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Essai d'analyse critique du role de la philosophie à travers les ouvrages de Paulin Hountondji et de Marcien Towa

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par Issiaga DIALLO
Université de Sonfonia Conakry - Maitrise 2005
  

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INTRODUCTION

Notre propos porte sur le rôle de la philosophie. Plus précisément du rôle de celle-ci tel qu'il est conçu dans deux ouvrages respectivement de Marcien Towa et de Paulin Hountondji. Il s'agit de :

- Essai sur la problématique philosophique dans l'Afrique actuelle, éditions Clé Yaoundé, 1979 (2eme édition)

- Sur « la philosophie africaine » critique de l'ethnophilosophie, Éditions Clé Yaoundé, 1980

Ces ouvrages sont des prises de positions dans la profonde controverse sur la problématique philosophique en Afrique. Cette controverse a des origines lointaines et engage à la fois les auteurs africains et Occidentaux. Dans cette perspective elle a fait l'objet d'approches contradictoires, avec comme toile de fond la question de l'existence ou non d'une philosophie africaine. Jusqu'à un certain temps, bien des auteurs Occidentaux, se fondant probablement sur les thèses racistes et négationnistes du Comte de Gobineau et autres Lévy-Bruhl, ont fait de la philosophie une exclusivité occidentale. Cependant, au sein de cette même littérature occidentale il est reconnu aux peuples africains en particulier de brillantes civilisations ; des civilisations qui certes sont différentes des civilisations occidentales mais qui demeurent quand même des civilisations, avec tout ce que cela implique en terme de diversités, de richesse, de complexité. Léo Frobenius, un ethnologue allemand qui entreprit nombre d'expéditions en Afrique Noire entre 1904 et 1935 en était profondément convaincu. De ces expéditions il a légué à la postérité une description profonde des peuples qu'il a rencontrés et il estime en substance qu'ils sont « civilisés jusqu'à la moelle des os »1(*). Une autre étape sera franchie dans ce débat avec la publication de La Philosophie Bantoue du Révérend Père Placide Tempels en 1945 aux éditions Lovania Léopoldville. Cet ouvrage était une monographie dans laquelle l'auteur recensait et apportait des réponses à toutes les interrogations de ses collègues Occidentaux qui opéraient sur le continent africain ou en avaient l'intention ; dans le cadre de la mission civilisatrice. Plus concrètement Tempels se proposait de mettre en exergue la vision du monde sous-jacente aux attitudes, comportements, us, coutumes, croyances etc. des Bantous à partir d'une analyse d'éléments de leurs champs culturels. Cet ouvrage constitue disons-nous une nouvelle étape dans la problématique philosophique africaine compte tenu notamment des réactions qu'il a enregistrées aussi bien au sein de l'intelligentsia africaine qu'occidentale. A coté de l'écho favorable qu'il a eu chez de grands penseurs Occidentaux comme Bachelard, Gabriel Marcel, Lucien Masson Oursel, etc., les gardiens de l'orthodoxie occidentale ne tardèrent pas de faire entendre leur voix. Ainsi Georges Gusdorf parle en termes pathétiques d'une crise de désintégration de la philosophie et se propose de lever les confusions afin que la philosophie soit ramenée à son champ naturel : l'Occident. Dans la littérature africaine bien des auteurs, éblouis notamment par le fait que La philosophie bantoue recelait une part de réhabilitation des peuples noirs par l'affirmation de l'existence de la philosophie africaine et la nécessité de réorienter la manière de les traiter, ont tiré une salve d'honneur à l'ouvrage de Tempels. Un vaste mouvement de pensée s'est donc développé dans le prolongement des thèses tempelsiennes. Le point culminant de ce mouvement littéraire et idéologique sera atteint avec la prétention de certains auteurs africains ou Occidentaux à dégager une philosophie africaine sur les mêmes méthodes que Tempels. A savoir une vision du monde à laquelle adhèreraient spontanément et inconsciemment tous les Africains sans distinction ; vision du monde qui serait la philosophie africaine. Une philosophie les Africains gagneraient, selon Juléat Basile Fouda (La philosophie africaine de l'existence, Lille, 1967) à « transmettre à travers les âges comme un héritage à recevoir, à défendre et incarner pour atteindre l'existence authentique ». Cette philosophie déduite donc de l'héritage culturel africain sera appelée ethnophilosophie. C'est du reste contre cette manière de concevoir la philosophie africaine qu'écrivent Towa et Hountondji dans les ouvrages qui nous intéressent. Ils estiment que cette manière de concevoir la philosophie africaine et les développements tant théoriques qu'idéologiques qui ont suivi, ont conduit à une impasse dans le débat sur la problématique philosophique africaine et qu'il urge d'invalider l'ethnophilosophie et de proposer une nouvelle approche dans ce débat; à la lumière du sens de celle-ci dans la tradition philosophique internationale et notamment occidentale. Ils remarquent en effet que pour la plupart tous les auteurs africains qui se sont lancés dans le débat sur la problématique philosophique en Afrique, se sont d'emblée crus obligés de défendre coûte que coûte l'existence d'une philosophie africaine avec le dessein avoué ou non de nier la négation des civilisations africaines par l'Occident depuis des siècles. Au risque cependant de produire quelque chose qui n'est philosophique que sur le continent africain. Ils en appellent donc à une réorientation des choses dans ce débat. C'est ainsi que pour Towa, la question de fond est celle relative à l'existence ou non d'une philosophie africaine. Il estime donc que cette question « doit être reprise à la base, la philosophie européenne examinée et jugée en elle-même, rigoureusement, imperturbablement, sans tenter d'en distendre le concept pour pouvoir y inclure nos cultures, ou de la caricaturer avec l'arrière pensée de lui opposer victorieusement nos propres modes de pensée. ». Quant à Hountondji, partant de l'existence avérée d'une abondante littérature produite par des auteurs africains et se qualifiant par elle-même de philosophique, il se propose entre autres dans son ouvrage « de circonscrire cette littérature, en dégager les thèmes majeurs, montrer quel en a été jusqu'ici la problématique de fait et rendre problématique cette problématique elle-même ». Dans les deux cas, il est fondamentalement question de dénoncer ce qu'ils considèrent comme des travers dans le débat sur la problématique philosophique africaine et de proposer de nouvelles pistes pour l'émergence d'une culture philosophique saine. Mais au-delà de cela, dans le cadre de leurs projets, Towa et Hountondji proposent des rôles spécifiques à la philosophie. Ces rôles font essentiellement référence aux conditions aussi bien théoriques que pratiques susceptibles de favoriser une véritable culture philosophique sur le continent africain. Nous nous bornerons à identifier et analyser ces rôles. Il s'agira précisément de les faire ressortir dans les ouvrages de Towa et de Hountondji et d'en faire une analyse critique. Autrement dit nous tenterons de comprendre pourquoi, dans le cadre de la problématique philosophique africaine, nos auteurs avancent ces rôles précis. Quelle est leur vision de la philosophie en général pour que de tels rôles soient proposés ? Quelles sont les limites de ces rôles relativement aux projets de Towa Hountondji eux-mêmes et à la problématique philosophique en général sur le continent africain ? A ces interrogations et à bien d'autres nous essaierons de répondre dans les lignes qui suivent. Pour ce faire, nous articulerons notre intervention en trois chapitres subdivisés en sections.

Dans le premier chapitre, nous nous pencherons sur le rôle de la philosophie comme élément de la problématique de la philosophie africaine. En d'autres il s'agira d'analyser cette problématique, faire le bilan de l'essentiel de la littérature qui lui est jusque là consacrée et aborder la question du rôle de la philosophie. Dans les autres chapitres nous ferons une analyse critique des rôles de la philosophie dans les ouvrages de Towa et Hountondji.

* 1 Léo Frobenius, Histoire de la civilisation africaine, traduit par Back et Ermont, Gallimard, Paris, 1938

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams