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La diversité et sa gestion dans un comité local d'ATTAC.

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par Jean Engel
Université Paris 1 - Sorbonne - Dea Sociologie Politique 2004
  

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Une insuffisance de l'engagement traditionnel

La multiplicité des engagements traduit chez les militants le même sentiment d'insuffisance de l'action politique traditionnelle que pour les autres catégories de militants. L'engagement dans ATTAC relèverait ici d'une recherche d'un militantisme plus complet. Ceci renforce l'idée de difficulté de trouver un engagement satisfaisant dans une structure traditionnelle. Bien que ces militants conservent leurs engagements, ils en ont néanmoins une vision critique.

A est membre d'ATTAC et milite à la LCR (Ligue Communiste révolutionnaire), il est également représentant syndical à la CGT :

« Non, on est jamais satisfait. Si je vous dis que je suis à la CGT par dépit... je peux dire la même chose pour le reste parce qu'on veut toujours faire plus et toujours aller plus loin. Non, mes engagements associatifs ou politiques sont... sont dans des structures que j'estime être à minima dans ce que j'attendais, c'est à moi de les faire aussi progresser et avancer. »[...]

« Je pense qu'il y a une grave faillite du politique, une insuffisance du syndicalisme et qu'une association comme ATTAC a montré ses preuves, qu'elle pouvait, ben, qu'elle pouvait faire un certain nombre de choses. Participer à des mouvements citoyens, que ce soit à Millau, que ce soit à Seattle, que ce soit à Bruxelles, de participer à un certain nombre de ces mouvements et qu'on était capable, là, d'interpeller le politique et d'interpeller la société toute entière. »

C'est ici l'idée de complémentarité entre les différents engagements qui est soulignée. L'engagement politique et syndical, même s'il demeure présent, est jugé incomplet et ce constat permet une recherche et une réceptivité accrue des idées ou des formes de militantisme nouvelles. Ici, ATTAC n'apparaît pas comme une concurrente mais comme le moyen d'aller plus loin et d'ajouter une facette à son engagement.

Le sentiment d'une insuffisance des structures traditionnelles place donc ces militants dans une disposition d'esprit propre à leur faire éprouver un certain intérêt pour une nouvelle forme d'action qui se démarque de l'action partisane ou syndicale.

Une forte transitivité des militants

Il nous semble que la connivence existant entre différentes organisations et ATTAC peut favoriser la « transitivité » des militants vers cette nouvelle association44(*). Le fait qu'un mouvement soit un membre fondateur d'ATTAC ou un adhérant de celle-ci nous paraît être de nature à favoriser le passage d'un militant de ce mouvement à ATTAC. La fréquence de la présence dans les rangs d'ATTAC d'individus membres du Syndicat SUD (Trois militants sur les 6 syndiqués font partie de SUD) ou de la LCR (deux militants) va dans ce sens. Qu'il s'agisse de conférences, de manifestations ou d'évènements plus importants, le milieu altermondialiste est organisé comme un réseau de coopération entre groupements politiques45(*). Ceci apparaît clairement comme une stratégie des mouvements politiques pour pallier l'éclatement des thèmes de luttes et à la petitesse des organisations (surtout dans les petites villes et notamment en Alsace où il y a certainement plus d'élus de droite que de militants de gauche...). Il existe donc une entraide entre les organisations qui facilite le brassage des militants :

« Ben, c'est dans le monde associatif, alter-mondialiste, on va dire, c'est « tu viens à ma manif, je vais à la tienne ». C'est un échange de bons procédés. J'annonce que la manif aura lieu tel jour, telle heure, et j'invite les membres à y aller s'ils ont envie d'y aller et voilà. »46(*)

C'est en partie pourquoi, dans ce cas, ATTAC n'apparaît pas comme une concurrente aux autres engagements. Le plus souvent, il s'agira d'un engagement supplémentaire et non d'un changement de mouvement. De plus, les liens tissés par ATTAC avec d'autres mouvements et associations dans les débuts de son existence et depuis, nous paraissent également jouer un rôle dans la dynamique d'adhésions qui a marqué le mouvement. La collaboration d'ATTAC et de ses comités locaux avec des collectifs (collectif contre l'AMI par exemple) ou dans des manifestations d'initiatives diverses (confédération paysanne) nous paraît avoir facilité sa croissance.

Mais la création d'ATTAC par un réseau d'associations ou de groupements n'explique pas, seule, les dynamiques de sur-engagement. Dans le cadre d'une accumulation d'engagements politiques, syndicaux et associatifs, l'action politique de base permet de côtoyer d'autres mouvements. C'est l'action dans un parti ou un syndicat qui va permettre (par le truchement de réseaux, de collectifs ou de liens personnels établis à travers l'action militante) la prise de contact avec ce type d'associations. La prise de contact est donc aussi favorisée par l'activité militante passée et présente.

Finalement, devant les difficultés des mouvements à renouveler l'action politique, ce sont les militants qui tentent, à travers de multiples participations, de lui redonner un sens. En tentant de dépasser les cloisonnements qui existent entre action politique, syndicale et associative, ces militants tentent de construire eux-mêmes les nouveaux cadres de l'engagement politique.

L'émergence de cet aspect individuel des réseaux a été décrit par Jacques Ion, pour qui la nature des réseaux tend à se modifier. Il affirme que « ce n'est plus le réseau de groupements qui constitue le cadre de l'engagement, c'est au contraire de plus en plus les individus eux-même qui créent des réseaux. »47(*) et confirme notre hypothèse concernant les réseaux interindividuels : « La transitivité des individus entre les divers groupements accompagne ainsi l'apparition de réseaux qui ne tiennent, au moins partiellement, leur existence que de la seule action des individus qui la constituent. Bref, les réseaux ne sont plus des données préexistantes à l'engagement, ils se dessinent au fur et à mesure des implications croisées des engagements individuels ».

Quoi qu'il en soit, on peut supposer qu'ATTAC n'aurait pas connu une telle vague d'adhésion sans le rôle joué par les réseaux d'organisations et les réseaux interindividuels.

* 44 On pourra consulter à ce sujet, Maxime Szczepansky, « Du militantisme à la militance, Une étude microsociologique des modalités de participation des militants « antimondialisation » à travers l'exemple d'un comité local de l'ATTAC », in Regards sociologiques, Strasbourg, N°24, 2003, p23-34.

* 45 L'existence de réseaux dans le monde politique n'est pas nouvelle en soi. Cependant, le fait que ces réseaux soient constitués sur le principe de la collaboration d'égal à égal et non sur un modèle de domination d'organisations satellites par un mouvement central nous paraît novateur. Cf Jacques Ion, op. cit.

* 46 Entretien 12.

* 47 Jacques Ion, La fin des militants, les éditions de l'atelier, coll. Enjeux de société, 1997.

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