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Protection Juridique du personel Humanitaire en Situation de conflit armé


par Nicole TCHOMTCHOUA TAGNE
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2004
  

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Section II : La réparation civile, une conséquence de l'action répressive

Le droit à la réparation pour les victimes d'une violation est un principe bien établi du droit international. Depuis la fin de la guerre froide, l'obligation d'offrir réparation aux victimes de violation des droits de l'homme et du droit international a été réaffirmée par un grand nombre de traités et déclarations internationales.

La réparation a été décrite en droit international public général comme ayant "pour but de soulager la douleur et de rendre justice aux victimes en supprimant ou réparant dans la mesure du possible les conséquences de l'acte dommageable. La recherche de la réparation est perçue par beaucoup d'experts comme revêtant des avantages thérapeutiques et psychologiques assez significatifs pour la victime. Cette obligation est consacrée et reconnue en droit international. L'octroie des dommages intérêts est important pour la réhabilitation de la victime individuelle et a une valeur compensatrice aux yeux de celle-ci et de la société.

Cependant, tout préjudice ne donnant pas lieu à réparation, pour qu'une action en réparation soit recevable, il faudrait que certaines conditions aient été remplies.

Paragraphe I- Les conditions de la réparation

L'action en réparation suppose l'existence d'une faute (A), d'un préjudice ou dommage (B) un lien de causalité (C) et l'imputabilité de la faute (D)

A - Un fait dommageable : la faute90(*)

Elle est à la fois une des conditions de la responsabilité civile et son fondement. Elle peut être un fait ou une omission, un fait illicite imputable à son auteur91(*). Ces actes délictuels ont été qualifiés en droit international humanitaire de crimes de guerre. On entend par « crimes de guerre » les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir des actes visant des personnes ou des biens protégés par les dispositions de ces Conventions et autres textes internationaux.

Il s'agit des violations du droit international humanitaire énoncées au Protocole II ainsi que ceux du statut de la Cour Pénale Internationale. A savoir le fait de lancer des attaques délibérées contre la population civile en général, et en particulier contre le personnel apportant secours au personnel humanitaire, les bâtiments, le matériel, les unités et moyens de transport sanitaires, le personnel utilisant les emblèmes distinctifs de la Croix-Rouge ou du Croissant Rouge, contre les missions d'aide humanitaire ou de maintien de la paix des Nations Unies.

La commission de tous ces actes, quel que soit leur auteur constitue une infraction grave en droit international humanitaire. Les victimes seront donc fondées à demander réparation. Mais retenons que la faute certes est le fondement de l'action civile mais elle est cumulative à d'autres conditions.

B- La nécessité d'un préjudice

A la différence de l'action pénale, l'action civile n'est pas une punition mais une réparation. La première diffère de la seconde à bien des égards, ceci tant au niveau de la source, de la sanction que du résultat. Le délit civil répond à la règle « pas d'intérêt pas d'action. »

Elle aboutit au paiement d'une indemnisation encore appelée dommages -intérêts à la victime. En plus d'exister, le préjudice doit être certain, réel et actuel. L'on ne saurait demander réparation pour un préjudice qu'on projette subir dans le futur. Par ailleurs, l'on ne pourra non plus obtenir réparation suite à un préjudice imaginaire. La réalité du préjudice doit pouvoir être perceptible. Il doit pouvoir être établi que l'acte posé a réellement été préjudiciable au plaignant (victime) et que celui-ci mérite réparation.

A cet effet, les victimes de crimes graves aux conventions de Genève ou crimes de guerre recevront des dommages et intérêt de par le préjudice92(*) que leur aura causé soit un des belligérants ou alors un civil.

C-le lien de causalité

Il s'agit en effet du lien de cause à effet entre la faute d'une personne ou le rôle d'une chose et le préjudice subi par un tiers93(*). Le dommage subi doit pouvoir être imputé à son auteur. Il établit la relation entre la cause et le dommage. Dans le cadre d'une atteinte causée à l'endroit d'un humanitaire, il est nécessaire d'établir que le fait d'un individu est à l'origine de cette atteinte dont est victime l'agent en question. C'est le lien entre l'infraction et le mal qu'a subi la victime. Pour que la responsabilité de l'auteur du dommage soit engagée, il faut qu'il y ait entre la faute et le dommage un rapport direct de causalité dont la cause incombe au demandeur.

D- L'imputabilité de la faute

En droit international coutumier, il a été admis que, les actes des personnes, groupes ou organisations peuvent être imputés à un Etat lorsqu'ils agissent en tant qu'organe de facto de cet Etat. Tel est le sens de cette disposition du projet de commission du droit international : « Le comportement de tout organe de l'Etat est considéré comme un fait de l'Etat d'après le droit international que cet organe exerce des fonctions législatives exécutives judiciaires ou autres quelle que soit la position qu'il occupe dans l'organisation de l'Etat et quelle que soit sa nature en tant qu'organe du gouvernement central de cet Etat94(*) ». Il s'agit du résultat d'un processus intellectuel nécessaire pour combler l'écart entre l'infraction de l'organe ou du responsable et l'attribution de la violation et de la responsabilité de l'Etat.

Grosso modo, ce sont les hypothèses où, les actes des particuliers sont attribués à l'Etat. En particulier dans les cas où ces individus peuvent être qualifiés fonctionnaires de facto.

Mais il convient de relever ici qu'il ne suffit pas que ces derniers agissent au compte de l'Etat pour que ces actes lui soient imputables. Il faudrait qu'il soit établi qu'il y avait de la part de cet Etat un pouvoir de direction ainsi qu'un lien effectif de subordination. C'est en ce sens que pour l'espèce activités militaires et paramilitaires au Nicaragua,95(*) il avait été établit que les Etats Unis d'Amérique avaient effectivement eu le contrôle des activités militaires et paramilitaires qui avaient conduit aux violations en question. L'effectivité de ce contrôle suffisait donc à établir la responsabilité des Etats Unis d'Amérique.

Tout Etat dont la responsabilité est établie de par les actes d'une organisation émanant de son pouvoir verra sa responsabilité civile engagée et se devra de réparer tout préjudice causé par un ou tous les membres de cette organisation.

Paragraphe II- La mise en oeuvre de la responsabilité civile en cas d'infraction contre le personnel humanitaire

La réparation civile en matière pénale répond à certaines exigences. En ce sens que, porté devant le juge pénal, la victime n'a pas l'opportunité des poursuites. Elle ne pourra déclencher le procès que par une plainte avec constitution de la partie civile. Ce qui se trouve être anormal lorsqu'on sait que « l'obligation de répondre est aussi obligation de réparer le dommage causé par l'infraction à la victime personnelle et directe de l'infraction »96(*). De ce point de vue, l'humanitaire victime d'une atteinte n'est certes pas admis à demander directement réparation devant le juge pénal, mais pourra intenter une action civile à des fins « répressives97(*). »

Il pourra obtenir réparation selon les cas en fonction de l'institution ou de l'instance face à laquelle elle se trouve.

A- La réparation prévue par les textes

Que le procès ait été porté devant une juridiction interne ou internationale, la victime jouit d'un droit à la réparation du préjudice qu'il a subi. Sur le plan national, celle ci pourra se fonder sur la responsabilité du fait d'autrui pour les cas où l'acte a été commis par un individu isolé, ou alors sur la responsabilité du commettant du fait de son préposé pour les cas où l'acte émanerait d'un membre de l'armée. Par ailleurs, en divers textes internationaux pourraient aussi fonder l'octroi d'une indemnisation devant la CPI.

1- Le code civil

Le code civil en ses article 1382 et suivant prévoit la responsabilité civile non seulement pour les dommage qu'on a causé soit même, mais aussi pour ceux qui sont causés par les personnes dont on a la charge.

a) l'article 1382 : la réparation du fait personnel

Toute personne victime a le droit d'obtenir du responsable, réparation du préjudice qu'elle a subi. Tel est le sens de l'article 1382 qui dispose : « Tout fait quelconque de l'homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé de le réparer »98(*). Toute personne qui commet une infraction à l'égard du personnel humanitaire se doit de réparer. Le juge qui condamne le responsable à réparer ne le frappe pas d'une peine mais l'oblige à réparer le dommage. Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime aux dépens du responsable dans la situation où elle se serrait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu. La réparation octroyée au personnel humanitaire ne peut cependant pas le replacer dans sa position initiale, à moins qu'elle n'émane d'une atteinte portée sur un bien matériel. Lorsque le préjudice causé au personnel humanitaire est physique, la réparation dans ce cas servira juste à compenser le préjudice.

b) l'article 1384 : la responsabilité du commettant du fait de son préposé

L'Etat est civilement responsable des exactions commises par les membres de ses troupes armées. L'article 1384 du code civil dispose que l'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais aussi de celui qui est causé par le fait des personnes dont on répond, ou des choses que l'on a sous sa garde. Il s'agit là de la responsabilité du commettant du fait de son préposé. Alors l'Etat se doit de réparer tout dommage causé à un personnel humanitaire par un membre de son armé. Ceci se justifie par le fait que, lorsqu'une armée est sur un champ de bataille, elle représente une Nation. Alors toutes les exactions qu'elle commettra seront imputables à leur Etat. Il faut aussi noter que la responsabilité civile de l'Etat peut aussi être engagée dans le cadre des actions d'une milice. C'est l'hypothèse où, Il a été constaté que cet Etat a soutenu l'action de la milice. Alors, l'Etat sera tenu de réparer tout dommage causé à un humanitaire par cette milice.

2- Le Statut de la Cour pénale internationale et le Règlement de Procédure et de Preuve

Le Statut de la Cour Pénale Internationale prévoit la réparation aux victimes des infractions qui sont de sa compétence. Son règlement donne une ouverture de la notion de victime et la décrit comme étant : « une personne physique qui a subi un préjudice du fait de la commission d'un crime relevant de la compétence de la Cour99(*) Il confère aux victimes la possibilité de participer aux procédures100(*) et d'obtenir réparation, tout en établissant les principes applicables. Il s'agit selon les cas d'une indemnisation, de la restitution, ou de la réhabilitation101(*). Le statut de la Cour dispose en effet que, la Cour pourra rendre contre une personne condamnée une ordonnance indiquant la réparation qu'il convient d'accorder aux victimes102(*) ; cette réparation s'octroie en tenant compte du préjudice103(*).

a) Le principe du restitutio in intégrum

Fondamentalement, la restitution en droit international avait pour but de remettre la chose en l'état où elle était avant le dommage. La restitution de ce dont la victime avait été indûment privée. Il pouvait s'agir de la remise en liberté, de la réinsertion de la victime dans à son emploi ou encore la garantie de non répétition.

Cependant, dans le cadre d'une atteinte portée sur un personnel humanitaire, il serait difficile de pouvoir appliquer ce principe de restitutio in intégrum. En ce sens que, lorsque le dommage est physique on ne peut pas ramener l'humanitaire dans son état initial. C'est pourquoi, la réparation se fait au travers de l'allocation des dommages et intérêt en compensation du préjudice. Vue que le dommage subi par la victime (mort ou atteinte à l'intégrité physique) ne peut être restitué. Mais par contre pour le cas de l'enlèvement d'un personnel humanitaire comme c'est très souvent le cas, la restitution peut consister pour l'auteur de l'infraction à libérer la victime. Mais de manière générale l'application du principe restitutio in intégrum demeure complexe en ce qui concerne les infractions commises sur le personnel humanitaire. C'est la raison pour laquelle la réparation va consister en l'octroi d'une compensation pécuniaire et dans certain cas à un traitement en vue de rétablir l'équilibre psychique de la victime.

b) La réhabilitation psychologique ou traitement post traumatique

Les guerres traditionnelles entre Etats ont cédé la place à une augmentation des conflits régionaux et à la diversification des types de belligérants, rendant par ce fait les conditions de travail difficiles pour les travailleurs humanitaires. Sur le terrain, ils sont de plus en plus la cible de différents types d'agression : actes terroristes, viols, prises d'otages, voire mort de compagnons de travail104(*). Ils sont soumis par là même à un stress psychique105(*) et physique auxquels s'ajoutent des conditions de vie pénibles, allant parfois jusqu'à l'insupportable et à des situations traumatiques aux conséquences souvent irréversibles. Alors, la charge, individuelle et collective, des émotions et des réactions de stress, qui pèse sur leurs épaules, est lourde. Pour protéger leur santé, ils doivent être pris en charge aux fins d'une réhabilitation psychologique. Elle consiste au traitement des blessures psychiques dont souffrent les intervenants humanitaire suite aux différentes épreuves auxquelles ils font face durant les missions d'assistance humanitaire. C'est une reconnaissance de la réalité d'une blessure psychique supportée dans la douleur, l'impuissance et l'horreur. Généralement, c'est l'oeuvre de l'employeur106(*), l'organisation ou la société, non directement touchés par l'événement ou des proches de la victime. Les personnes à charge de ce traitement doivent écouter attentivement la victime, passer du temps avec elle, lui offrir une assistance ainsi qu'une oreille attentive107(*).

3- La déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et d'abus de pouvoir de 1985

Elle a été adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies en 1985. Elle recommande aux Etats de prendre des mesures appropriées sur le plan national, sous régional et international afin de soulager la détresse des victimes. Elle leur demande explicitement d'octroyer réparation aux victimes même pour les cas où la faute ne leur est pas imputable. Cette déclaration recommande également aux Etats de mettre sur pied des fonds nationaux d'indemnisation des victimes afin de prévoir les cas où le pays dont la victime est ressortissante ne peut pas le faire. Il convient de noter que cette déclaration est une annexe à la Résolution 40/34 adoptée par l'Assemblée Générale en date du 29 novembre 1985.

4- Les principes fondamentaux et les directives sur le droit au recours et à réparation des victimes du droit international humanitaire adoptés par la Commission des droits de l'Homme en avril 2000

Ces principes concernent le droit à un recours et à la réparation des victimes de violation des droits de l'homme et du droit humanitaire. Ils imposent aux Etats une adéquation de la législation interne aux normes internationales ; les obligent à assurer réparation aux victimes pour les violations du droit international humanitaire causées par eux (les Etats). Aider les victimes à obtenir indemnisation des auteurs d'infractions graves au droit humanitaire. Ces principes les convient également à assurer la réparation des violations dont ils ne sont pas à l'origine ; ceci lorsque l'auteur de l'infraction ne peut pas indemniser ou alors refuse de le faire.

B- Les réparations émanant d'une convention passée par le personnel humanitaire

Il s'agit ici des autres types d'indemnisation dont peut bénéficier le personnel humanitaire de part son statut de travailleur ou suite à son contrat d'assurance.

1- L'indemnisation suite à la souscription d'un contrat d'assurance

Le contrat d'assurance vie est un lien juridique qui oblige l'assureur à garantir le risque et le souscripteur à payer la prime108(*). Il permet à celui qui le souscrit de donner aux siens, dans une certaine mesure la sécurité que son décès risquerait de compromettre. C'est un contrat consensuel, il est réputé conclu dès l'accord verbal des parties. Un écrit n'est exigé qu'à titre de preuve. Il est aléatoire en ce sens que seul le risque incertain peut être assuré. Alors, le personnel, étant donné le contexte dangereux dans lequel ils opèrent, souscrit généralement auprès des compagnies un contrat d'assurance sur leur vie. En cas de sinistre corporel ou de décès, ces compagnies se chargent d'indemniser soit les ayants droit de l'assuré ou alors le concerné au cas où le dommage n'a pas porté atteinte à sa vie.

Mail il faut souligné que cette couverture d'assurance n'est pas toujours automatique et connaît quelque fois certains problèmes. L'illustration est celle d'un membre du personnel d'une ONG américaine qui avait été grièvement blessé en Somalie par une mine occasionnant par là la perte de sa jambe. Mais, en dépit du fait que cette ONG était assurée contre les risques de guerre, la compagnie d'assurance a nié sa responsabilité sous prétexte que ce dernier ayant subi cet accident en plein travail devait se faire indemniser par la compagnie d'assurance américaine qui rembourse les frais occasionnés par l'accident de travail. Face à ce type de situation, l'agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID) a mis sur pied un programme spécial d'indemnisation en vue de combler l'écart des couvertures d'assurances109(*).

2-L'indemnisation due par l'organisme employeur conformément au droit du travail

De manière générale, tout travailleur dispose en vertu du droit de travail d'un contrat qui le lie à son institution ou son organisme de fonction. Ce contrat de travail est un élément essentiel dans la vie professionnelle de l'employé en ce qu'il crée un lien juridique entre l'employé et son employeur. Le législateur camerounais le définit dans l'article 23 du code du travail comme suit : « le contrat de travail est une convention par laquelle un travailleur s'engage à mettre son activité professionnelle sous l'autorité et la direction d'un employeur en contrepartie d'une rémunération »110(*). Ce contrat de travail confère à chacune des parties au contrat des droits ainsi que des obligations de l'un envers l'autre.

En vertu des règles régissant le droit du travail, est considéré comme accident de travail et obligeant l'employeur à verser une indemnisation, tout accident survenu à un travailleur  entre autres par le fait ou non à l'occasion de son travail111(*). Sur la base de cette disposition fondamentale du droit du travail, le personnel humanitaire, qui dans l'exercice de ses fonctions subit des dommages corporels pourra légitimement bénéficier d'une indemnisation calculée selon que son contrat de travail soit à durée déterminée ou indéterminé, en fonction aussi de son indice d'ancienneté. Dans tous les cas étant donné que l'accident ou alors le décès de ce personnel est survenu alors qu'il était en pleine mission d'assistance humanitaire, l'ONG ou alors l'institution spécialisée qui l'emploie se chargera de l'indemniser à juste titre.

3- L'indemnisation en cas d'accord passé entre l'organisme employeur et une institution

en cas d'accord passé entre un organisme humanitaire et une autre institution ou un autre organisme, il est souvent question de savoir qui se chargera de l'indemnisation en cas de dommage. La définition que nous avons donnée précédemment du contrat de travail met en exergue trois éléments. Il s'agit de la prestation, du salaire et du lien de subordination. Ce dernier élément constitue la base même du contrat de travail. Il traduit le fait que le salarié effectue son travail sous la direction de l'employeur dont les ordres doivent être respectés, et crée une dépendance juridique entre ces derniers112(*). En nous inspirant de cette règle juridique, l'on pourra dire que, lorsque certains personnels de cette ONG vont travailler aux cotés des Nations Unies ou d'une institution spécialisée de cet organe, le lien juridique de subordination demeure avec son personnel. Il en est de même pour le contrat de travail car le fait qu'il passe un accord avec une autre institution ne rompt pas les contrats qu'ils avaient conclus antérieurement avec leur organisation. Alors logiquement, en cas de problème le personnel de cette ONG bien que travaillant aux cotés d'une autre institution se retournera légitimement contre son employeur initial car c'est avec elle qu'il a signé le contrat de travail.

Mais il est tout de même à relever que, dans certains cas, l'institution avec qui l'ONG a passé l'accord peut se charger en cas de problème d'indemniser le personnel. Mais ils doivent au préalable l'avoir explicitement prévu dans les clauses de l'accord. C'est ce qui ressort de l'article 7 de l'accord cadre passé entre le Nicaragua et la Suisse113(*). En effet, en application de cet accord, les deux parties engagent respectivement leurs responsabilités pour des prétentions liées directement à des dommages résultant directement des actes commis au cours des réalisations. Le Nicaragua exonère le personnel suisse de toute responsabilité envers lui et vice versa.

En somme, nous dirons en guise de conclusion à ce chapitre qu'en plus d'être protégé, par les textes, le personnel humanitaire dispose d'un arsenal d'institutions en même de réprimer les atteintes portées à leur égard ou sur leurs biens. Les moyens sont mis à leurs dispositions tant à l'échelon national qu'international pour assurer le respect de leurs droits. Au niveau national, le juge pénal peut être saisi de l'affaire au titre de trois grands principes du droit pénal. A savoir en vertu de la règle de la territorialité, de la personnalité passive ou active et enfin de la loi sur la compétence universelle. Sur le plan international, la Cour Pénale Internationale, au moyen de ses modalités procédurales élaborées dans le texte de règlement de procédure et de preuve fait de la répression des infractions à l'égard du personnel humanitaire une réalité. Cette répression qu'elle soit sur le plan national ou international peut déboucher à l'octroie des dommages intérêts à la victime. Ces dommages-intérêts sont prévus par les textes et peuvent être octroyés devant le juge local ou international. Il existe également d'autres mesures de réparation qui sans être prévues par les textes permettent tout de même de réconforter l'humanitaire victime

Il apparaît clairement que la protection juridique du personnel humanitaire est effective. En amont, elle est fortement consacrée par des textes et traités internationaux. En aval, par des institutions qui assurent la sanction des éventuels délinquants en cas d'atteintes. Mais malgré cette forte consécration juridique, il se trouve malheureusement que, ces derniers dans l'exercice de leurs missions font toujours l'objet des attaques ciblées. Ce qui sur un plan purement pratique remet un peu en question l'efficacité de cette protection.

* 90 Nous ne mentionnerons ici que les actes qui sont commis sur le personnel humanitaire constituent des fautes. Nous ne mentionnerons pas toutes les infractions telles qu'énoncées par le droit humanitaire mais juste celles qui peuvent concerner les humanitaires.

* 91H. MAZEAUD, J. MAZEAUD, F. MAZEAUD, CHABAS. Leçons de droit civil, tome II, Montchrestien Paris, 1991,1355p.

* 92 H.MAZEAUD op. Cit., p. 332

* 93 S. GUILLIEN et J.VINCENT, Lexique des termes juridiques, 13ème édition, Dalloz, 1999.

* 94 cf. article 4(1) du projet d la commission du droit international humanitaire.

* 95 Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, arrêt du 27 juin 1986, C.I.J. Recueil 1986, par. 220 et 255.

* 96 M. DELMAS MARTY, Le flou du droit, PUF, Paris, 1986, p.50.

* 97 F.BOULAN, « Le double visage de l'action civile exercée devant les juridictions répressives » in, JCP, 1973.

* 98 Article 1382 du code civil camerounais.

* 99 Règle 85 du Règlement de procédure et de preuve

* 100 Article 19(3) du statut de la CPI

* 101 Règle 94 (1) du Règlement de procédure et de preuve

* 102 Article 75 paragraphe 2 du statut de la CPI

* 103 Règle 97(1) du Règlement de procédure et de preuve

* 104 B. BIERENS de HAAN, « Le débriefing émotionnel des intervenants humanitaires: l'expérience du CICR », in site Internet www.cicr.org (consulté le 18 /10/05 à 14h)

* 105 Centre de psychologie humanitaire, « Nous aidons ceux qui aident », in site Internet www.humanitarian-psy.org (consulté le 18/10/05)

* 106 CICR, Engagement humanitaire et conflit armé: le facteur stress, CICR, Genève, 1994, 45p.

* 107 ONU, La Sécurité hors siège, Nations Unies, New York, 1998, p.68-60.

* 108 H.MAZEAUD, C.MAZEAUD, F. CHABAS op. Cit.,p.236.

* 109 John BORTON, « Les ONG américaines cherchent à améliorer leur couverture d'assurance contre les risques de guerre », in Réseau Aide et d'Urgence et Réhabilitation n° 1, mars 2004.

* 110 P. BOUBOU, le code du travail, texte intégral, références jurisprudentielles et doctrinales, Edition AVENIR, septembre 2002, Douala, p.17

* 111 Centre D'Etude et de Formation pour le Développement, le droit par les textes : code du travail tchadien, novembre 2000, p.45.

* 112 A. ZANOUVY, cours de droit social, 2eme année DEUSS, UCAC, 2002.

* 113 Accord cadre entre le Conseil fédéral Suisse et le Gouvernement de la République du Nicaragua conclu et entré en vigueur le 12 avril 1994 in www.cicr.org ( consulté le 21 novembre 2005)

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