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La Prolifération des Services de Jeûne et de Prière dans le milieu chrétien capois à partir de 1990

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par Jean Marc-Antoine PREDESTIN
Université chrétienne du nord d'Haiti : Faculté de Théologie - Licence en Théologie 2004
  

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CHAPITRE 2

LA POSITION DE LA BIBLE

PAR RAPPORT AU JEUNE ET À LA PRIERE

Dans un sens général, le terme jeûne désigne l'idée d'abstention de nourriture. C'est le fait de s'abstenir de manger et de boire pendant un temps déterniné2(*)6. Cette abstention peut se faire pendant une période relativement courte de trois jours et exceptionnellement longue de 40 jours ou plus ( par exemple, le jeûne de 40 jours de Jésus). Il peut parfois s'accompagner d'un temps d'abstinence sexuelle et très rarement de renonciation à la boisson. C'est aussi une pratique très ancienne. En Orient, chez les Indous, en Égypte, il était une manifestation de tristesse qui symbolise un état d'âme: signe de deuil, de frayeur, et surtout d'humiliation et d'humilité. En Afrique traditionnelle, certaines régions connaissaient le jeûne et le pratiquaient pour éloigner les calamités qui les frappaient.

Lorsqu'on parle de jeûne, il ne faut pas automatiquement accorder à ce terme une dimension spirituelle ou religieuse, car ce terme ne s'applique pas uniquement dans un sens religieux. Etienne Lhermenault et Bernard Delepine, le considère comme une disposition générale sans considération religieuse et peut être préconisée à titre diététique ou médical 2(*)7.

Même lorsqu'on y ajoute une précision concernant sa dimension spirituelle, son orientation vers Dieu, on a alors la définition d'une pratique religieuse qui n'est pas spécifiquement juive ou chrétienne. On peut penser au ramadan, l'un des cinq piliers de l'Islam, qui conduit le musulman à un jeûne total qui implique l'absence de nourriture, boisson, tabac, relations sexuelles de l'aube au coucher du soleil pendant tout le neuvième mois du calendrier hégirien2(*)8. En plus du Christianisme et du Judaïsme, le jeûne est aussi enseigné et pratiqué dans d'autres grandes religions telles que : le Bouddhisme, l'Hindouisme, etc. Mais, dans le cadre de notre travail, nous allons asseoir notre analyse sur le jeûne biblique qui, selon le théologien Jean Calvin, cité par Yan Newberry, «n'est pas un but en soi ni un moyen, mais un climat de confiance, de disponibilité, de dépendance dans lequel on désire rencontrer Dieu. C'est une manière d'exprimer à Dieu notre vrai déplaisir de nous-même et de nos péchés avec une vraie humilité procédant de la crainte de Dieu.»2(*)9

Nous voulons aussi faire une autre remarque tout en nous interrogeant de la façon suivante: est-ce que ces services appelés Jeûnes dans la ville du Cap-Haïtien sont effectivement de véritables Jeûnes? Si l'on se limite à la définition du jeûne, il n'est pas acceptable de les considérer comme des véritables Jeûnes. Nous avons deux arguments pour ne pas considérer ces services comme des «Jeûnes» : d'abord, ils ne durent que quelques heures entre 4 à 6 heures, ensuite, l'abstention de nourriture n'y est pas de rigueur. Les responsables ne mettent pas ou presque pas l'accent sur ce dernier aspect du jeûne, nous avons toujours remarqué à proximité de ces services des marchants de bonbons, de boissons et même quelque fois de nourriture.

Toutefois, nous comprenons l'attitude des organisateurs et des participants en appelant ces services « Jeûne». Etant donné que dans la tradition judéo-chrétienne, le Jeûne est toujours associé à la prière, donc en organisant des services de prière plus ou moins longues, les chrétiens ont tendance à les faire passer pour des jeûnes. Nous y reviendrons dans la suite de ce chapitre aux paragraphes réservés au jeûne associé à la prière.

Ce chapitre, en plus de présenter la position de la bible par rapport au jeûne et à la prière, fait également un survol historique du jeûne en général et met l'accent sur certains types bien spécifiques de jeûne.

2.1.- HISTORIQUE ET DIFFERENTS TYPES DE JEUNE 

Dans cette partie, nous nous proposons de faire un survol historique du jeûne en général qui est pratiqué différemment par les chrétiens, les juifs, les musulmans, les hindous, les taoïstes, les jaïnismes et d'autres religions. Nous allons mettre l'accent également sur certains types de jeûne connus particulièrement dans le Judaïsme et le christianisme.

2.1.1.- Historique du jeûne 

Le jeûne a été utilisé pendant des siècles pour des raisons religieuses. Il est observé par les chrétiens, les juifs, les musulmans, les hindous, les taoïstes, les jaïnismes et dans d'autres religions. Même si le bouddhisme insiste plus sur la modération que sur le jeûne, les bouddhistes de certains pays, notamment du Tibet, pratiquent parfois le jeûne. À l'origine, lorsque les gens faisaient face à des menaces mortelles, ils étaient trop apeurés et en détresse pour manger. Ils ajustèrent leur diète en fonction de l'agonie éprouvée dans leurs âmes. L'agonie spirituelle soit le danger mortel avait pour conséquence l'arrêt de la prise de nourriture, disons le jeûne. Au départ, c'était aussi l'un des rites pendant lesquels les activités physiques étaient réduites ou absentes, amenant un état de calme comparable symboliquement à la mort ou à l'état qui précède la naissance. Le jeûne faisait aussi partie des rites de fertilité dans les cérémonies primitives. La plupart de ces cérémonies avaient lieu lors des équinoxes (Epoque de l'année marquant le début du printemps ou celui de l'automne, où la durée du jour est égale à celle de la nuit) de printemps et d'automne, et ont survécu pendant des siècles. Certains historiens voient dans l'usage symbolique du pain azyme ou pain sans levain que faisaient les juifs au moment de la Pâque, au printemps, une résurgence de cette origine primitive. On trouve des traces de ces rites anciens dans le jeûne observé par les chrétiens pendant le carême en préparation des fêtes de Pâques3(*)0.

Le jeûne a été critiqué dès les premiers temps. Un grand nombre de prophètes de l'Ancien Testament et des auteurs chrétiens des premiers siècles condamnèrent l'abus du jeûne comme une formalité sans signification pour des gens qui vivaient dans le luxe et l'immoralité, parmi ces prophètes, nous pouvons citer Esaie (Esaïe 58 : 1-14) et Joël (Joël 2 :12-18). La coutume a grandement modifié la manière dont se pratiquait le jeûne. Avec quelques exceptions notables, de nos jours, la règle est au jeûne sélectif plutôt qu'à l'abstinence totale.

La grande majorité des savants croient que la pratique du jeûne a commencé avec la perte d'appétit durant des temps de grandes détresses et de contraintes. Le phénomène de la perte d'appétit, à lui seul, prouve que le jeûne est, entre autres, un mécanisme. Anne qui est devenue plus tard la mère de Samuel, était si affligée de sa stérilité qu'elle "pleurait et ne mangeait point", selon 1 Samuel 1:7. Également, lorsque le roi Achab échoua dans sa tentative d'acheter la vigne de Naboth, il ne mangea rien ( 1 Rois 21:4 ).

Apparemment le jeûne a commencé en tant qu'expression naturelle du chagrin; toutefois, il est devenu usuel de refléter ou de démontrer à autrui son chagrin en s'abstenant de nourriture. David a jeûné pour démontrer son chagrin à la mort d'Abner (2 Sam. 3:35). Plusieurs références dans les Écritures décrivent le jeûne comme une pratique affligeant l'âme ou le corps (Esaie 58:3, 5). David justifie son jeûne d'avant la mort d'Abner, en disant son espoir d'influencer Dieu en démontrant son chagrin (2 Sam 12:15-23). Lorsque Dieu déchargea sa colère contre un peuple à cause de sa méchanceté, le jeûne devint un mode national normal de chercher la faveur divine et sa protection. Dès lors, il est naturel qu'un groupe de personnes se réunisse dans le jeûne et la prière, pour témoigner le chagrin de leurs péchés et intercéder auprès de Dieu. Le jeûne est devenu plus tard, un moyen extérieur de démontrer et encourager la repentance.

2.1.2.- Les types de jeûne dans l'Ancient testament

Nous trouvons plus de soixante-dix mentions du jeûne dans l'Ecriture, l'ancien testament et le nouveau testament confondus, avec une très grande variété de formes et de circonstances pour sa pratique3(*)1. Donc, il y a plusieurs types de jeûne, cette pratique peut être exercée dans des circonstances diverses. L'Ancien Testament mentionne particulièrement :

· des jeûnes publics réguliers : Le jeûne du quatrième mois, le jeûne du cinquième, le jeûne du septième et le jeûne du dixième deviendront pour la maison de Juda des jours de gaieté et de joie (Zacharie 8:19).

· des jeûnes publics occasionnels : Suite à la destruction de la tribu de Benjamin qui avait gravement péché tous les Israélites montèrent à Béthel, ils pleurèrent et restèrent là devant l'Eternel, ils jeûnèrent en ce jour jusqu'au soir, ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de communion devant l'Eternel ( Juges 20:26)

· des jeûnes privés : telle la réaction de Néhémie au récit de la désolation de Jérusalem : "Lorsque j'entendis ces paroles, je m'assis, je pleurais et, pendant plusieurs jours je pris le deuil. Je jeûnais, je priais devant le Dieu des cieux (Néhémie 1:4 a ).

On distingue encore d'autres types de jeûne, selon la rigueur du régime ou de l'abstention de nourriture et de breuvage à observer:

· Le jeûne normal : le jeûne normal consiste à s'abstenir de toute nourriture solide ou liquide, mais on pourrait boire de l'eau3(*)2.

· Le jeûne absolu : il y a aussi quelques exemples dans la Bible de jeûne « absolu », ce qui signifie s'abstenir de boire de l'eau autant que de la nourriture, comme dans Esdras 10:6. Dans Esther 4:16, la reine Esther instruit Mardochée «Va, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à Suse, et jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours, ni la nuit ni le jour». D'autres exemples dans le Deutéronome 9 : 9, Exode 34 : 28 et I Rois 19 : 8. Cette méthode de jeûne est une mesure exceptionnelle d'une situation extrêmement rare. L'on devrait être absolument certain de la guidance du Seigneur avant d'entreprendre des jeûnes de plus de trois jours ou un jeûne excluant le liquide ou abstention de tous solides et liquides (sans eau)3(*)3

· Le jeûne partiel : il y a aussi le «jeûne partiel » qui est une restriction de certains type de nourriture, comme dans Daniel 10 : 3 et I Roi 17. Cette méthode est celle utilisée aujourd'hui par ceux qui sautent un repas et vont en prière. Le jeûne peut être public ou privé, régulier ou occasionnel, involontaire ou volontaire.

· Le jeûne de Daniel : ce jeûne consiste en des menus fruits, légumes et eau.3(*)4

2.2.- LE JEUNE DANS L'ANCIEN TESTAMEMT 

Le jeûne dans l'Ancien Testament ou plutôt le jeûne biblique n'est pas seulement caractérisé par son association à la prière, car l'Islam fait aussi une telle association, mais c'est surtout son aspect volontaire, d`humilité et le sens de sa motivation qui le caractérise. Jean-François et Catherine Gotte mettent l'accent sur l'aspect d'humilité du jeûne:

 Le vrai sens du jeûne doit se définir en fonction de l'anthropologie biblique : l'homme est âme de son corps. Le corps est l'expression de l'âme. Il est le lieu de l'adoration. Bien sûr, l'intériorité est ce qui compte avant tout. Mais l'homme n'est pas pur esprit. Il a besoin de traduire corporellement les sentiments de son âme (.... Pour exprimer notre tristesse, notre humiliation, notre dépendance totale de Dieu, notre prière, le jeûne a sa place. Chacun est libre de prier avec son corps comme il l'entend d'une manière individuelle ou collective... Le corps est le moyen de l'être. N'ayons donc pas peur de mettre notre corps et notre coeur à l'unisson. Laissons les pensées intérieures de notre coeur modeler notre corps. Associons notre être extérieur à notre être intérieur afin que notre être tout entier puisse exprimer sa foi et sa prière. C'est dans ce sens que le jeûne est à redécouvrir. Mais attention ! sauvegardons la liberté et l'amour! 3(*)5 

Maintenant nous allons considérer l'application du jeûne dans le Judaïsme et des considérations sur certains jeûnes personnels et communautaires de l'ancien testament et surtout le jeûne du grand pardon, le « YOM KIPPOUR » seront aussi faites.

2.2.1.- Le jeûne dans le Judaïsme 

Dans le judaïsme, le jeûne est une attitude de dépendance à l'égard de Dieu. Il équivaut à humilier son âme, à se lamenter pour implorer telle ou telle faveur, le pardon, la lumière divine, avant d'accomplir une mission (Deutéronome 9 : 18, Joël 2 : 12, Jonas 3 : 5-9). Il est lié à l'aumône et à la prière, et il implique souvent abstention de bains, de parfums, de relations sexuelles. En tant que pénitence et purification, le jeûne a lieu le jour du Grand Pardon, Yom Kippour, depuis son institution traditionnelle par Moïse. On ne peut ni manger, ni boire en ce jour considéré comme saint (Nombres 29 : 7-11).

Les jeûnes suivants ont marqué le peuple de Dieu et le judaïsme, ils ont été organisés dans des circonstances bien spécifiques :

· Le jeûne d'Esdras (Esdras 8:23, 10:6) : Esdras était chargé de restaurer la Loi de Moise chez les Juifs alors qu'ils étaient à reconstruire la ville de Jérusalem avec la permission d'Artaxerxés, roi de Perse, lorsque le peuple de Dieu était captif de ces derniers. Malgré cette permission, les ennemis d'Israël les attaquaient. L'embarras de devoir demander protection aux Perses amena Esdras à jeûner pour recevoir une réponse.

· Le jeûne de Samuel ( 1 Sam 7: 6) : Samuel amena le peuple de Dieu à jeûner en célébration du retour de l'Arche d'Alliance de sa captivité par les Philistins, et prier pour qu'Israël soit délivré du péché qui avait entraîné la prise de l'Arche par l'ennemi.

· Le jeûne d'Élie: Elie alla dans le désert où, après une journée de marche, il s'assit sous un genêt, et demanda la mort, en disant: « C'est assez! Maintenant, Éternel, prends mon âme, car je ne suis pas meilleur que mes pères. Il se leva, mangea et but; et avec la force que lui donna cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, à Horeb » ( 1 Rois 19:4 et 8). Alors même si l'Écriture ne parle pas spécifiquement de jeûne ici. Élie est délibérément parti sans nourriture en fuyant la reine Jézabel, qui avait menacé de le tuer. Après cette privation, Dieu lui envoya un ange pour le guider.

· Le jeûne de Daniel ( Daniel 1:8, 9:3) : Daniel et ses trois compagnons Hébreux en captivité à Babylone, refusant la nourriture païenne. Cette guidance de Dieu à ne pas manger la nourriture des païens les a gardés plus forts.

· Le jeûne d'Esther: "Va, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à Suse, et jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours, ni la nuit ni le jour. Moi aussi, je jeûnerai de même avec mes servantes, puis j'entrerai chez le roi, malgré la loi; et si je dois périr, je périrai. Lorsque le roi vit la reine Esther debout dans la cour, elle trouva grâce à ses yeux; et le roi tendit à Esther le sceptre d'or qu'il tenait à la main. Esther s'approcha, et toucha le bout du sceptre ( Esther 4:16; 5:2). La reine Esther, une Juive dans une cour païenne, risque sa vie pour sauver son peuple menacé de destruction par Assuérus, roi de Perse. Avant de se présenter devant le roi afin d'implorer sa grâce pour les Juifs, Esther et son cousin Mardochée ont tous deux jeûnés pour appeler la protection de Dieu.

2.2.2.- Des jeûnes personnels et communautaires de l'Ancien Testament 

L'Ancien Testament nous donne de nombreux exemples du jeûne pratiqué sur le plan personnel et communautaire. Ces exemples nous montrent que le jeûne est un signe extérieur d'une tristesse intérieure. C'est ce qui découle d'ailleurs de certains avertissements des prophètes Esaie, Jérémie et Zacharie concernant le jeûne :

· Moise, 40 jours (Deutéronome 9:9,18-19, Exode 34:27-28) ;

· Josaphat publia un jeûne pour tout Juda ( 2 Chronique 20:3 ) ;

· David, 7 jours (2 Samuel 12:16-20 /Psaume 69:12,22 ;

· Daniel, 21 jours (Daniel 9:3 ) ;

· Néhémie (Néhémie 1:4 ) ;

· Le peuple d'Israël (Juges 20: 26-28, Lévitique 16:29) ;

· Le peuple de Ninive (Jonas 3:5-10) ;

· Esaïe 58:2-4 : « Que nous sert de jeûner, si tu ne le vois pas? De mortifier notre âme, si tu n'y as point égard ? -Voici, le jour de votre jeûne, vous vous livrez à vos penchants, Et vous traitez durement tous vos mercenaires » ;

· Ésaïe 58:3-5 : «Voici, vous jeûnez pour disputer et pour quereller, pour frapper méchamment du poing; vous ne jeûnez pas comme le veut ce jour, pour que votre voix soit entendue en haut » ;

· Ésaïe 58:4-6 : « Est-ce là le jeûne auquel je prends plaisir, un jour où l'homme humilie son âme? Courber la tête comme un jonc et se coucher sur le sac et la cendre, est-ce là ce que tu appelleras un jeûne, un jour agréable à l'Éternel ? » ;

· Ésaïe 58:5-7 : « Voici le jeûne auquel je prends plaisir: détache les chaînes de la méchanceté, dénoue les liens de la servitude, renvoie libres les opprimés, et que l'on rompe toute espèce de joug » ;

· Jérémie 36:5-7 : « Tu iras toi-même, et tu liras dans le livre que tu as écrit sous ma dictée les paroles de l'Éternel, aux oreilles du peuple, dans la maison de l'Éternel, le jour du jeûne; tu les liras aussi aux oreilles de tous ceux de Juda qui seront venus de leurs villes » ;

· Jérémie ( 36:8-10) : « La cinquième année de Jojakim, fils de Josias, roi de Juda, le neuvième mois, on publia un jeûne devant l'Éternel pour tout le peuple de Jérusalem et pour tout le peuple venu des villes de Juda à Jérusalem » ;

· Joël (1:13-15) : « Publiez un jeûne, une convocation solennelle! Assemblez les vieillards, tous les habitants du pays, dans la maison de l'Éternel, votre Dieu, et criez à l'Éternel! » ;

· Zacharie 8:18-20 : « Ainsi parle l'Éternel des armées: le jeûne du quatrième mois, le jeûne du cinquième, le jeûne du septième et le jeûne du dixième se changeront pour la maison de Juda en jours d'allégresse et de joie, en fêtes de réjouissance. Mais aimez la vérité et la paix ».

2.2.3.- Le Yom Kippour ou le jour du grand Pardon 

La seule fois où un jeûne est expressément requis dans la Bible c'est dans l'Ancien Testament pour le jour d'expiation, le Yôm Kippour : « c'est ici pour vous une loi perpétuelle, au septième mois, le dixième jour du mois, vous humilierez vos âmes, vous ne ferez aucun ouvrage, ni l'indigène, ni l'étranger qui séjourne au milieu de vous ( Lévitique 16:29) ».

Yom Kippour est un mot hébreu dérivant de yom hakippurim, qui signifie «jour du Grand Pardon»3(*)6. Cette fête est célébrée le dixième jour de tishri (le premier mois de l'année civile juive, le septième mois de l'année ecclésiastique dans le calendrier juif qui a lieu en septembre ou la première quinzaine d'octobre). C'est l'apogée de l'observance des dix jours de pénitence, qui commencent avec le nouvel an, et la plus sacrée des fêtes juives; elle représente les «jours très saints». Yom Kippour est une journée de recueillement, d'examen de conscience, de retour sur soi et de prières pour obtenir le pardon. Kippour apporte le pardon pour les péchés commis envers Dieu, mais non pour ceux commis envers le prochain, à moins qu'on ne se réconcilie avec lui à cette occasion. C'est également le jour où chaque individu prend de nouvelles résolutions pour l'année suivante.

Le but de tout ce que l'on fait à Yom Kippour (jeûne, prières et autres) est d'obtenir la décision divine de suspendre le jugement pour nos mauvaises actions. Et pour cela, il faut éprouver une sincère repentance, c'est à dire identifier ces actions, les avouer et regretter ce que l'on a fait. Il est évident qu'un profond désir de ne pas retomber dans ces mêmes erreurs doit accompagner toute repentance.

La perception erronée que Kippour ou Yom Kippour doit être considéré comme un jour de grande tristesse, tient probablement au fait que c'est un jour de long jeûne d'environ 25 heures. Mais le but de cette célébration n'est pas tant la mortification ou punition apportée par l'absence de nourriture, mais surtout d'aider à une réconciliation entre tous les hommes d'une part et d'autre part entre les individus et leur créateur. D'ailleurs le Talmud (Transcription de la tradition orale juive, ouvrage fondamental destiné à servir de code du droit judaïque) parle de Yom Kippour comme un des jours les plus joyeux de l'année pour le peuple Juif ( Mishna Yoma 8 :9).

Yom Kippour est le seul jeûne mandaté par la Thora (Lévitique 23:27). Le jeûne dure 25 heures et il est également interdit de boire quoi que ce soit, d'avoir des relations sexuelles ou de porter des chaussures en cuir. C'est pour cela que le jour de Kippour, vous verrez plusieurs Juifs vêtus de magnifiques costumes et robes et portant des paires de chaussures de sport en toile. Les jeunes de moins de 9 ans ainsi que les personnes malades, les femmes qui viennent d'accoucher dans les derniers 3 jours ne sont pas tenus d'observer le jeûne.

2.3.- LE JEUNE DANS LE NOUVEAU TESTAMENT

Dans le Nouveau Testament, le jeûne est une discipline largement pratiquée, entre autres par les Pharisiens et les disciples de Jean Baptiste. Jésus a débuté son ministère public par un jeûne prolongé de quarante jours (Matt. 4:1,2). Lorsque les apôtres de Jésus furent critiqués parce qu'ils ne jeûnaient pas, Jésus prit leur défense en disant qu'ils n'avaient pas à jeûner alors qu'il était présent, mais Il ajouta qu'ils allaient jeûner après qu'il leur aura été enlevé (voir Matthieu 9:14,15). Jésus n'a pas donné de directives quant à la fréquence du jeûne. Il enseigna que leur jeûne devait être différent de celui des Pharisiens, en ce sens d'être démontré à Dieu et non à autrui pour les impressionner (Matt. 6:16-18).

Le jeûne fut, par la suite pratiqué dans l'église du Nouveau Testament lorsque des anciens étaient ordonnés et lorsque des personnes étaient appelées à un ministère particulier ou un projet ( Actes 13:1-3). Pratiqué aussi, semble-t-il fréquemment, par Paul et autres « Leaders Chrétiens » (1Cor 7:5; 2 Cor 6:5).

Dans Actes 13:2, nous pouvons constater que la pratique du jeûne collectif était toujours vivante dans l'ère du Nouveau Testament : "Pendant qu'ils servaient le Seigneur dans leur ministère et qu'ils jeûnaient, le Saint Esprit dit: « Mettez-moi à part Barnabas et Saul pour l'oeuvre à laquelle je les ai appelés »

Actes 27:8-10 : « Un temps assez long s'était écoulé, et la navigation devenait dangereuse, car l'époque même du jeûne était déjà passée.». Dans 2 Corinthiens 6:5 : « Paul recommande aux ministres de Dieu de persévérer [...] dans les jeûnes[....] ».  Plus loin, il déclare encore dans 2 Corinthiens 11:26-28 : «J'ai été dans le travail et dans la peine, exposé à de nombreuses veilles, à la faim et à la soif, à des jeûnes, au froid et à la nudité ».

2.3.1.- Jésus Christ et le jeûne 

Avant de commencer son ministère public, Jésus pratique le jeûne et la prière (Mat. 4:2). Par la suite, il a invité les disciples à jeûner ( Matthieu 6 : 16-18).

Dans Matthieu 6:15-19, Jésus pose les conditions de la vraie pratique du Jeûne:

Lorsque vous jeûnez, ne prenez pas un air triste, comme les hypocrites, qui se rendent le visage tout défait, pour montrer aux hommes qu'ils jeûnent. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. Mais quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage, afin de ne pas montrer aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père qui est là dans le lieu secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. 

En prononçant ces Paroles, Jésus ne voulait pas s'opposer au jeûne, il voulait seulement montrer que le jeûne est une oeuvre de justice qui relève de la relation intime de l'homme à Dieu et que le jeûne ne devait pas être accompagné d'hypocrisie et d'effet de démonstration. 

2.3.2.- Le Jeûne dans le christianisme 

Cette partie de notre travail est le résumé d'informations tirées sur le site Internet de Géocities consulté le 10 décembre 2004 qui lui-même a été inspiré des ouvrages d'auteurs anglophones tels: Elmet L.Towns (Fasting for Spiritual Breakthrought), Ronnie W. Floyd (The Power of Prayer and Fasting) et Richard J. Foster (Célébration of Disciple)3(*)7.

Pendant les deux premiers siècles de son existence, l'Église institua le jeûne comme une préparation volontaire avant de recevoir les sacrements de la sainte communion et du baptême, ainsi que pour l'ordination des prêtres. Ensuite, ces jeûnes devinrent obligatoires. Au Concile d'Hippone (393), le jeûne est notifié par écrit; on conseille puis on impose le jeûne avant la communion. Au VIe siècle, le jeûne de carême de quarante heures, correspondant au temps que le Christ a passé dans la tombe, devint un jeûne de quarante jours pendant lesquels un seul repas par jour était permis. Après la Réforme, le jeûne fut conservé par la plupart des églises protestantes et rendu facultatif dans certains cas. Les protestants stricts comme les puritains condamnaient cependant de la même manière les fêtes et les jeûnes traditionnels. L'église orthodoxe respecte les jeûnes de manière rigoureuse.

Épiphane (315-403), évêque de Salamine de Chypre, s'interroge en ces termes : « Qui ne sait pas que le jeûne du quatrième et du sixième jour de la semaine est observé par les chrétiens de par le monde? » Au début de l'histoire de l'Église, les chrétiens jeûnaient deux fois la semaine, les mercredi et vendredi, ayant choisis ces jours pour se distinguer des Pharisiens qui jeûnaient les mardi et jeudi. Le jeûne de longue durée avait aussi été pratiqué avant la Pâque pour préparer les disciples spirituellement à la célébration de la résurrection de Jésus.

Plus tard, ce jeûne est devenu un jeûne d'une journée par semaine, plusieurs semaines avant la Pâques. Certaines réminiscences de cette pratique demeurent dans la tradition catholique, soit l'abstention de viandes le vendredi et d'un carême durant les quarante jours précédent la Pâques. Il était aussi d'usage pour les chrétiens de la période post-apostolique de jeûner pour se préparer à leur baptême.

La discipline du jeûne est depuis longtemps associée à la réforme et aux mouvements de réveil dans la chrétienté. Les fondateurs des monastères pratiquaient régulièrement le jeûne dans leur vie spirituelle. Même si, plus tard, leur pratique du jeûne a évolué vers l'ascétisme, en vaine quête de salut par ce moyen, il est probable que les premiers moines auraient été motivés dans leurs jeûnes par leurs prières pour un réveil et une réforme dans l'église.

Dans l'église catholique, le jeûne eucharistique est une pratique qui consiste à s'abstenir de nourriture et de boisson avant de recevoir la communion. Jusqu'à la réduction à trois heures avant la communion par Pie XII en 1953, puis à une heure par Paul VI en 1964, il fallait ne rien avoir mangé depuis minuit pour pouvoir communier le matin. De nos jours, dans l'église catholique, l'organisation du jeûne et de l'abstinence est laissée en grande partie à l'initiative personnelle et aux évêques; les seuls jeûnes obligatoires pour les fidèles de l'église catholique sont ceux du mercredi des cendres et du vendredi saint.

2.3.3.- Le Jeûne et les premiers chrétiens 

Dans le nouveau testament, aucun ordre de jeûner n'est donné aux chrétiens, comme il était le cas dans l'ancien testament. Jésus a seulement posé les conditions d'un vrai jeûne dans Matthieu 6 : 18. Cependant, en plus de l'exemple du nouveau testament nous montrant que Jésus a lui-même jeûné pendant 40 jours (Matthieu 4 : 2), nous avons aussi d'autres exemples de premiers chrétiens qui ont pratiqué le jeûne. Entre autres, signalons :

· Le jeûne de Jean Baptiste ( Luc 1:15): parce que Jean Baptiste précédait Jésus dans sa grande mission, il avait fait le voeu de Naziréat, voeu qui réclamait de lui qu'il jeûne et s'abstienne de toute liqueur forte. C'était un mode de vie volontairement adopté, choisi par Jean qui le désignait comme mis à part ;

· Anne, la prophétesse avait pratiqué le jeûne (Luc 2:36-38) : restée veuve et âgée de quatre vingt-quatre ans, elle ne quittait pas le temple, et elle servait Dieu nuit et jour dans le jeûne et dans la prière.

· Le jeûne de Paul ( Actes 9:9) : Saul de Tarse qui devint Paul après sa conversion à Jésus, fût frappé de cécité alors qu'ils persécutaient les chrétiens. Il n'était pas seulement aveugle physiquement, mais il n'avait aucune idée de la direction qu'allait prendre sa vie. Après s'être privé de nourriture et d'eau pendant trois jours, Ananias vint le visiter et sa vision fut restaurée, autant sa vision physique que spirituelle ;

· Les Anciens d'Antioche ( Actes 13 :3) ;

· L'église de Lystre ( Actes 14 :2).

2.4.- LE JEUNE ET LA PRIERE 

Nous avons déjà défini le jeûne biblique comme une manière d'exprimer à Dieu notre vrai déplaisir de nous-même et de nos péchés avec une vraie humilité procédant de la crainte de Dieu. Maintenant définissons la prière. Le pasteur Kayayan, dans son ouvrage la Prière en esprit, la définit comme « une relation entre Dieu et l'être humain  et entre l'être humain et son Dieu, vice versa». Il poursuit :

La relation entre les gens est déjà quelque chose de complexe qui passe par la parole et par bien d'autres façons d'être. C'est la même chose pour notre relation à Dieu. La prière est parfois quelque chose que l'on dit à Dieu, mais c'est d'abord le fait de se placer devant Dieu. La prière n'est pas une formule magique, une pratique superstitieuse : c'est une conversation avec le Dieu tout- puissant plein d'amour et de grâce3(*)8.

Après avoir mis l'accent sur le sens de la prière, il est important de faire remarquer que, dans le contexte biblique, le jeûne accompagne d'habitude la prière, il est souvent difficile de parler de Jeûner sans l'idée de prier ( Actes 13 : 3), mais l'inverse n'est pas tout aussi vrai puisqu'on peut toujours prier sans jeûner. Dans cette section, nous allons aborder dans un premier temps le lien existant entre le Jeûne et la prière, ensuite la notion importante du bon et du mauvais usage du jeûne et de la prière.

2.4.1.- Le jeûne associé à la prière 

Dans la majorité des cas, les jeûnes pratiqués dans les religions judéo-chrétiennes sont toujours liés à la prière. Dans Matthieu 17:21, Jésus a dit à ces disciples : "Mais cette sorte de démon ne sort que par la prière et par le jeûne." Jeûner pour obtenir une réponse est comme prier. Parfois quelqu'un peut prier avec foi, et Dieu entend et répond automatiquement. La personne n'a pas besoin de revenir à la charge comme un enfant qui tire la jupe de sa mère tant qu'il n'obtient pas l'attention de celle-ci. Alors d'autres fois, on doit continuellement demander avant que Dieu donne une réponse."Demandez, et l'on vous donnera; cherchez, et vous trouverez; frappez, et l'on vous ouvrira ( Matt 7:7). Nous trouvons des exemples de cette association dans plusieurs passages du nouveau testament :

Dans Marc 9:29, Le Seigneur dit aux disciples qui n'avaient pas pu chasser un démon : «Cette sorte de démon ne peut sortir en aucune manière, si ce n'est par la prière et par le jeûne ». Selon Actes 13:3, le jeûne associé à la prière était nécessaire pour permettre à l'église de discerner la pensée de Dieu, de comprendre ce qui est pur ou impur. Dans les Actes des Apôtres 14 : 23, nous apprenons également que dans chaque assemblée, les apôtres choisirent des anciens, prièrent et jeûnèrent et les recommandèrent au Seigneur.

La prière associée au jeûne permet au chrétien de se revêtir de la puissance de Dieu pour accomplir des oeuvres extraordinaires et pour aussi déterminer la volonté de Dieu dans ses actes. Le jeûne et la prière, comme l'a fait remarquer le théologien Yan Newberry, «  n'est pas un moyen d'obtenir ce que le chrétien veut, c'est plutôt devenir ce que Dieu veut qu'il soit 3(*)9 ». Et le pasteur Kayayan a aussi opiné dans le même sens :  «Un grand nombre de prières donnent l'impression que le seul but de cette pratique spirituelle est celui d'obtenir de Dieu tout ce que la personne désire, et d'obtenir n'importe quoi, comme si Dieu était notre obligé [...] ou une sorte de garçon de courses céleste(sic) préposé à notre service, toujours prêt à accourir à nos appels et demandes4(*)0 ». Il s'agit d'une grave erreur de penser que Dieu peut donner aux chrétiens tout ce qu'ils demandent dans les services de jeûne et de prière, car ce ne sont pas toutes les demandes qui répondent à sa volonté.

2.4.2.- Le bon usage du jeûne et de la prière 

Il est important de commenter ce passage d'Esaie 58 : 6-8 sur le Vrai Jeûne : 

Voici le jeûne auquel je prends plaisir : Détache les chaînes de la méchanceté, dénoue les liens de la servitude, Renvoie libres les opprimés, Et que l'on rompe toute espèce de joug; Partage ton pain avec celui qui a faim, Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile; Si tu vois un homme nu, couvre-le, Et ne te détourne pas de ton semblable. Alors ta lumière poindra comme l'aurore, Et ta guérison germera promptement; Ta justice marchera devant toi, Et la gloire de l'Éternel t'accompagnera. 

Personne ne doit interpréter ces versets dans le sens que le prophète redoute le jeûne et qu'il est déconseillé aux serviteurs de Dieu de jeûner. Dieu ne demandait pas à son peuple de ne pas jeûner, loin de là. Mais, il voulait que son peuple continue à jeûner et qu'il élargisse le jeûne au travers de ses actions de tous les jours. Par la bouche du prophète Joël, Dieu appelle clairement son peuple à jeûner (Joël 2:12) : « Maintenant encore, dit l'Éternel, Revenez à moi de tout votre coeur, Avec des jeûnes, avec des pleurs et des lamentations! » Nous pouvons assumer qu'Esaïe communiquait le désir de Dieu que le jeûne soit exercé au point où ses effets soient évidents au-delà de l'intimité de la personne qui jeûne.

Esaïe 58 est donc un modèle des fruits que Dieu attend d'une dévotion et d'une foi véritables. Bien utilisé, le jeûne peut nous aider à lui présenter ces fruits. Le Théologien Elmer L. Towns4(*)1 a résumé en neuf points ce passage d'Esaie. Il considère ces neufs points comme neuf bases du jeûne auxquels Dieu prend plaisir: (1) Détache les chaînes de la méchanceté, (2) Dénoue les liens de la servitude, (3) Renvoie libres les opprimés, (4) Rompe toute espèce de joug, (5) Partage ton pain avec celui qui a faim, (6) Fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile, (7) Alors ta lumière poindra comme l'aurore, (8) Ta guérison germera promptement, (9) Et la gloire de l'Éternel t'accompagnera.

2.4.3.- Le Mauvais usage du jeûne et de la prière 

Comme nous venons de le faire remarquer dans l'un des paragraphes précédents, lorsque nous jeûnons et prions, nous devons nous soumettre à la volonté de Dieu. Mais ce n'est pas le contraire qui doit se produire, pour que Dieu se soumette à notre volonté. Le plus souvent les services de jeûne et de prière se font dans un but de forcer Dieu à répondre à tous nos besoins. Cette pratique est considérée comme un mauvais usage du jeûne et de la prière. Certains leaders ecclésiastiques en organisant ces services de jeûne et de prière, proposent de répondre aux besoins des fidèles. Le théologien André Godin qualifie une telle façon d'agir de religion fonctionnelle et a fait un grand développement des dangers de celle-ci. Elle offre des croyances et une relation à Dieu qui ont simplement pour but d'accomplir des désirs, de combler des manques et d'apaiser des angoisses4(*)2.

Godin poursuit que  :

La religion fonctionnelle place Dieu en position de donner du sens à ce qui serait absurde par ailleurs, d'esquiver illusoirement la condition mortelle, de cimenter des sociétés, et même, finalement, de faire fonctionner des institutions ou des groupes religieux. Certes, la relation avec un tel Dieu peut culminer dans un sentiment d'adoration et de reconnaissance, mais elle maintient l'individu sur un axe de dominance-soumission qui s'ouvre difficilement à l'amour4(*)3.  C'est un fait courant de tenter d'utiliser Dieu pour arriver à ses fins : qui ne fait pas de prière pour obtenir des réussites en tout genre : examen, emploi, mariage, la protection contre le malheur, les maladies et la mort4(*)4. Certes, l'Evangile nous encourage à demander (Mat 7:7-8), mais ce n'est pas pour mettre Dieu à son service ou pour combler un simple désir d'expériences spirituelles sensibles. Une telle attitude peut véhiculer un cortège d'illusions masquées. Il s'agit d'être prudent et de discerner de quelles expériences il s'agit : Expérience du moi ? Expérience de Dieu? De quel Dieu?4(*)5 

 

  Pour éviter de confondre la volonté de Dieu avec la sienne et de se situer dans une fonctionnalité religieuse, il est nécessaire de discerner ce qui relève d'une volonté d'accomplissement de désirs compensatoires et ce qui relève d'une ouverture authentique à l'autre. L'aspect fonctionnel de la religion, avec son cortège d'illusions, peut voiler longtemps le mouvement vers la découverte et la connaissance de Dieu. La prière fonctionnelle devrait, par la maturité progressive du croyant, le conduire plus loin; dans ce sens, l'inexaucement peut devenir source de sagesse et servir à faire progresser vers l'attitude ordinairement réclamée du croyant : Que Ta volonté soit faite ! Selon le psychanalyste Th. Reik, l'évolution de l'homme vers sa maturité religieuse présente trois mutations du désir: a) Que ma volonté se fasse - b) Que ma volonté se fasse avec l'aide de Dieu - c) Que Ta volonté se fasse4(*)6

D'un autre coté, Etienne Lhermenault et Bernard Delépine ont aussi fait un très long développement sur des erreurs à éviter dans la pratique du jeûne:

Parce qu'il s'agit d'un acte de piété dans lequel notre corps est impliqué, la pratique du jeûne comporte quelques risques au même titre que la prière, l'offrande (ou l'aumône), [ ...] Jésus prend soin dans le Sermon sur la montagne d'avertir ses auditeurs contre les tentations liées aux actes extérieurs de la piété (Matthieu 6:1-8). Son souci est d'inviter le croyant à plus d'authenticité : que ce qu'il exprime par des gestes soit en accord avec ce qu'il est réellement et non avec ce qu'il désire paraître ! Il fait ainsi écho aux prophètes de l'Ancien Testament qui insistaient sur le coeur plus que sur le rite extérieur "Déchirez vos coeurs, et non vos vêtements..., selon Joël 4(*)7.

Ils ont repéré trois risques liés à l'aspect extérieur du jeûne4(*)8 :

· Le formalisme : Le livre du prophète Esaïe dénonce l'attachement excessif du peuple à la forme au détriment de l'esprit qui doit y présider. «Vous jeûnez pour vous disputer et vous quereller, pour frapper méchamment du poing, [...] Est-ce là le jeûne que je préconise un jour où l'homme s'humilie ? S'agit-il de courber la tête comme un jonc, de se coucher sur le sac et sur la cendre...? » (Esaïe 58:4). Le jeûne mis en cause ici paraît rituellement correct mais est véritablement scandaleux. L'attention de Dieu exprimée par le geste est démentie par l'injustice manifestée à l'égard du prochain. Il y a dans le formalisme une erreur de stratégie. Le croyant use son énergie à se conformer aux détails extérieurs pour éviter de se mettre en cause sur le plan intérieur.

· L'ostentation : Jésus, lui, s'en prend à la publicité que nous pouvons mettre en oeuvre autour de nos actes de piété : "les hypocrites ... se rendent le visage tout défait pour montrer aux hommes qu'ils jeûnent"( Matthieu 6:16). Cette attitude correspond au désir de paraître, d'être bien vu des hommes. Il y a dans l'ostentation une erreur de destinataire. Le croyant privilégie un rapport de domination ou au moins de comparaison avec les autres au lieu de rester dans une relation de soumission à Dieu. Cela peut revêtir des formes plus ou moins subtiles. Le mimétisme en est une: nous jeûnons simplement pour ne pas faire moins que les autres ; la revendication en est une autre : nous jeûnons pour asseoir notre légitimité au sein de la communauté !

· La superstition : Plus généralement, l'écriture combat les conceptions païennes, quasi magiques des actes de piété. Le jeûne n'est en aucune manière une façon de contraindre Dieu à exaucer notre prière, ni de le manipuler pour qu'il acquiesce à notre volonté. Ce n'est pas non plus un exercice de spiritualité mystique, de recherche d'un état d'extase pour obtenir de sensationnelles révélations divines. Il y a dans la superstition une erreur de compréhension majeure. Le croyant cherche ailleurs qu'en Dieu et son amour, le moyen de son salut. Il s'efforce d'en être un acteur méritant et de maîtriser, si c'était possible, l'action du Dieu vivant.

* 26 Société Biblique canadienne, Traduction Oecuménique de la Bible, Québec, 1995, p. 1841.

* 27 Etienne LHERMENAULT et Bernard DELEPINE : Dossier sur le jeûne et la prière, publié sur le site Internet : http://www.lueur.org/textes/dossce/d1jeunprier.php

* 28 Ibid. - (Le calendrier Hégirien: C'est un calendrier lunaire adopté vers 632 après J-C. par les musulmans. Hégir, c'est le premier jour de l'An I de l'ère musulmane correspondant au jour 16 du mois 7 de l'année 622 J-C., c'est le jour où le prophète Mohammed quitta La Mecque pour Médine. C'est une année de 12 mois (ou lunaisons) ayant alternativement 29 et 30 jours (comptés à partir du coucher du soleil du jour civil précèdent.) http://membres.lycos.fr/moussaoua/Traditions.htm

* 29 Yan NEWBERRY, « Disponible devant Dieu: une étude sur la pratique du jeûne biblique », Pierrelatte, Editions Biblos, p. 89.

* 30 http://www.geocities.com/roijesus/jeune, site consulté le 10 novembre 2003 et inspiré des ouvrages de Elmet L.Towns (Fasting for Spiritual Breakthrought, ed. Regal Book, 1996, 252pp.), Ronnie W. Floyd (The Power of Prayer and Fasting, Word publishing, 1997, 224pp.) et Richard J. Foster (Célébration of Disciple, Harper San Francisco, 1988, 256pp.)

* 31 Ibid.

* 32 Ibid.

* 33 Ibid..

* 34 Ibid..

* 35 Jean-François et Catherine GOTTE. «Le jeûne et la vie chrétienne», la revue Ichthus, mai 1984, pp.13-14.

* 36 Hubert JOURNO et Jean Paul SEBAG. « Yom Kippour» , 2002 , document publié sur le site : http://www.harissa.com/D_Religion/yomkippour.htm consulté le 15 octobre 2004.

* 37 http://www.geocities.com/roijesus/jeune/, site consulté le 21 janvier 2004.

* 38 Aaron.R. KAYAYAN, La Prière en Esprit, Perspectives Reformées, s.d., Ilinois , p. 55.

* 39 Yan Nweberry, Op.Cit. p. 83.

* 40 Aaron.R. KAYAYAN, Op. Cit, p. 37.

* 41 Elmet L. TOWNS, Fasting for Spiritual breakthrough, ed. Regal Books, 1996, p. 252.

* 42 A. GODIN, Psychologie des expériences religieuses : Le désir et la réalité, Paris, Éditions Le Centurion, 1981, p. 268.

* 43 Ibid, pp. 64-65.

* 44 ibid., p. 44

* 45 Ibid., p. 24.

* 46 T. REIK, «From Spell to Prayer», dans Psychoanalysis, 3 (4) 1955, pp.3-26.

* 47 Etienne LHERMENAULT et Bernard DELÉPINE, Loc. Cit.

* 48 Ibid.

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