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La blockchain, une révolution de l'intermédiation: un gain pour les entreprises au détriment des tiers de confiance ?

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par Jean-Louis LATHIERE
Université Paris Dauphine - Executive Master finance d'entreprise et pilotage de la performance 2018
  

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2.7 L'étude Deloitte : état des lieux sur la vision que les entreprises portent à la Blockchain

Les potentialités offertes par la Blockchain dépassent largement le seul domaine des crypto-monnaies. D'un modèle initialement conçu contre les institutions notamment financières, celui-ci est en cours de réappropriation par les grands groupes notamment financiers.

Ne pouvant mener nous même une analyse sectorielle exhaustive, nous nous sommes tournés vers des données secondaires issues d'études menées par des grands cabinets d'étude et d'audit.

Nous avons retenu une qui confirme cette implication accrue de la finance.

Cette étude75 a été menée par Deloitte en collaboration avec l'EFMA (European Financial Management Association) dans sa publication « Blockchain : de la frénésie au prototype ». Les évolutions techniques récentes rendent possibles l'utilisation de blockchains pour des besoins spécifiques comme par exemple des segments métiers, des classes d'actifs, avec une

74 Blockchain France (2016), la Blockchain décryptée, les clefs d'une révolution, l'Observatoire Netexplo, mai.

75 Deloitte (2016), Out of the blocks - Blockchain : de la frénésie au prototype, Deloitte Conseil & EFMA, juillet.

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gestion des droits particulière. C'est sur ce nouveau marché émergent que Deloitte entend se positionner.

2.7.1 Le positionnement de l'industrie financière vis à vis de la Blockchain

Cette enquête a été menée en 2016 auprès d'un large échantillon de 3000 personnes travaillant dans l'industrie financière pour analyser l'intérêt et l'impact potentiel de la Blockchain sur leur métier.

Quel est alors le positionnement des entreprises : 92% estiment que leur métier va s'en trouver modifier dont 85% d'ici 2020, mais seuls 15% y voit une menace. Elles voient la Blockchain comme un moyen de réduire les coûts, de gagner en efficacité et d'être un facteur de développement, de créer de nouveaux business y compris sous la forme de start-up. Il faut noter qu'une part non négligeable, mais minoritaire (26%), a pour motivation la peur de la concurrence et de rater le train d'une innovation majeure.

Cependant au moment de l'étude, 28% n'avaient commencé aucuns travaux, le reste étant en phase d'apprentissage ou de collaboration avec d'autres groupes ou start-up. Les principaux freins sont l'absence de responsable technique et les incertitudes sur la réglementation (49%), ce qui confirme qu'il s'agit d'un enjeu majeur dans le domaine financier. En revanche, les craintes à propos des performances, de la sécurité ou de la viabilité de la technologie sont très faibles (9% cumulés) ce qui est un point très positif pour la Blockchain. Elle a en quelque sorte conquis les esprits. Cela est confirmé par la demande pour des formations et le développement de prototypes qui expriment le besoin de comprendre et maîtriser cette technologie. C'est évidemment l'intérêt de Deloitte car cela fait partie de son offre, mais les pourcentages positifs sont suffisamment élevés pour être significatifs et peu biaisés. Ce qui caractérise l'année 2016 est donc la mise en oeuvre de prototypes.

L'autre aspect souligné par Deloitte est que l'industrie financière est convaincue des enjeux que représente la Blockchain, mais elle la considère plus pour son potentiel à améliorer et développer l'existant (les transferts internationaux de monnaie en particulier) que comme une technologie « disruptive » source d'innovations majeures pour leur métier. Comme l'avait exprimé prosaïquement un consultant en finance, la Blockchain est vue par la finance comme un moyen d'améliorer les performances de leurs chevaux plutôt que de créer leurs automobiles du futur. Cette lenteur d'adoption de la Blockchain par la finance sans doute liée

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à une culture d'entreprise prudente et à travailler dans des cadres réglementaires bien définis pourrait laisser le champ libre à de nouveaux acteurs dont l'innovation est le moteur principal tels que les Fintech ou les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) dont certains ont d'ailleurs commencé à déposer auprès des autorités des demandes d'agrément en tant qu'établissements financiers. On a ainsi parlé d'instant « Kodak » quand cette entreprise leader mondial de la photographie argentique s'est retrouvée au bord de la faillite n'ayant pas compris à temps que la photographie basculait massivement et de manière irréversible vers le numérique.

De plus, selon une étude réalisée par le cabinet Roland Berger76, les entreprises qui sont à la pointe en matière de numérique ont une croissance de l'ordre de 6 fois supérieure aux autres et selon le cabinet McKinsey77, le chiffre d'affaires généré par le numérique pourrait être de 1000 milliards d'€ d'ici 2025, si les infrastructures numériques étaient pleinement mises en oeuvre.

Si les craintes sur la réglementation ou son absence actuelle sont un frein pour son développement, les autorités ont conscience que des règles trop restrictives seraient une menace pour l'avenir de cette innovation et pourraient constituer un désavantage compétitif. Il s'agit donc d'un enjeu très important qu'il faudra suivre de près.

Pour des raisons de sécurité, l'industrie financière a l'habitude de travailler avec des environnements fermés. C'est probablement ce qui explique que seul 11% envisage de travailler en Blockchain publique et 18% en Blockchain bitcoin avec des applications supplémentaires. Cependant la moitié envisage de travailler avec des blockchains de consortium (semi-privée) ce qui montre qu'elles envisagent malgré tout de développer des échanges avec d'autres entités même s'il s'agit d'environnements bien encadrés et à ouverture très contrôlée. Il est probable qu'une plus grande ouverture sera progressivement acceptée avec la montée en maturité de la technologie. De plus, l'adoption d'un nouveau standard peut prendre jusqu'à 3 ans. Ainsi le consortium R3 compte 45 banques participantes, ce qui nécessite du temps pour aboutir à des accords entre ses membres. Dans ce type d'environnement, plusieurs risques peuvent se présenter : d'une part que le développement soit trop lent et finisse par décourager certains membres, d'autre part que les entreprises adhérentes se retrouvent liées à une plate-forme propriétaire limitant leurs possibilités

76 Roland Berger Strategy Consultants (2014), Du rattrapage à la transformation - L'aventure numérique, une chance pour la France, Septembre.

77 McKinsey France (2014), Accélérer la mutation numérique des entreprises - un gisement de croissance et de compétitivité pour la France, McKinsey&Company, septembre.

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d'évolution et d'adaptation à leurs besoins propres. En revanche, cela peut faciliter la compréhension de la technologie et permettre d'acquérir une compétence plus complète et plus rapide grâce à la diversité des contacts et des expériences possibles, les problématiques rencontrées par ces différentes sociétés étant proches car elles exercent les mêmes métiers. Il est significatif que d'autres consortiums entre acteurs bancaires, assureurs et financiers se soient créés en Grande-Bretagne ou en France pour explorer le potentiel de la Blockchain.

Deloitte s'est intéressé aux différentes expérimentations en cours au moment de l'enquête. Il faut noter qu'elles concernent principalement des applications existantes nécessitant d'être optimisées, le métier et la réglementation s'étant complexifiés avec le temps. Le but est de montrer concrètement les gains en termes de coût et d'efficacité que peut apporter la Blockchain. Il s'agit de montrer aux directions générales l'intérêt stratégique qu'il y a à investir dans cette technologie. Cette complexification du métier ainsi que la multiplication des intermédiaires ont non seulement un coût financier, mais également une augmentation des délais d'exécution des opérations qui pourraient être fortement optimisés en opérant de pair à pair de manière transparente avec l'exécution automatique de contrats et la sécurisation et la traçabilité qu'apporte la Blockchain. Cela concerne en particulier les opérations de distribution et de règlement des valeurs mobilières ainsi que les actions en back-office, de lutte anti-blanchiment ou de relation client. Ainsi le Nasdaq pour les valeurs mobilières et la Bank of Ireland pour la traçabilité de transaction dans le cadre de la réglementation européenne MiFID II, ont réalisé avec succès des plates-formes compatibles avec l'existant.

Mais il existe une autre tendance, minoritaire pour l'instant, qui consiste à faire de la recherche, à expérimenter de nouvelles solutions pour ensuite déterminer si elles répondront à un besoin existant ou si elles ouvriront la voie à un nouveau business.

2.7.2 Une étude de cas : la banque KBC

En complément, Deloitte a choisi comme étude de cas la stratégie du bancassureur belge KBC qui a opté pour une stratégie intermédiaire. Elle consiste à évaluer de nouvelles solutions dont une doit être basée sur la Blockchain pour répondre à un besoin du marché financier. Le but n'est pas de développer systématiquement sur la Blockchain, mais seulement quand elle apporte un bénéfice supplémentaire par rapport aux techniques traditionnelles (bases de données, transactionnel, ...). Cela a été le cas pour des projets sur les marchés de capitaux,

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pour des opérations bancaires courantes et sur une plate-forme de Financement Participatif « Bolero ». Celle-ci utilise des smart contracts pour le transfert automatique de propriétés des titres et le versement automatique de dividendes quand les conditions sont réunies. Elle évite par exemple de vérifier que toutes les informations nécessaires sont à jour ou d'effectuer des versements individuels. KBC explique qu'il aurait été possible de développer des solutions combinant plusieurs autres techniques, mais que la Blockchain avait permis des gains conséquents et une optimisation significative des processus. La banque a impliqué des clients et des entrepreneurs dans l'expérimentation pour améliorer la solution, mais également les régulateurs belges pour les sensibiliser aux spécificités et aux possibilités de cette technologie en prévision des futurs textes législatifs qui devraient encadrer ces évolutions pour garantir la confiance dans la finance sans étouffer ces innovations.

Le potentiel de cette technologie pour les entreprises se confirme, comme le montre cette étude de 2016 dans le secteur des services financiers. Il devrait également s'exprimer dans d'autres secteurs comme va le montrer notre étude de cas.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery