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Les enjeux environnementaux, économiques, sociaux et politiques de l'accès à l'eau dans l'agglomération de Lima et plus spécialement dans les quartiers dits « asentamientos humanos », quel avenir pour une ville assoifée ?

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par Claire Gaillardou
UFR de Géographie Bordeaux III - DEA de géographie, mention développement, sociétés et cultures 2007
  

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I-3 Croissance démographique et évolution de la demande face au déficit des ressources

L'agglomération de Lima est un cas particulier au Pérou. Elle en est la plus grande ville et dépasse de dix fois Arequipa, deuxième ville du pays. Cette hypertrophie est due principalement à une évolution démographique et urbaine spontanée, déséquilibrée et surprenante que les pouvoirs publics n'ont pas pu contrôler. La ville s'est donc développée de manière anarchique sans aucune planification, menaçant la qualité de vie de ses habitants.

En 1993, Lima contait 6 221 000 habitants. Aujourd'hui, avec plus de 7 200 000 habitants, soit près d'un tiers de la population nationale (29% de la population totale du Pérou) elle est la proue des politiques démographiques péruviennes.

- Historique et profil de la croissance ; un site marqué par son passé et sa vocation ortuaire

La ville s'est développée près des contreforts des Andes, sur les anciens cônes alluviaux du Rímac, petit cours d'eau torrentueux qui se précipite des montagnes environnantes. Récemment, la banlieue nord s'est étendue jusqu'aux cônes alluviaux d'un autre cours d'eau ayant les mêmes caractéristiques, le Chillón (Cf. Carte 2).

Photo 2, 3 ,H et 5 : Entre bidonvilles, centre-ville colonial et quartiers internationaux, une

ville aux multiples visages :

Source : Auteur.

L'agglomération a été fondée par les Espagnols en tant que port destiné principalement à servir pour l'exportation des métaux précieux du Pérou supérieur (par exemple, Cuzco et Potosí). La ville portuaire elle-même était en fait El Callao; quant à la ville coloniale (Cf. Photo 2) de Lima, elle a été

installée à une distance prudente, soit à 10 km de la côte. Lorsque le Pérou a déclaré son indépendance au début du XIXe siècle, Lima est devenue la capitale du pays.

Sa croissance s'est faite lentement jusqu'aux années 1940, lorsque la population a atteint 300 000 personnes. Depuis lors, elle s'est accélérée et, aujourd'hui, la population du Lima métropolitain est bien près d'atteindre les 8 millions d'habitants. Selon Olivera (1991), Lima abrite à présent 28 % de la population du Pérou (45 % de la population urbaine), elle compte pour 69 % de la production industrielle interne, 70 % des entreprises industrielles y sont situées, 87 % des ressources fiscales de l'État en proviennent et on y retrouve 83 % des dépôts bancaires et 98 % des investissements privés.

Carte 3 : Processus d'expansion de la ville de Lima entre 1981 et 2000 :

Source : Auteur, d'après l'Atlas Environnemental de Lima.

Cette croissance persistante est la raison d'un ensemble de déficiences, et avant tout dans le Secteur des services vitaux. La migration interne est continue, principalement en provenance des Andes. 64% de la population de Lima Métropolitaine bénéficie de l'accès à l'eau potable personnel et seulement 60%, de services hygiéniques basiques.

-Une évolution urbaine et démographique incontrôlable

La ville et le mode de vie urbain de la capitale séduisent les populations rurales, le plus souvent issues de la région andine, en situation de paupérisation. En milieu tout parait plus simple (santé, emploi, logement, éducation). Les difficiles conditions de vie des campagnes refoulent une multitude de ruraux à l'abandon vers la ville. Or, la tendance est avant tout à la constitution de mégapoles fortement dualisées entre des quartiers à fort pouvoir d'achat et des zones sous-intégrées aux infrastructures publiques urbaines. De toute part des périphéries urbaines dites « spontanées » surgissent du désert souvent selon un processus invasif désordonné, comme on peut le voir sur les photos 6 et 7.

Photo 6 et 7 : première étape d'invasion au bord de la Panaméricaine Sud, abris d'esterasi et de
tôle:

Source : Auteur.

La plupart de ces périphéries ont pu être qualifiées de « spontanées », car elles sont construites sans planification de l'espace, ni aménagements (sans viabilisation, sans infrastructures d'adduction d'eau ou d'électricité, par exemple), parfois en toute illégalité sur des terres périurbaines. Au Pérou, les résultats de ces invasions donnent lieux à des quartiers périphériques pauvres présentant des logements familiaux allant du simple abris fait d' « esteras » (mur de palme végétales tressés ,

1 Mur de palmes végétales tressés.

comme sur la photo 6), à de minuscules maisons individuelles de briques ou de parpaings, en dur, mais sans confort moderne. D'abord qualifiés de Barriadas (quartiers) puis de Pueblos Jovenes (quartiers jeunes) ces appellations ont étés abandonnées par soucis de partialité et on les appelle aujourd'hui plus simplement « Asentamientos Humanos » (littéralement : établissements humains).

Ces villes non officielles dans la ville, installées dans les espaces délaissés (notamment sur les cerros ceinturant Lima, qui sont des collines sablonneuses à forte déclivité et en perpétuelle érosion, rendant l'habitat précaire et insécuritaire), parfois en une nuit, s'opposent au centre d'affaires et les problèmes urbains y sont légions. Ils sont dus au surpeuplement, au manque d'emplois et d'équipements, à l'insalubrité, aux déficiences ou à l'inexistence des réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement. Ces défaillances se caractérisent par les problèmes sociaux, la surmortalité, le sous" emploi.

Comme le souligne Florence Tourette : « Promiscuité et grande pauvreté se mêlent à une violence endémique dans des villes géantes qui ont du mal à digérer ce trop plein de tout »1. En même temps, les conditions de vie dans ces quartiers spontanés sont supérieures à celles du milieu rural abandonné. On y retrouve une prise d'assaut de chaque zone laissée pour compte par la ville, pour s'installer et y tirer profit. Peu importe s'il s'agit d'un habitat spontané et précaire qui finit par s'inscrire dans la durée.

Marginalisés et rejetés aux périphéries de la ville, ces habitats sont aussi des marqueurs des ségrégations et des inégalités urbaines à l'échelle de l'agglomération.

-Les « asentamientos humanos » : marqueurs des inégalités

« La situation d'accès à l'eau et à l'assainissement dans le pays continue à être une barrière fondamentale à la réduction de la pauvreté et des inégalités, même si les chiffres officiels indiquent une couverture intégrale » (Agence Canadienne pour le Développement International).

Comme nous venons de le voir dans l'étude de la croissance urbaine liméenne, les « asentamientos humanos » sont des espaces de promiscuité, de grande pauvreté et qui manquent cruellement d'infrastructures pour leur développement. Cependant, nous sommes venus à la conclusion que dans ces espaces le manque d'eau potable et d'assainissement pouvait également être un facteur aggravant des inégalités sociales. En effet, comme nous en ferons la preuve plus loin, les

1 TOURETTE, Florence, 2005, Développement social urbain et politique de la ville, Pour comprendre le malaise urbain et pour mieux appréhender la politique de la ville, Paris : Gualino Editeur, 167 pages.

« asentamientos humanos » ne bénéficient pas des mêmes conditions d'accès à l'eau. Tout d'abord, d'un point de vue financier, l'eau potable est parfois payée jusqu'`à 10 fois plus cher dans les périphéries que dans les quartiers à fort pouvoir d'achat du centre comme Miraflores ou Surco. De plus, la qualité de cette eau est bien moindre puisqu'elle est tributaire bien souvent d'un réseau de camions citernes qui ne respecte guère en pratique les contrôles d'hygiène imposés pour le nettoiement des cuves.

Photo 8 et 9 : De la cuve du camion-citerne aux bidons personnels de conservation, un

manque d'hygiène flagrant.

Source : Auteur.

De même, la situation à risque des asentamientos humanos dans des lieux ne bénéficiant pas d'un système de voierie adéquate et parfois même perchés à flanc de cerros, implique un difficile acheminement de la ressource, donc un temps et des efforts précieux nécessaires qui occupent une place importante dans le quotidien des habitants. Enfin, la faible qualité de l'eau et le manque de services d'hygiènes spécifiques sont responsables de taux de maladies importants, stigmates des pays du sud comme le choléra. A la fois cause et conséquence des inégalités, la recherche en eau est donc un enjeu crucial dans la lutte contre la pauvreté lancée par l'Etat péruvien.

-La demande actuelle des consommateurs en matière d'eau potable

La consommation totale d'eau dans la zone métropolitaine en 1986 était estimée à environ 21 m3/seconde, soit 11,35 m3/seconde provenant du Rímac et 9,45 m3/seconde de sources souterraines. En 1990, la demande était passée à environ 25 m3/seconde et elle continuera à s'accroître à un rythme d'à peu près 4 % par an pour atteindre 33 m3/seconde en l'an 2000 et 45 m3/seconde en 2010.

Le réseau de distribution principal dessert quelque 60 % de la population avec l'eau tirée du Rímac ainsi que de 106 (42 %) des 253 puits productifs. En 1985, on avait estimé qu'environ 70 % de la population était légitimement raccordée au principal système municipal, 16 % y était illégalement raccordée et enfin 14 % devait s'approvisionner à des robinets publics ou à des citernes. Avec la croissance récente, il est probable que le pourcentage réel des personnes qui n'ont pas l'eau courante ou qui sont illégalement raccordées au réseau soit supérieur à 40 % (2,8 millions de personnes).

Les 147 puits qui restent sont reliés aux réseaux de distribution locaux. C'est de ces puits que les industries, entreprises commerciales et fermes qui recourant à l'irrigation reçoivent la majeure partie de leur eau. Or nous avons vu dans l'état des lieux des ressources aquifères souterraines que leur utilisation n'est actuellement plus envisageable de manière durable, et n'est donc pas une solution à terme à la recherche de la ressource hydrique.

Ainsi aujourd'hui, face à cette croissance démographique démesurée qui se heurte aux limites physiques du site, il est important d'envisager des politiques de développement, visant à anticiper les facteurs du problème et à éviter les erreurs du passé.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci