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L'Initiative PPTE et la lutte contre la pauvreté au Cameroun: une analyse sociologique

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par Sosthène Hervé MOUAFO NGATOM
Université de Yaoundé 1,Cameroun - DEA 2007
  

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II.2. La lutte contre la pauvreté : une politique au coeur de la problématique du développement

La politique de lutte contre la pauvreté constitue de nos jours un centre d'intérêts et de débats sur le développement des pays du Tiers Monde. Qu'est-ce qui explique l'émergence de cette politique et quels en sont les atouts ?

II.2.1. La lutte contre la pauvreté : les circonstances de l'émergence de la politique

Plusieurs raisons expliquent l'émergence de la politique de lutte contre la pauvreté dans le monde en développement. Jean-Pierre Cling et al. (Dir) en retiennent principalement trois qui ont conduit les Institutions de Bretton Woods (IBW) à effectuer un saut qualitatif dans ce domaine en lançant des stratégies de lutte contre la pauvreté. D'après eux, la progression de la pauvreté dans le monde, l'échec des Programmes d'ajustement structurel et la crise de légitimité des Institutions de Bretton Woods, ont favorisé l'érection de la politique de lutte contre la pauvreté.

La montée en puissance de la pauvreté est la première raison favorable à l'émergence de la politique de lutte contre la pauvreté. En effet, la progression de la pauvreté dans de nombreuses parties du monde a conduit à un recentrage des politiques de développement sur la question de la pauvreté. Bien que la prise de conscience du problème de la pauvreté dans les pays en développement soit l'aboutissement d'un long processus de maturation initié à la fin des années quatre-vingt par les Nations Unies, notamment l'UNICEF et le PNUD qui ont joué le rôle de précurseurs dans ce domaine, et malgré le retard accusé par les Institutions de Bretton Woods dans l'intégration de cette dimension dans leurs politiques, la pauvreté est une réalité qui prend de l'ampleur dans le monde. Quelles que soient les incertitudes sur les chiffres, la pauvreté est manifeste dans de nombreuses parties du monde au cours de ces dernières années. Son accroissement est particulièrement sensible en Afrique subsaharienne et dans les pays en transition d'Europe et d'Asie Centrale. Selon les statistiques de la Banque Mondiale, près de la moitié de la population mondiale vit avec moins de 2 dollars par jour et un cinquième avec moins de 1 dollar par jour, montant considéré habituellement comme le seuil de pauvreté absolue. Dans le cas de l'Afrique subsaharienne, 47% de la population vit en dessous de ce dernier seuil.

Certains pays semblent enfermés dans une véritable « trappe à pauvreté »comme en témoigne le doublement du nombre de pays les moins avancés (PMA) en trente ans. En 2001, on comptait 49 PMA alors qu'ils étaient 25 lors de la création de cette catégorie de pays.Compte tenu des tendances démographiques, la population de ces pays va tripler d'ici 2050 selon les projections des Nations Unies, passant de 660 millions à 1,8 milliards, pour représenter près de 20% de la population mondiale (contre 11% actuellement). Il est donc impératif de réagir pour éviter que des populations entières meurent littéralement de faim.

L'échec des Programmes d'ajustement structurel et la remise en cause du « Consensus de Washington » sont la deuxième raison qui a contraint les Institutions de Bretton Woods à changer de politiques.

Fondés sur le « Consensus de Washington », les programmes d'ajustement structurel étaient basés sur le triptyque stabilisation macroéconomique - libéralisme externe - libéralisme interne. L'échec de ces Programmes se lit dans les chiffres sus-évoqués. Après plus d'une vingtaine d'années d'ajustement structurel sous l'égide des Institutions de Bretton Woods, aucun succès durable n'a pu être exhibé. Même le « miracle asiatique » montré en exemple pendant des années aux Pays en développement est remis en cause depuis la crise de 1997. Il en est de même des programmes appliqués avec l'appui des IBW dans les autres grands pays émergents (Argentine, Brésil, Mexique, Turquie, etc.) et en transition (Russie), qui ont également connu des crises graves dont certains ne sont pas encore sortis. Quant aux bons élèves (front-runners) africains qui se sont succédés au panthéon des « success stories », aucun n'a réussi à tenir ses promesses dans la durée.

L'échec du « Consensus de Washington », dans la plupart des pays, est désormais reconnu par la Banque mondiale elle même comme l'atteste la critique de Stiglitz, ancien économiste en chef de cette Institution et prix Nobel d'économie en 2001 :

« Le FMI est supposé assurer la stabilité financière internationale. Quant à l'OMC, elle doit faciliter le commerce international. Malheureusement, la façon dont ces deux dernières Institutions cherchent à remplir leur mandat a probablement contribué à accroître la pauvreté (...). Le mélange des politiques de libéralisation et des politiques économiques restrictives imposées par le FMI a créé un cocktail aux effets dramatiques pour les pays en développement ».

En plus de la remise en question des stratégies passées, la crise de la dette multilatérale constitue l'autre conséquence fâcheuse de l'échec des PAS sur les pays en développement et sur les IBW. Cette crise résulte directement de vingt ans de prêts à moratoire sans croissance économique. Les Institutions financières, et tout particulièrement la Banque Mondiale, se retrouvent ainsi en première ligne d'une situation de surendettement des pays pauvres, où la composante multilatérale est progressivement devenue prépondérante.

Le troisième facteur de l'émergence de la politique de la lutte contre la pauvreté, qui résulte de deux autres ci-dessus est la crise de légitimité des IBW. Face à l'aggravation de la pauvreté dans le monde, à l'échec général des politiques promues par les IBW et à la crise de la dette qui en résulte, les critiques se sont multipliées à leur égard, leur réclamant un changement d'orientation. Ce changement constitue un moyen à un double niveau.

Il est d'abord un moyen de répondre à la « fatigue de l'aide » dans les pays développés, où les opinions publiques s'interrogent sur l'utilité de continuer à consacrer des efforts financiers aussi conséquents à l'aide au développement. Ainsi, pour lutter contre ce désenchantement, le thème de la pauvreté est manifestement porteur, ne serait-ce que dans une optique de solidarité humanitaire.

C'est également un moyen de répondre aux critiques de la société civile et des mouvements contestataires. C'est le cas de la décision du lancement du DSRP qui s'inscrit dans un contexte de critique de plus en plus virulente de l'action des Organisations internationales, qui a poussé les pays du G7 à lancer l'Initiative PPTE renforcée lors de leur sommet de Cologne en 1999, et qui a culminé ensuite lors de la conférence de Seattle en novembre 1999 et du sommet du G7 de Gênes en juin 2001.

Il apparaît que l'irruption de la politique de lutte contre la pauvreté sur le champ de la politique de développement tient à la progression de la pauvreté dans le monde, à l'échec des Programmes d'ajustement structurel ainsi que du « consensus de Washington » qui le fondait, et à la crise de légitimité des IBW. Quels peuvent être alors les atouts de l'émergence et de la consécration de cette politique ?

II.2.2. La lutte contre la pauvreté : les atouts supposés de la politique

Du fait de l'échec des stratégies passées, les principes de la politique de lutte contre la pauvreté l'ont créditée des qualités favorables à la réduction de la pauvreté. Cette politique repose sur le principe de la participation, lequel suppose la prise en compte des valeurs des populations bénéficiaires dans les initiatives de développement d'une part, et leur implication dans la mise en oeuvre des ces initiatives, d'autre part.

La prise en compte des valeurs des populations bénéficiaires dans les initiatives de développement est une modalité essentielle du principe de la participation. En effet, la démarche promue par la politique de lutte contre la pauvreté intègre la prise en compte des besoins exprimés par les bénéficiaires dans les initiatives de développement. Cette démarche consiste à partir non des modèles et théories de développement importés mais des pratiques quotidiennes concrètes des populations bénéficiaires. Elle exige la création au sein des communautés d'accueil, des conditions pour une appropriation des initiatives de développement qui leur sont destinées.

La démarche de la politique de lutte contre la pauvreté s'affranchit de la tutelle exclusive des bureaucrates et investit le terrain. La participation en matière de lutte contre la pauvreté vise à donner la parole aux populations bénéficiaires, car celles-ci connaissent mieux que quiconque leurs problèmes, leurs besoins. A travers l'approche participative, le peuple devient un véritable agent ou acteur de son développement par une définition de ses besoins prioritaires et des actions appropriées pour les satisfaire. Le passage d'une conception du développement privilégiant presque exclusivement les infrastructures matérielles à une autre qui réserverait une place aux structures sociales - de même que l'abandon progressif des modèles occidentaux ethnocentriques de développement au profit du respect des cultures locales - fait de la politique de lutte contre la pauvreté une politique de développement orientée vers des projets de développement tournés vers les acteurs locaux.

La participation des différents acteurs de la société est également une modalité indispensable du principe de la participation. Elle ouvre de nouvelles perspectives quant à la façon dont les initiatives de développement et les affaires nationales en général devront être conduites. En favorisant le respect du droit à l'information et à l'expression, la participation atteint un premier objectif de la politique de lutte contre la pauvreté, celui de s'attaquer à une des dimensions de la pauvreté, celle de l'exclusion et de la marginalisation.

La participation est supposée remédier aux dysfonctionnements de la démocratie dans les pays pauvres. Elle devrait ainsi renforcer les capacités et le pouvoir des corps intermédiaires (médias, syndicats, associations, etc.) dans l'élaboration, le suivi, le contrôle, l'évaluation et la réorientation des politiques. L'information, suivant cette optique, rend explicite les choix publics et accroît la transparence dans la gestion des affaires de l'Etat, tout en conférant aux différents acteurs de la société la possibilité d'exercer des pressions voire de sanctionner ce dernier en cas de défaillance. En bref, l'enjeu de la participation est d'assurer le principe de responsabilité démocratique (accountability), rendant l'Etat responsable de ses actions devant les citoyens.

En somme, le processus participatif, pour reprendre Jean-Pierre Cling et al, devrait aider à l'identification des alternatives aux options antérieures qui soient viables et cohérentes en permettant une plus grande prise en compte des spécificités nationales, une identification des véritables besoins de la population et une meilleure compréhension des logiques d'acteurs. Tels sont les atouts supposés de la politique de lutte contre la pauvreté. Que dire de l'émergence de cette politique au Cameroun ?

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore