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La Prolifération des Services de Jeûne et de Prière dans le milieu chrétien capois à partir de 1990

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par Jean Marc-Antoine PREDESTIN
Université chrétienne du nord d'Haiti : Faculté de Théologie - Licence en Théologie 2004
  

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AVANT- PROPOS

En traitant ce thème, nous n'avons pas eu l'intention de nous opposer à la pratique du jeûne et de la prière par les Chrétiens du Cap-Haïtien, encore moins d'accorder la priorité à l'engagement social des chrétiens sur leur détermination de rester en communion constante avec Dieu. Au contraire, nous partageons sans réserve la déclaration de Jésus Christ faite dans l'évangile de Matthieu selon laquelle il faut chercher premièrement le Royaume de Dieu et sa Justice, et toutes les autres choses vous seront données par surcroît (Matt. 6:33).

Notre ultime souhait est celui de voir les chrétiens d'Haïti parvenir un jour à faire un meilleur usage du jeûne et de la prière. Nous savons pertinemment qu'aucun être humain ne pourra atteindre des buts positifs sans être en relation constante avec Dieu. Nous sommes également convainçus que la prière et le jeûne sont les plus sûrs moyens pour arriver à cette fin. Les Chrétiens et tous ceux qui ont «Jéhovah » pour Dieu doivent mener une vie de prière, et au besoin, ils doivent associer le jeûne à la prière. Mais il est tout aussi important de souligner que le jeûne et la prière en dehors de la volonté de Dieu pourraient occasionner plus de mal que de bien. Les services de jeûne et de prière ne devraient pas être organisés dans le but de forcer Dieu à répondre à des requêtes charnelles et égoïstes, ils ne devraient pas non plus isoler les Chrétiens ou les dispenser de leurs responsabilités citoyennes.

Ce travail vise à porter les dirigeants des différentes congrégations chrétiennes et les responsables des services de jeûne et de prière du Cap-Haitien et d'Haïti tout entière à repenser leur stratégie de lutte contre la misère, le chômage, la maladie, la pauvreté, la superstition, etc. Autant de maux qui tracassent les chrétiens haïtiens et qui expliquent, dans une large mesure, la prolifération des services de jeûne et de prière dans la ville du Cap-Haïtien. Sans vouloir être méchants vis-à-vis du Jeûne et de la prière, nous constatons que les Chrétiens haïtiens prient et jeûnent de plus en plus, alors que paradoxalement, ils deviennent de plus en plus pauvres. Le fait est que, ce n'est pas parce que ce moyen est inefficace, mais plutôt parce qu'ils jeûnent et prient mal dans le but de satisfaire des mauvaises intentions, comme l'a dit implicitement l'apôtre Jacques (Jacques 4:3). Parfois aussi, ils jeûnent et prient pour des choses que, tout naturellement, Dieu a déjà mises à leur disposition. Il leur aurait suffi seulement de déployer leur intelligence et ils pourraient ainsi se procurer les choses désirées, sans avoir besoin de l'intervention expresse de l'être suprême. Pour survivre sur cette terre, tout naturellement, l'homme doit travailler, s'il ne le fait pas, qu'il ne mange pas non plus selon l'Apôtre Paul ( 2 Thess. 3 : 10). Dieu déteste la paresse, l'oisiveté et la passivité ; c'est pourquoi il a créé l'homme à son image et à sa ressemblance de sorte qu'il soit un être dynamique et intelligent. Il a créé l'homme avec la capacité de dominer le monde et tout ce qu'il renferme.

Les Chrétiens haïtiens sont des fils et des filles de Dieu ( Jean 1 : 12). Ils doivent tout mettre en oeuvre en vue de transformer les situations désobligeantes que sont en train de vivre une grande partie de frères et de soeurs chrétiens haitiens. Devant la misère, le sous-développement, la maladie, l'exploitation, l'Eglise haïtienne doit dire un mot. Le meilleur comportement à afficher par cette église, ce n'est pas de dire que « le mond se pa lakay nan syèl ma pralé », mais elle doit passer à l'action pour le bien de ses membres et de la communauté haitienne tout entière. L'église haïtienne doit enfin encourager ses membres à, d'abord, chercher la présence de Dieu et, ensuite, le pain. Comme tout homme, le chrétien haïtien est formé du corps et de l'esprit ; il ne vit pas de pain seulement certes, mais il ne peut non plus vivre sans le pain.

Nous espérons vivement que ce travail pourra aider chacun de nos frères et soeurs chrétiens du Cap et d'Haïti, de toutes les tendances doctrinales, à prendre conscience du rôle important qu'ils ont à jouer au développement de la communauté où le créateur les a placés. Que ce travail leur aide à faire une bonne application du jeûne et de la prière, conformément à l'esprit et à la lettre de la Bible, la parole révélatrice du Dieu de Jacob, d'Isaac et d'Abraham. nous souhaitons qu'un jour, les Chrétiens de tous les horizons du Cap-Haitien et d'Haiti se serviront des services de jeûne et de prière, non pas pour demander à Dieu de faire tomber du ciel de la manne, mais pour lui demander la direction, la force et l'intelligence nécessaire afin de pouvoir être effectivement le sel et la lumière d'Haiti.

REMERCIEMENTS

La Réalisation de ce Mémoire a bénéficié de l'appui et du support de plusieurs personnes et institutions. Qu'elles soient, par ces lignes, remerciées.

Remerciements d'abord à Dieu qui m'a donné du courage et de l'intelligence pour réaliser ce Travail, étape indispensable pour l'obtention du grade de Licencié en Théologie.

Ensuite, mes remerciements vont à :

· Monsieur Romanne Présumé, mon professeur de Méthodologie, qui a dirigé ce travail, pour son soutien et ses conseils ;

· Monsieur Jules Casséus, Recteur de l'UCNH, pour son cours d'Eglise et Société d'où j'ai tiré mon sujet de recherche ;

· Tous mes professeurs des cinq années d'études à la Faculté de Théologie de L'UCNH ;

· Aux Responsables d'églises catholiques protestantes et adventistes du septième, aux responsables des services de jeûne et de prière de la ville du Cap-Haïtien et aux différents participants à ses services qui ont aimablement accepté de répondre, sans aucune arrière pensée, à mes questions.

· Mes collègues de promotion ( ETDI : 1999-2004 ) ;

· Toute la congrégation de l'église Baptiste Redford ;

· Mes employeurs, respectivement la Secrétairerie d'État à la Jeunessee, aux Sports et à l'Éducation Civique (SEJSEC) et le Plan International, sans eux je ne pourrais pas trouver les moyens financiers nécessaires pour payer les cinq années d'études et couvrir les frais de ce Travail ;

De plus, je suis infiniment reconnaissant aux personnes dont la bienveillance à mon égard, tant en termes d'apport que de support, s'est avérée prépondérante: Hérold Gabriel, Charitable Ambroise, Michelet Petit-Homme, Emmanuel Cherfils, Guériney Jaclin, Borromée Laguerre, Doudou Abdonel, David Olivier, Werley Saintilien, les Soeurs Jeannine Joliné Compère, Paul Dorcély, Dieula, etc.

Enfin, je ne saurais terminer, sans saluer la confiance et l'affection, constante et déterminante, de mon incomparable mère Madame Suzie Prédestin, ma tendre femme Miss Geneviève Bertrand, mes deux chers enfants Christine et Jean Markenley Prédestin.

00.- INTRODUCTION

A partir des années 90, la ville du Cap-Haïtien et ses environs ont vu la prolifération sans précédent des services de jeûne et de prière. Ces services organisés à l'intérieur comme à l'extérieur des temples, sont menés aussi bien par des ministres religieux, des groupes religieux que des leaders laïcs. On les a baptisés de réunion de prière, de veillée, de jeûne, de cri de minuit, de cri de midi, etc. Ils n'ont pas un horaire fixe, ils durent entre une heure et six heures et se tiennent tous les jours de la semaine. La multiplication de ces services est constatée parmi presque toutes les couches religieuses: les Protestants, les Adventistes du septième jour et même les Catholiques romains.

Alors qu'on assiste au foisonnement de ces services dans tous les coins et les recoins de la ville, il n'est pas évident que la vie socio-économique des fidèles se soit améliorée, ni même leur relation avec Dieu. C'est avec raison que le docteur Casséus Jules, parlant de l'église haïtienne, pense que celle-ci a un faible impact sur la société haïtienne : étant mal partie, croit-il, elle n'a pas rempli sa mission. Il parle aussi d'un inconscient collectif haïtien qui n'est pas encore conquis par le dynamisme de l'évangile. Il poursuit pour annoncer que tout cela explique que l'évangile a été et continue à être mal communiqué à l'Haïtien. L'évangile est mal compris, mal vécu et comme résultat, l'église haïtienne manque de vision, de dynamisme et n'a pas rempli de façon effective la mission de réconciliation et de service qui est assignée à l'Eglise visible-invisible de Jésus-Christ dans un contexte social donné1(*). D'autres théologiens haïtiens posent également le problème de l'inefficacité de l'église haïtienne à contribuer à l'amélioration effective des conditions socio-économiques du chrétien haïtien. Ainsi, le révérend Joël D. Alexandre pense que la responsabilité chrétienne impose aux Chrétiens de ne pas être les derniers à s'engager là où se décide l'avenir de la communauté nationale. Pour lui, ce serait une grave trahison de la part de la communauté chrétienne de ne pas se mettre en présence de la décision extrêmement importante de changer les structures qui ont des conséquences économiques, sociales et politiques néfastes sur la société2(*).

On observe que la majorité de ces services sont organisés non pas dans le but principal de rapprocher les participants de Dieu, mais plutôt dans l'optique de résoudre les différents problèmes socio-économiques de ces participants. Les requêtes de prière qui prévalent à l'intérieur de ces services concernent généralement : le besoin de travailler, de trouver un visa, de trouver la guérison, de contracter un mariage, etc. Certains organisateurs de ces services sont allés même jusqu'à faire croire aux fidèles que pour celui qui s'en remet à Dieu, il n'est pas nécessaire de consentir d'efforts personnels pour les choses matérielles, le mieux serait d'abandonner tout entre les mains de Dieu dans les services de jeûnes et de prière. Ainsi, ils font une très mauvaise interprétation des paroles de la bible trouvées dans la première lettre aux Thessaloniques, chapitre cinq et le verset 17, selon lesquelles il faut prier sans cesse. Pour demeurer dans la prière, on n'a pas besoin de fréquenter spécifiquement un service de prière. Partout où l'on est, on peut se mettre à la prière : au travail, au bureau, au marché, etc. Cette conception d'abandonner tout dans la prière et le jeûne tend à désengager les chrétiens de leur responsabilité vis-à-vis de soi et de leur communauté. C'est vraiment à tort que certains de ces responsables de service de jeûne et de prière encouragent les chrétiens à abandonner tout à la providence. Ce comportement est une dérive résultant d'une incompréhension de la parole de Dieu. Le fait de prier sans cesse ne veut pas dire qu'il faut passer tout son temps dans des services de jeûne et de prière, sans faire d'efforts, sans accomplir aucun acte de développement personnel. La bible nous dit non seulement de demander, de frapper, mais aussi de chercher, car le fait de chercher implique l'idée d'action humaine. Donc, il ne suffit pas seulement de demander afin de trouver, ni de frapper afin qu'on vous ouvre, mais aussi il faut chercher afin de trouver ( Luc 11: 9 et Matthieu 7:7). La plupart des organisateurs de ces services ne font aucun effort pour aider les croyants à s'épanouir dans la société, à prendre des initiatives visant à améliorer leur condition d'existence.

Autrement dit, le but visé par les organisateurs de ces services de jeûne n'est pas la meilleure approche pour l'amélioration des conditions de vie et pour l'acquisition du bien-être tant matériel que spirituel qu'ils font espérer aux participants. Nous savons très bien que le Dieu des chrétiens est un Dieu dynamique qui n'encourage pas l'oisiveté ( Matt. 25 : 24, 30 ). Excepté dans des conditions très exceptionnelles où Dieu a donné à manger aux gens sans qu'ils aient besoin de travailler (Ex. 16 : 11-16). Il a toujours encouragé le travail comme voie de satisfaction de nos besoins socio-économiques (Rom.4 : 4, 2 Thess. 3 :10, Luc 10 :7). Si le salut est une grâce, mais pour vivre sur cette terre, pour subvenir à ses différents besoins, il faut travailler, le Dieu créateur du ciel et de la terre est un Dieu travailleur (Gen. 2 : 2). Nous partageons sans réserve le développement suivant fait par les lettres encycliques de l'église catholique sur le rôle du travail :

   Le rôle du travail humain est un facteur toujours plus important pour la production des richesses immatérielles et matérielles; En outre, il paraît évident que le travail d'un homme s'imbrique naturellement dans celui d'autres hommes. Plus que jamais aujourd'hui, travailler, c'est travailler avec les autres et travailler pour les autres: c'est faire quelque chose pour quelqu'un. Le travail est d'autant plus fécond et productif que l'homme est plus capable de connaître les ressources productives de la terre et de percevoir quels sont les besoins profonds de l'autre pour qui le travail est fourni. En effet, " Dieu faisait l'Homme avec la poussière de la terre et créa pour lui et pour sa descendance, ce monde si bel, pour qu'il le travaille et en soit le gardien. Il est alors possible d'affirmer, ce qui est absolument fondamental, que le travail appartient à la vocation de toute personne ; l'homme s'exprime donc et se réalise dans son activité laborieuse3(*).

Le travail est ainsi source de fierté et d'épanouissement pour chaque être humain :

 Il est un bien pour l'homme, car grâce à lui, l'homme transforme la nature en l'adaptant à ses propres besoins. L'homme doit travailler parce que le Créateur le lui a ordonné, et aussi du fait de son humanité même dont la subsistance et le développement exigent le travail. L'homme doit travailler par égard pour le prochain, spécialement pour sa famille, mais aussi pour la société à laquelle il appartient, pour la nation dont il est fils ou fille, pour toute la famille humaine dont il est membre, étant héritier du travail des générations qui l'ont précédé et en même temps co-artisan de l'avenir de ceux qui viendront après lui dans la suite de l'histoire. Tout cela constitue l'obligation morale du travail entendue en son sens le plus large. Lorsqu'il faudra considérer les droits moraux de chaque homme par rapport au travail, droits correspondants à cette obligation, on devra avoir toujours devant les yeux ce cercle entier de points de référence dans lequel prend place le travail de chaque sujet au travail4(*).

Il n'est pas question pour un chrétien d'être inactif et d'attendre la manne du ciel. L'un des pires défauts du chrétien haïtien, c'est le fait d'être dominé, pour répéter le terme du docteur Casséus Jules, par le Providentialisme et le Bondye bon5(*). Le mieux à faire, ce n'est pas d'organiser des services de jeûne et de prière ça et là et constamment dans le but de demander à Dieu du travail, de la guérison, un mariage, un visa, etc., mais les communautés chrétiennes doivent s'organiser de telles sortes qu'elles permettent aux croyants d'être dynamiques dans la société. Et ainsi avec l'aide de Dieu, ils pourront réaliser de grandes choses en mettant en oeuvre les potentialités et l'intelligence que Dieu a mises en eux.

Notre préoccupation principale, en réalisant ce travail, est de savoir si les services de jeûne et de prière organisés dans la ville du Cap-Haïtien peuvent aider ceux qui les fréquentent à résoudre les problèmes socio-économiques auxquels ils sont confrontés ?

Pour bien cerner ce problème, nous nous posons également les questions suivantes: Quelles sont les causes de la prolifération des services de jeûne et de prière dans le milieu chrétien capois?  Quelles mesures les leaders ecclésiastiques doivent-ils prendre en vue de favoriser l'épanouissement socio-économique des croyants ? Comment faut-il appliquer de telles mesures?

L'objectif général de ce travail est, d'une part, de présenter une analyse des causes et des conséquences identifiables de la prolifération des services de jeûne et de prière dans le milieu chrétien capois à partir de l'année 1990; et d'autre part, de proposer aux responsables d'églises, aux organisateurs et participants des services des pistes de solution conformes à l'esprit biblique en vue de favoriser l'épanouissement socio-économique des chrétiens haïtiens et de la communauté haïtienne tout entière.

En termes d'objectifs particuliers, nous nous proposons :

· D'exposer l'état de la situation dans la ville du Cap-Haïtien en ce qui a trait à l'organisation de ces services ;

· D'informer les chrétiens de la position de la bible par rapport au jeûne et à la prière ;

· D'analyser les causes de la prolifération des services de jeûne et de prière ainsi que les effets négatifs de ce phénomène quant au développement socio-économique des croyants ;

· D'inciter les responsables de l'église haïtienne à tenir compte à la fois des besoins spirituels et temporels du chrétien haïtien dans le cadre de leur ministère.

Nous lisons dans le livre de la genèse au chapitre cinquième et le verset premier, que Dieu créa l'homme à sa ressemblance. Cette ressemblance, il faut le préciser, ne concerne pas l'aspect physique, car Dieu en tant qu'esprit, n'a pas de corps, il s'agit d'une ressemblance spirituelle (Jean 4: 24). Cela veut dire que, de même que Dieu est un être Dynamique et Intelligent, il a créé l'homme pour que celui-ci soit aussi dynamique et intelligent. Dieu a créé l'homme pour qu'il exerce une influence positive sur son milieu, à cause de sa ressemblance avec Dieu (Genèse 1 : 28). Le docteur Casséus en ce sens a fait remarquer que : « tout homme est créé à l'image de Dieu et doit affronter la vie avec optimisme. L'on doit travailler sérieusement pour améliorer son monde6(*)». Pour créer l'univers et tout ce qu'il renferme, Dieu a beaucoup travaillé. Or, si l'homme est crée à la ressemblance de Dieu, il ne doit pas s'attendre à tout recevoir dans la voie de la facilité. Car il est écrit que l'homme doit manger à la sueur de son front (Genèse 3:17). C'est là même une désobéissance que de vouloir tout avoir avec facilité, sans le moindre effort. Dieu promet certes la vie abondante à son peuple, mais c'est en travaillant, il n'encourage point la paresse.

Contrairement à ce qui devrait être, certains leaders ecclésiastiques et responsables des services de jeûne et de prière dans la ville du Cap-Haïtien semblent ne pas comprendre que l'homme en général et le peuple de Dieu en particulier est créé pour assujettir la terre, selon Genèse 1:28. Dieu a confié à l'homme la mission de dominer sur toutes les choses de la terre. En faisant un mauvais usage de la prière, ils pensent que le seul fait de passer tout leur temps à prier et à jeûner suffit pour leur apporter des solutions à tous les problèmes auxquels ils font face.

De ce fait, nous estimons qu'il est tout à fait urgent de souligner à l'attention de ces leaders en particulier et de la communauté chrétienne en général que, pour la satisfaction des besoins socio-économiques, il ne suffit pas pour quelqu'un de passer toute sa vie à prier et à jeûner. Les croyants doivent exploiter les potentialités intellectuelles que Dieu a mises en eux. Dieu n'a pas l'intention de faire de nous des receveurs de manne, loin de là, Dieu au contraire veut que nous travaillions pour satisfaire nos besoins et ceux de notre communauté. « Tout homme est appelé à faire valoir ce qu'il a reçu de Dieu avec le don de la vie, nous dit le révérend Joël D. Alexandre ». Il poursuit pour nous dire que « tout homme est mis devant une décision qui engage sa responsabilité devant Dieu. Si l'homme doit pouvoir travailler, c'est que Dieu lui offre, dans le travail, l'occasion de le glorifier, la possibilité de le servir et en le servant, l'occasion de servir ses frères, d'être utiles à d'autres7(*) ».

D'un autre côté, le docteur Casséus pense que « la condition socio-économique précaire de notre pays porte beaucoup de chrétiens à se comporter comme des disciples de pain, de manne. Comme résultat, l'église haïtienne devient une église marginale qui n'est pas en mesure d'exercer son rôle véritable de sel et de lumière8(*) ». Pour ainsi dire, le chrétien ne doit pas rester à attendre que les autres fassent quelque chose pour améliorer sa vie, il doit au contraire passer à l'action, il doit se soucier plus à donner qu'à recevoir, selon Actes 20: 35. C'est en s'appuyant sur ces paroles de la bible qu'Ellen G White, citée par Léo R. Van Dolson, avance que le but de nos préoccupations ne devrait pas être de savoir ce que nous devons recevoir, mais ce que nous pouvons donner9(*).

En traitant ce thème, nous voulons conscientiser tous ceux que la question intéresse dans l'aire du Cap-Haïtien et à travers toute Haïti, que la satisfaction des différents besoins socio-économiques de nos croyants ne sera effective qu'en combinant la prière au travail. Il faut une meilleure interprétation des passages de la Bible concernant le jeûne et la prière. Dieu ne nous demande pas de passer tout notre temps à fréquenter des services de jeûne et de prière, il veut que nous soyons de rudes travailleurs. Nous devons être dynamiques et intelligents. Nous devons, en tant que croyants, accomplir des actions concrètes. Les croyants doivent être encouragés à apprendre un métier, à prendre des initiatives personnelles visant à améliorer leur condition de vie. Nous voulons porter les leaders ecclésiastiques, les organisateurs de services de jeûne et de prière, de la ville du Cap-Haïtien et d'Haïti à travailler à ce qu'il y ait une église intégrée dans la société capoise, remplissant favorablement son rôle de sel et de lumière dans sa communauté. Une église qui fait un bon usage du jeûne et de la prière, une église qui prie et agit pour son bien-être spirituel et social.1(*)0

Nos grilles d'analyse s'articulent autour de la vérification des hypothèses suivantes :

· La multiplication exagérée des services de jeûne et de prière dans le milieu chrétien capois encourage la paresse chez les participants et les empêche de prendre des initiatives personnelles en vue de leur épanouissement socio-économique.

· Les messages délivrés à l'intérieur des services de jeûne et de prière dans le milieu Chrétien capois empêchent aux participants de s'engager dans la vie socio-politique haïtienne.

· Une église qui prie et qui agit favorisera non seulement l'amélioration des conditions de vie des Chrétiens haïtiens, mais également contribuera au développement socio-économique de la société haïtienne.

Pour la vérification des hypothèses émises dans ce travail, nous avons effectué une enquête dans l'aire du Cap-Haïtien, le centre de la ville du Cap et ses trois sections communales, en vue de faire le recensement1(*)1 des services de jeûne et de prière, de constater leur évolution à partir de 1990 et de nous enquérir des objectifs pour lesquels les croyants viennent participer à ces services. Pour cette enquête, nous avons procédé de différentes manières: observation dissimulée, questionnaire, entrevue dirigée1(*)2 avec les participants et les responsables de ces services. Pour récolter des informations relatives au nombre total de services de jeûne et de prière existant dans la ville du Cap-Haïtien, la technique dite « boule de neige1(*)3 » a été utilisée. C'est à dire, pour chaque responsable de service rencontré, il lui était demandé d'identifier d'autres responsables ou d'autres services de jeûne et de prière qu'il connaît. Ce processus a été suivi de novembre à décembre 2003.

Nous avons consulté des personnalités qui n'ont pas publié de livres certes, mais qui acquièrent une très grande expérience sur le thème que nous abordons. Nous avons consulté des auteurs qui ont abordé ce thème d'une façon ou d'une autre avant nous, cela nous permet de constater ce qui est déjà dit, l'analyser, le critiquer, en vue de mieux orienter le travail. Nous avons aussi puisé des notes et explications de cours dispensés par les professeurs à la faculté de théologie de l'Université Chrétienne du Nord D'Haïti, plus particulièrement celles des cours d'Eglise et Société et de Culte de l'Eglise. Pour notre recherche documentaire, nous avons utilisé diverses sources : Les bibliothèques de la place, des ouvrages personnels, ceux des amis et camarades de promotion, des périodiques, des journaux, l'Internet, etc.

Ce travail est réalisé en cinq chapitres. Le premier chapitre expose l'état de la situation dans la ville du Cap-Haïtien. Il porte sur des considérations d'ordre général relatives au profil de la ville du Cap-Haïtien, à l'organisations des services de jeûne et de prière tenus dans la ville, aux caractéristiques des organisateurs et participants. Le deuxième chapitre expose la position de la Bible par rapport au jeûne et à la prière. Après un survol historique, nous considérons également le jeûne respectivement selon l'ancien testament et le nouveau testament. Dans le troisième chapitre, nous faisons une analyse des causes identifiables de la prolifération des services de jeûne et de prière dans la ville du Cap-Haïtien, en mettant l'accent sur certaines croyances et certains comportements des chrétiens, ainsi que des causes sociales et des causes économiques du phénomène. Ensuite, le quatrième chapitre traite des conséquences néfastes de la prolifération de ces services sur l'église particulièrement et, sur la ville du Cap-Haïtien en général. Ce sont des conséquences politiques, économiques et sociales.

Et enfin, le cinquième chapitre fait des propositions aux responsables de l'église haïtienne comme institution regroupant les chrétiens de toutes les tendances du christianisme, aux différents leaders et à chaque chrétien en vue d'oeuvrer pour une société haïtienne où les besoins spirituels et matériels seront pris en compte. Nous démontrons que l'Eglise a une responsabilité dans le processus de développement de la société haïtienne, elle n`est pas là seulement pour montrer la voie du ciel, elle doit en tout temps et en tout sens remplir sa mission de sel et de lumière dans la société où Dieu l'a placée.

* 1 Jules CASSEUS, « L'Eglise, Aujourd'hui, Ici et Maintenant » Limbé, ed. STBH/UCNH, 1998, p. 93.

* 2 D. Joël ALEXANDRE, Une Stratégie de Transformation dans le Cadre de la Mission Intégrale de L'Eglise, Presse Evangélique, Port-Au-Prince, 1993, pp. 46-47.

* 3 Lettre encyclique Centesimus annus ( à l'occasion du centenaire de l'encyclique Renum novarum),

1er mai 1991.

* 4 Lettre encyclique Laborem Exercens, n.16 (sur le travail humain), 14 septembre 1981.

* 5 Jules CASSEUS, Pour une Eglise Authentiquement haïtienne, ed. STBH/UCNH, Limbé, 1987, p. 117.

* 6 Ibid.., p. 10.

* 7 D. Joël ALEXANDRE, Op. Cit., p. 77.

* 8 Jules CASSEUS, « Haïti : Quelle Eglise, Quelle libération », STBH/UCNH, the little River Press, Miami, 1991, p. 95.

* 9 Léo R. VAN DOLSON, Pas de Temps à Perdre, s.é., s.l.n.d., p. 35.

* 10 Ibid., p. 98.

* 11 Romanne PRÉSUMÉ, « Manuel de Méthodologie, de la Problématique à l'Analyse des données », La Presse Evangélique, Port-Au-Prince, 2003, p. 213.

* 12 Ibid, p. 229.

* 13 Sylvie FAYET « Dossier: La formation des usagers, Méthodologie documentaire », BBF, Paris, T.44, No.1, p. 55.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote