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La résilience de l'hôpital public face aux catastrophes: cas du centre hospitalier universitaire Yalgado Ouedraogo

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par Atina YARGA
Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature - Diplôme d'Administrateur des hôpitaux et des services de santé 2017
  

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Paragraphe 2 : Vérification de l'hypothèse spécifique N°3 qui jugefaiblel'implication des acteurs externes notamment l'Etat et la commune de Ouagadougou

Graphique 16 (série de 3): Politique d'équipement au profit du CHU-YO après les catastrophes

Nombre de réponses : 124

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

Quelques indicateurs font une analyse critique de cette hypothèse. Concernant le plateau technique, après l'insurrection populaire, 30% (38/124*100) des enquêtés affirment qu'aucune initiative n'a été prise par l'Etat pour renforcer le plateau technique. Ils sont jusqu'à 31%, lors du coup d'Etat, à reconnaître cette situation contre 35% pour l'attentat.CHU-ENT6 regrette le manque d'option pour des solutions endogènes : « Lors de l'insurrection populaire et du coup d'Etat alors qu'on n'avait pas certains matériels spécifiques à Yalgado, on avait de la compétence. Mais l'Etat a préféré évacuer les gens à coup de milliards au lieu de faire venir le matériel sur place». Le cas de BENEF-ENT 10est un exemple patent : « Je devais être opéré au genou. Il n'y avait pas le matériel à Yalgado mais au Centre médical avec antenne chirurgicale (CMA) de Schiphra. Avec l'autorisation du Directeur général, j'ai été opéré à Schiphra et l'hôpital Yalgado a remboursé ». C'est donc un euphémisme de dire que le plateau technique du CHU-YO est pauvre. Comme difficultés dans la prise en charge des afflux de blessés, CHU-RESP116 parle de « manque criard de matériel et de consommables ».Toutefois, selon MS-ENT9, des actions ont été engagées par l'Etat pour renforcer les plateaux techniques et les compétences, mais pas spécifiquement pour le CHU-YO :« De façon générale, on a ouvert un Diplôme universitaire en médecine d'urgence (formation d'urgentistes) à Bobo, une filière d'attachés de santé en soins d'urgences. Il y a la création d'un centre de neurochirurgie, de cancérologie, de traumatologie. Chaque hôpital se doit de planifier l'acquisition de son matériel et faire le plaidoyer nécessaire ».

.

Graphique 17 (série de 3): Politique de formation après les catastrophes

Nombre de réponses : 124

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

Quant au renforcementdes capacités du personnel, la situation est aussi préoccupante : après l'insurrection populaire, 39% (48/124*100) des enquêtés affirment que des sessions de formations n'ont pas été tenues. Cette opinion est partagée par 36% des enquêtés pour le coup d'Etat et 40% pour l'attentat. Cela s'est ressenti sur la technicité du personnel lors des catastrophes. CHU-AG90 considère le manque de formation comme une difficulté majeure : « [...] il y a des agents qui, parce que non formés, travaillaient comme en temps normal ».

En somme, l'Etat n'a pas financé des activités de formation du personnel médical et paramédical en médecine d'urgence ou de catastrophe. En outre, l'acquisition de matériel médico-technique de pointe pour réduire significativement les évacuations sanitaires à l'extérieur n'a pas été faite. La contribution de l'Etat semble plus centrée sur la prise en charge immédiate des patients sans trop se préoccuper de la qualité et de l'efficacité de cette prise en charge à moyen ou long terme.Or, le véritable défi n'est pas tant de rendre gratuits les soins pour les victimes mais plutôt de se demanderà quels soins ils ont accès.

Tableau 1 : Situation des fonds reçus pour la prise en charge des blesses par évènement

EVENEMENT

BONNES VOLONTES

ETAT

TOTAL

INSURRECTION POPULAIRE DES 30 ET 31/10/2014

74 515 980

0

74 515 980

COUP D'ETAT MANQUE DU 16/09/2015

24 875 500

93 381 000

118 256 500

ATTENTAT DU 15/01/2016

1 097 500

15 000 000

16 097 500

TOTAL

100 488 980

108 381 000

208 869 980

Source : Construit par l'auteur à parti des données de l'Agence comptable du CHU-YO.

Concernant le remboursement rapide par l'Etat des frais engagés dans la prise en charge des victimes, il poursuit un objectif : celui de ne pas perturber le fragile équilibre financier de l'hôpital public.Ce remboursement est plus ou moins rapide. En effet,reconnaît Bibia Robert SANGARE : « Pour le coup d'Etat, le gouvernement a anticipé en mettant à notre disposition 93 millions 381 milles F CFA »67(*). Pour l'attentat du 15 janvier 2016, « la contribution de l'Etat a été remise trois mois plus tard soit le 15 avril 2016 » selon CHU-AG105.Cependant, regrette CHU-ENT6, l'Etat ne contribue pas le plus souvent pour les soins dont il a pourtantdécrété la gratuité : « Il n'y a pas de remboursement systématique. Ce sont les bonnes volontés et nos fonds propres qui supportent pour l'essentiel »(cf. tableau 1 ci-dessus).Et pour preuve, sur 208 869 980 FCFA de recettes, les dépenses ont dépassé le double68(*).

S'agissant du transport des blessés lors des catastrophes d'origine anthropique, il apparaît que l'essentiel a été assuré par la Croix rouge et la Brigade nationale des sapeurs pompiers (cf. tableau 4 annexe 1).

Graphique 18 (série de 4): Moyens de transport des blessés lors de l'insurrection populaire

Nombre de réponses : 124

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

Les enquêtés affirment que les moyens de transport sont dans l'ordre d'importance pendant l'insurrection populaire : ambulances ordinaires : 68% (84/124*100) des enquêtés ; voitures de particuliers : 44% ; motos de particuliers : 41% ; ambulances médicalisées : 31%.

Graphique 19 (série de 4) : Moyens de transport des blessés lors du coup d'Etat

Nombre de réponses : 124

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

Lors du coup d'Etat manqué, on a le classement suivant : ambulances ordinaires : 63% des enquêtés ; voitures de particuliers (38%) ; motos (36%) ; ambulances médicalisées (29%).

Graphique 20 (série de 4) : Moyens de transport des blessés lors de l'attentat

Nombre de réponses : 124

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

Pendant l'attentat du 15 janvier 2016, les ambulances ordinaires ont servi au transport selon 59% des enquêtés, les voitures selon 28%, les motos selon 24%, les ambulances médicalisées selon 30%.

A l'analyse, le fait inquiétant est la proportion des engins à deux roues, selon en moyenne 34% des enquêtés et des voitures particulières selon en moyenne 37% des enquêtés pour les trois évènements. Et pour cause, si leur recours peut être salutaire pour les cas bénins, il peut traduire le résultat d'un geste désespéré de sauver, qui met à nu un manque de moyens appropriés pour la prise en charge pré-hospitalière. En somme, les moyens de transport n'étaient pas adaptés car en plus des motos et des voitures, c'était surtout des ambulances ordinaires qui ont assuré le transport de blessés.Ces résultats sont comparables à ceuxdeAmal BouOUNI épouse HAMZAOUI (2012 :19) qui avait aussi mentionné « le recours à des moyens de transport non médicalisé comme le bus pour assurer l'évacuation du lieu du sinistre » en Tunisie. Du reste, l'évocation de l'utilisation d'ambulances médicalisées par les enquêtés est due à une confusion. Dans les faits, elles n'ont pas été utilisées.

A cette insuffisance d'ordre logistique se greffent des problèmes de coordination entre les intervenants sur le terrain et le comité de crise de l'hôpital ; l'intérêtd'une telle coordination étant d'éviter l'engorgement des urgences.

Graphique 21 : Prise en charge pré-hospitalière des afflux massifs de blessés de l'insurrection populaire, du coup d'Etat et de l'attaque terroriste

Nombre de réponses : 114

Source : enquête de terrain, mars-avril 2017.

La coordination par le comité de crise du CHU-YO du transport des blessés reçoit majoritairement les appréciations suivantes de la part des agents de santé : "bonne" selon 42% (48/114*100) des enquêtés et "passable" selon 35%des enquêtés.Une tendance confirmée par les intervenants : CR-ENT1 relève aussi que la coordination était"passable". C'est la conclusion à laquelle était parvenueBendaoud AHMED SALEM (2010 : 98), qui afustigéla mauvaise organisation du service d'accueil de l'hôpital militaire Avicenne. 

Au sujet de l'implication de la Commune de Ouagadougou dans la lutte contre les inondations, elle s'analyse d'abord par ce qui est fait pour prémunir la ville dans son ensemble contre ce fléau. A ce niveau,CO-ENT8  reconnaît l'immensité de la tâche : «il y a des actions centrées sur les hommes (sensibilisation à travers les médias et des équipes mobiles qui sensibilisent dans les quartiers) et celles qui ciblent les ouvrages de drainage (curage des caniveaux qui se fait à l'entreprise et celui en régie du 1er janvier au 31 décembre). Mais les besoins de curage sont énormes par rapport aux moyens, car on n'arrive pas à curer tous les caniveaux. En plus, l'incivisme est réel avec l'installation des commerçants sur les caniveaux pour ne pas parler du manque de matériel, des pannes et de la motivation».De plus, les actions sont souvent inadaptées. CO-ENT4  relève : « En 2016, il y a eu une inondation dans la ville le 21 juillet et le 23 juillet la mairie a lancé une vaste campagne de curage des caniveaux ». Or, ce qui est fait ou n'est pas fait à l'échelle de la ville a des conséquences sur le CHU-YO. Ce qui permeta priori d'affirmer qu'il y a une certaine relation de causalité entre résilience urbaine et résilience hospitalière. Une ville vulnérable aura ipso facto des infrastructures socio-économiques vulnérables69(*), dont les infrastructures sanitaires telles que l'hôpital.

Quant aux mesures spécifiques au profit du CHU-YO, elles sont résumées parCO-ENT4 : « chaque année la mairie débouche les caniveaux à l'intérieur et à l'extérieur de Yalgado mais son cas est spécifique. Les caniveaux internes ne sont pas adaptés car ce sont de cunettes alors qu'il aurait fallu des collecteurs pour une zone inondable ». Malgré ces actions dont se prévalent les responsables de la commune, les inondations n'ont pas épargné le CHU-YO. A titre d'exemple, ce n'est qu'après l'inondation du 10 juillet 2016 que les acteurs de la commune ont déguerpis les commerçants installés sur les caniveaux situés devant la porte du CHU-YO en août 2016. Mais des caniveaux à travers la ville sont occupés sur de dizaines de mètres de la même façon sans la moindre réaction des autorités communales.A ce propos, CO-ENT4  poursuit : « En plus de Yalgado, il y a eu le déguerpissement de l'avenue Oumarou KANAZOE. Et depuis, plus rien. La balle est dans le camp de d'autorité. Mais, certains déguerpis se réinstallent ».

Source : A. YARGA, 11 mars 2017

Planche photographique 6 : caniveaux à proximité du CHU-YO libérés par les commerçants déguerpis en août 2016 par les autorités communales

Au vu de ce qui précède, l'hypothèse spécifique qui postule que « la faible implication des acteurs externes notamment l'Etat et la commune de Ouagadougou entrave la résilience du CHU-YO face aux catastrophes naturelles et d'origine anthropique », est confirmée.

L'analyse et l'interprétation des résultats de notre étude ainsi que les déductions faites montrent que deux hypothèses spécifiques sur trois sont confirmées. En toute logique, notre hypothèse générale qui postule que « la faible capacité de gestion des catastrophes par le CHU-YO est due à un ensemble de vulnérabilités qui l'affectent avant, pendant et après les catastrophes » est confirmée.Le CHU-YO n'est pas encore résilient face aux catastrophes. Ces résultats sont opposés à ceux de Valéry RIDDE et ali. (juin 2016 :12).

* 67Interview du Directeur Général du CHU-YO, Monsieur Bibia Robert SANGARE, in "YALGADO Info", N°14-janvier 2016, 23p.,p.18

* 68 Idem, p.18. Le Directeur général affirmait : « Pour être rigoureux, nous disons que la prise en charge des blessés a coûté plus de 400 000 000 FCFA ».

* 69 Approche systémique de la résilience urbaine prônée par Serge LHOMME et alii (2010) selon qui : « une piste pour évaluer la résistance urbaine est alors de considérer la ville comme un système ».

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault