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La conception d'un projet d'établissement: Entre politique, ingénierie et pragmatisme

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par Simon MAMORY
Université de Nantes - Master Pro Direction d'Etablissement ou Organisme de Formation (DEOF) 2002
  

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CONTEXTUALISATION DE LA RECHERCHE

PREMIÈRE PARTIE ~ CONTEXTUALISATION DE LA RECHERCHE

Ignorer le monde, ignorer l'humanité, est une carence mentale fréquente chez nos intellectuels les plus raffinés.

Hadj Garm'Orin

Mais pourquoi ne sommes-nous pas tous frères avec des frères ?

FiodorMikhaïlovitch Dostoïevski

Brève notion d'autobiographie référencée4

Dans cette quête du chemin qui mène à l'élargissement de la compréhension de l'une des multiples facettes du métier de la direction, "peut-on manier les modèles forgés par les sciences exactes pour rendre intelligibles les processus sociaux ?" (R. Chartier, 1983)5 Cette question, que nous prenons à notre compte, semble s'imposer d'elle-même. Sembler en effet, car autrement ce serait présumer qu'en recherche, quelque chose puisse aller de soi. En réalité, il n'en est rien. Certes, il ne peut y avoir de recherche sans des contraintes de diverses natures mais, pour y faire face, le choix impose aussi sa présence tout au long du parcours. Du choix du sujet jusqu'à l'objectif en passant par la ou les méthodologies adoptées. C'est pourquoi, explorer scientifiquement c'est problématiser car "quoi qu'on en dise, dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. C'est précisément ce sens du problème qui donne la

marque du véritable esprit scientifique..." G. Bachelard (1938)6.

4 L'autobiographie référencée est composée des dimensions autoréférentielles et hétéroréférentielles. Nous suggérons une synonymie entre autobiographie référencée et Enracinement susceptibles d'être utilisés indifféremment dans cette étude. Avant d'explorer le contexte socioprofessionnel et épistémologique en effet, clarifier la signification du terme autobiographie référencée, que nous avons découvert et tant entendu (surtout le volet autoréférentiel) durant la formation, constituera notre incontournable pose des premières pierres.

5 Roger Chartier (1983), Avant propos, in Norbert Elias, Engagement et distanciation, Coll. Pocket, Fayard, p. II

6 Gaston Bachelard (1938, 1982), La formation de l'esprit scientifique, p.14 in J.-L. Le Moigne, (1999), La modélisation

des systèmes complexes, Paris, Dunod, p. 23.

Avant même d'entamer telle ou telle partie "technique" propre à la recherche

en sciences sociales ou la gestion en général, prenons comme prédicat l'idée selon laquelle s'appuyer sur des méthodes rigoureuses en vue de plus d'objectivité caractérise toute démarche

qui se veut scientifique. Néanmoins, quel que soit le sujet, les savoirs produits par les sciences en général sont liés aux intérêts et engagements de ceux qui les produisent. G. Bateson, comme H.

A. Simon, a nettement précisé qu'en réalité, il ne peut qu'être illusoire de prétendre décrire une réalité objective indépendamment de l'observateur. Ce dernier, inscrit dans un projet (de vie personnelle, de recherche, de carrière), positionne son regard depuis un angle de vue, dans une finalité donnée et par rapport à certains paramètres contextuels relativement subjectifs ou contraignants. Ce qui signifie que, nos intentions participent de manière prépondérante à la construction de notre vision de la réalité. D'autant plus que la réalité ne peut qu'être l'interprétation, par nos multiples filtres, de l'insaisissable réel. Par conséquent, "c'est seulement

en objectivant sa propre position [d'abord] que le chercheur peut instituer une distance par rapport aux dépendances qui le contraignent sans qu'il le sache, et, pratiquer le "désenchantement émotionnel" qui sépare le savoir "scientifique" des représentations immédiates, des préjugés spontanés" (R. Chartier, 1983)7. Une telle idée se situe aux antipodes

de celle de croyance populaire ou de certains scientifiques soutenant l'existence d'une objectivité absolue épurée de toute part subjective, auréolée d'une illusoire neutralité absolue. Nous soutenons pourtant cette position de R. Chartier puisque, non seulement, il est possible de la démontrer, de l'illustrer mais aussi de la critiquer voire la dépasser peut-être dans quelques siècles lorsque des futures générations de chercheurs auront trouvé un autre paradigme. Car, en effet, c'est cela aussi le savoir humain : toujours provisoire, sous forme de petites strates qui s'accumulent au cours de l'histoire.

Chaque être humain, dans toutes ses dimensions, est la résultante vivante des multiples évènements (répulsifs, douloureux, banals, matériels, idéologiques, fastes, extraordinaires, biologiques, sensuels, etc.) qui ont traversé sa vie et avec lesquels il se construit

par interactions, ou dont pour certains il est le générateur. Alors, "le réseau des activités humaines acquiert ainsi une plus grande complexité, une plus grande extension et un maillage plus serré" (N. Elias, 1983)8 dont l'intelligibilité plus fine suppose une approche globale plutôt qu'un évitement ou une simplification stérilisante. Se projeter exige une relecture de l'essentiel

du passé pour en dégager le sens parce qu'ainsi le présent se comprend mieux et le futur se

conçoit plus aisément sur une base plus solide.

7 Roger Chartier, op. cit. p. IV

8 Norbert Elias (1983), Engagement et distanciation, Paris, Fayard

Il est donc indispensable de restituer l'essentiel de ces évènements dans leur contexte géographique, sociologique et axiologique pour mieux comprendre les fondements de la position qu'occupe le praticien-chercheur par rapport à son sujet/objet d'étude. Il en va de même pour la définition de certaines notions qu'il a pu confronter à son vécu, à des réalités plus ou moins subjectives, voire intimement enfouies pour qu'il puisse en être conscient. Ainsi, telle ou telle perspective adoptée par le chercheur parviendra mieux à faire sens pour les autres comme pour lui-même grâce à ce travail d'élucidation et de réappropriation, éclairé par des jalons théoriques. Aussi pour y parvenir, "le point capital est que chaque sujet humain peut se considérer à la fois comme sujet et comme objet, et de même objectiver autrui tout en le reconnaissant comme sujet" (E. Morin, 2001)9. Toutefois, avant d'objectiver autrui, il convient

de s'objectiver soi-même. Objectiver seulement ne suffit pas. Objectiver tout en subjectivant revient à inscrire l'acteur dans un projet. Appelons alors "projectivation" cette concomitance d'objectivation avec la subjectivation puisque nous nous inscrivons délibérément dans la posture

de modélisation-interprétation systémique qui se veut projective, contrairement à la modélisation analytique cartésienne qui se contente d'être objective. Ce qui nous permet de reformuler la précédente proposition, pour être plus complet, en disant qu'avant de "projectiver"10 autrui, il convient de se "projectiver" soi-même puisque l'acteur est relié à son action. Dans cette action de "projectivation", il y a, pour être logique, une part de "retroprojection"11 (à prendre au sens étymologique) du regard. Définissons alors la "projectivation" comme l'ensemble des mouvements de notre regard sur un sujet/objet, englobant la "retroprojection" avec la projection.

Le schéma qui suit (cf. fig.1, p.12) se propose comme illustration, en guise de complément à cette explicitation sur le positionnement du chercheur par rapport à son sujet/objet d'étude. Une telle posture est aussi appropriée pour toute personne exerçant des responsabilités

dans une institution de prestation de services à caractère social ou éducatif.

9 Edgar Morin (2001), La méthode 5. L'humanité de l'humanité, Coll. Points, Seuil, p. 84

10 Projeter, même en tenant compte des éléments du passé, suppose une perspective qui s'étale vers l'avenir, qui se conjugue au futur avec la grande part de l'hypothétique que cela recouvre. Or nous voulons exprimer à travers ce néologisme "projectiver" l'inscription d'un acteur objectivé et subjectivé à la fois, dans un projet qui peut être totalement achevé, conjugué à l'imparfait avec un plus grande par d'interprétation et modélisation a posteriori (postjectivation) possible. Pour autant, nous ne perdons pas de vues que tout peut s'inscrire en un temps dans un continuum "passé-futur" de l'acteur de sa vie.

11 En tant qu'observateur présent, nous proposons d'appeler retroprojection tout regard sur une vie de projet aboutie dans le passé, contrairement à la projection qui suppose un regard devant, vers l'avenir. Ainsi, une Projectivation peut inclure une Retroprojection et une Projection.

Chercheur

Projectivation

=

(Subjectivation + Objectivation)

Retroprojection

(Rétrospective)

Projection

(Prospective)

Retro-projet Projet

Acteur

(Sujet / Objet)

Passé Présent

Futur

Figure 1 : La "Projectivation"

L'autre motif fondamental de la démarche réflexive autoréférentielle, incluant tout ce que nous venons de voir, se résume dans la prise de conscience du fait que l'heuristique même de cette recherche-action en interaction avec l'action-recherche s'enracine dans le "terreau expérientiel" (C. Gérard, 1999)12. De là découle un nouveau système d'actions résultant de la dialogie engagement-dégagement. Ce système évolue dans un nouveau contexte pour opérer une projection véhiculée par et véhiculant l'hypothèse de C. Gérard (2006) selon laquelle l'autonomie

de "l'élève" directeur procède de l'action de se former en actionnant deux méta processus :

enracinement et fondement qui s'autoréfléchissent dans leur rapport dialogique.

Sans contester la nécessité d'une légitimation d'un ensemble de corpus scientifique dont des chercheurs se sont fait la spécialité, tel n'est pas exactement notre objectif

12 Christian Gérard (1999), Au bonheur des maths. De la résolution à la construction des problèmes, Paris, L'Harmattan.

ici puisque nous visons simplement à mieux partager notre travail dans sa globalité ; mieux faire comprendre (voire, com-prendre) les multiples nuances d'idées difficiles à transmettre, dissimulées derrière les recoins de nos perfectibles exposés. En résumé, cette partie dite autoréférentielle s'inscrit dans une logique de la démarche compréhensive caractérisée par le binôme projet et son contexte, étant attendu que les deux sont reliés par le chercheur. Comprendre le contexte, les origines, les fondements et autres enracinements d'un projet de recherche qui est en même temps un projet de professionnalisation, éclaire certainement in fine

ses finalités.

Ainsi vient d'être explicitée, en quelques mots, la pertinence méthodologique

de l'entrée en matière par une autobiographie référencée afin d'élucider les positions, les motivations et les valeurs qui portent et supportent ce travail. Bref, les contextes axiologiques et socioprofessionnels qui permettent d'identifier les enracinements - d'aucuns disent l'ancrage (c'est plus dynamique)13 - de nos préoccupations. Mettons alors en pratique la préconisation de

P. Ricoeur (1990)14 en commençant par nous objectiver pour mieux objectiver. Nous veillerons,

par la suite, à garder cette idée en filigrane tout au long de nos réflexions.

13 Toutefois, tout cela n'est que métaphore. Chacun use de l'image qui convient mieux à sa sensibilité.

14 Paul Ricoeur (1990), Soi-même comme un autre, Paris, Coll. Points, Seuil.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle