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La protection du droit à la liberté à l'épreuve de la détention préventive en droit positif togolais


par P. Roger KPAKOU
Université de Parakou - Master en droit pénal et sciences criminelles 2020
  

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CHAPITRE 1 : Les axes de réformes envisageables

Le régime de la détention préventive souffre de l'absence d'un dispositif de réparation de la détention préventive injustifiée. En effet, les détentions préventives injustifiées sont courantes. Il est urgent que le législateur mette en place un régime de réparation de la détention injustifiée. C'est en effet un droit auquel doivent pouvoir prétendre toutes les victimes de détention injustifiée, sous certaines conditions. Sur le champ des réformes, d'importants acquis sont à relever. Certaines pistes de solution nécessitent cependant une attention soutenue et particulière du législateur. Dans cet ordre des idées, il sera abordé dans un premier temps le renforcement du cadre légal et institutionnel (Section 1) puis dans un second temps, la nécessité d'un régime de réparation de la détention préventive injustifiée (Section 2).

Section 1 : Le renforcement du cadre légal et institutionnel

Le régime de la détention préventive mérite d'être réformé afin de renforcer la protection du droit à la liberté ainsi que son effectivité à l'épreuve de la détention préventive. Le législateur togolais est conscient de cette nécessité. Pour y pallier, des réformes sont d'ores et déjà engagées et d'autres sont annoncées. Toutefois, à lumière des bonnes pratiques dans les législations voisines, certaines pistes de solutions méritent une attention particulière. À cet effet, il sera abordé dans un premier temps, les réformes engagées pour la protection du droit à la liberté (Paragraphe 1) et dans un second temps les pistes de solutions envisageables (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : Les réformes engagées pour la protection du droit à la liberté

Le législateur est instruit des limites observables dans le dispositif de protection des droits fondamentaux des personnes poursuivies en général. Les autorités publiques en ont conscience également. Elles ont acté progressivement en faveur de l'amélioration du régime de la détention préventive. Comme il le sera analysé, ces réformes concourent en majorité à la mise en place progressive des conditions requises pour une meilleure protection du droit à la liberté de toute personne poursuivie en droit positif togolais.

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Toutefois, des avancées restent attendues. En faveur de la protection du droit à la liberté lors de la détention préventive, des avancées notoires (A) sont identifiables tandis que d'autres restent attendues (B).

A. Des avancées notoires

Pour renforcer la protection du droit à la liberté, le législateur a procédé à l'adoption de la loi n° 2015-010 du 24 novembre 2015 portant nouveau code pénale au Togo. En ce qui concerne l'amélioration du traitement des personnes poursuivies, le nouveau code pénal togolais a le mérite de criminaliser les actes de torture en ses articles 198168 et suivants. Il faut rappeler qu'en 2012, la commission africaine des droits de l'Homme avait recommandé au gouvernement togolais de « veiller à ce que tous les auteurs des actes de torture soient poursuivis169 ». Cette réforme est aujourd'hui effective en droit positif togolais. La torture de toutes personnes, notamment celles en détention, est un crime imprescriptible en droit positif togolais. Une autre réforme majeure est également l'adoption de la loi n° 2019-015 portant code de l'organisation judiciaire du 30 octobre 2019. La principale plus-value de l'adoption de cette loi est sa contribution à la lutte contre la lenteur judiciaire au Togo. En effet, le législateur crée des tribunaux criminels170 et des cours criminelles d'appel171 qui sont des juridictions compétentes pour juger en premier ressort et en appel toutes les infractions qualifiées de crime. Le droit positif togolais tourne ainsi la page des cours d'assises. Avec la création de ces nouvelles juridictions, les affaires criminelles seront traitées avec plus de célérité. Cette réforme permettra de lutter contre les détentions prolongées et de fixer les détenus sur leur sort dans un délai raisonnable. Il faut également relever les efforts en faveur de

168 Art 198 NCPT « Le terme «torture» désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu'elle soit.

Ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles. »

169 CADHP, Observations finales et recommandations relatives aux 3e, 4e et 5e rapports périodiques cumulés de la République du Togo, 51e session ordinaire, 18 avril - 2 mai 2012, Banjul, Gambie, § 73(xv)

170 Art 67 et 68 de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 30/10/2019

171 Art 67 et 68 de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 30/10/2019

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l'amélioration des conditions de détention, notamment la construction de la nouvelle prison de Kpalimé172 ; la rénovation de certaines prisons civiles173, la rénovation et l'agrandissement du cabanon avec la création d'un quartier pour femmes, etc.

Les acteurs du monde judiciaire sont également impliqués dans l'effectivité de la protection du droit à la liberté. Ainsi, le tribunal de Lomé a adressé au directeur général de la police nationale et au directeur général de la gendarmerie nationale, un courrier en date du 02 février 2019 en vue de la fixation d'une heure limite pour les déferrements au parquet d'instance Lomé. Aux termes de cette missive, l'heure limite de déferrement au parquet de Lomé est fixée à 15h au plus tard, sauf en cas de nécessité de service. La raison de cette préoccupation est fondée sur la volonté de lutter contre les détentions arbitraires, le phénomène dit du « double mandat de dépôt » et celui du « vendredi soir174 ». Cette mesure vise à laisser suffisamment de temps au parquetier et ensuite au juge d'instruction pour connaitre de l'affaire dans les horaires de service et éviter qu'un individu ne soit incarcéré pour cause d'un déferrement tardif. L'administration pénitentiaire s'est également dotée d'un logiciel de gestion des prisons (application permettant l'enregistrement biométrique des détenus au niveau du greffe de chaque établissement pénitentiaire ainsi que les enregistrements de stock alimentaires, etc.175).

L'une des raisons du recours abusif à la détention préventive est le manque de garantie de représentation. Pour lutter contre le défaut de garantie de représentation, les travaux d'adressage effectués dans certaines villes du Togo constituent un grand atout. Également, la mise en oeuvre du projet d'identification nationale biométrique (e-ID Togo) annoncé par le PND sera une plus-value pour une meilleure garantie de représentation des personnes.

172 Le 21 septembre 2016

173 Par exemple, réhabilitation de la prison civile de Dapaong en février 2017

174 Hormis les cas de flagrants délits, seul le juge d'instruction a le pouvoir de placer le suspect en détention préventive. Mais en pratique, le procureur décerne mandat de dépôt même dans les affaires ne constituant pas des flagrants délits. Plus tard, lorsque le prévenu est appelé devant le juge d'instruction, ce dernier l'inculpe formellement en antidatant le mandat de dépôt à la date où le procureur avait ordonné le placement en détention préventive de ce dernier. C'est le phénomène du double mandat de dépôt.

175 https://togopresse.tg/les-acteurs-se-familiarisent-avec-le-logiciel-de-gestion-informatique-des-prisons-a-
kpalime/, consulté le 22 juin 2020 à 19h43

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand