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"en aparté"sur Canal Plus : l'invité, le public et le média comme tiers autoritaire dans une émission de conversation

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par Marylène Khouri
Institut Français de Presse Paris II-Assas - Maà®trise d'information et communication 2005
  

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2- « Voir sans être vu »

Selon Michel Foucault cité par Olivier Razac, « notre société n'est pas celle du spectacle, mais de la surveillance »66(*). Il définit le principe de surveillance par le fait de voir sans être vu. Ce principe de « voir sans être vu » contamine les formes de spectacle actuelles67(*). Dans En aparté, l'invité ne sait où les caméras se focalisent, où le téléspectateur regarde ; l'invité vit une vraie situation de surveillance totale ; en effet, un candidat de télé réalité ou un prisonnier sait quels sont les moments forts de sa surveillance et quand il peut réaliser les choses interdites ; il sait quand la surveillance faiblit. Or, ici, pas de répit. La « dissymétrie optique » est encore plus flagrante que dans un spectacle classique. La dissymétrie optique définit le fait que la scène et le public soient deux espaces séparés où les spectateurs sont invisibles et les acteurs éclairés. « Le spectateur est d'autant plus réceptif que sa personnalité n'est plus en jeu pendant le spectacle »68(*).Ainsi, le téléspectateur concentre son attention sur l'invité. L'une des prétentions du décor d' En aparté est de recréer un espace scénique censé être semblables aux espaces de vie du téléspectateur. L'appartement pourrait ressembler à celui d'un téléspectateur de Canal plus : branché, confortable, un brin « high tech ». Ainsi, lors de la diffusion de l'émission, invité comme téléspectateur se retrouvent dans un salon, un effet de symétrie s'opère autour de l'écran. La dissymétrie optique chère au spectacle classique s'atténue. Comme dans un zoo, les invités et les téléspectateurs se retrouvent dans des espaces distincts mais semblables sauf que l'individu/animal observé se situe dans un faux espace recréant le réel. Pour définir l'intérêt d'un zoo, Olivier Razac énonce qu' « il n'est pas le dépassement du quotidien vers le rêve de la fiction, c'est une descente du rêve exotique dans la banalité d'une sortie familiale du week-end ». Pour le téléspectateur face à En aparté, il s'agit d'une sorte de « tourisme » dans l'altérité du « people », cette entité jugé potentiellement supérieure car célèbre. Les deux univers par leur similitude de décor, s'entrechoquent. « Ce n'est pas la rue ou la forêt, il s'agit bien d'un spectacle, d'une réalité travaillée en vue d'une jouissance esthétique ». Cependant, contrairement au précepte de Michel Foucault « voir et être vu », l'invité ne peut percevoir ceux qui le regardent alors que dans un zoo, visiteurs et animaux sont sur le même plan. Ici, l'invité est véritablement isolé. Et tout comme dans un zoo, même si l'individu exhibé et le spectateur partagent le même réel, ils n'ont ni le même rang, ni la même fonction. «Il y en a un qui est là pour être montré et un pour regarder. Le spécimen est infériorisé par le simple fait d'être mis dans une situation contraignante pour le plaisir d'un autre»69(*). En fait, le spécimen/invité est une personnalité qui justifie sa célébrité par le fait d'avoir accompli quelque chose de relativement louable ; on le considère donc. Cependant, le dispositif d' En aparté l'infériorise en le mettant à la merci des regards et des jugements des téléspectateurs.

Pour résumer, Olivier Razac énonce que le zoo est «un dispositif multiple, un mélange complexe de prison, de laboratoire et de théâtre »70(*) ; or, nous pouvons appliquer cette définition à En aparté :

« En tant que prison, il façonne les dispositions des corps exposés en contrôlant leur vie et leur milieu, leur espace et leur temps. Mais c'est une prison étrange qui voile l'enfermement derrière une simulation de liberté. (...)En tant que laboratoire, le zoo produit un savoir sur la biologie, la psychologie et les relations des spécimens. (C'est un savoir disciplinaire de gardiennage)(...)En tant que théâtre, le zoo (...) suscite un plaisir ou un déplaisir selon les comportements montrés. (...). Mais c'est un théâtre sans scène ni salle, un spectacle du réel ou une réalité spectaculaire (...).La prison assure une sincérité factice mais convaincante, le laboratoire propose une vérité pédagogique et rassurante, le théâtre produit l'intensité excitante du comportement sauvage. »

A partir de cette définition, Olivier Razac rapproche les dispositifs zoologiques de ceux de la télé-réalité qu'il définit ainsi « une mise en scène du réel que l'on regarde à distance comme un spectacle divertissant ».

* 66 « Surveiller et punir », Michel Foucault, Paris, Gallimard, 1975, page 252

* 67 « L'écran et le zoo », Olivier Razac, page 90

* 68 Ibid, page 92

* 69 Ibid, page 96

* 70 Ibid, page 97

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