WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Quels outils marketing et quelles stratégies de communication employer pour transformer l'image négative des festivals de musique électronique en France ?


par Antonin Vanderriest
ECE INSEEC - BBA 2021
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3. Les repressions (la loi, les interdits) et protestations

a. Soirées rave : situations à hauts risques

Due à l'origine des musiques électroniques, les répressions concernant cette culture et la culture elle-même ont plus ou moins émergé en même temps. L'ironie vient du fait que le mouvement culturel de l'électro et de ses pratiques étaient déjà apparues comme une forme de répression en soi, cela revient à se demander qui est arrivé en premier entre l'oeuf et la poule. Quoi qu'il en soit, les critères de répression de la part des autorités et de l'état ont toujours concernés les deux mêmes facteurs : la drogue et le bruit, l'illégalité et donc le non-respect de la loi étant intrinsèques à ces facteurs. En France, il existait (et existe d'ailleurs toujours plus ou moins) un

29 TESSIER L. (2003), « Musiques et fêtes techno : l'exception franco-britannique des free parties », Revue française de Sociologie, vol. 44, no 1, pp. 63-91

30 Lecarpentier C. (27/02/2015), « La nuit, Paris rave encore », NextLibération.fr

26

certain vide juridique en ce qui concerne la manière de réagir à ce genre d'évènements illégaux (rave/free parties), et ce manque d'informations sur la conduite à tenir n'est d'ailleurs pas exempt de responsabilités dans l'origine de certains accrochages entre les autorités et les participants.

De la clarté est apporté pour la première fois par Jean-Louis Debré, ministre de l'Intérieur à ce moment-là, qui décide de s'occuper pleinement de ce qui selon lui pourrait s'élever au rang de problème public. Une première circulaire est diffusée par la Mission de Lutte antidrogues (Milad) de la Direction Générale de la Police Nationale à destination de toutes les mairies de France. Il y est dénoncé une situation « extrêmement préoccupante au plan de l'ordre, de la sécurité et de la santé publique ». Son but n'est pas caché, son intitulé ne permet d'ailleurs aucune mauvaise interprétation : « Les soirées rave, des situations à hauts risques ». Cette circulaire expose tous les moyens juridiques à la disposition des élus locaux pour lutter contre ces évènements. Ils sont priés de s'adonner pleinement à faire cesser ces rave parties (légales ou non), et ils ont à leur disposition en annexe des modèles d'arrêtés d'interdictions. Michel Bouchet, patron de la Milad, affirme que « le but est de mettre les organisateurs dos au mur pour qu'ils se civilisent31 ». Malheureusement, comme le fait remarquer M. Lafargue de Grangeneuve, ce sont majoritairement les raves légales qui subiront ces nouvelles dispositions. « Les raves légales sont plus faciles à contrôler parce qu'il est possible d'intervenir en amont : ces soirées sont les plus visibles, elles sont annoncées et bénéficient d'une certaine publicité ; or, le maire - qui possède le pouvoir de police administrative sur sa commune - peut assez aisément annuler ce type d'évènements, même au dernier moment, notamment en invoquant un trouble à l'ordre public ou un manque de garanties en matière de sécurité.32 »

Ce n'est cependant pas aussi simple pour les free parties (clandestines et illégales) qui sont bien plus compliquées à réprimer. Dû au fait qu'elles sont en général bien dissimulées, il faut d'abord organiser des recherches pour en trouver le lieu et s'informer à l'avance, ce qui a un certain coût. Il est plutôt rare pour les autorités d'arriver avant le début de la fête, et il est quasiment mission impossible d'intervenir de quelques manières que ce soit une fois qu'elles ont commencé. Les autorités ne veulent en effet pas courir le risque de déclencher une émeute en tentant d'y mettre

31 Bernier A. (27/04/2000), « Des raves à la réalité. Après le boom des grands rendez-vous officiels, la scène techno se replie sur les fêtes et l'underground », Libération n°5893, p. 33-34

32 Lafargue de Grangeneuve L. (2010), L'Etat face aux rave-parties, les enjeux politiques du mouvement techno, Toulouse, ed. Sociologiques, Presses Universitaires du Mirail, p. 159

27

fin, étant à chaque fois largement dépassées en nombre. « Pour les organisateurs, il suffisait donc de rester discrets jusqu'à ce que la fête ait vraiment démarré33 ».

Il y a bien entendu des conséquences imprévues à ces répressions, la première étant qu'au lieu de faire diminuer puis disparaitre ce phénomène des raves, elles vont en fait les radicaliser et principalement les faire plonger dans la clandestinité. Ce texte sera perçu comme une injustice de la part de nombre d'adeptes des soirées rave, principalement car il interdit ces rassemblements pour cause d'usage de drogue généralisé sans même chercher à faire de distinction (tous les participants ne sont pas des consommateurs). Cette circulaire est donc vécue par ces adeptes comme une attaque claire à la globalité d'un mouvement culturel. Il apparait alors des rhétoriques justificatives faisant des comparaisons avec d'autres genres musicaux (« est-ce qu'on interdit le rock à cause de l'héroïne ? ») chez les amateurs, et qui est toujours d'actualité. Le succès de ces soirées rave, étant dos au mur, a pour conséquence l'augmentation notable des free parties. Michel Bouchet reconnait d'ailleurs que cette circulaire était « un texte d'inspiration assez prohibitionniste » et qu'elle a donc indirectement promu les rave clandestines et incontrôlables34.

Une autre conséquence notable concerne le réel impact de cette circulaire. Au lieu de s'attaquer au problème des drogues, ce pour quoi elle était prévue, c'est en fait le problème du bruit (qui n'était pas prioritaire pour la Milad) qu'elle va d'une certaine façon régler. En effet, il est désormais nécessaire pour les organisateurs de trouver des endroits éloignés de tout voisinage pour ne pas alerter la police. Ceci n'est en fait qu'un contournement du problème, puisqu'une fois la free commencée il est très rare voir même inconcevable que le nombre de décibels respecte une quelconque norme.

C'est donc le début du jeu du chat et de la souris, toujours d'actualité, qui émerge entre les autorités et les raveurs. La circulaire qui était censée mettre fin au mouvement dans sa globalité et la consommation de drogue y étant liée (que ce soit dans un contexte légal ou clandestin) a en réalité beaucoup plus impacté la partie légale, voir commerciale du mouvement. En parallèle, c'est le nombre de free parties qui augmente de façon exponentielle en réaction au refus constant des autorités de leur accorder la permission d'exister. On peut encore ici constater des contradictions entre les motivations juridico-politiques et leurs conséquences, puisque l'un des

33 Tessier L. (2003), « Musiques et fêtes techno : l'exception franco-britannique des free parties », Revue française de Sociologie, vol. 44, no 1, p. 63-91

34 Thibaud C. (18/06/1998), « Faut-il avoir peur des raves ? », L'Express n°2450, p. 98

28

problèmes de ces regroupements illégaux est qu'elles ne sont pas tenues (entendez qu'elles ne sont pas régies par une entité reconnue par l'Etat et soumise à ses lois) et qu'on assite par conséquent à des dégradations importantes notamment en ce qui concerne la pollution et l'atteinte aux droits de propriété. La majorité des sound-systems évoluant dans le milieu free « par défaut » diffusent cependant un discours de responsabilisation auprès de leur public et mettent même en place des actions spécifiques. Il n'est donc pas rare de voir la possibilité d'échanger un sac poubelle plein (qui sont d'ailleurs distribués par les sounds à chaque véhicule arrivant sur l'évènement) contre une bière, ou bien encore des coupures dans la diffusion du son pendant lesquelles tout le monde est invité à faire peu de ménage. Finalement, on observe un basculement assez conséquent du mouvement vers les free parties, qui sont estimés en 1997 à environ 80035.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo