'est nous aussi qui l'avons. Nous n'avons donc pas à nous torturer pour un article de presse ou un reportage incluant certains aspects de notre vie privée.

Enfin, les litiges entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information ou les atteintes illicites au droit au respect de la vie privée par voie de presse trouvent leur règlement ou résolution dans des sanctions à l'encontre des auteurs desdites atteintes.

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Chapitre II :

LES SANCTIONS DES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE
DES PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE

La règle de droit implique nécessairement contrôle de son application et sanction de non respect, par la mise en jeu, normalement devant un juge ou éventuellement quelque autre institution (autorité de régulation et d'autorégulation, instance disciplinaire, structure professionnelle...) de la responsabilité des personnes reconnues coupables ou, tout au moins tenues en tant que responsables d'assurer les conséquences de sa violation. Sans contrôle véritable, la collectivité et les particuliers seraient privés de la protection et des garanties que le droit est pourtant censé leur apporter. Tout serait alors qu'illusion. Le secteur des médias et le droit qui leur est applicable n'échappent pas à cette exigence.

Le principe de la liberté d'expression et de communication n'exclut pas, bien au contraire, que des limitations y soient apportées et que puisse et doive même être engagée la responsabilité de ceux qui passeraient outre1. Les textes nationaux et internationaux fondamentaux le prévoient2.

Il s'agit pour chacun d'assumer les conséquences de ses actes, et en l'espèce, de ses écrits et reportages s'ils sont constitutifs d'une faute ou causerait un dommage. Un tel régime de responsabilité représente le minimum de ce que comporte le droit applicable aux activités d'information. C'est, en droit ivoirien comme en droit universel, l'exacte mise en oeuvre du principe posé par l'article 11 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, selon lequel : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits le plus précieux de l'homme, tout citoyen peut donc parler, écrire et imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »

1 E. Derieux, communication audiovisuelle, la responsabilité des médias, responsables, coupables, condamnables, punissables ? JCP la semaine juridique, n° 28, 14 juillet 1999, p. 1335.

2 Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, art. 11 ; convention européenne des droits de l'homme de 1950 art. 10

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Dans un tel système, les violations ou fautes sont définies par la loi et leur sanction, répression et réparation, est assurée par le juge dans le cadre d'un contrôle de type judiciaire, normalement répressif a posteriori.

Ainsi, dans le souci de la conciliation et du respect des droits et libertés apparemment contradictoires, un mécanisme de contrôle et de sanction du non respect des obligations et interdictions est institué et effectivement mis en oeuvre. Il dépend notamment de la nature et de la gravité de la faute commise et des conséquences que celle-ci peut avoir pour la collectivité toute entière ou certains intérêts privés plus particulièrement.

De façon plus large et générale encore, la référence faite au droit au respect de la vie privée en rapport avec le droit de l'information permet de dégager la responsabilité des médias. On cherche ici à identifier ou à décrire les différents modes de sanctions existants, conséquences ou aboutissements des contrôles exercés. Dans cette relation de cause à effet entre la sanction et le droit, on ne retiendra que les sanctions de nature juridique (prévues par des textes, décidées par des autorités officiellement investies d'une telle compétence, dont l'exécution s'impose)1. On envisagera pour cela successivement celles des sanctions qui sont prononcées par le juge et plus exactement et précisément le juge judiciaire (section

I) et celles qui, déterminées par d'autres instances ou autorités sont d'une autre nature (section II). Ainsi est assurée la conciliation entre la liberté d'expression, dont seuls les abus sont sanctionnés, et les droits et intérêts individuels ou collectifs malmenés2.

Section I- Les sanctions judiciaires.

Les sanctions judiciaires visent selon les cas, à assurer la protection du droit au respect de la vie privée face aux médias soit par la réparation du dommage soit par la répression de l'infraction. A cet égard, nous distinguons deux types de sanctions. D'une part les sanctions civiles (paragraphe I) et d'autre part les

1 E. Derieux, op. cit. p. 1338

2 J.L Martin-Lagardette, le guide l'écriture journalistique, 5ième édition, la découverte, P 225

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sanctions pénales (paragraphe II). Mais la demande doit, à défaut de disposition contraire, être portée devant les tribunaux de première instance ou leurs sections détachées.

Paragraphe I- Les sanctions civiles.

Le non respect du droit à la vie privée comporte des sanctions civiles ordinaires des droits subjectifs. Partie intégrante du droit de la responsabilité civile, axée principalement sur la recherche d'une faute (délictuelle ou quasi délictuelle), la théorie de l'abus du droit, en l'espèce, l'abus du droit de l'information porte à considérer que cet abus peut entraîner à la charge de son auteur, soit une réparation par l'attribution notamment de dommages et intérêts, soit le juge peut ordonner alors des mesures propres visant à supprimer le dommage, voire à l'empêcher de naître1.

Autrement dit, le titulaire d'un droit peut obtenir la réparation du dommage que lui cause la lésion (violation) de ce droit. Quel est le fondement des sanctions civiles c'est-à-dire du droit à la réparation (A) et comment peut-il être réparé (B) ?

A- Le fondement de la sanction civile.

Parlant des fondements de la sanction civile, une précision s'avère indispensable en ce sens que deux conceptions s'affrontent.

Pour certains auteurs comme B. Edelman, les droits de la personnalité sont des droits de propriété. Par conséquent, la simple atteinte c'est-à-dire la diffusion d'un droit de la personnalité sans l'accord de la victime et sans une pertinence certaine devrait donner droit à réparation sans que l'intéressé ait à prouver une faute et un préjudice réel ou prévisible.

En revanche, pour d'autres auteurs, ils estiment que pour que la responsabilité de l'auteur de la diffusion soit retenue, il faut que la divulgation de l'élément de la vie privée ait causé un préjudice à la victime et que ce préjudice ait une connexité avec la faute, en l'espèce la diffusion litigieuse.

1 F. Terré, P. Simler et Y. Lequette, droit civil, les obligations, 8ème, Paris, Dalloz 2002 p. 716

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Pour notre part, nous nous alignons sur cette dernière conception pour la simple raison que si la publication illégitime d'un détail de la privée devrait être obligatoirement sanctionnée, cela paralyserait beaucoup les activités de la presse. D'où la nécessité pour la personne, victime de l'abus de la liberté de la presse de prouver l'existence d'une faute (1), d'un dommage dont elle a souffert (2) et d'un lien de causalité entre la faute et le dommage (3). Soulignons, outre mesure que, le droit au respect de la vie privée est sanctionné par la responsabilité civile de leur auteur fondée essentiellement en Côte d'Ivoire sur les articles 1382 et 1383 du code civil. En France, plusieurs textes interviennent dans ce domaine. En effet, la responsabilité civile en matière d'usage abusif de la liberté de l'information est sanctionnée principalement par la loi du 29 juillet 1881 puis les art.9-1 du code civil, à côté du vieil article 1382 du même code.

1- La nécessité d'une faute.

Le système de responsabilité qu'a reconnu le code civil repose essentiellement sur l'analyse du comportement de l'auteur du dommage car seul le comportement constitutif de faute ouvre droit à sanction ou à réparation. La responsabilité est dite subjective dans un tel cas et c'est précisément le système que consacre l'article 1382 du code civil lorsqu'il énonce que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». La faute, selon certains auteurs, à l'instar de Planiol se présente comme la violation d'une obligation préexistante dont la loi ordonne la réparation quand elle a causé un dommage à autrui.

Pour d'autres auteurs, la faute est tout simplement un acte illicite, autrement dit un acte contraire soit aux lois, soit aux usages ou coutumes, soit à la justice sociale. En somme, la faute est un fait se présentant comme un écart de conduite que le juge va apprécier cas par cas, par référence à un modèle abstrait donné. A vrai dire, le caractère fautif d'un comportement dommageable est apprécié in abstracto par les juges. Ainsi, la violation de la vie privée, l'atteinte ou la faute consistera par exemple en ce qui concerne le droit à l'image, dans la reproduction

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(photographie) et la publication de l'image d'autrui sans son consentement, en dehors des faits justificatifs de diffusion .S'agissant de la vie privée tout court, c'est la révélation d'un secret inhérent à la personne sans raison valable.

2- La nécessité d'un dommage ou d'un préjudice.

La violation de la vie privée par le journaliste, qu'elle soit prouvée ou présumée n'entraîne la responsabilité que si un dommage en ait résulté pour la victime. Celle-ci doit donc prouver le préjudice que lui fait subir la divulgation d'un élément de sa personnalité. Ce préjudice doit être direct et certain, c'est-à-dire qu'il soit actuel ou futur et doit porter atteinte à un intérêt juridiquement protégé.

Aussi le dommage peut-il être matériel ou moral.

A titre d'illustration, dans le droit au respect de la vie privée, lorsqu'un article révèle l'homosexualité d'une personne publique ou non, il y a un préjudice moral qui résulterait de l'atteinte à sa vie privée et partant à son honorabilité et à sa réputation s'il voulait tenir cet aspect caché. Quant au préjudice matériel, il s'agira de la divulgation d'un secret entraînant par exemple une perte d'emploi pour la victime, l'exploitation d'une image en porte à faux avec la réalité ou la diffusion d'une information mensongère. Confère jugement n° 502/civ/7ième du 20 juin 2001(affaire Bohouri José Marius contre Gecos Formation et Koné Laman).

Le préjudice matériel résulterait de la perte de l'emploi.

Quelque soit la nature du dommage, il doit avoir un lien de connexité, de causalité entre la faute et le dommage.

3- La nécessité d'un lien de causalité entre la faute et le dommage.

La victime de l'atteinte aux droits de la personnalité doit prouver que le préjudice dont elle a souffert résulte directement de la faute commise par le journaliste ou l'éditeur, l'auteur des faits.

Ainsi, le juge saisi ne conclura à la responsabilité civile de l'auteur de l'atteinte à la vie privée sous le fondement de l'article 1382 du code civil que si la victime

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démontre qu'il existe un lien de cause à effet entre la divulgation par exemple des éléments de sa vie privée (faute) et le préjudice subi.

Dans notre second exemple, la personne licenciée devra démontrer que la publication de l'article relatif à sa vie privée a été la cause exclusive de la rupture de son contrat de travail ou de son congédiement. S'il était démontré que la rupture du contrat de travail avait une autre cause (abandon de poste, faute lourde par exemple) le lien de causalité ferait défaut. La réunion cumulative des trois conditions (faute, préjudice et lien de causalité) aura pour conséquence la condamnation par le juge de l'auteur de l'atteinte par une réparation ou tout autre action.

B- La détermination des sanctions.

De prime abord et comme leur nom l'indique, ces sanctions, en effet, ne sont que civiles. Nous avons écarté de notre étude, ici, l'atteinte à l'honneur et à la considération, droits subjectifs certes capitaux et permanents, mais leur reconnaissance est traditionnelle, leurs poursuites par la diffamation et l'injure sont pénales d'origine et d'essence. Et même lorsque celles-ci sont limitées au civil, elles n'en sont pas moins enfermées dans une procédure spécifique et complexe définie par les nouvelles lois sur la presse du 14 décembre 2004. Par ailleurs, si l'atteinte à la vie privée de la personne peut aussi donner lieu à des sanctions pénales, les poursuites sont, en ce sens, très rares car elles supposent l'emploi de procédés techniques de captation (enregistrement, transmission à l'insu).

Pour traiter de la sanction civile des atteintes au droit au respect de la vie privée, nous allons, successivement, recenser deux types de sanctions. Les unes tendent à la réparation de l'atteinte (1) tandis que les autres visent d'autres actions (2).

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1- La réparation pécuniaire des atteintes au droit au respect de la vie privée.

Au regard de la loi, l'existence de la responsabilité civile a pour effet d'obliger celui par la faute de laquelle cette responsabilité a été établie à réparer le préjudice causé sous la forme de dommages et intérêts1. Aux abus commis par écrits, reportages et réalisations journalistiques, s'appliquent ou devraient normalement s'appliquer les dispositions des articles 1382 et suivants du code civil qui déterminent le régime général de la responsabilité civile. Tout fait « qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Il appartient au juge, dans le cadre d'un contrôle a posteriori, en cela respectueux de la liberté d'expression, d'établir la faute et la relation de cause à effet entre la faute et le dommage, et de déterminer, par voie de conséquence, le mode de réparation qui lui apparaîtra le mieux adapté. Par une telle responsabilité civile, il s'agit d'assurer la réparation du dommage subi par la victime des abus commis par les auteurs ou professionnels des médias. Cela contribue bien davantage à rétablir dans leur droit les personnes injustement mises en cause et doit normalement suffire à dissuader les auteurs de commettre de tels excès ou de telles violations. Cette forme de responsabilité paraît souvent mieux adaptée aux excès commis du fait de la rédaction d'un texte ou de la diffusion d'un reportage2. La victime d'une atteinte à son droit à la vie privée peut donc obtenir du juge des dommages et intérêts pour indemniser le préjudice subi. En général, il s'agit de l'allocation ou de l'attribution à la victime d'une somme d'argent compensatoire qui constitue la réparation proprement dite (notamment du préjudice moral et matériel). Les dommages et intérêts sont censés réparer l'intégralité du préjudice direct et prévisible subi par la victime. L'évaluation du dommage et intérêt est du ressort du juge. A cet effet, lors de l'atteinte au droit à l'image de dame Kamé N'daw, le juge statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort avait condamné in solidum les éditions Jean Claude Nourault et la librairie de

1 Code civil, art. 1382

2 J. L Martin - Lagardette, op cit, p.232

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France, prises en la personne de leurs directeurs respectifs, à la demanderesse la somme de 500 000 francs à titre de dommages et intérêts.1

Par contre, le droit de réclamer des dommages et intérêts pour non respect des droits de la personnalité est un droit personnel. Il ne peut donc être exercé que par la personne victime des intrusions des journalistes et non par sa famille, même proche2. C'est ainsi que la veuve d'un homme filmé lors d'une tentative infructueuse de réanimation par une équipe de secours n'a pas eu le droit d'intenter un procès pour atteinte à la vie privée, après la diffusion du reportage. Seul son époux, s'il avait survécu, aurait pu intenter une telle action.

De façon générale aux Etats-unis, les journalistes sont rarement condamnés. Toutefois, le montant des dommages et intérêts versés est souvent considérables (plusieurs centaines de milliers de dollar) lorsque le défendeur est une maison d'édition ou une chaîne de télévision importante3

Toutefois une critique fondamentale est apportée à cette réparation pécuniaire. Le dommage résultant du droit de la personnalité étant par hypothèse extra patrimonial, comment peut-il être réparé en argent ?

A ce propos, on admet que l'indemnité pécuniaire qu'on accorde à la victime de l'atteinte du fait du journaliste ne répare pas ce qui est par essence irréparable mais offre à tout le moins une compensation satisfaisante A cet égard, après verdict de la cour d'appel d'Abidjan en date du 28 juillet 1999 qui s'est montée plus clémente en condamnant les journalistes prévenus Diégou Bailly et Joachim Beugré au paiement de cinq millions de francs CFA à titre de dommages et intérêts au ministre Ezan Akélé, soit le centième de ses prétentions .

Mais dans tous les cas, le juge peut accorder, une réparation autre que pécuniaire lorsqu'elle apparaît plus appropriée. C'est par exemple le cas de la publication forcée de la décision de condamnation ou d'un extrait de cette décision,

1 Trib.P.I Abidjan, 29 juillet 1976, RID, n° 1-2 p. 36

2 Anonyme, vie privée, droit de la personnalité aux Etats-unis http// :www.senat.fr/IC33/C33/htm/# fn8

3 Idem

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rectifiant ainsi, auprès du public, une information trompeuse ou erronée et en modifiant ou atténuant les effets1.

En revanche, d'autres mesures peuvent accompagner ou suppléer la réparation pécuniaire.

2- Les autres mesures ou sanctions.

Les autres actions tendant à la réparation de l'atteinte issue de la diffusion illicite de la vie privée visent toutes mesures propres à faire cesser l'atteinte et le droit de réponse.

a- Toutes mesures visant la cessation de l'atteinte.

Toute victime d'une atteinte aux droits modernes de la personnalité peut, en effet, à sa demande, obtenir du juge l'ordonnance de toute mesure visant à faire cesser immédiatement l'atteinte ou pour prévenir les atteintes ultérieures.

Ces mesures sont expressément issues de l'art. 9 du code civil français, applicables aussi en Côte d'Ivoire selon les mesures prises dans ce sens par le juge ivoirien.

Cet article stipule : « chacun a droit au respect de sa vie privée (loi du 17 juillet 1970 tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens).

Les juges peuvent, prescrire toutes mesures telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée... ».

Dans cette perspective, le premier remède prévu par les dispositions légales et réglementaires en matière de presse pour violation des droits modernes de la personnalité, en l'espèce, le droit à la vie privée est l'action en cessation.

Dès que les conditions légales sont réunies, c'est-à-dire lorsque la personne, victime de la publication a subi un préjudice (moral ou matériel), le juge doit, sur requête de l'intéressé, donner l'ordre de cessation de l'acte illicite. La cessation peut prendre la forme d'une interdiction absolue de la publication ou certains

1 E. Derieux, « justice pénale et droits des médias », justices, D, n° 10, Avril-Juin 1998, p. 139-149 et « la responsabilité des médias, responsables, coupables, condamnables, punissables ? » JCP, 1999, I, 153.

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passages de la publication seulement s'il y a possibilité de répétition de l'article illicite, le juge peut agir préventivement.

De plus, le juge peut ordonner d'autres mesures telles que séquestre, saisie ou retrait du commerce des publications incriminées (photographies par exemple), la suppression de certains passages assimilables à une vraie censure et ne se justifient que si les descriptions ou divulgations incriminées revêtent un caractère intolérable compte tenu de leur gravité. C'est pourquoi dans l'affaire Kamé N'daw, le juge ordonna la saisie et la destruction des clichés, des cartes postales et de l'ouvrage intitulé « Côte d'Ivoire » au besoin sans astreinte comminatoire de 5.000 francs par jour de retard.1 Et l'article 72 de la loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004, portant régime juridique de la presse confirme ces dites mesures. Il dispose :« les exemplaires d'un journal ou d'un écrit périodique peuvent faire l'objet d'une saisie par voie judiciaire dans les cas de toutes formes de violences exercées à l'encontre des personnes physiques et morales ainsi que sur leurs biens »

Le juge peut aussi prescrire la publication de la décision de condamnation. Autrement dit le juge peut ordonner l'insertion de la décision de justice dans la presse.

Ces mesures sont propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité des droits modernes de la personnalité à savoir le droit à l'image, le droit à la vie privée, le droit à la présomption d'innocence, le droit au nom, le droit à la voix, le droit à la propriété intellectuelle. Par ailleurs, le juge peut reconnaître à la personne lésée un droit de réponse.

b- Le droit de réponse ou réparation en nature.

Le droit de réponse est, pour les cours et tribunaux qui le rappellent ou l'ordonnent très souvent, « un droit général et absolu »2. En consacrant ce droit en son article 13, le législateur français de la loi du 29 juillet 1881 et aujourd'hui tous

1 Trib.P.I Abidjan, 29 janvier 1976, RID, op. cit. p. 36

2 J. Ravanas, op. cit, p. 333

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les législateurs nationaux et internationaux, avec en ce qui nous concerne les deux nouvelles lois du 14 décembre 2004 sur le droit de l'information en général, a attendu rétablir un certain équilibre entre les particuliers et la presse. Face à la puissance considérable de la presse, qui s'exerce notamment par l'influence qu'elle a sur le jugement de ses lecteurs, auditeurs et téléspectateurs puis sur la formation de l'opinion publique, il est nécessaire d'assurer à tout individu la défense de sa personnalité. Le droit de réponse n'est point une réplique à une mise en cause d'un individu ou d'un organe de presse comme pourrait le penser certaines personnes. Il est la sanction d'une atteinte illicite aux droits de la personnalité d'un individu. C'est pourquoi, « on ne saurait trop insister sur l'importance de cette institution..., elle est apparue comme le moyen le plus approprié de lutter contre l'abus le plus criant, le plus dangereux de la liberté d'expression : la diffusion de fausses nouvelles. »1

Ce qui a fait dire à Ruy Barbosa que « le remède du mensonge est dans la vérité. »2

Le droit de réponse est donc une sanction qui permet de mettre les deux droits et libertés c'est-à-dire les deux droits de l'homme à savoir droit de l'information et droit au respect de la vie privée sur le même pied d'égalité pour ne pas que le premier abuse du second compte tenu des moyens qu'il utilise pour son exercice.

Ce droit de réponse a été ainsi instauré pour protéger les personnes mises en cause dans les médias contre les abus des journalistes.

En Côte d'Ivoire, ce sont les articles 55 et 150 respectivement des lois n° 2004-643 portant régime juridique de la presse et n° 2004-644 portant régime juridique de la communication audiovisuelle du 14 décembre 2004 qui définissent le droit de réponse.3

Selon la première disposition « toute personne mise en cause dans un journal ou écrit périodique peut exiger l'insertion d'une réponse, si elle estime que la

1 F. Terrou et Lucien Solal, le droit de l'information, UNESCO, paris, 1951 in le droit de réponse de Freitas Nobre, nouvelles éditions Latines, paris, 1973, p. 8

2 F. Nobre, le droit de réponse, Nouvelles éditions latines, paris, 1973 p. 8

3 J.O. de République de Côte d'Ivoire, n° spécial, Accords de Linas Marcoussis, quarante sixième année, n° 2 du jeudi 30 décembre 2004, p. 71 et 88

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citation qui la concerne est erronée, diffamatoire ou qu'elle porte atteinte à son honneur, à sa réputation, à sa dignité.» Pour ce faire, le directeur de publication sera tenu d'insérer dans les trois jours de leur réception, les réponses de toute personne mise en cause dans le journal ou écrit périodique quotidien, et dans le plus prochain numéro pour les autres. Cette insertion devra être faite à la même place et dans les mêmes caractères que l'article qui l'aura provoquée et sans aucune intercalation.1 Pour ce qui est des journaux ou écrits périodiques non quotidiens, le Directeur de publication sera tenu d'insérer la réponse dans le prochain numéro.

Aux termes de la seconde disposition « toute personne physique ou morale dispose d'un droit de réponse dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation auraient été diffusées dans le cadre d'une activité de communication audiovisuelle ; le demandeur doit préciser les imputations sur lesquelles il souhaite répondre et la teneur de la réponse qu'il propose d'y apporter. La réponse doit être diffusée dans des conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé le message contenant l'imputation invoquée. Elle doit également être diffusée de manière que lui soit assurée une audience équivalente à celle du message précité. »

La demande d'exercice du droit de réponse doit être présentée dans les huit (8) jours suivant la diffusion du message contenant l'imputation qui la fonde. En cas de refus ou du silence gardé sur la demande par son destinataire dans les quatre (4) jours suivant sa réception, le président du tribunal sur saisine du demandeur peut ordonner sous astreinte la diffusion de la réponse. Il peut déclarer une ordonnance exécutoire sur minute nonobstant toutes les voies de recours.2

La réponse doit être pertinente c'est-à-dire non abusive. En outre, l'insertion de la réponse doit être gratuite.

En définitive, dans les deux cas, qu'il s'agisse de la réparation pécuniaire ou des autres actions ou sanctions, le juge peut statuer en référé. C'est ce qui ressort

1 Loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse, art. 56

2 Loi n° 2004-644 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la communication audiovisuelle, art. 151

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de l'article 9 du code civil français in fine «ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé.» et qui sont aussi appliquées par la jurisprudence ivoirienne.

A côté de ces sanctions civiles, si l'usage ou la diffusion des droits de la personnalité et partant du droit au respect de la vie privée fait apparaître une intention de nuire, l'affaire sera alors traitée au pénal. En conséquence, des sanctions pénales pourraient en résulter.

Paragraphe II- Les sanctions pénales.

La gravité des atteintes qui peuvent être portées aux droits de la personnalité et leur multiplication a conduit le législateur à le réprimer par des sanctions pénales. Précisons toutefois qu'en droit pénal, le juge ne punit que les faits qu'il définit et qualifie comme étant des infractions. Cette considération résulte du principe de légalité des infractions et des peines: « nullum crimen nulla poena sine lege » le fondement textuel est l'art. 13 al. 1 du code pénal. Selon cette disposition « le juge ne peut qualifier d'infraction et punir un fait qui n'est pas légalement défini et puni comme tel. Il ne peut prononcer d'autres peines et mesures de sûreté que celles établies par la loi et prévues pour l'infraction qu'il constate. »

En effet, les abus ou infractions des publications ou diffusions journalistiques sont susceptibles d'entraîner la mise en jeu de la responsabilité pénale des auteurs et de ceux- directeurs de publication- sous l'autorité desquels ils agissent. L'état actuel du droit fait que, en l'absence de codification , la définition des infractions et des peines encourues, en matière de presse écrite et de communication audiovisuelle, relève en partie, des deux nouvelles lois du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse écrite et de la communication audiovisuelle.

Ces nouvelles règles, en raison de leur adaptation à l'évolution universelle des médias sont plus ou moins favorables aux journalistes.

Ce qui constitue une avancée notable dans l'évolution des législations en matière de presse de façon générale.

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Ainsi pour qu'un abus au droit au respect de la vie privée par voie de presse soit réprimé (B), il est nécessaire, voire indispensable que l'abus ou l'atteinte en question soit qualifiée d'infraction (A).

A- Les infractions pénales des journalistes contre le droit au respect de la vie privée.

Ici, il y a une nécessité que l'atteinte au droit au respect de la vie privée soit qualifiée infraction.

L'infraction est, aux termes de l'article 2 du code pénal, « tout fait, action ou omission, qui trouble ou est susceptible de troubler l'ordre ou la paix publique en portant atteinte aux droits légitimes soit des particuliers, soit des collectivités publiques ou privées et qui, comme tel, est légalement sanctionné »1

L'infraction ainsi définie, il s'agira, en l'espèce, de sanctionner des personnes (en l'occurrence des journalistes, des directeurs de publication, voire des entreprises ou agences de presse) qui ont commis des faits en diffusant des informations par voie d'écrits ou d'autres médias dans des conditions prohibées par la loi. Ces infractions, par conséquent, peuvent donner lieu à des poursuites pénales.

L'action en justice ou la sanction pénale ayant pour objet de mettre fin à la violation au droit au respect de la vie privée.

Ces actions ou mesures dites limitatives de la liberté d'expression ou du droit de l'information sont prescrites par le législateur et par le juge des référés en cas d'immixtion intolérable dans la vie privée, en cas d'atteinte à l'intimité de la vie privée.

Le droit au respect de la vie privée étant le droit de toute personne à ce que sa vie privée ne soit pas l'objet de divulgation ni d'investigation, la personne dont la vie privée est publiée, ou est l'objet d'immixtion, peut agir en justice pour mettre fin à cette divulgation.1

1 Loi n° 81-640 du 31 Juillet 1981, instituant le code pénal, modifiée par la loi n° 95-522 du 6 Juillet 1995 art.2

1 P. Kayser, la protection de la vie privée, op cit, p. 238

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A ce titre, certaines infractions sont qualifiées de traditionnelles dans la mesure où elles existent de longue date et concernent la diffamation et l'injure (1). D'autres, par contre, peuvent apparaître comme modernes, soit qu'elles aient connu un essor particulier à une époque récente soit qu'elles aient été instituées par des textes adoptés ou modifiés il y a peu. Il s'agit, par exemple, des investigations ou des intrusions dans la vie privée des individus sans leur consentement ou sans une urgence d'intérêt public ou de pertinence sociale (2)

1- Les infractions traditionnelles ou anciennes.

A l'heure actuelle, les infractions pénales traditionnelles contre la vie privée par voie de presse peuvent revêtir la forme d'une diffamation ou d'une injure et ont été invoquées les plus fréquemment dans le cadre de la loi de 1881 sur la presse en France. Ces infractions portent, en effet, atteinte à des droits qui touchent profondément les personnes et leurs familles puis qui sont reconnues socialement puisqu'elles concernent leur dignité profonde et interne, voire leur vie privée.

Les textes internationaux prévoient d'ailleurs la nécessité de sanctionner de telles atteintes et le pacte international des Nations Unies du 16 décembre 1966 les autorités expressément dans de tels cas2

En côte d'ivoire, le législateur en définissant ces deux concepts violateurs de l'honneur et de la considération et par ricochet le droit au respect de la vie privée s'est aligné sur la conception déjà retenue par les textes internationaux et sur la loi française de 1881 sur la presse (Art 29 al 1).

Les définitions qui en découlent sont fournies naguère par la loi n° 91-1033 du 31 décembre 1991 portant régime juridique de la presse, aujourd'hui remplacée par la loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004 portant également régime juridique de la presse.1

2 Pacte International des Nations Unies du 16 décembre 1966, art 19 paragraphe 3a

1 Loi n° 91-1033 du 31 décembre 1991 art. 42 et remplacée par la loi n°2004-643 du 14 décembre 2004 art. 78 portant régime juridique de la presse

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a- La diffamation

D'origine latine difame ou diffamare, diffamer est l'action de divulguer ou de répandre un mauvais bruit ; dif est la privation de fama (fameux, renommé) consistant en rumeurs ou en création d'une opinion publique négative. Apparue au 14ème siècle, la diffamation est un acte de langage énonçant par la parole ou par écrit un état de chose, imputant un fait qui porte atteinte à la réputation d'une personne2 ou qu'elle est le fait de chercher à nuire publiquement à la réputation ou à l'honneur de quelqu'un par des accusations vraies ou fausses3

La diffamation s'inscrit au croisement entre deux familles de droit d'importance majeure : d'un côté la liberté d'opinion, d'expression et de l'information comme fondement de la liberté de la presse et de la société démocratique. De l'autre côté, la protection de la vie privée de l'individu et de sa réputation. Il s'agit là d'une tension permanente entre l'expression et ses limitations.

La diffamation s'apparente, pour certains, à une répression, une limitation et un contrôle de la liberté de la presse.

Pour d'autres, elle est au contraire un moyen de canaliser cette liberté d'expression, de la réglementer pour l'empêcher de devenir synonyme de libertinage, d'excès, en donnant aux uns et aux autres le sens de la responsabilité sociale4

Au sens de la loi, la diffamation reste un délit de presse. Un délit avec un statut hybride, civil et pénal à la fois, susceptible d'une peine de prison ou d'une peine d'amende.

2 L'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture (UNESCO), la diffamation dans les médias en Afrique, publiée en 2004, Bureau Régional de Dakar secteur Communication et Information, P.1

3 J. Girodet, Dictionnaire de la langue Française, A -H éd. Bordas, Paris 1976, P. 808

4 UNESCO, op cit p.5

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Mais aujourd'hui les peines de prison ont laissé place aux peines d'amende concernant l'aspect pénal de la diffamation, objet de notre attention ici, selon les nouvelles législations1

En effet, la diffamation est assurément celle des infractions définies dans la loi de 2004 portant régime juridique de la presse qui est la plus fréquemment commise, poursuivie et sanctionnée. Il s'agit, aux termes de l'article 78 alinéa 1 de ladite loi, de (( toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps social auquel le fait est imputé »2 La diffamation est donc une infraction contre la vie privée en ce sens que les allégations ou imputations d'un fait telles les accusations mensongères, de malversations ou de détournement de fonds dans l'unique intention de nuire constitueraient une immixtion intolérable dans la vie privée de l'intéressé.

La dépréciation de l'honneur et de la réputation touche à la vie intime de toute personne et partant porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée. C'est pourquoi l'affaire Dame Dadié Clarisse contre le `'groupe Olympe» a droit de citer. En effet, dans cette affaire Dame Dadié Clarisse contre le groupe olympe, le tribunal de première instance d'Abidjan Plateau statuant en matière correctionnelle décida ce qui suit : (( attendu que l'article incriminé, présentant Dame Dadié Clarisse comme esclavagiste des temps nouveaux, porte manifestement atteinte à l'honneur et à la considération, à la vie privée de celle-ci, surtout même que les prévenus ont reconnu n'avoir opéré aucune vérification quant aux faits qu'ils reprenaient, que dés lors les faits de diffamation à eux reprochés sont établis »3

Ainsi, la diffamation contre la vie privée peut résider dans le caractère dégradant ou humiliant de la diffusion mais aussi dans le mensonge avec intention de nuire. Le mensonge consistant en une publication erronée dans la mesure où l'information véhiculée est susceptible de causer un préjudice à la personne concernée.

1 Nouvelles lois sur la presse écrite et la Communication Audiovisuelle du 14 décembre 2004.

2 Loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse, art. 78 al.1

3 Trib. P.I Abidjan Plateau Ministère public C/ Soum Junior- JMK AHOUSSOU et le Journal `'INTER», 20 Mai 2005 n°2111.

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En somme, pour qu'il y ait délit de diffamation, il faut que l'imputation traduise une intention coupable de l'auteur, qu'elle ait été publique, qu'il s'agisse d'un fait déterminé dont on puisse vérifier l'exactitude ou la fausseté, que ce fait soit contraire à l'honneur ou à la morale établie (par exemple un vol, une fraude, un adultère), et que la personne diffamée soit, même si elle n'est pas nommée, facile à reconnaître.

b- L'injure

Du latin « injuria », l'injure, au sens commun, est une parole extrêmement blessante, d'une grossièreté méprisante.1

En droit et selon les dispositions de la loi de 2004 portant régime juridique de la presse, précisément en sont article 78 alinéas 3, l'injure est définie comme « toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait »2

La référence à aucun fait est normalement ce qui permet de distinguer l'injure de la diffamation surtout que c'est un même article qui les définit. L'injure ne renferme l'imputation d'aucun fait au contraire de la diffamation qui renferme l'imputation d'un fait pour être constituée. Cependant, la distinction n'est pas toujours aisée. Cela oblige celui qui engage la procédure ou qui este en justice, au risque pour lui d'échouer dans son action, à prendre parti sur la nature exacte de l'infraction. Ce qui est pourtant bien loin d'être toujours très simple ou évident. C'est la référence ou l'absence de référence à un fait qui doit, dans les conditions parfois bien délicates et incertaines, permettre de faire la différence entre la diffamation et l'injure. Traiter quelqu'un d' « incapable », de « malhonnête », d' « ivrogne », de « débile », d' « homosexuel », de « pédophile », ou d' « adultérin » par exemple, en l'absence de mentions ou de précisions même de référence à un fait, sera considéré comme injurieux et d'attentatoire au droit au respect de la vie privée.

1 J. Girodet, Dictionnaire de la langue Française, op cit, I-Z page 1645

2 Loi n° 2004 -643 du 14 décembre 2004 op cit art.78 al. 3

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En résumé, le droit au respect de la vie privée ayant pour but de protéger la paix et la liberté de la vie personnelle et familiale, une atteinte peut ne pas être une atteinte à l'honneur ou une diffamation ou une injure, et à l'inverse une diffamation ou une injure peut ne pas être une atteinte au droit au respect de la vie privée1. La victime ne peut alors se prévaloir que des modes de protection de la vie privée ou de ceux de l'honneur. Mais la plupart des atteintes au droit au respect de la vie privée sont en même temps des atteintes à l'honneur ou à la considération, parce qu'elles consistent en des divulgations de la vie privée qui portent atteinte à l'honneur et à la considération. La victime peut se prévaloir des modes de protection de la vie privée et de ceux de l'honneur et de la considération, puisque le même fait matériel constitue une atteinte au droit au respect de la vie privée et une atteinte à l'honneur ou à la considération. Il en est ainsi quand une publication contient, à la fois, des allégations constitutives d'une atteinte au droit au respect de la vie privée et des allégations constitutives d'une atteinte à l'honneur et à la considération.2

A côté des infractions dénommées traditionnelles contre le droit au respect de la vie privée, figurent aussi celles dites modernes ou nouvelles.

2- Les infractions modernes ou nouvelles contre le droit au respect de la vie privée.

A l'opposé des infractions pénales traditionnelles contre le droit au respect de la vie privée se trouvent également les infractions appelées modernes ou nouvelles contre ce droit. En effet, ces infractions sont qualifiées modernes ou nouvelles parce qu'elles relèvent de textes relativement récents.

Notre droit pénal comporte depuis longtemps des infractions qui ont en partie pour fin de protéger les personnes contre des atteintes d'une gravité particulière.

1 La déclaration Universelle des droits de l'homme et le pacte international relatif aux droits civils et politiques réunissant dans une même disposition ou article la protection de la vie privée et celle de l'honneur :art.12 de la déclaration et 17 du pacte.

2 C'est le cas de l'allégation, dans un article de journal, de l'homosexualité d'une personne constitutive d'une atteinte à l'intimité de sa vie privée et de la description de son déguisement et de son maquillage en un personnage ridicule, constitutive d'une atteinte à l'honneur et à la considération. Paris, 1ère ch. B, 20 Février 1986, D, 1986 IR, 236.

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Notre code pénal, dans sa partie spéciale consacrée aux crimes et délits contre les personnes, en l'occurrence le titre II et notamment le chapitre 4 portant atteinte à la liberté et la tranquillité des personnes ne fait pas cas de façon expresse des infractions contre le droit au respect de la vie privée par voie de presse. Ce qui pourrait nous faire penser qu'il n'y a pas 'infraction contre le droit à la vie privée relevant du code pénal de 1981 modifié par la loi n°95-522 du 6 juillet 1995.

Cependant, pour éviter tout libertinage de la part des journalistes dans le traitement de l'information, les atteintes ont été étendues par le législateur et elles sont interprétées par la jurisprudence d'une manière extensive afin d'assurer une protection plus complète du droit au respect de la vie privée par voie de presse, surtout que le journaliste est un citoyen comme les autres en dépit de la liberté dont il jouit dans l'exercice de son métier ne peut être au dessus de la loi en usant d'excès.

Ces infractions nouvelles concernent notamment les investigations dans la vie privée des individus en vue de leurs divulgations. C'est le cas, parmi les premières, des délits de violation des correspondances qui protègent non seulement la liberté d'expression de la pensée par la correspondance mais aussi les secrets de la vie privée qu'elle contient souvent.1

Egalement, des délits de violation de domicile. En effet, l'inviolabilité du domicile, proclamée par la constitution du 1er Août 2000 (art. 4), puis par l'article 384 et suivants du code pénal mais le domicile, lieu par excellence d'expression de la vie privée, sa violation est un délit contre le secret et la violation de la vie privée.

Mais concernant ces investigations dans la vie privée par la violation de la correspondance et du domicile, ce sont les divulgations qui peuvent elles-mêmes constituer des infractions pénales. La violation de la vie privée est également susceptible de constituer le délit de violation du secret professionnel, quand l'auteur, en l'espèce, le journaliste a une connaissance du fait divulgué en raison de son état ou de sa profession (art. 380 et suivants du code pénal).

1 J. Pelissier « la protection du secret de la correspondance au regard du droit pénal » revue science criminelle et droit pénal, 1965 p.106.

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Parmi les secondes, il faut citer les délits d'espionnage audiovisuel de l'intimité de la vie privée et le délit de conversation, communication et utilisation du produit de cet espionnage puis, le délit de captation au moyen d'un appareil, des paroles ou de l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé, sans son consentement (art. 380 et suivants du code pénal). Une personne, un journaliste peut porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'une autre en opérant une investigation dans celle-ci. A partir de cette première atteinte, une autre peut être réalisée par la communication et l'utilisation du produit de cette investigation. Ainsi la première n'est le plus souvent effectuée qu'en vue de la seconde. Aussi, la personne dont les paroles ou l'image ont été captées doit -elle être dans un lieu privé. Peu importe, en revanche, le lieu où se trouve l'appareil que sert à les capter. Il peut être indifféremment dans un lieu privé ou dans un lieu public.1

Au total, les infractions pénales dans leur ensemble peuvent être qualifiées par le juge. Mais comment ces infractions peuvent elles être sanctionnées, voire réprimées ?

B- La répression ou les sanctions pénales proprement dites.

Quelque soit la nature de l'atteinte portée au droit au respect de la vie privée, c'est-à-dire si cette infraction est commise par voie de presse, le juge la réprimait pénalement par des peines privatives de liberté temporaire ou emprisonnement (1) et des peines d'amendes (2). Ces peines sont dites principales.

1- De la privation de liberté provisoire ou emprisonnement.

A l'heure actuelle de l'évolution de la législation sur la presse en Côte d'Ivoire, le législateur, dans les deux nouvelles lois sur la presse écrite et audiovisuelle, respectivement art. 68 al 1er et 192 al 1er, a supprimé la peine privative de liberté ou la peine d'emprisonnement pour les délits commis par les journalistes dans l'exercice de leur profession.

1 J. Ravanas, op cit, n° 449, p. 519

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En effet, les deux textes disposent comme suit « la peine d'emprisonnement est exclue pour les délits de presse ». Ce qui laisse présumer qu'il n'y a pas de crime ou de contravention en matière d'infraction par voie de presse. Elles sont toutes qualifiées délits.

Que pouvons-nous retenir des amendes ?

2- Les amendes.

Les infractions commises par le canal d'un organe de presse, sont assorties, outre les sanctions civiles éventuelles, de sanctions pénales en l'occurrence des amendes prévues par les articles 81,82, 83 et suivants de la loi 2004-643 du 14 décembre 2004 et régissant les dispositions pénales ayant trait aux deux lois de 2004 sur la presse écrite et audiovisuelle.

D'après ces textes, l'auteur d'une infraction au droit à la vie privée, risque d'être condamné au paiement d'une amende.

Ainsi, par exemple la diffamation commise envers les particuliers est punie d'une amende de 5.000.000 de francs à 10.000.000 de francs (art. 82).

La publication de fausses informations est punie d'une amende de 5.000.000 de francs à 10.000.000 de francs (art. 82. L'injure commise envers les particuliers est punie d'une amende de 5.000.000 de francs à 15.000.000 de francs (art. 83 al. 2)

A propos des personnes dites publiques, le délit d'offense au président de la république qui est constitué par toute allégation diffamatoire tant dans sa vie privée que publique et qui sont de nature à l'atteindre dans son honneur ou dans sa dignité (art. 74 al 1er), en matière d'outrage, d'offense ou d'injure, l'amende est de 10.000.000 de francs à 20.000.000 de francs ; à 15.000.000 de fracs (l'art. 77 al 2 et 3).

En considération de tout ce qui entoure le nouvel environnement juridique de la presse, on pourrait être prétentieux de dire que le code pénal ne s'applique plus aux délits de presse en ce sens que les montants des amendes sont supérieurs à ceux contenus dans le code pénal et aussi les deux nouvelles lois sur la presse

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excluent la peine d'emprisonnement des sanctions, infligées à l'auteur (journaliste) d'une violation à un droit de la personnalité comme le droit au respect de la vie privée.

Toute chose qui a fait dire à plus d'un de la dépénalisation des délits de

presse.

Toutefois, nous ne sommes pas de cet avis. En effet, attendu que les montants des amendes sont d'ailleurs très élevés et qu'ainsi, les amendes sont qualifiées de peines principales, donc pénales, on ne pourrait, dans ces conditions ou juridiquement, parler de dépénalisation mais plutôt de suppression de la peine d'emprisonnement.

A ces sanctions judiciaires, sous forme de répression et de réparation qui peuvent apparaître souvent inefficaces ou inadaptées, peuvent s'ajouter ou se substituer d'autres formes de sanctions.

Section II- Les sanctions extra judiciaires.

Les sanctions non juridictionnelles contre les médias ont sans doute vocation, dans certains domaines, à se substituer, plus qu'à surajouter, aux sanctions juridictionnelles, même si certaines des décisions ou mesures prises à ce titre sont elles-mêmes susceptibles de recours juridictionnels.

Ces sanctions émanent de structures ou « d'autorités administratives, indépendantes » qui ont été mises en place dans des domaines où les libertés étaient en cause.1

Elles sont aujourd'hui l'instrument d'une nouvelle forme de « régulation » plus souple, nécessaire à un domaine sensible et en perpétuelle évolution.

Quelles sont donc les institutions de contrôle ou de protection des droits de la personnalité et partant de la vie privée face à la liberté des médias ?( paragraphe I) Quelles sanctions peuvent ou pourraient-elles prononcer face à un usage abusif de la liberté d'expression des médias ? (paragraphe II)

1 Médiateur de la république française, commission nationale de l'informatique et des libertés, commission d'accès aux documents administratifs, in JCP, la semaine juridique, éd. Générale, n° 28 - 14 juillet 1999, p. 1338

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Paragraphe I- Les organes de contrôle du droit de la presse face au droit au respect de la vie privée.

En Côte d'Ivoire, le milieu de l'information dispose de deux types d'organes qui exercent un contrôle a posteriori sur l'activité des médias. Il s'agit dans un premier temps des organes de régulation, autorités administratives indépendantes (A) et dans un second temps d'un organe d'autorégulation (B)

A- Les organes de régulation.

Ils sont de deux ordres : le CNP et le CNCA.

Le premier assure le contrôle de la presse écrite (1) tandis que le second réglemente la communication audiovisuelle (2)

1- Le conseil National de la Presse (CNP).

Le Conseil National de la Presse a été créé par la loi n° 91-1033 du 31 décembre 1991 portant régime juridique de la presse écrite en Côte d'Ivoire, telle que modifiée par la loi n°99-436 du 6 juillet 1999 et aujourd'hui modifiée par la loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004.

Aux termes de l'art. 38 de la nouvelle loi « il est crée une instance de régulation dénommée Conseil National de la Presse en abrégé CNP, autorité administrative indépendante, qui est chargé de veiller au respect par les entreprises de presse et les journalistes des obligations prévues par la présente loi.

« Quelles sont donc les attributions du CNP ?

Le Conseil National de la Presse veille au respect des règles relatives à la création, à la propriété, aux ressources et à la déontologie de l'entreprise de presse telles que déterminées aux art. 6 et 13 de la présente loi ainsi qu'au pluralisme de la presse. Il exerce le pouvoir disciplinaire au sein de la profession de journaliste et des professionnels de la presse » art. 39.

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A ce titre, il reçoit du procureur de la République un exemplaire de toute déclaration de publication ainsi que copie du récépissé.

En cas de non respect des dispositions légales, le CNP peut se saisir d'office ou être saisi à tout moment par tout intéressé sans préjudice de sanctions disciplinaires. C'est dans ce sens le CNP prend le temps de sensibiliser sur la bonne tenue de leurs plumes. En témoigne son communiqué condamnant les photographies dégradantes ou irrévérencieuses en date du 26 septembre 2005.Le CNP observe que bon nombre de publications ont une fâcheuse propension à publier des photographies désobligeantes des personnes . Le CNP rappelle que la publication de photographies dégradantes constitue une atteinte à l' honneur et à la dignité .Il affirme de surcroît que le droit à l' image , composante du droit à vie privée , fait l' objet d' une protection rigoureuse par la jurisprudence , les textes ivoiriens et internationaux .

2- Le Conseil National de la Communication Audiovisuelle (CNCA).

Le CNCA et le pouvoir de tutelle et de contrôle qu'il exerce sur la radio et la télévision, responsables devant lui notamment mais exclusivement, méritent, de ce point de vue, une attention particulière.

En effet, le CNCA a été institué par la loi n°91-1001 du 27 décembre 1991 fixant le régime juridique de la communication audiovisuelle, modifiée par la loi n° 2004-644 du 14 décembre 2004. Il garantit l'exercice de la liberté de communication dans les conditions définies par les textes subséquents (art 4,5 et 6) en jouant un rôle général de contrôle et de régulation de l'espace audiovisuel ivoirien.

Ainsi le CNCA a pour mission de garantir et d'assurer la liberté et la protection de la communication audiovisuelle dans le respect de la loi, de veiller au respect de l'éthique et de la déontologie en matière d'information.

En somme, le CNCA, dont la mission est de garantir la bonne application des textes en vigueur, veille à la sauvegarde de principes fondamentaux par la loi,

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notamment le respect par les médias audiovisuels, de la dignité de la personne humaine et de l'ordre public.

Il veille aussi à ce que le service public national de la radiodiffusion et de la télévision réponde aux besoins et aux aspirations des citoyens en matière d'éducation, de formation, de culture et de diversement, etc.

Pour mener à bien sa mission, le CNCA dispose de pouvoir de sanctions.

B- L'organe d'auto régulation : l'Observatoire de le Liberté de la Presse, de l'Ethique et de la Déontologie (OLPED).

L'OLPED est une institution professionnelle indépendante. Il a été créé au cours du séminaire international organisé par l' UNJCI en partenariat avec le ministère de la communication à Yamoussoukro, du 28 au 29 Décembre 1995 autour du thème «la responsabilité du journaliste en période électorale »1.

Les objectifs de l'OLPED sont les suivants : promouvoir et défendre le liberté de la presse, protéger le droit du public à une information libre. Complète , honnête et exacte, faire observer le code de déontologie des journalistes de Cote d'Ivoire , veiller au respect des normes de l'éthique sociale en sanctionnant notamment toute atteinte à la dignité humaine etc.2

L'OLPED est donc un tribunal moral voulu par les professionnels3 des médias, eux-mêmes, dont l'unique but est de mettre de l'ordre par l'auto régulation dans leur profession marquée de temps à autre par des dérapages, des abus de la liberté de l'information.

Ainsi l'OLPED s'impose comme l'un des moyens d'assainir une presse très jeune, abondante avec la retour de la Cote d'Ivoire au multipartisme en 1990, une presse sans formation qui doit s'éduquer elle-même, s'auto discipliner, s'auto critiquer pour ne point laisser les pouvoirs politiques et judiciaires mettre de l'ordre

1 Zio Moussa, l'OLPED : un tribunal moral voulu par les professionnels, in les cahiers de l'OLPED, imprimé en Côte d'Ivoire par SNPECI, Abidjan, 16 juin 2004 p. 19

2 OLPED : statuts, Titre I : nature et objectifs in les cahiers de l'OLPED, op. cit. p. 37 et préambule du code de déontologie ivoirien, p. 35

3 Zio Moussa, extrait de l'OLPED, pionnier de l'autorégulation des médias en Afrique in les cahiers de l'OLPED, p. 19

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dans leur rang. Il n'y a pas de meilleurs juges d'un journaliste que ses pairs, qui félicitent et encouragent les meilleures productions mais aussi dénoncent les mauvais exemples.1 C'est ainsi certains articles de journaux ont été jugés attentatoires à la dignité humaine .Citons le quotidien qui a disparu des kiosques à journaux « Le Reflet numéro 114 du 29 mars 1999 où une écolière de 14 ans poignardée à mort dont l'exploitation des photos illustrant cet article à la « une » du journal porte atteinte à la dignité humaine. (Voir les cahiers de l' OLPED p .160)

Paragraphe II- Les sanctions.

Deux paragraphes conduiront l'étude des sanctions non juridictionnelles.

En cas de manquement aux règles d'éthique et de déontologie ou en cas d'atteintes illicites au droit au respect de la vie privée, les organes de régulation peuvent prononcer les sanctions suivantes. Il s'agira des sanctions disciplinaires (A) mais aussi de sanctions pécuniaires ou économiques (B).

A- Les sanctions disciplinaires.

Le CNP dispose de deux niveaux de sanctions en cas de manquement aux

règles de l'information (art 47).

D'abord sur l'entreprise de presse.

Le CNP peut prononcer l'avertissement, le blâme.

Sur le journaliste, le CNP dispose aussi de l'avertissement, du blâme, de la

suspension, de la radiation.

La suspension entraîne de plein droit le retrait de la carte professionnelle

pendant la durée de ladite mesure.

La radiation quant à elle entraîne le retrait définitif de la carte professionnelle.

Le CNCA, lui, ne fait pas de distinction entre l'entreprise de communication et le

journaliste.

1 A. Dan Moussa, Forces et faiblesses de l'OLPED, in les cahiers de l'OLPED, p. 28.

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En effet en cas de manquement aux obligations de la communication audiovisuelle, les sanctions suivantes sont susceptibles d'être prononcées par le CNCA. Il sera question par exemple d'un avertissement, d'un blâme, d'une suspension ou d'une radiation (art 8). La suspension et la radiation produisent les mêmes effets que celles prononcées par le CNP. L'OLPED quant à lui et dans une certaine mesure l'UNJCI ne fait qu'interpeller le journaliste à exercer sa profession en bon père de famille par la culture d'une responsabilité dans la diffusion de l'information. C'est ainsi que les mauvais exemples de production, précisément les atteintes aux droits et libertés d'autrui sont décriés, sanctionnés outre mesure moralement sous forme de communiqués. Les communiqués sont dans ce cas très nombreux. Nous citerons celui concernant le journal « l'Agora n 54 du 12 avril 1999. Le bureau de l'OLPED a estimé que le titre de l'article de intitulé « Affaire Dramera» de fernand dedeh porte atteinte à la dignité humaine en ce sens que la photo illustrant cet article aussi bien à la une qu' en page intérieure est humiliante.1

B- Les sanctions pécuniaires ou économiques.

La loi régissant le CNCA ne fait mention d'aucune condamnation pécuniaire. L'article 47 de la loi portant régime juridique de la presse écrite fait état d'une probable sanction pécuniaire. Par ailleurs, il y a lieu de souligner que les sanctions non juridictionnelles ou administratives prononcées par les organes de régulation sont susceptibles de recours devant les juridictions compétentes (art 47 in fine C.N.P et art 10 CNCA).

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1 Communiqué n°84, dénommé appel à la société civile, in les cahiers de l'OLPED, p. 160

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Conclusion

Que serait la liberté sans contrainte, sanction ?

Les sanctions des atteintes du droit de l'information au droit au respect de la vie privée sont un contrepoids à la puissance de la liberté d'expression et de la communication qui donne droit ou pouvoir au journaliste de diffuser librement toute information en rapport étroit avec l'actualité ou l'information légitime du public. Ce journaliste peut donc écrire, parler, montrer un fait ou un événement si les conditions de la diffusion des droits d'autrui sont réunies. Par contre, à coté de ce pouvoir dont jouit le journaliste, il peut être reprochable à plus d'un titre s'il outrepasse les pouvoirs qui lui ont été conférés et soumis à des sanctions s'il est reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés. Les sanctions ont donc une fonction d'intimidation pour permettre aux médias d'être plus responsables afin de ne pas utiliser la liberté d'expression à leur guise car leur liberté s'arrête là où commence celle des autres.

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CONCLUSION GENERALE.

La protection des droits et libertés individuelles, notamment le droit au respect de la vie privée face au risque que présente la presse est devenue une préoccupation importante des pouvoirs publics, des citoyens et des journalistes eux-mêmes.

C'est pourquoi, au terme de notre étude relative aux rapports « droit au respect de la vie privée et droit de l'information », il convient de faire allusion à ce vieux proverbe européen, qui, nous l'espérons, apportera certainement une réponse à nos préoccupations. Il est intitulé : « la langue est la meilleure et la pire des choses ». Cela remonte à plus de 2500 ans, Esope racontait des fables. Il était un esclave. Un jour, son maître lui dit : « prépare-moi un repas avec ce qu'il y a de meilleur ». Esope composa un repas fait uniquement de langues (de boeuf, de veau, ou de mouton). Il expliqua : « la langue est ce qu'il y a de meilleur ; elle permet à l'homme de dire la vérité et de s'entendre avec les autres hommes ». Le lendemain, son maître lui demanda de lui donner ce qu'il y a de pire. Esope lui fit le même repas : «la langue, expliqua-t-il, est ce qu'il y a de pire ; elle permet à l'homme de dire des mensonges. Elle peut pousser les hommes à se battre ».1 Ce que l'on dit ainsi de la langue, on peut le dire de tous les moyens que les hommes se sont donnés pour s'exprimer : les journaux, la radio, la télévision,2 etc.

En considération de ce qui suit, droit au respect de la vie privée et droit de l'information peuvent se concilier. Tout dépend de la volonté du journaliste en faisant de son outil de travail, ce qu'il y a de meilleur dans la marche et le développement de la société, en donnant au mot « liberté » qu'il ne cesse de revendiquer, un sens humain. En effet, partout à travers le monde et depuis longtemps les journalistes revendiquent la liberté. Depuis quelques années, des progrès importants ont, fort heureusement, été accomplis. Mais cette liberté est-elle la liberté d'écrire, de dire, de montrer n'importe quoi ? Il faut bien se demander :

1 N. Copin, Président de rapporter sans frontières, introduction, in presse et déontologie dans l'Afrique des grands lacs "rapporter sans frontières», octobre 1995, p. 6

2 idem

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qu'est ce que je fait, qu'est ce je dois faire de ma liberté de journaliste ? Vais-je l'utiliser pour la « meilleure » ou la « pire » des choses ?

Voilà autant de questionnements qui nous amènent à faire des observations inhérentes à la situation des rapports entre les droits des individus et le droit de l'information.

Une observation attentive de la scène médiatique permet de réaliser combien le conflit entre les deux droits restitue la traditionnelle dialectique de la théorie et de la pratique. Chaque pays a ses propres lois, qui dépendent de son histoire, de sa culture, du régime politique qui s'est instauré. Mais, on retrouve souvent à travers le monde les mêmes prescriptions faites aux journalistes. D'une façon quasi générale, les atteintes aux droits de la personnalité à savoir toute accusation mensongère ou toute atteinte à la vie privée sont condamnées. Mais on constate aussi, soit que les lois sont mal appliquées, soit, tout simplement, qu'elles n'ont pas tout prévu. C'est pourquoi, depuis longtemps, les journalistes ont réfléchi entre eux, et, par pays ou par région du monde (en Cote d'Ivoire depuis 1992, après l'institution d'un réel cadre d'exercice de la liberté de la presse), ils se sont fixés des règles de conduite rédigées sous forme de chartes ou de code de déontologie. Le mot « déontologie » signifiant l'ensemble des devoirs qu'une profession se fixe à elle-même.

Mais malgré cela et en l'état actuel de la situation de la presse, il est bon de noter que la quasi totalité des diverses raisons qui sont à la bases du conflit trouvent leur motivation dans les carences imputables tant aux consommateurs de l'information qu'aux professionnels des médias eux-mêmes. Bien entendu, la responsabilité des médias sur l'empiètement des droits d'autrui est souvent liée aux comportements des journalistes qui sont, de façon récurrente, en contradiction totale avec les bonnes intentions exprimées par les textes de concilier droits de la personnalité et droits de l'information. D'ailleurs, l'essentiel des griefs formulés à leur endroit témoigne de ce que les journalistes, surtout ceux de la presse écrite constituent le principal violateur des droits de la personnalité. Bien plus, dans le contexte actuel, avec la guerre, nous sommes au regret de dire que la presse dans son ensemble a un mal. Le manque de professionnalisme, le manque d'objectivité

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dans le traitement de l'actualité, le non respect des règles de l'éthique et de la déontologie sont le leitmotiv des graves dérives dont sont coupables les journalistes dans l'exercice de ce métier si noble.

Pis encore, la presse est devenue tributaire des Chapelles politiques. Les journalistes travaillent non pas pour une presse d'information, c'est à dire celles qui s'affirme avant tout, soucieuse d'information objective ; mais plutôt en tant que journaliste politique ou de combat. Ils sont au service des hommes politiques ou des partis politiques pour dénigrer ceux qui ne sont pas de leur bord au lieu d'être au service de l'information.

Toutefois, l'on ne doit pas occulter la responsabilité des consommateurs de l'information, car la passivité des lecteurs, auditeurs et téléspectateurs reste une cause majeure de l'enlisement des journalistes.

En effet, en tant que destinataire privilégié de l'information et titulaire du droit du public à l'information, un permanent devoir de contrôle, voire de censure1, propre à mettre les droits de la personnalité à l'abri de tout péril, de toute manifestation de l'arbitraire est indispensable.2

Naturellement, l'absence, l'ignorance ou même l'insuffisance d'une telle action fait le lit à l'exercice approximatif de la liberté de l'information par les journalistes.

Heureusement l'action d'arbitrage du juge et celle des régulateurs que posent les organisations professionnelles des journalistes3 constituent un facteur déterminant dans la quête de la consolidation d'un réel respect des droits de la personnalité, surtout de la vie privée.

Les résultats obtenus dans cette optique montrent bien à quel point ils constituent de réelles garanties des droits de la personnalité contre tout exercice abusif de la profession par les journalistes.

1 La censure est prise ici dans le sens d'un tri, d'un filtrage : le consommateur doit acheter un journal ou suivre une émission radio ou télé en tenant compte du respect des lois régissant la discipline de l'information et non seulement par affinité politique ou autre considération.

2 Notamment en faisant en sorte que le jugement qu'ils rendent contraignent les producteurs de l'information à s'améliorer et à tendre vers la perfection

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Encore qu'à ce niveau des actions restent à poser, qui consisteraient dans un premier temps pour le juge, à concilier le respect des droits de la personnalité avec le principe de la liberté d'expression. Il doit dans l'exercice de ses pouvoirs, limiter son intervention aux mesures strictement nécessaires pour faire cesser le trouble constaté.1

Pour les organes de régulation, d'autorégulation, l'UNJCI et le particulier, il s'agira de fortifier leur complicité afin que la saisine aussi bien du juge que du CNP, du CNCA, de l'OLPED soit effective chaque fois que les droits de la personnalité seront en péril ou chaque fois qu'ils seront violés.

Fort de ce qui précède, l'on se rend compte que l'opposition entre droit au respect de la vie privée et droit de l'information nécessite une cure à la mesure du mal.

Une véritable et sincère prise de conscience s'impose, devant induire chez tous les acteurs du domaine de l'information un profond changement des mentalités relativement à l'acception même de la liberté de la presse et à la responsabilité qui est le corollaire.

La nécessité d'une telle action reste d'actualité, surtout en ce moment où l'on parle de dépénalisation des délits de presse. De ce fait donc, le journaliste doit faire un bond qualitatif dans la formation pour jouer désormais le rôle qui est le sien, à savoir « informer, encore informer, toujours informer »2 et rien de plus .Car il ne peut y avoir de liberté d'expression sans protection de la vie privée. Ainsi la déontologie doit être enseignée aux jeunes qui se préparent à faire du journalisme. Ils doivent savoir que, bien souvent, ils doivent décider seuls de ce qu'ils auront à faire et que leur décision soit meilleure s'ils ont des points de repère. La déontologie nécessite à la fois la réflexion personnelle et la réflexion collective, si nous voulons que les médias soient la meilleure et non la pire des choses.3

1 J. P. Gridel, chronique doctrine, presse, op. cit., Recueil , Dalloz 2005, n° 6 , p. 398

2 Diegou Bailly in "la presse à l'épreuve de la liberté", film documentaire, Axel production and azimuts, novembre 2002

3Il s'agit du CNCA, CNP et de l'OLPED qui ont en commun les missions de lutte pour le respect de la liberté de la presse mais également pour le respect des règles et lois sur l'exercice de la profession des médias

3 N. Copin, introduction, in presse et déontologie dans l'Afrique des grands lacs « rapporter sans frontières », octobre 1995, p. 7

KOFFI Aka Marcellin 119

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Enfin, une telle avancée constituerait un nouveau contexte, un contexte idéal pour relancer la controverse sur la nécessité d'une réelle et totale cohabitation, coexistence pacifique entre droit de l'information et droit à la vie privée.

Une réponse affirmative, semble-t-il, s'impose tant il est vrai à l'observation, que si le journaliste exerce son métier dans le strict respect des lois nationales et internationales que de ses propres lois à savoir le respect de l'éthique et de la déontologie de la profession des médias, la combinaison tiendra. La conciliation sera de plus en plus une réalité partout dans le monde, particulièrement dans les pays en voie de développement, en l'espèce la Côte d'Ivoire.

Dans tous les cas, les droits de la personnalité ont de beaux jours devant eux si le journaliste se forme sur le plan du droit et fait sérieusement son autocritique pour que naisse un type de journalisme qui, sans nier sa vocation et son attachement aux principes de liberté, de formation et d'éducation ne peut que contribuer à la promotion, sans trop de heurts de l'espèce humaine. C'est précisément à ces conditions que nous parviendrons à la nécessaire et délicate conciliation des garanties des droits et libertés individuelles avec le droit de l'information et ainsi de réussir « la tentative de combinaison d'un couple apparemment antinomique, opposé ».

« Deux notions qui participent l'une et l'autre à la consolidation de la vie sociale ».

En définitive, la presse doit être au service de chaque citoyen. Son développement doit s'opérer dans le respect de la dignité humaine .Le journaliste doit être certain qu'il y a bien lien direct avec l'actualité et pas d'extrapolations .

Il ne doit pas porter atteinte ni à l'identité humaine ni aux droits de l'homme ni à la vie privée ni aux libertés individuelles ou publiques. De toute façon ,seules les publications, diffusions jugées diffamatoires ,injurieuses ou dénaturatoires tombent sous le coup de la sanction juridique et administrative.

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

KOFFI Aka Marcellin 120

ANNEXES

KOFFI Aka Marcellin 121

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

ANNEXE I

TEXTES FONDAMENTAUX INTERNATIONAUX RELATIFS A LA LIBERTE

D'EXPRESSION

Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 Article 10

Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne troublent pas l'ordre public établi par la loi

Article 11

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

Déclaration Universelle des droits de l'homme de 1948

Article 19

Toute personne a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de rechercher, de recevoir et de répondre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen que ce soit

Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966.

Article 19

1-Nul ne peut être inquiété pour ses opinions.

2-Toute personne a droit à la liberté d'expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son droit.

3-l'exercice des libertés prévues au paragraphe 2 du présent article comporte des devoirs spéciaux et des responsabilités spéciales. Il peut en conséquence être

KOFFI Aka Marcellin 122

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

soumis à certaines restrictions qui doivent toutefois être expressément fixées par la loi et qui sont nécessaires :

a-)au respect des droits ou de la réputation d`autrui ;

b-) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publique

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950.

Article 10

1-Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisation.

2-L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi qui constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

Charte africaine de droits de l'homme et des peuples de 1981

Article 9

1-Toute personne a droit à l'information.

2-Toute personne a le droit d'exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des

lois et règlements

KOFFI Aka Marcellin 123

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Charte européenne des droits fondamentaux de 2000

Article 11

Liberté d'expression et d'information

1-Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières.

2-La liberté des médias et leur pluralisme sont respectés

KOFFI Aka Marcellin 124

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

ANNEXE II

TEXTES FONDAMENTAUX INTERNATIONAUX RELATIFS AUX DROITS

DE LA PERSONNALITE.

Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (26 Août 1789).

Article 9 : présomption d'innocence

Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimé par la loi.

Déclaration Universelle des droits de l'Homme (10 Décembre 1948).

Article 11 : présomption d'innocence

Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès où toutes les garanties nécessaires à se défendre lui auront été assurées.

Article 12 : honneur et réputation, vie privée.

Nul ne sera l'objet d'immixtion arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.

Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (juin 1981)

Article 5

Tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d'exploitation et d'avilissement de l'homme ou les traitements cruels inhérents ou dégradants sont interdites.

KOFFI Aka Marcellin 125

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

Article 7-b

Le droit à la présomption d'innocence jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente.

Charte européenne des droits fondamentaux (Nice (France) le 7 Décembre 2000).

Article 7 : respect de la vie privée et familiale.

Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications.

Article 8 : protection des données à caractère personnel.

1-Toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant.

2-Ces données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminés et sur la base de consentement de la personne concernée ou en vertu d'un autre fondement légitime prévu par la loi. Toute personne a le droit d'accéder aux données collectées la concernant et d'en obtenir la rectification.

3-Le respect de ces règles est soumis au contrôle d'une autorité indépendante.

Article 48 : présomption d'innocence et droit de la défense.

1-Tout accusé est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

2-Le respect des droits de la défense est garanti à tout accusé.

KOFFI Aka Marcellin 126

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

BIBLIOGRAPHIE GENERALE.

I- Traités et ouvrages généraux.

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Mazeaud (H.), Droit civil, introduction, les personnes, les incapacités, éd.Monchrestien, Paris, 1996

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Tourneau (P.), La responsabilité civile, 2ème éd., Dalloz, Paris 1976 Viney (G.), Traité de droit civil, la responsabilité, LGDJ, paris, 1988

II- Ouvrages spéciaux.

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1976, Paris 1976

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Biolley (G), Le droit de réponse en matière de presse, LGDJ, Paris, 1963 Cayrol (R), La presse écrite et audiovisuelle, PUF, Paris 1973

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Dupichot (J), les prejudices refléchis nés de l'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité physique, Paris, 1969

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Gnago (D), La presomption d'innocence en droit ivoirien, 2ème edition, collection

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Kayser (P), La protection de la vie privée, 2ème edition Ecocnomica, Presses

Universitaires d'Aix-Marseille, Paris 1990

KOFFI Aka Marcellin 128

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Les cahiers de l'OLPED, L'autorégulation face aux défis de la liberté de la presse, Abidjan, 16 juin 2004

Martin (J.L) - Lagardette, le guide de l'écriture journalistique, 5ième édition, La

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Michaud (M), Le droit au respect de la vie privée dans le contexte médiatique, Montréal, Wilson et lafleur, 1996

Pelissier (J.) « La protection du secret de la correspondance au regard du droit pénal », Revue science criminelle et droit pénal, 1965

Rivero (J), -"La protection des droits de l'homme dans les rapports entre personnes privées, mélanges cassin, 1971

-Les libertés publiques, tome I, 3ème edition, Paris, 1990

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Schulte (H.H), Dufresne (M.P), Pratique du journalisme, Paris septembre 1999, réimpression avril 2002

Terrou (F) et Solal (L), Le droit de l'information, UNESCO, Paris, 1951.

III! Thèses.

Ouraga (O), L'Etat et les libertés publiques en Côte d'Ivoire, essai de théorie générale, thèse d'Etat Nice, 1986

Ravanas (J), La protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, LGDJ, Paris, 1978

IV! Mémoires.

Konangui (A F), La liberté de la presse en Côte d'Ivoire, 2001-2003,Université de

cocody

Malan (I. N), La protection des droits civils et de la personnalité par la charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981 Université de cocody

Siraga (H. M.), Les droits et libertés publiques en Afrique noire devant l'assemblée nationale sous la IVè République (1946-1958) Université de cocody

KOFFI Aka Marcellin 129

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

V- Articles, doctrines, chroniques.

AUVRET (P), Doctrine, Droit des personnes, l'utilisation de la personnalité d'autrui, exemples et illustrations de presse, JCP la .S.J. éd. G. n°12, 23 mars 2005. P 551556

BAKOUCHE (D), note, droit des personnes. Liberté de la presse et dignité de la personne humaine, JCP, II, 10186, 4 novembre 2004. P 2257et S. BEIGNIER (B) et REGOURD (S), chronique, presse, droit de la presse et des médias, JCP/ la semaine juridique, éd. Générale n° 48, 24 novembre 2004. P 2143 et S.

BEIGNIER (B) et Lamy (B), Doctrine chronique, droit de la presse et des médias, JCP/La semaine juridique éd. Générale n°23, 8 juin 2005. P 1059-1064

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KOFFI Aka Marcellin 130

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

VE BOUA, déontologie et le liberté et liberté de presse, séminaire de Yamoussoukro, 28 août 1992. P 8

VI-TEXTES FONDAMENTAUX, CODES ET REGLEMENTS INTERIEURS.

A- DECLARATIONS ET PACTES INTERNATIONAUX .

- Charte Africaine des droits de l'Homme et des peuples ( Nairobi (Kenya), juin

1981).

- Charte européenne des doits fondamentaux (Nice, France ) 7 mars 2000

- Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des

libertés fondamentales (4 novembre 1950)

- Convention interaméricaine des droits de l'Homme de 1969.

- Déclaration universelle des droits de l'Homme (10 décembre 1948)

- Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966.

B- TEXTES CONSTITUTIONELS.

- Constitution Française du 4 Novembre 1958. Vè République. - Constitution ivoirienne du 1er août 2000 IIe république.

C- TEXTES LEGISLATIFS.

- Loi française du 29 juillet 1881 sur la presse

- Loi française n° 70-643 du 17 juillet 1970

- Loi française n° 72-553 du 3 juillet 1972

- Loi ivoirienne n° 2004-643 du 14 décembre 2004 portant nouveau régime

juridique de la presse écrite.

- Loi ivoirienne n° 2004-644 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de

la communication audiovisuelle.

D- CODES ET REGLEMENTS INTERIEURS.

- code civil français

KOFFI Aka Marcellin 131

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

- code pénal (français et ivoirien)

- code de déontologie du journaliste ivoirien, 29 août 1992

- code de déontologie togolaise

- code d'éthique des journalistes du Burundi

- charte de déontologie et droits des journalistes du Rwanda

- statut et règlement intérieur de l'UNJCI

- statut de l'OLPED-CI, 7 octobre 1995

- règlement intérieur de l'OLPED-CI, 7 octobre 1995

JURISPRUDENCE.

Jurisprudence étrangère

- Civ. 1ère, 28 mai 1991 Dalloz 1992, 213, note p. kayser, JCP, 1992, II, 21845,

note

- Civ. 2ème, 4 novembre 2004, recueil Dalloz 2005 n° 10 p. 698

- paris, 1er ch, 6 juillet Pablo Ruiz Picasso c/ édition calmann-lévy, gazette-pal,

1966, 1er semestre, p. 39, 3ème espèce.

- Paris, 1er ch., 15 novembre 1966, société anonyme presse office c/ Gunther

sachs, Dalloz-1967, JCP-182, 2ème espèce, note p. mimin

- Paris, 14ème ch. 21 décembre 1970, société France éditions et publication c/

muraccioli dit Antoine, JCP 1971, II, 16653.

- TGI, paris, référé, 27 février 1970, charrière dit papillon c/ ménager et autres,

JCP -1970, II, 16293, observations, Raymond Lindon

- TGI, Nanterre, ord. Réf, 9 mars 2005, n° 05/00760, F. Heaulme c/ télévision

française 1 : juris-data n° 2005-266371

Jurisprudence ivoirienne.

- Trib.P.I. Abidjan, 29 janvier 1976, RID 1976 n° 1-2 p. 34

- Trib.P.I. Abidjan plateau 2ème ch. 20 mai 2005 n° 2111/04 (inedit). Dame

dadié née Toty oulehonon clarisse c/ le quotidien « l'inter »

- Trib P.I Abidjan Plateau, n° 502, 7ième ch civile du 20 juin 2001, Affaire

Bohouri Kobena José Marius c/ Gecos Formation et Koné Laman

KOFFI Aka Marcellin 132

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

- C.A. Abidjan, 2 juillet 1982 n° 567 (inédit)

JOURNAUX ET PERIODIQUES.

- Fraternité Matin du samedi 14 - dimanche 15 janvier 2006, débats d'idées par

Ouraga Obou « Légalité et légitimité » P 16 et 17

- Fraternité Matin n° 12263 du vendredi 23 septembre 2005

- Fraternité Matin n° 12267 du mercredi 28 septembre 2005

- Fraternité Matin du jeudi 03 mai 2001

- Le Monde des 27-28 janvier 1974

SITE INTERNET.

www. olped.org

www. gret.org

www. lexisnexis.fr

www. dalloz.fr

http:// www. telerama.fr/culturama/ftg/etc/images/introinage.asp ?fr=1

http:// www.droit.technologie.org

http:// www.netpme.fr

http:// www. senat.fr/ic33/ic33.htm/

KOFFI Aka Marcellin 133

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

TABLE DES MATIERES

DEDICACE III

REMERCIEMENTS IV

LISTE DES ABREVIATIONS V

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE DES PERSONNES ET DROIT DE L'INFORMATION : DEUX NOTIONS OPPOSEES MAIS CONCILIBALES. 11

CHAPITRE I- DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT DE L'INFORMATION : DEUX NOTIONS

OPPOSEES 14

Section I- Le droit au respect de la vie privée et le droit de l'information, deux libertés

opposées dans leur nature. 15

Paragraphe I- Le droit à la vie privée, un droit introverti. 16

Paragraphe II - Le droit de l'information, un droit extraverti. 19

Section II- Droit au respect de la vie privée et droit de l'information : deux libertés

opposées dans leurs fonctions. 20
Paragraphe I- Le principe de l'interdiction de divulguer la vie privée des personnes

sans leur consentement, obstacle à l'expression du droit de l'information. 21

Paragraphe II- Le principe de l'inviolabilité de la vie privée. 23

Conclusion 24

CHAPITRE II- DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET DROIT DE L'INFORMATION : DEUX DROITS

CONCILIABLES OU COMPLEMENTAIRES. 25
Section I- Les faits justificatifs de l'immixtion du journaliste dans la vie privée des

personnes. 26
Paragraphe I- Les conditions de la diffusion de la vie privée d'une personne par le

journaliste. 27

A- Les conditions générales de la diffusion de la vie privée d'une personne par le

journaliste. 27

1) Le consentement de la personne concernée. 28

a) La nature juridique du consentement 28

b) La portée du consentement dans la conciliation entre droit au

respect de la vie privée et droit de l'information 28

2) L'information légitime du public . 32

a) Droit au respect de la vie privée proprement dit et droit de l'information 33

b) Droit à l'image et droit de l'information. 36

c) Droit à la présomption d'innocence et droit de l'information. 41

3) Le caractère anodin de l'élément révélé 44

4- L'existence d'une divulgation antérieure. 45

B- Les conditions particulières liées à une certaine catégorie de personnes. 46

1- Les personnes publiques. 47

a- Notion de personnes publiques. 47

KOFFI Aka Marcellin 134

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

b- Droit à la vie privée des personnes publiques et droit de l'information,

quelle conciliation ? 48

2- Les personnes célèbres ou recherchant la notoriété. 53

Paragraphe II- L'objectivité de l'information et sa conformité à la législation

qui lui est propre. 56

A- La révélation de faits intimes doit être mesurée, prudente et objective. 56

B- Le respect, par le journaliste de ses propres règles dans ses rapports avec

le droit au respect de la vie privée 57

Section II- Complémentarité du droit à la vie privée et droit de l'information à l'ère des

nouveaux moyens de communication 60

Paragraphe I- Le droit de l'information, instrument de développement des droits privés. 60

Paragraphe II- Le droit de l'information, instrument de défense ou de Protection

de la vie privée. 62

Conclusion 63

DEUXIEME PARTIE : LES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE DES

PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE ET LEURS SANCTIONS. 64

CHAPITRE I- LES MODES D'ATTEINTES A LA VIE PRIVEE DES PERSONNES PAR VOIE DE PRESSE ET

LEUR INCIDENCE SUR LA VIE DES VICTIMES. 67

Section I- Les atteintes à la vie privée des personnes par voie de presse. 68

Paragraphe I- Les atteintes au secret de la vie privée des personnes par voie de presse. 69

A- La révélation de faits privés exacts mais embarrassants. 70

B- L'intrusion dans la vie privée. 72
Paragraphe II- Les atteintes portées directement à la liberté de la vie privée par voie de

presse 73

A- La représentation mensongère d'une personne par voie de presse. 74

B- Le détournement du nom ou de l'image par voie de presse. 75

1) Le détournement du nom. 75

2) Le détournement de l'image d'autrui par voie de presse. 77
Section II- L'incidence des atteintes à la vie privée par voie de presse sur la vie des

personnes victimes. 80

Paragraphe I- La dévalorisation de la personne, victime d'une diffusion d'un secret

de sa vie privée ou d'une information mensongère. 81

Paragraphe II- La destruction d'une personne par la révélation d'un détail ou secret

de sa vie privée. 83

A- La destruction psychologique ou morale 83

B- La destruction physique. 84

Conclusion 85

CHAPITRE II- LES SANCTIONS DES ATTEINTES AU DROIT A LA VIE PRIVEE DES PERSONNES

PAR VOIE DE PRESSE 86

Section I- Les sanctions judiciaires. 87

Paragraphe I- Les sanctions civiles. 88

A- Le fondement de la sanction civile. 88

1- La nécessité d'une faute. 89

2- La nécessité d'un dommage ou d'un préjudice. 90

3- La nécessité d'un lien de causalité entre la faute et le dommage. 90

B- La détermination des sanctions. 91

KOFFI Aka Marcellin 135

Droit au respect de la vie privée et droit de l'information en côte - d'ivoire.

1- La réparation pécuniaire des atteintes au droit au respect de

la vie privée. 92

2- Les autres mesures ou sanctions. 94

a- Toutes mesures visant la cessation de l'atteinte. 94

b- Le droit de réponse ou réparation en nature. 95

Paragraphe II- Les sanctions pénales. 98

A- Les infractions pénales des journalistes contre le droit au respect de la vie privée. .. 99

1- Les infractions traditionnelles ou anciennes. 100

a- La diffamation 101

b- L'injure 103

2- Les infractions modernes ou nouvelles contre le droit au respect

de la vie privée. 104

B- La répression ou les sanctions pénales proprement dites. 106

1- De la privation de liberté provisoire ou emprisonnement. 106

2- Les amendes. 107

Section II- Les sanctions extra judiciaires. 108

Paragraphe I- Les organes de contrôle du droit de la presse face au droit au respect

de la vie privée. 109

A- Les organes de régulation. 109

1- Le conseil National de la Presse (CNP). 109

2- Le Conseil National de la Communication Audiovisuelle (CNCA). 110

B- L'organe d'auto régulation : l'Observatoire de le Liberté de la Presse,

de l'Ethique et de la Déontologie (OLPED). 111

Paragraphe II- Les sanctions. 112

A- Les sanctions disciplinaires. 112

B- Les sanctions pécuniaires ou économiques. 113

Conclusion 114

CONCLUSION GENERALE. 115

ANNEXES 120

BIBLIOGRAPHIE GENERALE. 126

TABLE DES MATIERES 133






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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci