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La coopération judiciaire pénale dans la zone CEMAC

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par Théophile NGAPA
Université de Dschang - Cameroun - DEA en Droit Communautaire et Comparé Cemac 2005
  

Disponible en mode multipage

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DEDICACE

« Si le fleuve fait des détours, c'est parce que personne ne lui montre le chemin »

A ma grande famille pour m'avoir toujours montré le bon chemin,

Et plus spécialement à ma mère TCHOUGUET Marie-Claire et à mon oncle Jean NGAPA,

Je dédie ce travail.

REMERCIEMENTS

Nul ne peut se vanter de se passer des Hommes. Ce travail qui s'achève est la parfaite illustration de cette pensée et je voudrais ainsi exprimer mes chaleureux remerciements à l'endroit de tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à sa réalisation.

Toute ma gratitude et ma reconnaissance vont d'abord à l'endroit de tous les enseignants de la faculté des sciences juridiques et politiques de l'université de Dschang, avec une mention particulière :

Au Professeur KALIEU ELONGO YVETTE RACHEL pour sa rigueur, sa disponibilité et sa patience dans la conduite de mes premiers pas dans la recherche.

Au Professeur ANOUKAHA FRANCOIS, doyen de la faculté, pour sa soif intarissable de donner à notre formation un label de grande qualité.

Au Docteur KEUBOU Philippe pour la documentation et ses conseils dans la recherche.

Aux Doctorants KEUFFI Daniel, TCHABO SONTANG Hervé Martial, NJIEUFACK Roland et MAGEU KAMDEM Joëlle qui ont accepté de relire ce travail en vue de son amélioration.

A Maître FOKOUA Hélène, des remerciements très particuliers pour l'assistance tant matérielle que morale dont elle n'a cessé de m'apporter à toutes les étapes ayant conduit à la réalisation de ce travail.

Au Docteur MAHOUVE Michel et à Maître HEUGANG Patrice pour leur soutien tant en conseil que documentaire.

Aux familles FUNZEU, NGOMPO, YAZE et SADO pour leur hospitalité et leur soutien.

Aux Abbés GANGOUE Charles et MBITCHOU Dieunedort Robert pour leurs conseils et leur soutien incessant.

A Mme KAYIM Justine pour son assistance matérielle et morale.

Je voudrais aussi remercier tous mes camarades et amis pour l'intérêt qu'ils ont toujours accordé à mon travail, plus particulièrement SIEWE Louis -Marie, NGUIFFEU T. Eddy L., DJOMNANG T., TCHOUPOU M. George, TAKAFFO K. Didier, OMVA ABA'A MEYONG, TSOPGNING Nathalie, TEPPI KOLLOKO Fidèle, MAGNE F. Viviane, CHAMKO T. Alvine, KEUMEKA N. Roseline, DACLEU Jacqueline Aimée, TEDONZO YEMDJEU Jeannot, NGASSA Levis, KOMBOU Hugues Anicet, KUIMO N. M. Bertrand, TOBIE Eric et KENFACK K. Amandine J.

A mademoiselle AWAMU MENEKEU Hemerance pour son assistance morale et sa compagnie au quotidien qui m'ont toujours réconfortées et encouragées dans la réalisation de ce travail.

Et à bien d'autres personnes dont les noms n'ont pas pu être cités ici.

PRINCIPALES ABREVIATIONS

- BEAC : Banque des Etats de l'Afrique Centrale

- CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

- GABAC : Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale

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- Ibid. : dans le même texte, par le même auteur

- NCPP : Nouveau Code de Procédure Pénale Camerounais

- OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

- Op. Cit. : Opere citato (Dans l'oeuvre précité)

- P/PP : page/pages

- Pdf : Portable document Format/ Format de document universel

- Rev. Sc. Crim. : Revue de Science Criminelle et de Droit Pénal Comparé

- UEAC : Union Economique de l'Afrique Centrale

- UMAC : Union Monétaire de l'Afrique Centrale

SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIERE PARTIE : LES ASPECTS NORMATIFS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 9

CHAPITRE I : LA DIMENSION POLITIQUE DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 11

SECTION I : LE RÔLE PRÉPONDÉRANT DU POUVOIR EXÉCUTIF DANS LA DÉFINITION DE LA POLITIQUE PÉNALE COMMUNAUTAIRE 11

SECTION II : LE POIDS IMPORTANT DES REVENDICATIONS DE SOUVERAINETÉ 20

CHAPITRE II - LA DIMENSION JURIDIQUE DE LA COOPÉRATION 30

SECTION I : L'HARMONISATION DES INCRIMINATIONS AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE 31

SECTION II : UNE HARMONISATION TIMIDE DES SANCTIONS 42

DEUXIEME PARTIE : LES ASPECTS OPERATIONNELS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 52

CHAPITRE I : LES CRITIQUES AVANCÉES CONTRE LES INSTRUMENTS CLASSIQUES DE COOPÉRATION 55

SECTION I : L'INADAPTATION DE CERTAINS MÉCANISMES D'EXTRADITION À LA VOLONTÉ D'EFFICACITÉ DANS LA RÉPRESSION 55

SECTION II : LES ENTRAVES À L'ENTRAIDE JUDICIAIRE 68

CHAPITRE II : L'ÉMERGENCE D'UN VÉRITABLE DROIT DE POURSUITE AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE 77

SECTION I : LES AVANCÉES RÉALISÉES PAR LE LÉGISLATEUR CEMAC 77

SECTION II : LES ÉVOLUTIONS ENVISAGEABLES 85

CONCLUSION GÉNÉRALE 91

RESUME

L'intégration économique a pour corollaire la consécration du principe de la libre circulation des personnes et des biens. Mais, il faut aussi éviter que l'ouverture des frontières ne se transforme pas en refuge pour les délinquants ayant commis des infractions dans un autre Etat. En effet, les délinquants peuvent circuler librement, les avoirs criminels aussi, mais pas la justice qui est confinée à l'intérieur des frontières étatiques. C'est pour faire face à ces difficultés que les Etats ont jugé nécessaire de coopérer entre eux afin de résorber au mieux ce problème grandissant de la criminalité transfrontalière. Mais, cette volonté se heurte très vite aux revendications de souveraineté de la part des Etats ; car, le droit pénal et la procédure pénale ont toujours été considérés comme des éléments fondamentaux de cette souveraineté. Ce conflit s'observe beaucoup plus dans le processus d'élaboration des normes communautaires devant régir ou faciliter la coopération judiciaire. Le législateur CEMAC, grandement aidé dans son entreprise par son homologue de l'OHADA, essaye d'harmoniser autant que possible les normes communautaires touchant à la coopération judiciaire afin de faciliter la mise en oeuvre des instruments classiques de coopération qu'il a retenus. Cet effort du législateur CEMAC est déjà fort appréciable et nous permet de penser à d'éventuelles évolutions pour une plus grande efficacité de la coopération répressive internationale.

ABSTRACT

The economical integration has an effect on the consecration of the principle of free circulation of goods and people. But, the borders opening should not be transformed into a sort of refuge or shelter for delinquent who have committed offences in another state. In fact, delinquent can move freely, criminals too, but justice which is confined in the status borders does not circulate. In order to face these difficulties, States decides to cooperate between them in order or so as to bring together a solution to the problem of transborders criminality becoming very serious. But, this precious idea collides with the Status's claims of sovereignty because the penal law and the penal procedure have always being considered as the fundamentals elements of this sovereignty. This conflict is more observed in the elaboration process of community norms which are supposed to facilitate the judiciary cooperation. The CEMAC legislator greatly helped by his homologue of OHADA tries to harmonize the community norms touching the judiciary cooperation in order to make easier the putting in place of classical instruments of cooperation which he has detained. This CEMAC's effort is highly appreciated and it permits us to think of possible evolution for a very big efficiency of the international repressive cooperation.

Introduction générale

« L'union fait la force ». Cette expression transposée au niveau des Etats montre la nécessité pour eux de collaborer, voire de s'unir pour faire face plus efficacement aux nouvelles contraintes politiques, économiques et sociales. C'est sans doute ce qui justifie le vaste mouvement de regroupements régionaux et sous-régionaux auquel nous assistons aujourd'hui. Toutes les barrières politiques, économiques et territoriales tendent à s'estomper progressivement sous le coup de la volonté ou des contraintes du moment. L'on se rapproche à petits pas vers une sorte de « pays planétaire ». En effet, l'après-seconde guerre mondiale a été marqué par une revitalisation du processus d'intégration politique et économique ; l'intégration économique étant la forme de regroupement régional la plus en vue aujourd'hui. Elle se présente comme une association d'Etats qui se mettent ensemble pour faciliter les échanges commerciaux entre eux et créer à terme une union économique ; Cette union étant fortement marquée par le principe de la libre circulation des biens, des capitaux et des personnes.

En fait, « en dépit des apparences, il n'est plus possible aujourd'hui de méconnaître la superposition des normes nationales, régionales et mondiales, ni la surabondance d'institutions et de juges, nationaux et internationaux, à compétence élargie. Ces réalités nouvelles font évoluer le droit vers des systèmes interactifs, complexes et fortement instables. Plus que d'une défaite du droit, c'est d'une mutation qu'il s'agit, dans la conception même de l'ordre juridique »1(*). Ce phénomène de transformation de l'ordre juridique au niveau international constitue l'une des dynamiques saillantes qui traversent le droit en tant qu'objet de recherche. Cette évolution a eu pour effet de placer le droit au coeur des modes de régulation entre les différentes échelles de la gouvernance internationale (Etats, communautés régionales, organisations internationales), mais aussi de faire de ce dernier un objet de négociation entre ces niveaux de pouvoir. L'intégration ne signifiant pas la perte de la part des Etats de leur autonomie, ils conservent l'essentiel des attributs de leur souveraineté comme le droit de rendre justice sur leur territoire. Mais, il s'avère que l'ouverture des frontières entraîne la multiplication des échanges et provoque une augmentation de la criminalité transfrontalière dont l'action est facilitée par la disparition des contrôles. La coopération étatique s'impose dès lors comme « la solution » aux yeux de la quasi- totalité des acteurs, qu'ils soient professionnels, politiques ou administratifs. C'est pour concilier la nécessité d'intégration et l'exigence de justice et de sécurité que les Etats membres de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)2(*) ont mis sur pied des mécanismes de coopération judiciaire.

On entend couramment par «coopération«, une aide réciproque, une collaboration dans un but commun3(*). On entend également par «judiciaire« tout ce qui relève de la justice et de son administration. La coopération judiciaire peut donc être entendue comme la mise en collaboration, dans un but commun, des différentes juridictions. Elle vise donc à rapprocher les différentes législations et procédures des pays afin d'améliorer l'accès à la justice et son exercice. L'idée de la coopération n'est pas nouvelle dans la zone CEMAC. En fait, avant les indépendances, l'administration coloniale avait déjà mis sur pied des conventions favorisant les échanges entre les juridictions des colonies en matière judiciaire. Le premier texte spécifique régissant la coopération judiciaire entre la majorité des Etats membres de la CEMAC fut la Convention multilatérale de justice de Tananarive adoptée le 21 Septembre 19614(*). Plusieurs accords bilatéraux étaient aussi en vigueur entre les pays de la CEMAC ou entre l'un de ces pays et un Etat tiers à la sous-région. C'est au cours de la cinquième conférence des chefs d'Etats et de gouvernements de la CEMAC tenue à Brazzaville au Congo le 28 Janvier 2004 que les Etats membres ont réaffirmé leur engagement en faveur de la coopération judiciaire. En effet, au cours de cette réunion, deux textes majeurs devant régir la coopération judicaire entre ces Etats ont été adoptés. Il s'agit tout d'abord de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC, adopté sur le modèle du traité type d'entraide judiciaire des Nations Unies5(*). Il s'agit ensuite de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC adopté lui aussi sur le modèle du traité type d'extradition des nations unies6(*). Ces deux textes ne sont pas encore entrés en vigueur faute de ratification par l'ensemble des Etats membres. Mais, il semble que leur entrée en vigueur est «imminente«7(*). La coopération judiciaire telle que régie par ces deux textes et la plupart des conventions internationales concerne aussi bien les domaines administratif, civil que pénal.

Sur le plan civil, la coopération judiciaire est régie pour l'essentiel par les règles internes des Etats parties en matière de droit international privé. Ces règles sont complétées par quelques dispositions de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC, notamment en ce qui concerne l'accès aux juridictions8(*) et la délivrance de la formule exécutoire9(*). C'est donc dans le domaine pénal que la coopération judiciaire a plus d'intérêt. C'est pourquoi nous avons choisi de limiter nos analyses à l'étude de « la coopération judiciaire en matière pénale dans la zone CEMAC ».

Le droit pénal, par définition l'un des éléments fondamentaux de la souveraineté des Etats, est aujourd'hui un enjeu de discussions entre les autorités étatiques. Depuis de nombreuses années dans le cadre communautaire, la définition du « droit pénal » a évolué d'une activité exclusivement territorialisée à une approche interétatique. Dans son acception la plus large, l'expression « droit pénal » désigne la branche du droit positif qui relève « de la répression par l'Etat des comportements de nature à créer un trouble pour l'ordre social »10(*). De façon théorique, il est facile de décomposer le domaine pénal en trois ensembles : le droit pénal général, le droit pénal spécial et la procédure pénale. Le droit pénal général concerne la structure de l'infraction et les conditions générales de la responsabilité pénale. Il fixe, par ailleurs, l'éventail des diverses peines et mesures de sûreté encourues et énonce les principes selon lesquels ces dernières sont prononcées et appliquées. Le droit pénal spécial représente « le catalogue » des infractions, avec, pour chacune, les divers éléments constitutifs et les sanctions applicables. Enfin, la procédure pénale détermine les règles techniques de mise en oeuvre de la répression et ses différents rouages. Cette branche du droit pénal pose ainsi les conditions dans lesquelles les infractions sont recherchées, découvertes, constatées, poursuivies et prouvées. Ce domaine concerne directement les autorités compétentes au niveau de leurs actions et de leurs attributions.

La procédure pénale précise donc les règles qui président à l'arrestation jusqu'à celles qui motivent la décision de jugement définitif. Elle recouvre ainsi les compétences des différentes juridictions répressives, la recherche et la constatation des infractions, l'administration de la preuve et l'imputabilité de celle-ci aux auteurs présumés. Par conséquent, les règles de procédure pénale établissent les attributions de certains magistrats et représentants de la police judiciaire qui peuvent, sans le respect d'un certain formalisme, porter atteinte aux libertés fondamentales du citoyen. Ainsi, le point d'équilibre entre la volonté d'accomplir la mission de police judiciaire d'une part, et le nécessaire respect des libertés publiques d'autre part constitue le coeur de ce sous-ensemble du droit pénal. Le droit pénal est donc un domaine fortement marqué par le principe de la territorialité11(*). Mais, une question demeure de savoir comment concilier l'encadrement de la justice dans la sphère territoriale nationale avec le principe de la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux ? Les biens et avoirs criminels peuvent circuler librement, les délinquants aussi, mais pas la justice qui est retenue au niveau des frontières étatiques au nom de la souveraineté. Il y a donc un risque énorme que l'ouverture des frontières se transforme très vite en lieu de refuge des délinquants ayant commis des infractions dans un autre Etat ; d'où la nécessité de coopérer.

En fait, dans le domaine de la lutte contre les phénomènes criminels, on assiste à la constitution d'un « récit » introduisant une corrélation entre les représentations de la menace et une interprétation normative de type : « pour lutter contre l'ennemi transnational que sont les phénomènes criminels en tous genres, les Etats doivent coopérer ». Préconisée par un grand nombre d'observateurs opérationnels et institutionnels, cette recette de politique publique traduit, pour une part, une perte de confiance dans la puissance de l'Etat, jugé incapable de faire face individuellement à une menace criminelle ayant su, elle, tirer parti de la mondialisation ; puisque les criminels sont les principaux bénéficiaires du développement contemporain des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Devant la puissance présumée croissante des organisations criminelles, les pouvoirs publics se définissent comme déficients et se doivent de s'organiser pour être le plus efficaces possible : ils doivent coopérer. Cette nécessité de coopérer de manière très étroite s'est réaffirmée aux lendemains des attentats terroristes perpétrés aux Etats-Unis le 11 Septembre 2001. Le législateur CEMAC n'a donc pas voulu attendre le choc des images pour prendre des mesures visant la prévention et la répression de la criminalité sous toutes ses formes.

Parler de la coopération judiciaire en matière répressive dans la zone CEMAC nous soumet de manière préalable à une triple difficulté : d'abord, parler des textes non encore ratifiés par l'ensemble des Etats membres et donc s'aventurer à effectuer un exercice auquel le juriste est peu habitué : se livrer à conjecture sur des règles du droit qui n'est pas encore en vigueur. Ensuite, le droit pénal et la procédure pénale sont des domaines traditionnellement marqués par le sceau de la souveraineté des Etats, «je punis, donc je suis«12(*), ces derniers étant généralement réfractaires à toute immixtion extérieure. Nous aurons donc la difficile mission de nous exercer sur un terrain miné où les « ayatollahs » du droit communautaire affrontent les « intégristes » de la souveraineté nationale. Enfin, le droit pénal des Etats membres de la CEMAC subi de fortes influences de la part de plusieurs autres organisations communautaires au bon rang desquelles l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A)13(*) dont font partie les six Etats qui composent la CEMAC. En effet, le législateur OHADA à travers les actes uniformes peut édicter des incriminations pénales qui auront vocation à s'intégrer dans le droit interne des Etats parties.

En dépit de ces difficultés, nous pouvons procéder par deux interrogations majeures : les règles juridiques régissant ou devant régir la coopération judiciaire pénale entre les Etats membres de la CEMAC seront-elles à la hauteur des attentes d'une lutte efficace contre l'impunité et la criminalité organisée ? La mise en oeuvre du processus de coopération ne sera-t-elle pas handicapée par des revendications de souveraineté de la part des Etats ?

Ces interrogations sont suscitées par le fait que certains instruments de politique criminelle adoptés dans le cadre de la CEMAC ont été créés pour faire face à la criminalité du 19e siècle, de telle façon que la réponse aux nouvelles formes de criminalité internationale est parfois problématique. Cette étude aura donc pour objet la politique criminelle de la CEMAC en matière de coopération judiciaire pénale. Mais, pour accéder à une plus grande intelligibilité de la matière, une précision méthodologique s'impose.

Pour une étude consacrée à la coopération judiciaire pénale dans la zone CEMAC, plusieurs choix méthodologiques s'offrent à nous. C'est ainsi que nous pouvons procéder par une étude documentaire, ce qui nous permettra de feuilleter les nombreux textes consacrés à cette matière. Mais, cette approche reste limitée car elle ne favorise pas de prendre en compte les facteurs politiques et sociaux qui déterminent souvent le choix des instruments de coopération. Une approche essentiellement analytique pourra permettre de mieux cerner le processus de coopération judiciaire, mais ne permettra pas d'envisager la matière comme un ensemble en vue de mieux ressortir les mérites et les imperfections ; objectif qui est facilement atteint lorsqu'on adopte une démarche critique. Tout ceci nous amène à opter pour une approche à la fois documentaire, analytique et critique de la question de la coopération judiciaire pénale dans la zone CEMAC. Ce qui nous permettra de parcourir les différents textes régissant cette matière en vue de les rendre plus intelligibles, en ressortir les imperfections et proposer des solutions que nous estimerons les mieux adaptées. Ceci permettra aux praticiens de trouver dans ce travail un guide pour la mise en oeuvre de la machine coercitive en cas de poursuites pénales mixtes. Cette étude vise aussi à offrir aux responsables politiques des propositions sur les moyens adéquats à donner à la justice pour qu'elle accomplisse sa propre mission qui est celle de lutter efficacement contre tous ceux qui violent les règles sociales et économiques ; car, avant même d'être un problème de pratique, la coopération judiciaire pénale est d'abord un problème de politique. Il faut donc trouver des voies et moyens de rendre le crime moins «appétissant« pour qu'on puisse dire, si l'on était Martin Luther King  «je fais un rêve« que tous les responsables des atteintes à l'ordre socio-économique sont punis sans exception.

Au total, comme nous l'avons souligné, la coopération judiciaire est avant tout un problème de normes. Il revient tout d'abord au législateur communautaire d'édicter les normes régissant la matière. La pratique de la coopération ne sera donc large ou restreinte, et son efficacité appréciée qu'en fonction des moyens préalablement mis à la disposition des acteurs de la coopération judiciaire par l'instance normative. C'est ce qui nous amène à adopter un plan en deux parties consacrés aux aspects normatifs (première partie) et aux aspects opérationnels (deuxième partie) de la coopération judiciaire pénale.

PREMIERE PARTIE : LES ASPECTS NORMATIFS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE

La lutte contre la criminalité tant « domestique » 14(*) que « moderne »15(*)  est avant tout un problème de normes. Les hommes politiques et tous ceux qui sont en charge de l'élaboration de la politique pénale communautaire doivent donner aux juges et policiers un cadre juridique propice à l'exercice de leurs missions qui est de lutter contre ceux qui violent les règles sociales et économiques. Ceci est d'autant plus justifié que les moyens mis à la disposition des autorités judiciaires sont souvent le reflet des considérations politiques de leurs auteurs. Il devient donc nécessaire, en particulier dans le domaine pénal, de ne pas exclure la dimension politique que peuvent revêtir certaines mobilisations juridiques. La dimension politique de la coopération judiciaire s'avère donc être l'une des plus importantes car elle est souvent le théâtre des affrontements entre des convictions politiques le plus souvent divergentes.

Toujours sur le plan normatif, après avoir résolu les difficultés d'ordre politique, d'autres considérations, en général juridiques s'imposent. En effet pour lutter efficacement contre la criminalité transfrontalière, il apparaît nécessaire de moderniser le cadre juridique afin d'améliorer la coopération16(*). Les différences juridiques ont été le plus souvent pointées du doigt comme l'une des principales raisons du blocage de la mise en oeuvre de la coopération judiciaire.

Ainsi, au-delà d'une simple description des décisions et dispositifs communautaires en matière de coopération pénale, il est particulièrement important de réaliser un véritable travail de déconstruction du processus de production de ces normes, en s'interrogeant sur ses dynamiques constitutives, qu'elles soient d'ordres juridique (chapitre II) ou politique (chapitre I).

CHAPITRE I : LA DIMENSION POLITIQUE DE LA COOPERATION JUDICIAIRE

Le droit pénal et la procédure pénale sont deux domaines qui sont réfractaires à toute immixtion externe parce que frappés du sceau de la souveraineté des Etats. En se regroupant sous la forme communautaire, les Etats ont entendu garder l'essentiel des attributs de leur souveraineté comme le droit de rendre la justice sur leur territoire. C'est ce qui explique sans doute que dans le traité constitutif de la CEMAC, le droit pénal et la procédure pénale n'aient pas été cités expressément comme faisant partie des objectifs. Le législateur OHADA quant à lui a tout de même prévu dans l'article 5 §2 du traité de l'OHADA que « les actes uniformes peuvent inclure les dispositions d'incrimination pénale ».

La nécessité de coopérer s'est imposée par elle-même. Mais, les Etats à travers leurs organes politiques représentant de l'exécutif se sont arrogés le privilège de la détermination de la politique pénale communautaire (section I). Ceci se justifie par la volonté de sacraliser la souveraineté étatique en contrôlant au maximum les immixtions des entités communautaires. Mais, une question se pose alors de savoir comment concilier cette revendication de souveraineté et la volonté d'efficacité dans la lutte contre la criminalité transfrontalière (Section II) ?

SECTION I : Le rôle prépondérant du pouvoir exécutif dans la définition de la politique pénale communautaire

Que l'on se situe dans le contexte du système institutionnel de la CEMAC ou dans celui de l'OHADA, le constat est le même : on assiste à une sorte de législature à l'exécutif (paragraphe I). Cette situation ne parait toujours pas très encourageante au regard de la théorie de la séparation des pouvoirs et du souci de protection des droits fondamentaux de l'homme. C'est pourquoi nous prônons une plus grande représentativité populaire dans la définition de la politique pénale communautaire (paragraphe II).

Paragraphe I : Une législature à l'exécutif

Le pouvoir exécutif, contrairement aux théories fondamentales de la séparation des pouvoirs, s'impose de plus en plus aujourd'hui comme un véritable législateur pénal17(*). Ceci s'observe très nettement à travers le rôle que jouent les représentants du pouvoir exécutif au sein du conseil des ministres de l'UEAC18(*) et du comité ministériel de l'UMAC19(*)(A) ainsi qu'au sein du conseil des ministres de l'OHADA dans l'édition des normes pénales communautaires. (B)

A- Le rôle actif des représentants de l'exécutif dans la CEMAC

La répartition des compétences entre les différents institutions et organes de la CEMAC est l'oeuvre de l'additif au traité de la CEMAC relatif au système institutionnel et juridique de la communauté20(*). L'article 20 de ce texte pose clairement que : « pour l'application du traité et du présent Additif, et sauf dérogations prévues par ceux-ci ou dispositions particulières contenues dans les conventions de l'U.E.A.C.et de l'U.M.A.C :

- la Conférence des Chefs d'Etat adopte des actes additionnels au traité ;

- le Conseil des Ministres et le Comité Ministériel adoptent des règlements, des directives, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis ;

- le Secrétaire Exécutif et le Gouverneur de la B.E.A.C. arrêtent des règlements d'application, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis ».

Il ressort de ces dispositions que seules les instances politiques représentant du pouvoir exécutif des Etats ont une fonction législative21(*), le rôle du parlement communautaire étant résumé selon les termes de l'article 26 de cet additif au traité, au « contrôle démocratique des institutions et organes participants au processus décisionnel de la communauté. » Il s'agit plus particulièrement de la conférence des chefs d'Etat de la CEMAC (1) et des institutions ministérielles (2).

1- La Conférence des chefs d'Etat de la CEMAC

La conférence des chefs d'Etat de la CEMAC est l'organe décisionnel suprême de la communauté. Au terme de l'article 3 de l'additif au traité, « elle détermine la politique de la communauté et oriente l'action du conseil des ministres de l'UEAC et du comité ministériel de l'UMAC ».

C'est sur la base de cette prérogative que la conférence des chefs d'Etat peut légiférer par voie d'actes additionnels22(*). Ces actes sont annexés au traité de la CEMAC et complètent celui-ci sans le modifier23(*). Ces actes additionnels s'imposent aux institutions de la communauté ainsi qu'aux autorités des Etats membres. Confortée par ces dispositions juridiques, la conférence des chefs d'Etat de la CEMAC s'est attelée à définir une sorte de « politique pénale communautaire. » Elle a depuis quelques années, adopté plusieurs textes tendant à renforcer et à faciliter la coopération judiciaire entre les Etats membres. Nous avons comme exemple par excellence l'accord de coopération judiciaire et l'accord d'extradition24(*) entre les Etats membres de la CEMAC. Ces deux textes ont pour but de faciliter la collaboration entre les Etats membres en vue de faire face à la montée grandissante des phénomènes de criminalité organisée et de criminalité transfrontalière.

Dans cette définition de la politique pénale communautaire, d'autres prérogatives sont aussi reconnues au Conseil des Ministres de l'UEAC et au Comité Ministériel de l'UMAC.

2- Le Conseil des Ministres de l'UEAC et le Comité Ministériel de l'UMAC

Le Conseil des Ministres de l'UEAC et le Comité Ministériel de l'UMAC sont des organes politiques de la CEMAC composés des représentants du pouvoir exécutif des Etats membres25(*). Dans l'exercice de leur mission, ces deux organes peuvent légiférer par voie de règlements. Ces règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tous les Etats ; sauf le cas des règlements-cadres qui ne sont directement applicables que pour certains de leurs éléments26(*).

Le Conseil des Ministres de l'UEAC et le Comité Ministériel de l'UEAC adoptent aussi des directives, prennent des décisions qui peuvent aussi avoir dans certaines circonstances une valeur législative.

Le contenu de ces textes n'étant pas précisé, rien n'empêche donc ces organes de prendre des mesures pouvant toucher au droit pénal tant de fond que de forme si cela s'avère nécessaire. Ils peuvent dans d'autres cas être habilités par la Conférence des Chefs d'Etat pour prendre des règlements ayant pour but de déterminer les modalités d'application des textes portant sur la coopération judiciaire adoptés par cette Conférence des Chefs d'Etat27(*).

Dans la mise en oeuvre de la politique économique et monétaire de la communauté, l'UEAC et l'UMAC, à travers leurs organes, ont eu à éditer plusieurs règlements contenant des incriminations et parfois même des sanctions. Et nous savons que, selon les termes de l'article 21 de l'additif au traité de la CEMAC, ces règlements sont obligatoires et directement applicables dans tout Etat membre.

D'autres règlements du Conseil des Ministres de l'UEAC et du Comité Ministériel de l'UMAC ont pour objet même la facilitation de l'entraide répressive entre les Etats membres en vue de lutter efficacement contre la criminalité28(*). Ces règlements ont généralement pour but de créer ou de renforcer des institutions intervenant dans la coopération judiciaire, ou encore même d'édicter certaines incriminations qui devront alors s'intégrer dans l'ordre pénal interne des Etats membres. Tel est aussi le cas pour les dispositions pénales édictées par le législateur OHADA.

B- Le Conseil des Ministres de l'OHADA, véritable législateur pénal

L'article 3 du traité de l'OHADA qui détermine les institutions de l'OHADA fait du Conseil des Ministres l'organe décisionnel et normatif suprême. En effet, il ressort de cet article que « la réalisation des tâches prévues au présent traité (traité OHADA) est assurée par une organisation dénommée organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) comprenant un Conseil des Ministres et une cour commune de justice et d'arbitrage, le conseil des ministres est assisté d'un Secrétariat Permanent auquel est rattaché une Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature. »

L'article 5 alinéa 2 du même texte prévoit la possibilité pour les actes uniformes d'inclure des dispositions d'incrimination pénale29(*). C'est ainsi qu'au regard des dispositions de l'article 6 du traité, le Secrétariat Permanent (1) et le Conseil des Ministres (2) de l'OHADA jouent un rôle important dans la définition de la politique pénale communautaire30(*) qui n'est pas sans incidence sur le processus de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC, tous parties au traité de l'OHADA.

1- Le Secrétariat Permanent : rôle de préparation des Actes Uniformes

L'article 6 du traité de l'OHADA pose clairement que « les actes uniformes sont préparés par le secrétariat permanent en concertation avec les gouvernements des Etats parties ». C'est donc à cet organe que revient la charge de préparer les actes uniformes et de les soumettre pour adoption au conseil des ministres. Ces actes uniformes pouvant inclure « des dispositions d'incrimination pénale31(*) », on se retrouve très vite en face d'un organe qui est une émanation du pouvoir exécutif32(*) et qui a le pouvoir de légiférer en matière pénale. L'expression « législature à l'exécutif » que nous avons employée pour titrer notre présent paragraphe ne s'en trouve que fortement consolidée. Celle-ci l'est encore plus lorsqu'on sait que c'est au Conseil des Ministres que revient la part importante du pouvoir de légiférer dans la cadre de l'OHADA.

2- Le Conseil des Ministres : rôle de délibération et d'adoption

Le Conseil des Ministres de l'OHADA est une institution composée des ministres chargés de la justice et des ministres chargés des finances des Etats membres33(*). C'est à cette institution que revient le pouvoir de décision et l'essentiel du pouvoir normatif. Aux termes de l'article 6 (in fine) du traité, les actes uniformes « sont délibérés et adoptés par le conseil des ministres après avis de la cour commune de justice et d'arbitrage ». En effet, après les observations des gouvernements des Etats parties et avis de la cour commune de justice et d'arbitrage, le Secrétariat Permanent met au point le texte définitif du projet d'acte uniforme et le soumet au Conseil des Ministres pour adoption34(*). Après adoption des actes uniformes par le Conseil des Ministres, ils entrent en vigueur conformément aux modalités de l'article 9 du traité de l'OHADA et sont applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure35(*). C'est ainsi qu'un acte uniforme contenant des dispositions pénales pourra entrer en vigueur et s'imposer aux individus sous la seule initiative du pouvoir exécutif. Or, nous savons que le droit pénal et la procédure pénale sont des domaines réservés par toute constitution qui se veut démocratique, à la compétence du pouvoir législatif. Ce qui semble apparemment n'être pas le cas au regard de tout ce que nous venons d'étudier sur le processus d'édiction des normes pénales communautaires ; d'où la nécessité de promouvoir et de renforcer l'intervention du pouvoir législatif dans la définition de la politique pénale communautaire.

Paragraphe II : La nécessité d'une plus grande intervention des représentants du pouvoir législatif

Le principe de la séparation des pouvoirs est l'un des principes de base de toute démocratie. Au nom de ce principe, la Constitution repartit les attributions entre les différents pouvoirs. En matière législative, le domaine de la loi est nettement défini par rapport au domaine réglementaire, de telle sorte que toute immixtion du pouvoir exécutif dans le domaine législatif doit être sinon autorisée par les représentants du peuple, du moins contrôlée par ceux-ci.

Dans le cadre de la CEMAC, les Constitutions des Etats membres réservent expressément aux représentants du peuple le soin de légiférer en matière pénale. L'exécutif ne pourra avoir d'initiative législative que s'il a été habilité par le parlement national. Et, son entreprise législative est soumise au contrôle de ces représentants du peuple à travers la procédure d'adoption ou de ratification.

Sur le plan international, les mécanismes de production et d'adoption des textes deviennent très différents. L'exécutif a tendance à supplanter le législatif et s'impose de plus en plus comme principal législateur pénal. Cette situation est critiquable (A) et nous trouvons de plus en plus nécessaire de promouvoir l'intervention des représentants du peuple dans l'édiction des normes pénales communautaires (B).

A- Les critiques avancées au pouvoir exécutif comme législateur pénal

Deux critiques sont généralement avancées contre le pouvoir exécutif lorsqu'il intervient comme législateur pénal communautaire. Cette situation est considérée comme étant contraire au principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. Plus encore, le pouvoir exécutif est le plus souvent accusé d'avoir une vocation liberticide.

S'agissant du non respect du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, l'on pense que l'habilitation des représentants de l'exécutif par la Constitution à ratifier les traités et accords internationaux est insuffisante pour justifier l'énorme initiative législative dont ils bénéficient. Cette habilitation constitutionnelle est encore plus insuffisante lorsque les représentants de l'exécutif doivent intervenir dans un domaine aussi sensible que les libertés individuelles sans aucun contrôle des représentants du peuple. C'est par exemple le cas lorsque le texte touchant au droit pénal de fond ou de forme devient obligatoire dans les Etats sans aucune procédure de contrôle des représentants du peuple36(*). L'exécutif se sera alors immiscé dans un domaine réservé par la Constitution au législatif sans que ce dernier ne puisse exercer de contrôle, violant ainsi ouvertement le principe de la séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif.

Pour ce qui concerne la deuxième accusation, l'exécutif a été le plus souvent soupçonné de ne pas être très favorable aux droits et libertés des citoyens. C'est ce qui justifie que son immixtion dans l'élaboration des normes pénales lorsqu'elle est tolérée, doit être étroitement contrôlée pour éviter de graves atteintes. Or, dans le cadre du droit communautaire, en dehors des accords, les autres textes comme les règlements, les directives et les actes uniformes ne sont pas soumis à ratification ; pourtant ils peuvent contenir d'importantes dispositions pénales obligatoires pour les Etats membres. C'est pourquoi il devient nécessaire d'impliquer de plus en plus les représentants du pouvoir législatif dans le processus d'élaboration des normes communautaires.

B- La nécessité de renforcer l'intervention des représentants du peuple dans le processus d'élaboration des normes pénales communautaires

Il ne s'agit pas pour nous ici de transposer le processus interne d'élaboration des normes au niveau communautaire, ce qui relèverait sans doute de l'utopie. Notre idée ici consiste à donner aux représentants des peuples un réel pouvoir de contrôle et d'approbation des normes édictées par les institutions communautaires représentants du pouvoir exécutif des Etats. Une distinction peut être faite selon qu'on se trouve dans le cadre de la CEMAC ou de l'OHADA.

Dans le cadre de la CEMAC, l'article 4 de l'additif au traité dispose que « le parlement communautaire (...) aura pour rôle essentiel de légiférer par voie de directive », il sera chargé du contrôle démocratique des institutions et organes participant au processus décisionnel de la communauté37(*). En attendant la création du parlement communautaire, c'est la commission interparlementaire qui a été instituée pour jouer son rôle. Cette commission est composée de cinq membres par Etat désignés par l'organe législatif de chaque Etat membre. La présence des représentants du pouvoir législatif est déjà appréciable, mais il aurait été plus opportun de conférer à cet organe une véritable initiative législative, notamment pour les matières touchant au droit pénal des Etats membres. Quoiqu'il en soit, le pouvoir de contrôle qui lui est reconnu38(*) est déjà une avancée, encore faudra-t-il qu'il s'agisse d'un contrôle effectif avec possibilité de remise en cause des actes pris par les institutions en violation de la politique communautaire.

Dans le cadre de l'OHADA, la nécessité de faire intervenir les représentants des parlements nationaux se fait aussi de plus en plus resentir. Ceci à cause de l'absence de toute procédure de ratification des actes uniformes avant leur entrée en vigueur. L'intervention des représentants du peuple pourra se faire au moment des consultations des gouvernements sur les avant projets d'acte uniforme, car nous jugeons insuffisante leur intervention au sein des commissions tripartites. Les parlements nationaux auront donc l'occasion de formuler leurs avis, ce qui permettra au Conseil des Ministres d'adopter un texte qui prend en considération toutes les réalités et aspirations des peuples des Etats parties.

A côté du pouvoir exécutif qui s'impose de plus en plus comme législateur pénal pour édicter les normes communautaires, la dimension politique de la coopération est aussi marquée par l'équation souveraineté - efficacité qu'il faut résoudre.

SECTION II : Le poids important des revendications de souveraineté

Sur le plan politique, la coopération judiciaire en matière pénale est le terrain d'affrontements entre les partisans de la souveraineté étatique et ceux qui prônent une baisse des barrières de la souveraineté pour une plus grande efficacité de la coopération. La raison, comme nous l'avons déjà évoqué, est que les Etats ont toujours protégé le monopole de rendre la justice sur leur territoire. Le droit de punir est la principale prérogative étatique ayant justifié le contrat social rousseauiste. Le droit de punir devient la justification même de l'existence de l'Etat39(*). Mais, face à la montée croissante de la criminalité et l'insuffisance des réponses nationales, les Etats se trouvent quelque peu « contraints » d'accepter des immixtions sans toutefois renoncer à leur souveraineté dans ce domaine. C'est le contenu de la légitimité politique qui se trouve ainsi modifié. Ces diverses évolutions traduisent un repositionnement des Etats qui, engagés désormais dans un processus de négociation visant à assurer une lutte efficace contre différentes formes de criminalité en appellent à des références nouvelles tout en continuant de défendre leur conception propre des politiques de sécurité et de justice40(*). Sur le plan communautaire, on observe donc la recherche d'un compromis entre protection des souverainetés et volonté d'efficacité dans la répression. C'est ce qui justifie que les Etats de la CEMAC aient opté pour la formule « coopération41(*) » (paragraphe I). Ce conflit entre souveraineté et efficacité est aussi ressentie dans le laxisme du processus d'adoption définitive et de ratification des textes communautaires touchant la coopération judiciaire pénale (paragraphe II)

Paragraphe I : L'approche de coopération adoptée

Selon le dictionnaire Universel42(*), « coopérer » c'est « opérer, travailler conjointement avec quelqu'un  ». La coopération n'est donc que le fait de travailler conjointement avec quelqu'un. La coopération judiciaire est donc une voie de lutte contre les pratiques internationales de la criminalité qui a une portée minimale, car visant la simple « mise en communication » d'ensembles normatifs qui restent distincts et autonomes43(*). C'est ainsi que l'Etat reste le principal acteur dans le jeu coopératif (A) et on note une quasi-absence d'institutions communautaires en charge de la coopération (B).

A- L'Etat, acteur principal de la coopération judiciaire

La coopération judiciaire dans la CEMAC est fortement marquée par le caractère intergouvernemental du processus. Les Etats membres sont encore aujourd'hui les principaux acteurs du jeu coopératif. En effet, comme nous aurons certainement l'occasion de le voir, la pratique de la coopération judiciaire dans la zone CEMAC reste essentiellement dominée par les Etats qui restent les principaux décideurs. Cette intervention étatique se fait par le biais des ministres en charge des relations extérieures et de la justice. La raison est encore trouvée dans cette volonté de protéger un domaine qui a toujours été marqué du sceau de la souveraineté. C'est pourquoi on observe une rareté d'institutions communautaires chargées de la lutte contre la criminalité.

B- La rareté d'institutions communautaires chargées de la coopération

La nécessité de créer des organes communautaires de coopération pour la lutte contre la criminalité s'est toujours fait sentir. Bernard BERTOSSA rappelait déjà, dans le contexte européen que : « si nous voulons avoir quelques chances de lutter contre la criminalité organisée, il est impératif que les institutions européennes (communautaires) se dotent d'autorités judiciaires compétentes pour poursuivre, sur l'ensemble du continent (de la communauté) les auteurs d'infraction dont ces institutions peuvent être aussi victimes. »44(*)

Dans l'optique de renforcer la coopération judiciaire en Europe en vue de lutter efficacement contre la criminalité organisée, plusieurs organes spécialisés ont été créés. Nous avons par exemple Eurojust45(*) qui est un organe Européen dont le but est de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité. Il est composé des représentants des Etats membres ayant la qualité de procureur, de juge ou d'officier de la police judiciaire. Nous avons aussi l'exemple d'Europol46(*), Office Européen de Police implanté à la Haye aux Pays-Bas et qui a pour mission d'assurer l'efficacité des services compétents des Etats membres et de leur coopération dans les domaines les plus nombreux touchant la criminalité internationale47(*).

Dans la CEMAC, les choses ne sont pas aussi avancées. A cause de la lutte pour la préservation de leur souveraineté, les Etats admettent mal la création d'organes supranationaux chargés de la coordination de la lutte contre les formes les plus graves de la criminalité. Mais, des avancées notables sont à observer dans le domaine de la lutte contre le blanchiment d'argent.

Dans ce secteur, la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC) et la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC) jouent un rôle très important notamment dans la prévention du secteur bancaire contre le blanchiment. En effet, les banques centrales ressentent de plus en plus la nécessité d'intégrer la lutte contre le blanchiment dans leurs principaux objectifs. La BEAC a fait de cette lutte « l'un des grands chantiers des « reformes de deuxième génération48(*) » ». Cet engagement justifie ces propos du gouverneur de la BEAC au cours de la réunion des gouverneurs des banques centrales africaines lors de sa 28e session tenue à Yaoundé les 29 et 30 juillet 2004 : « au delà du préalable que constitue ce cadre juridique, les banques centrales vont désormais oeuvrer aux côtés des autorités compétentes des Etats à intensifier la sensibilisation des milieux financiers et contribuer à l'application effective des textes (...) par ailleurs, elles devront assurer leurs obligations en tant qu'organismes assujettis appelés à effectuer des déclarations de soupçon au même titre que les organismes financiers49(*) ». Mais, à côté de ce rôle de contrôle et de supervision de la BEAC et de la COBAC, le véritable organe de coordination des stratégies de lutte antiblanchiment dans la zone CEMAC est le Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale50(*) (GABAC). Il est considéré, selon les termes du préambule de l'acte additionnel qui le crée, comme « une structure de promotion des normes, instruments et standards de lutte contre le blanchiment, chargé également du suivi de leur mise en oeuvre coordonnée et de leur efficacité ». Dans l'exercice de ses missions, le GABAC est appelé à collaborer avec les structures similaires existant en Afrique et au niveau international51(*) pour une plus grande efficacité dans la prévention et la répression des actes de blanchiment. C'est pourquoi un auteur52(*) a estimé indispensable que le « GABAC puisse sans aucun obstacle fournir et recevoir des informations du GIABA, qui est l'organe chargé de promouvoir les législations antiblanchiment et de faciliter la coordination des activités des Etats membres de la CEDEAO ». La mise en place de ces institutions communautaires spécialisées dans la lutte antiblanchiment est déjà une avancée considérable pour la coopération judiciaire dans la zone CEMAC. Mais, une avancée qui reste toujours insuffisante, au regard des nouvelles exigences de la lutte contre la criminalité organisée.

Les oppositions entre revendication de souveraineté et volonté d'efficacité sont aussi fortement observées dans le processus de prise de décision au sein de la CEMAC.

Paragraphe II - Le laxisme du processus d'adoption et de ratification des textes communautaires

Avec l'avènement de la CEMAC, certains acteurs53(*) se sont presque réjouis de ce que les décisions ne sont plus « prises sans exclusives à l'unanimité54(*) » comme c'était le cas sous l'égide de l'UDEAC55(*). « Les textes de la CEMAC ont institués la règle du consensus comme une règle de principe pour l'adoption des actes de la conférence des chefs d'Etat [bien que] cette règle reste supplétive pour l'adoption par les autres organes de la communauté des autres politiques communautaires56(*) ». Malgré cette avancée, il apparaît que la règle de l'unanimité refait surface lorsqu'il faut réglementer certains domaines sensibles de la politique communautaire comme celui de la coopération judiciaire (A). De plus, même lorsque ces instances communautaires parviennent à s'entendre malgré tout, cette unanimité n'est que de façade au vu du fossé temporel qui sépare l'adoption de la ratification. La raison n'est pas trop difficile à trouver : c'est que gonflés de leur égo de souveraineté, les Etats ont bien du mal à se soumettre à un accord qu'ils ont presque été contraints d'accepter du « bout des lèvres » (B)

A- Le rayonnement de la règle de l'unanimité en matière de coopération judiciaire

L'exigence de l'unanimité des Etats pour l'adoption des textes relatifs à la coopération judiciaire a toujours été fustigée par la majorité des auteurs. En raison de la règle de l`unanimité, l'harmonisation pénale en vue d'une répression efficace de la criminalité demeure largement utopique57(*). Ceci est d'autant plus justifiable que les gouvernements nationaux sont plus réticents à laisser une entité communautaire leur « usurper » leurs fonctions régaliennes. Cette exigence de l'unanimité revient à donner un droit de véto à chaque Etat membre. Ce qui pourra  aboutir, soit à la paralysie, soit au nivellement par le bas, c'est-à-dire à l'adoption de textes qui manquent d'ambition, et par conséquent ne rencontrent pas l'objectif58(*). Cette situation est encore plus déplorable au sein de l'Union Européenne où « toutes les décisions se prennent à l'unanimité »59(*).

La situation dans le cadre de la CEMAC n'est pas aussi lamentable60(*). La règle de l'unanimité et celle du consensus se partagent le terrain en fonction du type de décision à prendre et le domaine concerné. C'est ainsi que les actes de la Conférence des chefs d'Etats sont adoptés par consensus61(*). L'unanimité quant à elle est requise pour l'adoption de la politique fiscale commune62(*), de la mise en oeuvre du principe de la libre circulation des travailleurs, de la liberté d'établissement, d'investissement, de mouvement des capitaux et de prestation de service pour ne citer que ceux-ci63(*).

Pour ce qui s'agit des conventions et accords, ils sont adoptés à l'unanimité. Tel a été le cas des accords de coopération judiciaire et d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC. Il est aussi prévu que toutes les décisions relatives à l'application et à la modification de ces accords seront prises à l'unanimité64(*). Mais, nous pensons que pour les décisions relatives à l`application de ces accords, il aurait été préférable d'opter pour le principe de la majorité simple ou de la majorité qualifiée, ceci pour simplifier la procédure et éviter les blocages inutiles causés par l'unanimité. Car, comme l'affirmait fort remarquablement un auteur, « l'effectivité d'une décision ne dépend pas de la spécificité de la procédure d'adoption, mais de la capacité de l'organisation à amener les Etats à respecter ses décisions »65(*). Ainsi, une décision obligatoire même prise à l'unanimité « ne sera pas nécessairement exécutée, notamment parce que les organisations internationales ne disposent en général d'aucun moyen d'assurer l'exécution. Elles dépendent à cet égard de la bonne volonté des Etats »66(*). C'est donc l'autorité politique et surtout morale dont dispose une organisation qui conduit les Etats membres à appliquer les actes de cette organisation.

En somme, le constat est clair ; l'unanimité doit être réservée à l'adoption des textes fondamentaux, mais ne saurait servir de mode de gouvernance. Par conséquent, il faut refuser de « sanctuariser cette règle de l'unanimité tout à fait à la fois antidémocratique67(*) et terreau de l'impuissance »68(*).

L'adoption de la règle de l'unanimité dans le domaine de la coopération judiciaire est aussi révélatrice de l'opposition qui anime l'esprit des dirigeants des Etats membres qui, tout en étant jaloux de leur souveraineté, recherchent néanmoins une efficacité dans la lutte contre la criminalité, qui, elle, amène à coopérer. C'est cette opposition entre revendication de souveraineté et volonté d'efficacité qui justifie la lenteur de la procédure de ratification des textes portant sur la coopération judiciaire.

B- Les écarts entre adoption et ratification

L'adoption d'une convention internationale n'est pas généralement suffisante. Dans presque tous les cas, elle a besoin d'être ratifiée par les Etats parties pour avoir une force obligatoire69(*). A travers la procédure de ratification, les Etats retrouvent le moyen de bloquer un texte qu'ils ont été un peu contraints d'accepter. Quand on regarde le temps long, trop long qui peut s'écouler entre la signature d'une convention et sa ratification ensuite par les différents parlements nationaux, on reste parfois perplexe. On se demande souvent alors où est la volonté politique de lutter contre le crime organisé. Quand on met en moyenne près de cinq ans et parfois plus pour ratifier une convention, on comprend qu'il y a un vrai problème. Et là, c'est une responsabilité qui incombe aux hommes politiques70(*). Comme le fait remarquer un auteur parlant du contexte européen « la commission, le conseil, les représentations permanentes, ont créé un arsenal qui n'était pas facile à imaginer (...), le problème est que souvent on n'a pas les moyens pour faire appliquer ce droit71(*) : toutes les conventions signées doivent être ratifiées pour devenir droit réel. Et si elles ne le sont pas, comme la plupart des cas, elles restent un droit virtuel, et ça c'est un problème politique énorme qui n'est plus tolérable vis-à-vis des citoyens72(*)». Cette affirmation montre le rôle important et déterminant que joue la ratification des conventions dans la lutte contre la criminalité. Pour que cette lutte soit effective et que le droit qui découle de ces conventions soit effectif, les Etats ont le devoir de procéder à la ratification de ces instruments lorsqu'elle est nécessaire pour son entrée en vigueur. Or, cette procédure de ratification est fort remarquée par sa lenteur comme nous l'avons déjà souligné. Plus grave encore, cette ratification est souvent renvoyée aux calendes grecques et ce texte restera alors paralysé à jamais par le défaut de ratification.

Le problème de la ratification des conventions portant sur la coopération judiciaire se pose aussi avec acuité dans la zone CEMAC. L'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC et l'accord d'extradition entre ces Etats adoptés au cours de la cinquième Conférence des chefs d'Etat de la CEMAC depuis le 28 Janvier 2004 à Brazzaville ne sont pas encore entrés en vigueur faute de ratification par l'ensemble des Etats parties comme l'exigent ces textes73(*). Certains pays qui ont compris l'importance de pareils instruments se sont attelés à accélérer leur processus de ratification. Tel est par exemple le cas du Cameroun qui les a ratifiés par deux décrets du 30 Janvier 200674(*).

Comme le souligne toutefois un auteur75(*), tout ne réside pas dans la ratification des conventions, il faut aussi les intégrer dans l'ordre pénal interne chaque fois que cela est nécessaire. Mais, l'intégration de ces normes, bien qu'étant un problème politique, est beaucoup plus un problème juridique.

Chapitre II - La dimension juridique de la coopération

La construction communautaire a une influence considérable sur la politique pénale des Etats membres. L'enjeu de la sécurité légitime quelque peu les interventions du législateur communautaire dans la politique pénale interne des Etats membres en leur faisant perdre un peu de leur monopole dans ce domaine. En fait, selon le concept de « Spill Over », la croissance des échanges transnationaux dans un secteur donné crée une pression sur les règles nationales disparates qui progressivement, vont être remplacées, via des ajustements et une institutionnalisation grandissante, par des règles supranationales renforçant la gouvernance communautaire76(*). La transformation de la politique pénale apparaît donc comme le résultat du regroupement communautaire, mais aussi comme le but voulu par les acteurs politiques.

Quoiqu'il en soit, les différences juridiques entre les législations des Etats ont toujours été identifiées comme l'un des principaux blocages de la pratique de la coopération judiciaire. Ces différences peuvent affecter de manière significative la condition de la double incrimination requise pour accorder l'extradition par exemple. Ceci revient à montrer qu'il devient important que les comportements criminels soient approchés de la même façon par tous les Etats membres de la communauté. L'harmonisation permet ainsi d'éviter qu'un Etat ne se transforme en paradis pénal à l'encontre des autres. En harmonisant les législations pénales, les Etats réduisent les différences entre les droits nationaux. Les criminels perdent ainsi tout intérêt à s'établir dans tel ou tel Etat. C'est pourquoi dans le contexte européen, l'article 31 du traité d'Amsterdam prévoit l'adoption progressive des mesures instaurant des règles minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et aux sanctions applicables dans les domaines de la criminalité organisée du terrorisme et du trafic des drogues. « Cette approche dépasse la seule logique de la coopération pour impulser une véritable harmonisation des législations pénales fondée sur la nature du phénomène criminel et non plus seulement sur l'action des autorités judiciaires77(*) ».

Même si dans le traité de la CEMAC les aspirations que nous venons d'énoncer ne sont pas stipulées expressément, n'empêche que nous assistons aujourd'hui, dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, à un effort d'harmonisation des incriminations (section I), bien que l'initiative communautaire soit encore timide en matière de sanction (section II).

Section I : L'harmonisation des incriminations au niveau communautaire

Comme nous avons essayé de le démontrer dans nos développements, le droit pénal des Etats membres de la CEMAC subit une influence aussi bien du droit matériel de la CEMAC que du droit issu de l'OHADA. Contrairement à certaines conceptions antérieures pour qui le droit communautaire ne pouvait avoir une influence sur le droit pénal des Etats membres, on assiste aujourd'hui à une affirmation de plus en plus persistante d'un pouvoir d'incriminer au niveau communautaire (paragraphe I). Ces incriminations communautaires, comme on peut bien s'en douter, interférent avec le droit pénal interne des Etats membres (paragraphe II).

Paragraphe I : L'affirmation d'un pouvoir d'incriminer au niveau communautaire

L'édiction d'incriminations communautaires (B) vient en quelque sorte remettre en cause les modes traditionnels de légitimation du pouvoir d'incriminer (A).

A- Les modes traditionnels de légitimation du pouvoir d'incriminer

Traditionnellement, les modes de légitimation du pouvoir d'incriminer se confondaient avec la souveraineté des Etats et le rôle privilégié du pouvoir législatif.

1- La souveraineté des Etats

Dans son acception la plus large, l'expression « droit pénal » désigne la branche du droit positif qui relève « de la répression par l'Etat des comportements de nature à créer un trouble pour l'ordre social »78(*). Il s'agit donc de la réaction du corps social représenté par l'Etat, contre les injustices qu'il subit par le fait d'un individu.

Le droit de punir a toujours été intimement rattaché à la souveraineté des Etats. C'est pourquoi il apparaissait inconcevable de transférer cette prérogative au profit d'une instance supranationale. La justice est rendue par les juges et au nom du peuple en vertu d'une délégation de souveraineté. C'est ce que faisait remarquer Jean -Marc VARAUT à propos du passage de la coopération à un système judiciaire européen : « c'est très simple, un jour quelqu'un se lèverait et dirait : pourquoi me jugez-vous ? On ne peut juger qu'au nom du peuple, en vertu d'une délégation de souveraineté. Le procureur ou le questeur, c'est au nom du peuple italien, les juges au nom du peuple français. S'il peut y avoir une sorte d'organisation embryonnaire au sein de l'Europe, il n'y a pas de souveraineté européenne, il n'y a pas de peuple Européen, ce serait une organisation de légitime défense mais cela ne serait pas la justice contre le crime »79(*). Tout ceci vise à démontrer que le droit pénal comme la justice pénale sont fortement rattachés à la souveraineté des Etats. Seule cette souveraineté peut ainsi légitimer le droit de légiférer et de punir. Le rôle du pouvoir législatif dans la légitimation du pouvoir d'incriminer n'est donc que le corollaire de la souveraineté des Etats.

2- Le rôle privilégié du pouvoir législatif

En vertu du principe de la légalité des délits et des peines, un comportement ne peut constituer une infraction que s'il est prévu et réprimé en tant que tel par un texte. Le législateur national a donc le devoir d'ériger certains comportements qu'il trouve répréhensibles en infraction et de les consigner dans un texte juridique qui leur servirait de base légale. Il est donc le principal organe normatif en matière pénale. Cette faculté est reconnue, par la plupart des constitutions qui se veulent démocratiques, aux parlements nationaux composés des représentants du peuple. Une incrimination est alors jugée légitime parce qu'elle découle de la volonté générale, celle du peuple qui s'exprime à travers ses représentants. Mais aussi, on assiste de plus en plus à un dépassement de cette conception classique de légitimation du pouvoir d'incriminer. Le législateur communautaire s'impose de plus en plus comme un centre d'édiction de normes d'incriminations pénales qui s'imposent même aux Etats membres.

B- Un effort considérable de communautarisation des incriminations

Dans la zone CEMAC, on assiste à une « communautarisation » des incriminations. La communautarisation peut être entendue comme l'édiction des incriminations par le droit communautaire et qui a vocation à s'intégrer dans l'ordre juridique interne. Cette communautarisation est l'oeuvre de deux principales organisations communautaires. Elle est d'abord l'oeuvre du législateur CEMAC pour ce qui s'agit de certains crimes organisés. Elle est aussi l'oeuvre du législateur OHADA dans son entreprise d'harmonisation, voire d'uniformisation du droit des affaires en Afrique.

1- Les infractions édictées par le législateur CEMAC

Afin de créer une communauté sécurisée et où il fait bon vivre pour les citoyens, les Etats de la sous-région d'Afrique centrale se sont résolument engagés dans une lutte contre les formes les plus graves de la criminalité organisée. C'est ainsi qu'ils ont adopté plusieurs conventions contenant aussi bien des mesures préventives que des mesures répressives. Ces conventions contiennent pour certaines d'entre elles de véritables incriminations pénales. C'est cette érection de comportements en infraction par le droit communautaire qui nous a amené à parler de communautarisation. Deux des incriminations du législateur CEMAC attirent notre attention parce que s'inscrivant dans la logique mondiale actuelle. Il s'agit du terrorisme et du blanchiment des capitaux qui reçoivent désormais une définition communautaire.

S'agissant du terrorisme, sa définition sur le plan communautaire est donnée par la convention entre les Etats membres du comité des chefs de police de l'Afrique (CCPAC) en matière de lutte contre le terrorisme80(*). En son article 1(2) ce texte énumère un certain nombre d'actes qualifiés « d'actes terroristes81(*) ». Une pareille initiative du législateur communautaire ne peut être que louable lorsqu'on sait qu'au niveau des Etats, cette infraction est rarement prévue par les législations internes82(*). Mais, il convient toutefois de rappeler que cette infraction est prévue par de nombreux textes internationaux auxquels la plupart des Etats membres de la sous-région d'Afrique centrale sont parties83(*).

Le législateur CEMAC réprime aussi bien la perpétration du terrorisme que le financement du terrorisme. Mais, pour ce dernier, il faut se reporter au règlement du comité ministériel de l'UMAC portant sur la prévention et la répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale84(*). Aux termes de l`article 2 de ce texte, « le financement du terrorisme est le fait pour toute personne de fournir ou de réunir, par quelques moyens que ce soit, directement ou indirectement, illicitement ou délibérément, les fonds dans l'intention de les voir utilisés ou en sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre :

a/ un acte qui constitue une infraction de terrorisme selon la définition de l'un des traités internationaux pertinents régulièrement ratifié par l'Etat membre ;

b/ tout autre acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque ». Cette incrimination pénale viendra combler en quelque sorte le vide des législations nationales des Etats membres qui ne l'avaient pas prévue.

Pour ce qui est ensuite du blanchiment (ou blanchissement) des capitaux, sa définition est l'oeuvre du règlement N° 1/03-CEMAC-UMAC précité. Ce texte vient édicter une incrimination qui n'existait pas encore dans le dispositif pénal de la plupart des Etats membres85(*).

Aux termes de l'article 1er de ce texte, plusieurs agissements peuvent tomber sous le coup de l'infraction de blanchiment des capitaux86(*). Il peut être défini comme « le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens de l`auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect »87(*). c'est donc une infraction nouvelle pour les Etats membres et qui apparaît le plus souvent intimement lié au terrorisme.

L'intérêt d'une telle harmonisation des incriminations est très grand lorsqu'on se retrouve sur le stade de la coopération judiciaire. Tout d'abord, à cause de la gravité de certaines de ces infractions, les mécanismes de coopération entre les autorités chargées de leur répression ne s'en trouveraient que très simplifiés, rendant ainsi cette lutte la plus efficace possible. Ensuite, certaines de ces infractions, comme le terrorisme, ont tendance à donner une vocation universelle aux Etats pour leur répression. Enfin, prévoyant ainsi des incriminations au niveau communautaire, c'est le vide juridique qui existait au niveau des Etats qui ne réprimaient pas ces comportements qui se trouve comblé, au grand bonheur de la condition de la double incrimination qui est souvent requise pour accorder l'extradition ou exécuter une demande d'entraide.

2- L'harmonisation des incriminations par le droit pénal des affaires de l'OHADA

Comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, les Etats ont de tout temps refusé le transfert de cet attribut essentiel de la souveraineté qu'est le droit de punir à une autorité extérieure88(*). Pour cette raison, le droit pénal a toujours résisté à toute internationalisation et à toute intégration dans une souveraineté autre que strictement étatique. Mais, pour assurer la sécurité des affaires afin d'attirer les investisseurs étrangers en Afrique, l'article 5 du traité de l'OHADA donne la possibilité aux actes uniformes de prévoir, à côté des sanctions civiles et économiques, des incriminations pénales ; même s'il renvoie aux Etats membres le soin de déterminer les sanctions appropriées. C'est sur le fondement de cet article que plusieurs incriminations peuvent être décelées dans les huit actes uniformes déjà en vigueur dans l'espace OHADA89(*). L'abondance de la matière ne nous permet pas de faire une étude globale de ces incriminations contenues dans les textes uniformes. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'une telle harmonisation des incriminations par le législateur OHADA peut s'avérer d'une importance considérable dans la mise en oeuvre de la coopération judiciaire entre les Etats membres. Ces incriminations s'imposant aux Etats membres, ceci ne pourra que permettre que la condition de la double incrimination soit facilement remplie en cas de demande d'extradition ou d'entraide pour une infraction prévue par le droit pénal des affaires de l'OHADA. L'OHADA vient ainsi ajouter au crédit des infractions communautaires, les infractions aux affaires. Mais, nous ne saurons passer sous silence les interférences susceptibles d'être observées entre la norme d'incrimination communautaire et la norme pénale interne.

Paragraphe II : Les interférences entre les incriminations communautaires et la norme pénale interne

Il est tout à fait prévisible que les immixtions du droit communautaire entraînent des conséquences sur la norme pénale interne. Les auteurs qui se sont penchés sur la question n'ont pas tardé à observer « la difficile rencontre du droit pénal et du droit communautaire »90(*). Deux cas se présentent généralement : soit les deux normes cohabitent de manière pacifique (A), soit au contraire on assiste à un conflit entre la norme pénale communautaire et la norme interne (B).

A- La cohabitation « pacifique » entre la norme pénale communautaire et la norme interne

La cohabitation entre les normes pénales interne et communautaire sera dite «pacifique« lorsqu'aucune d'elles ne vient remettre en cause l'autre. Dans cette hypothèse, deux cas de figure peuvent se présenter. Soit la norme communautaire vient créer une nouvelle incrimination qui n'existait pas dans l'ordre pénal interne (1), soit c'est le droit pénal interne qui est mobilisé au service du droit communautaire (2).

1- L'introduction d'une nouvelle incrimination dans l'ordre pénal interne

Le droit pénal communautaire peut intervenir pour créer de nouvelles incriminations dans l'ordre pénal interne des Etats membres. Il s'agit d'une situation où la norme pénale communautaire ne vient que renforcer le dispositif répressif des Etats membres sans toutefois y porter atteinte. Nous avons l'exemple de l'infraction de blanchiment d'argent qui ne remet en cause aucune législation interne des Etats membres en la matière et qui ne contribue qu'à un renforcement de leur dispositif pénal.

2- La mobilisation du droit pénal interne au profit du droit communautaire

Il s'agit des hypothèses où le droit communautaire peut condamner un comportement et faire appel au droit pénal des Etats membres pour l'incriminer et le punir. C'est le cas par exemple lorsque le droit communautaire édicte des interdictions et invite alors les Etats membres à les incriminer et les sanctionner.

Il s'agit aussi et surtout des hypothèses où le législateur communautaire édicte des incriminations et laisse aux Etats membres le soin de déterminer les sanctions. Ceci est en fait la pratique la plus récurrente, comme nous avons déjà eu l'occasion de le démontrer. L'exemple le plus avéré est celui du législateur OHADA qui érige certains comportements en infraction, et laisse aux Etats parties le devoir de déterminer eux-mêmes les sanctions91(*). Mais, les cas les plus récurrents d'interférences sont ceux d'un conflit entre la norme pénale communautaire et le droit pénal interne.

B- Conflit entre incriminations communautaires et droit pénal interne

Malgré la résistance de la souveraineté aux immixtions du législateur communautaire dans le domaine pénal, il apparaît que « certaines dispositions internes des Etats membres, fussent-elles prises en matière pénale, peuvent s'avérer incompatibles avec les buts du traité et appeler une condamnation de la part de la cour de justice »92(*). Dans de pareilles circonstances, le principe de la primauté de la norme communautaire sur la loi interne est généralement affirmé pour écarter le droit pénal interne (1), même si des questions peuvent être soulevées sur la constitutionnalité d'une telle solution (2).

1- Le principe de la primauté de la norme pénale communautaire

Il est généralement admis que le droit communautaire a un effet « neutralisateur »93(*) sur la norme pénale interne qui lui est incompatible. Cette approche invite les juges nationaux à laisser inappliquée la norme nationale jugée incompatible, et les autorités législatives et exécutives à s'abstenir de prendre toute norme nouvelle contraire au droit communautaire94(*). Le droit communautaire élimine ainsi sans hésitation tout ce qui, dans les droits nationaux, lui parait incompatible avec sa finalité propre. Ceci s'explique par l'effet direct qui est souvent reconnu au droit communautaire. C'est dans cette logique que l'article 21 du traité de la CEMAC dispose que les actes additionnels s'imposent aux institutions de la communauté ainsi qu'aux autorités des Etats membres. Il en est de même pour les règlements qui sont obligatoires et directement applicables dans tout Etat membre. L'article 10 du traité OHADA est encore beaucoup plus explicite sur cette question. Il pose clairement que « les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure ». Cette disposition qui réaffirme le principe de la supranationalité des Actes Uniformes oblige les juges à écarter les dispositions contraires des législations nationales au profit du droit communautaire. Mais, à y regarder de près, cette situation qui érige le juge national en véritable juge du pouvoir législatif est critiquable.

2- La problématique de la constitutionnalité des atteintes à la répression par le droit communautaire

Notre réflexion dans ce titre, est fortement inspirée de celle de Monsieur Jacques BORE 95(*). Le paradoxe nait du pouvoir qui est reconnu ou que se reconnaissent les juges, national et communautaire, de suspendre l'application d'une loi pénale interne. Cette faculté peut être soupçonnée, et parfois à raison, de porter atteinte au principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. Sous la pression de la primauté communautaire, ou même par une simple interprétation personnelle des traités, le juge national peut s'autoriser par exemple à désincriminer ce que le législateur a incriminé. Et c'est là le paradoxe. Le juge national peut écarter une loi qu'il juge contraire au traité, mais ne peut écarter une loi qu'il juge inconstitutionnelle ; alors que la constitution a une valeur supérieure à celle des traités. C'est ainsi qu'un auteur a pu affirmer que « par l'effet de la pénétration et de l'expansion progressive du droit communautaire, et parce que l'économie touche à presque tous les domaines de l'activité humaine, la plupart des [règles internes] d'incrimination sont promises à une subversion imminente96(*) ».

Une autre question peut être soulevée à propos de l'inconstitutionnalité de certaines incriminations édictées par les textes communautaires. Il est généralement admis, notamment dans le contexte français, que la ratification d'une convention internationale jugée inconstitutionnelle est subordonnée à la révision préalable de cette constitution.  Qu'arriverait-il alors si une pareille convention est alors ratifiée sans que n'intervienne une révision constitutionnelle pour la mise en conformité ? Est-ce à dire qu'au nom de la primauté du droit communautaire on doit écarter la norme interne d'incrimination au profit de la norme communautaire inconstitutionnelle97(*) ? La réponse à notre avis semble négative car l'inverse relèverait de l'injustice. Nous pensons aussi que la réponse doit être la même lorsque la norme pénale communautaire viole l'un des droits fondamentaux reconnus à l'être humain, même s'ils sont généralement contenus dans le préambule des constitutions nationales.

Au total, malgré ces observations sur les interférences susceptibles de se produire entre les incriminations communautaires et le droit pénal interne, il reste vrai que l'harmonisation des incriminations est une initiative très louable car elle permet d'éviter certaines difficultés rencontrées au cours de la procédure d'extradition ou d'entraide judiciaire, notamment celle de la double incrimination. Quoiqu'il en soit « puissant, pour tuer ou infléchir les règles du droit pénal national (...), le droit communautaire devient au contraire un dragon aux pieds d'argile lorsqu'il s'agit pour lui d'assurer une sanction à la réglementation qu'il édicte »98(*).

Section II : Une harmonisation timide des sanctions

Le besoin d'harmonisation des sanctions pénales, de tendre vers une échelle commune en vue de renforcer la coopération judiciaire, a été plusieurs fois affirmé dans le cadre européen aux réunions du conseil « justice  et affaires intérieures ». Il arrive le plus souvent que les sanctions civiles et économiques non restrictives de liberté que le législateur communautaire édicte apparaissent insuffisantes pour encadrer l'intérêt qu'il veut protéger, c'est pourquoi il a besoin de sanctions pénales pour les compléter. En fait, une incrimination communautaire a besoin d'être assortie d'une sanction pour être vraiment complète. Or, dans la plupart des cas, lorsque le législateur communautaire incrimine certains comportements, il renvoie aux législations nationales le devoir de prendre les sanctions y afférentes. Il y a ainsi une dissociation entre le pouvoir d'incriminer et le pouvoir de punir.

Qu'il s'agisse du droit des affaires de l'OHADA ou du droit matériel CEMAC, on observe généralement une dualité de compétence en matière pénale. Le législateur communautaire incrimine et les Etats sanctionnent. Ces derniers jouissent donc d'un rôle privilégié en matière de sanction (paragraphe I). Mais, face au risque de disparité des sanctions pouvant être édictées par les Etats pour le même comportement, l'on juge nécessaire de procéder à leur harmonisation (paragraphe II).

Paragraphe I : Le rôle important des Etats dans la détermination des sanctions

Le devoir de trouver des sanctions aux incriminations communautaires est généralement confié aux Etats. Plusieurs raisons peuvent justifier ce choix. Mais, la raison la plus évidente et la plus avancée est le souci de préserver la souveraineté des Etats ; laquelle a déjà durement souffert de l'immixtion du droit communautaire par son pouvoir d'incrimination. En fait, comme le faisait déjà remarquer un auteur, « le pouvoir de police et le droit de punir sont en effet l'expression la plus achevée de la souveraineté de chaque Etat, et, dans une organisation commune née de la solidarité des pays démocratiques (du moins on l'espère), il n'est pas évident que la réglementation économique appelle nécessairement un système de répression pénale »99(*). Les Etats ayant alors perdu leur initiative pour l'incrimination, ils la retrouvent pour la sanction. Une distinction peut être opérée selon qu'il s'agit du système répressif de la CEMAC (B) ou de celui de l'OHADA (A).

A- Le système des sanctions de l'OHADA

Le système répressif de l'OHADA est une illustration parfaite de l'éclatement de la compétence normative en droit pénal communautaire. En effet, l'article 5 alinéa 2 du traité dispose expressément que « les actes uniformes peuvent inclure des incriminations pénales. Les Etats parties s'engagent à déterminer les sanctions encourues ». Le renvoi est donc toujours obligatoire dans la cadre de l'OHADA, mais ne s'effectue pas de la même manière. Dans certains cas, l'intervention du législateur national est nécessaire alors que dans d'autres, elle ne l'est pas parce que les textes existant déjà permettent de sanctionner le comportement considéré.

S'agissant de la première méthode, celle du renvoi à des textes à créer, elle est la technique utilisée par l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique. Dans ce texte où toute une partie est consacrée aux dispositions pénales100(*) , « les formules utilisées pour annoncer les incriminations101(*) traduisent la volonté du législateur régional de laisser aux Etats parties toute liberté pour déterminer la sanction qu'ils jugent appropriées »102(*). La même technique de pénalisation se retrouve dans l'acte uniforme relatif au droit commercial général103(*) et l'acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises sises dans les Etats parties au traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique104(*). L'adoption d'un texte spécial se révèle donc indispensable pour la répression des agissements visés par ces différents actes105(*).

Pour ce qui est de la deuxième méthode, celle d'un renvoi à des textes préexistants, après avoir incriminé un comportement, le législateur régional renvoie à une sanction préalable existante ou censée exister dans la législation nationale des Etats parties. Cette méthode est beaucoup plus radicale, car, c'est la « norme communautaire qui, de sa propre autorité, indique non seulement ce qui doit être sanctionné, mais aussi comment il doit l'être »106(*).  Les Etats sont ainsi dépossédés à la fois du pouvoir de déterminer les comportements à punir et de celui de fixer la mesure de sanction. C'est le cas par exemple de l'acte uniforme portant organisation des sûretés lorsqu'il dispose dans son article 97 alinéa 3 que les peines prévues pour le délit d'abus de confiance s'appliquent au débiteur ou à toute personne qui, par des manoeuvres frauduleuses, prive le créancier nanti de ses droits ou les diminue. On peut aussi retrouver cette méthode de sanction par renvoi à des infractions préexistantes en parcourant les autres actes uniformes107(*).

Une question peut toutefois être soulevée concernant cette pratique. Qu'arriverait-il si l'infraction à laquelle la norme communautaire renvoie n'existe pas dans la législation nationale des Etats parties ? Les Etats doivent-il alors créer cette nouvelle infraction ou alors doivent-ils créer simplement un texte pour sanctionner le comportement incriminé par le législateur communautaire ? La deuxième solution semble à notre avis la mieux appropriée. Quoiqu'il en soit, cette technique de pénalisation par référence conduit à confiner le législateur national à un rôle purement « platonique »108(*), puisque la répression des agissements considérés n'appelle aucune intervention de sa part.

B- Le renvoi du législateur CEMAC aux législations nationales

Dans le cadre de la CEMAC, la tendance dominante est de conférer aux Etats membres le soin de déterminer les sanctions applicables aux incriminations communautaires. C'est ainsi par exemple qu'en matière de répression des pratiques commerciales anticoncurrentielles, l'article 27 du règlement N° 1/99/UEAC-CN -639 du 25 Juin 1999 dispose que « ces pratiques peuvent donner lieu à une peine d'emprisonnement pour toute personne physique qui frauduleusement aura pris une part personnelle et déterminante dans leur conception ou leur mise en oeuvre.

Le quantum des peines est déterminé conformément aux législations nationales ».

Quoiqu'il en soit, que le législateur communautaire renvoie à un texte à créer ou alors qu'il renvoie à une infraction préexistante, ceci n'écarte pas l'épineux problème de la divergence dans la répression des comportements incriminés par le droit communautaire. Cette divergence s'apparente parfois à une injustice puisque pour le même comportement, certaines législations peuvent prévoir des sanctions modérées alors que d'autres par contre prévoient des peines sévères. D'où, la nécessité, pour un renforcement de la coopération judiciaire en vue d'une lutte efficace contre la criminalité, d'harmoniser les sanctions pénales aux incriminations communautaires.

Paragraphe II : La nécessité d'une harmonisation des sanctions pénales

Le devoir qui incombe aux Etats de sanctionner les incriminations n'est pas resté trop longtemps à l'abri des critiques. On affirme de plus en plus aujourd'hui la nécessité d'harmoniser ces sanctions. Plusieurs raisons militent en faveur de cette idée.

Tout d'abord, en laissant aux Etats le soin de déterminer librement les sanctions aux incriminations communautaires, on risque d'assister à l'adoption de sanctions très disparates. La sanction d'un même comportement pourra être modérée dans un Etat alors qu'elle est très sévère dans un autre. Cette grande hétérogénéité des sanctions frise l'injustice.

Une autre raison avancée, qui est corollaire de la première, c'est d'éviter qu'à cause de la souplesse de leur législation certains Etats ne se transforment en paradis pénaux. L'hypothèse est simple à imaginer, il est évident que si un Etat prend des sanctions très souples par rapport aux autres, cela pourra être une source de motivation pour les criminels qui vont choisir de s'établir dans cet Etat. On peut même voir dans la politique de sanction un moyen pour certains Etats d'effectuer une sorte de « concurrence déloyale » contre les autres Etats. En prenant en exemple les sanctions en droit pénal des affaires, un Etat pourra prendre des sanctions très souples dans l'optique d'attirer au maximum les investisseurs et encourager l'établissement sur son sol des entreprises qui n'ont pas toujours la volonté d'exercer avec le principe de la légalité inscrit à leur ordre du jour109(*).

C'est pour parer à ces éventualités que certaines organisations communautaires ont préféré sanctionner directement les comportements qu'ils incriminent, évitant ainsi un concours des compétences normatives110(*). Ceci apparaît comme étant une véritable évolution de la compétence normative du droit communautaire, laquelle évolution peut aussi être observée au sein de la CEMAC à travers son effort d'harmonisation des sanctions pour certaines formes graves de criminalité (A). Mais, si l'on reste d'accord sur le principe de l'harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires, la question de la méthode reste encore à résoudre (B).

A- L'effort du législateur CEMAC en matière d'harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires

La question de l'harmonisation des sanctions ne touche de manière évidente que les peines d'emprisonnement. Car, on peut observer, par une simple lecture des textes du droit matériel de la CEMAC, que le législateur n'hésite pas tellement à édicter certaines sanctions non restrictives de liberté comme les interdictions et les déchéances. Mais, concernant les peines de prison, le législateur national est souvent interpellé pour en déterminer le quantum.

On note toutefois une évolution significative dans l'attitude du législateur, notamment en ce qui concerne l'infraction de blanchiment d'argent et du financement du terrorisme. Dans ces domaines, le législateur communautaire ne s'est pas contenté d'incriminer ces comportements, mais il les a également assortis de sanctions pénales. Ceci est l'oeuvre du titre V du règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale. Aux termes de l'article 46 de ce texte « est puni d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende pouvant aller jusqu'à cinq fois le montant des sommes blanchies sans être inférieure à FCFA 10.000 000, celui qui aura commis intentionnellement un ou plusieurs des agissements énumérés à l'article 1er ci-dessus relatif à la définition du blanchiment des capitaux ». Cet article puni également la tentative, la complicité, la participation à une association ou entente en vue de la commission des faits de blanchiment de capitaux. L'article 47 quant à lui énumère les circonstances qui conduisent à doubler les peines prévues dans l'article 46111(*).

L'article 48 sanctionne des mêmes peines les infractions liées au blanchiment des capitaux. Il s'agit par exemple du fait pour les dirigeants ou les agents d'organismes financiers ou de toute personne assujettie au titre de l'article 5, de porter à la connaissance du propriétaire des sommes ou de l'auteur de l'une des opérations mentionnées aux articles 18 et 36 (de ce règlement) l'existence de la déclaration faite auprès de l'agence nationale d'investigation financière (ANIF) ou de donner des informations sur les suites qui lui ont été réservées112(*).

S'agissant de l'infraction de financement du terrorisme, elle est punie d'un emprisonnement de 10 ans au moins et d'une amende pouvant aller jusqu'à 10 fois le montant des sommes en cause sans être inférieure à 10.000 000 FCFA. Il n'est même pas nécessaire que les fonds aient été effectivement utilisés pour commettre un acte terroriste pour que l'infraction soit consommée113(*). D'autres sanctions sont même prévues comme mesure d'accompagnement à la condamnation initiale. Il s'agit de la confiscation114(*), des peines d'amendes115(*), des interdictions définitives ou temporaires116(*).

Cette audace du législateur CEMAC, qui ne s'est pas seulement contenté d'incriminer le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, mais les a également assorti de sanction, est à encourager. Cette initiative permettra de mettre la coopération judiciaire dans son entreprise de lutte contre la criminalité à l'abri des difficultés que nous avons pris amplement le soin d'élucider. Cependant, la méthode à adopter pour une pareille harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires reste encore au centre de polémiques.

B- Les techniques d'harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires

Si l'on est de plus en plus d'accord sur la nécessité d'harmoniser les sanctions aux incriminations communautaires, la méthode à adopter est encore l'objet de controverses. Cette problématique a suscité de nombreuses controverses au sein de l'Union Européenne et a « empoisonné » les débats de plusieurs projets, notamment concernant la décision-cadre sur la traite des êtres humains117(*). Du point de vue de son contenu, il est généralement admis que l'harmonisation des sanctions ne doit concerner que les délits ayant fait l'objet d'une harmonisation à l'échelle communautaire et doit concerner surtout les peines d'emprisonnement et les peines d'amende. Ceci dit, plusieurs méthodes peuvent être adoptées pour l'harmonisation des ces sanctions. Parmi ces méthodes, le système de socle minimal de la peine maximale, le système de fourchette et celui d'uniformisation, sont les plus avancés.

S'agissant tout d'abord du système de socle minimal de la peine maximale, il s'agit pour le législateur communautaire d'édicter des seuils minimaux de la peine maximale. Autrement dit, il est question de déterminer un plancher au-delà duquel les Etats doivent fixer le minimum de la sanction. Ici, le droit communautaire incrimine un comportement et fixe une sanction minimale en deçà de laquelle les Etats ne doivent pas aller.

S'agissant ensuite du système de fourchette, il impose au législateur communautaire d'encadrer l'initiative des Etats en fixant les bornes minimale et maximale de la sanction. Le droit communautaire fixe donc à la fois le minimum et le maximum de la peine et laisse aux Etats la liberté de prendre des initiatives qui respectent toutefois ces bornes. Cette solution a pour mérite d'éviter aussi bien un excès de souplesse dans la répression qu'un excès de sévérité.

S'agissant enfin du système d'uniformisation de la sanction, elle apparaît comme la voie la plus radicale. D'après ce système, le droit communautaire incrimine et édicte des sanctions uniformes qui s'imposent dans tous les Etats membres sans aucune intervention du législateur national. Cette technique a le mérite d'imposer une sanction communautaire uniforme dans tous les Etats membres en évitant aussi les injustices pouvant découler d'une application hétérogène des sanctions aux violations des mêmes normes communautaires. Bien que la plus appropriée, cette technique d'uniformisation de la sanction est toutefois la plus difficile à accepter et à réaliser.

Il a été question pour nous dans ce chapitre d'étudier les différents aspects juridiques de la coopération judiciaire. De ces études, il ressort que la coopération judiciaire sera plus ou moins efficace selon que les législations nationales seront les plus proches possibles ; l'harmonisation apparaissant comme l'une des solutions idoines pour réduire au maximum les différences. Cette harmonisation viendra ainsi renforcer la coopération judiciaire en éliminant par exemple l'obstacle de la double incrimination. Contrairement à l'Union Européenne, la CEMAC, fortement aidée par le chevauchement des autres organisations communautaires comme l'OAPI et la CIMA, mais, surtout l'OHADA, est fortement avancée sur cette voie de l'harmonisation.

Conclusion de la première partie

Au terme de notre analyse consacrée aux aspects normatifs de la coopération judiciaire, plusieurs observations peuvent déjà être dégagées. La coopération judiciaire est un domaine très sensible, fortement marqué par le concept de souveraineté, où le sentiment de responsabilité politique des autorités publiques est très vif et dans lequel les principes constitutionnels jouent un rôle important. Le droit de punir, matière d'ordre public, ne peut être traité comme la politique agricole ou la commercialisation des morceaux de savon ou des kilogrammes de maïs. On se trouve ici au coeur même de la souveraineté des Etats, ce qui influence de manière significative le processus d'édiction des normes communautaires de coopération et justifie le niveau d'avancement de ce système de réponse à la criminalité. Nous avons vu qu'il existait au niveau de la CEMAC une volonté politique de lutter contre la criminalité sous toutes ses formes. Nous l'avons tous ressenti à travers l'étude de la mise en place au niveau communautaire d'un cadre juridique favorable à l'harmonisation aussi bien des incriminations que des sanctions de certains comportements  criminels ; le législateur CEMAC étant fortement aidé dans cette entreprise par le législateur OHADA à travers l'harmonisation, voire l'uniformisation du droit des affaires en Afrique. Mais, nous pouvons dire que la mise en place d'un cadre normatif ne suffit pas. Cette volonté de lutter contre toutes les formes de criminalité doit être traduite dans l'action, ce qui apparaît généralement comme le plus inquiétant dans le processus de coopération judiciaire.

DEUXIEME PARTIE : LES ASPECTS OPERATIONNELS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE

Après avoir étudié les questions de droit pénal de fond soulevées par la coopération judiciaire, il est maintenant question pour nous dans ce titre d'analyser les questions d'ordre pénal procédural soulevées par la mise en oeuvre de la coopération judiciaire pénale. En effet, parler des aspects opérationnels de la coopération judiciaire pénale revient à s'interroger sur la mise en oeuvre de cette forme particulière de procédure pénale. Il est question pour nous maintenant d'étudier les différents instruments juridiques mis à la disposition des magistrats et des autres autorités judiciaires par les hommes politiques pour mener à bien leur procédure contenant un élément d'extranéité. Nous nous retrouvons donc ici au coeur même de la pratique de la coopération judiciaire pénale.

L'analyse des textes spéciaux servant de base à la coopération judiciaire dans la zone CEMAC118(*) nous permet de déceler deux instruments : l'extradition et l'entraide répressive internationale. L'extradition est définie à l'article 1er de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC comme étant un acte par lequel un Etat requis remet à la disposition d'un Etat requérant une personne poursuivie, recherchée ou condamnée pour une infraction de droit commun conformément aux dispositions légales prévues. C'est donc une mesure permettant de retrouver et de punir l'auteur d'une infraction qui se serait refugié dans un autre Etat.

L'entraide répressive, dans un sens restreint, peut être compris comme étant une procédure permettant de retrouver la preuve d'une infraction contenant un élément d'extranéité. On y regroupe généralement les commissions rogatoires, les demandes de comparution de témoins, d'experts ou de confiscation des produits de l'infraction.

Qu'il s'agisse de l'entraide répressive internationale ou de l'extradition, ce sont des instruments classiques qui ont été inventés depuis le 19e siècle pour lutter contre la criminalité transfrontalière. C'est pourquoi certains auteurs n'hésitent pas à manifester leurs doutes sur la capacité de ces instruments à assurer une lutte efficace contre la criminalité du 21e siècle (chapitre I). Mais, il serait sans doute illusoire de croire, en matière instrumentale dans la cadre de la CEMAC, que nous allons faire autre chose que du neuf avec du vieux. Tant il vrai qu'en matière de coopération pénale, le vieux a fourni déjà un certain nombre de pistes que l'on doit d'abord améliorer avant d'innover119(*) (chapitre II).

Chapitre I : Les critiques avancées contre les instruments classiques de coopération

Plusieurs critiques ont le plus souvent été avancées contre les instruments classiques de coopération que sont l'extradition et l'entraide répressive internationale. Les unes tiennent à l'inadaptation de certains mécanismes d'extradition à la volonté d'efficacité dans la répression (section I). D'autres concernent les nombreux points d'achoppement qui jonchent la pratique de l'entraide judiciaire internationale (section II).

Section I : L'inadaptation de certains mécanismes d'extradition à la volonté d'efficacité dans la répression

L'extradition a pour but de livrer à la justice l'auteur d'une infraction qui se trouve à l'étranger, pour le soumettre à un jugement (extradition « processuelle ») ou pour lui faire exécuter une peine de prison ou une mesure de sûreté définitive (extradition « à fin d'exécution »). Le texte fondamental en la matière dans le cadre de la CEMAC est l'accord d'extradition entre les Etats membres, auquel il faut ajouter l'accord de coopération judiciaire, les législations nationales des Etats membres et les conventions internationales multilatérales auxquelles les Etats membres de la CEMAC sont parties120(*).

Pour qu'elle soit accordée, la demande d'extradition doit remplir certaines conditions tant de fond que de forme. Elle doit aussi suivre une procédure déterminée pour être valable. Mais, qu'il s'agisse des conditions (paragraphe I) ou de la procédure (paragraphe II), des critiques qui ne sont pas des moins sérieuses au regard des nouveaux défis imposés par la lutte contre la criminalité sont avancées.

Paragraphe I- L'inopportunité de certaines conditions de l'extradition

L'extradition est généralement soumise au respect de plusieurs règles. C'est ainsi que l'infraction pour laquelle elle est demandée ne doit pas être considérée par la partie requise comme entrant dans le champ des infractions justifiant sa compétence121(*). L'extradition ne peut non plus être accordée si l'auteur de l'infraction a déjà été poursuivi pour les mêmes faits. C'est l'application sur le plan international du principe ne bis in idem (ou non bis in idem122(*)).

Il en est de même en cas d'amnistie123(*), d'infraction politique,124(*) militaire,125(*) ou punie de la peine capitale126(*). On peut recenser ainsi dans ces divers textes plusieurs autres conditions aussi bien positives que négatives qui entourent la pratique de l'extradition. Mais, deux d'entre elles sont jugées par une bonne partie de la doctrine comme inadaptées à l'évolution contemporaine de la lutte contre la criminalité. Il s'agit de la condition de la double incrimination (A), et celle de la non-extradition en matière fiscale (B).

A- La double incrimination

L'exigence de la double incrimination est l'une des règles générales appliquées à l'extradition. Si l'on apprécie de manière extensive cette notion, on peut en déduire qu'elle a une double portée : elle signifie tout d'abord que l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée doit exister aussi bien dans l'ordre législatif de l'Etat requis que dans celui de l'Etat requérant. Elle signifie ensuite que cette infraction doit avoir un certain degré de gravité pour pouvoir justifier l'extradition.

Des difficultés peuvent surgir dans la mise en oeuvre de ce principe de la double incrimination, compte tenu des divergences qui existent entre les législations des Etats membres. Il peut arriver que l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée n'existe pas dans l'ordre juridique de l'Etat requis, du moins sous la même qualification. Certaines autorités face à cette situation rejettent la demande d'extradition. Pour elles, « double incrimination » signifierait « incrimination identique ». Mais, cette attitude est fustigée par la doctrine dominante. Pour elle, la double incrimination doit être appréciée de manière abstraite. Le fait pour lequel l'extradition est poursuivie doit être transposé au niveau de l'Etat requis pour voir s'il n'y a pas d'infraction correspondante. Ce n'est que dans les cas où ce comportement reproché ne tombe sous le coup d'aucune incrimination dans l'Etat requis qu'on pourra conclure que la condition de la double incrimination n'est pas remplie. Cette position est corroborée par la jurisprudence suisse qui affirme que, pour le constat de la double incrimination en matière de corruption d'un fonctionnaire « les faits reprochés à la personne poursuivie à l'étranger doivent être transposés, dans la mesure nécessaire et selon leur sens, pour juger de leur punissabilité selon le droit interne de l'Etat requis, en se fondant sur l'hypothèse que les actes auraient été commis sur le territoire de cet Etat ou mieux encore, qu'il seraient soumis à la juridiction de cet Etat. (...). En l'occurrence, le juge suisse doit donc raisonner comme si non seulement le corrupteur présumé avait agi en Suisse, mais que le fonctionnaire corrompu appartenait à une administration suisse »127(*).

Cette approche ainsi décrite permet d'avoir une appréciation extensive de la règle de la double incrimination. Mais, d'autres difficultés peuvent être soulevées : qu'arriverait-il si les faits reprochés violent sévèrement l'ordre public interne de l'Etat requérant alors qu'ils ne correspondent à aucune infraction dans le droit interne de l'Etat requis ? Cette violation doit-elle rester impunie au nom du principe de la double incrimination ? C'est sur la base de ces interrogations que nous militons en faveur de l'abolition de la règle de la double incrimination. En fait, nous pensons que pour accorder l'extradition, on doit plus tenir compte de l'ordre public qui a été violé que de celui dans lequel se trouve le délinquant. Ce dernier ayant agi en connaissance de cause, assurer son impunité par le passage d'une frontière à une autre s'apparente à une injustice puisqu'il savait à quoi il s'exposait en commettant les faits réprimés. Prenons l'exemple de l'infraction d'homosexualité. L'article 347 bis du code pénal Camerounais dispose que toute personne ayant eu des rapports sexuels avec une personne de même sexe s'expose à une peine de 6 mois à 5 ans de prison et à une amende de 200.000 FCFA maximum, le tout multiplié par deux si le partenaire est mineur de moins de 21 ans. Le code pénal Gabonais ne mentionne nullement la conduite homosexuelle comme étant une infraction. Puisque tout ce qui n'est pas défendu est permis, l'homosexualité serait donc légale au Gabon. Ne serait-il pas alors injuste qu'une personne poursuivie pour homosexualité au Cameroun puisse s'assurer de son impunité tout simplement en traversant la frontière ?

Au total, nous observons que la règle de la double incrimination peut affaiblir de manière considérable la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes. Elle peut transformer certains Etats en lieu de préparation et de refuge pour les délinquants ayant commis une infraction sur le territoire d'un autre Etat. L'harmonisation des incriminations réalisée par le législateur CEMAC, aidé par le législateur OHADA, permet d'éviter au maximum les blocages susceptibles d'être causés par cette règle. Mais, il faut aller plus loin en la supprimant afin que les frontières ne se transforment plus en avantage pour les délinquants alors qu'elles constitueraient un obstacle pour la justice.

Comme la règle de la double incrimination, certains auteurs n'hésitent pas à critiquer sévèrement la règle de la non-extradition en matière fiscale.

B- La règle de la non-extradition en matière fiscale

Le principe est généralement celui de l'exclusion des infractions fiscales du domaine de l'extradition. Obéissant aux revendications de la souveraineté des Etats parties, les conventions internationales permettent de refuser l'extradition pour les matières de taxes, impôts, douanes et change. Tel est aussi le cas de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC qui fait de l'exclusion le principe. L'extradition ne pourra ainsi être accordée en matière fiscale que « s'il en a été ainsi convenu entre Etats parties pour chaque infraction ou catégorie d'infractions »128(*). Certains auteurs129(*) fustigent cette situation et proposent que les infractions fiscales soient intégrées dans le domaine de l'extradition sans possibilité d'exclusion. Plusieurs raisons sont avancées pour soutenir cette position. La plus courante est que les infractions fiscales ont le plus souvent un lien très étroit avec plusieurs infractions qui restent dans le champ de l'extradition, notamment avec le blanchiment des capitaux. La réalisation de ces infractions s'accompagne fréquemment de violations fiscales et douanières. Plus encore, les investigations menées en matière fiscales permettent le plus souvent de déceler l'existence d'autres infractions économiques de plus grande envergure130(*).

Les conditions de la double incrimination et de la non-extradition en matière fiscale apparaissent, au terme de cette analyse consacrée à l'inopportunité de certaines conditions d'extradition, comme de véritables sources de blocage de la coopération judiciaire. Ces conditions peuvent ainsi paralyser et rendre inefficace la lutte contre la criminalité transfrontalière. Mais, c'est surtout au niveau de la procédure d'extradition que des blocages sont de plus en plus nombreux.

Paragraphe II- La complexité de la procédure d'extradition

L'article 11 de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC prévoit que « sauf disposition contraire du présent accord, la loi pénale de la partie requise est seule applicable à la procédure de l'extradition ainsi qu'à celle de l'arrestation provisoire ». C'est dire tout simplement que la procédure d'extradition est régie par la loi nationale des Etats parties lorsque ceux-ci ont la qualité d'Etat requis. Dans le contexte camerounais, la procédure d'extradition est régie par le nouveau code de procédure pénale qui abroge les dispositions de l'ancienne loi de 1964131(*) sur l'extradition. Cette procédure varie selon que le Cameroun est l'Etat requérant ou requis. Lorsque le Cameroun est l'Etat requérant les règles de procédure sont peu nombreuses et se résument pour l'essentiel aux dispositions des articles 673 à 675 du nouveau code de procédure pénale. La procédure est beaucoup plus longue et complexe lorsque le Cameroun est l'Etat requis132(*). Mais qu'il s'agisse de l'extradition active ou passive, plusieurs interrogations peuvent être soulevées notamment dans le contexte Camerounais. En fait, à la lecture des différentes dispositions du nouveau code de procédure pénale camerounais, il demeure des doutes sur l'instance judiciaire compétente en matière d'extradition (A). On reproche aussi à cette nouvelle procédure d'être attentatoire aux droits de la victime (B). Plus encore, plusieurs auteurs ont exprimé leur scepticisme à l'égard de la phase administrative de l'extradition (C).

A- L'imprécision dans la détermination de l'instance judiciaire compétente133(*)

Avant la réorganisation judiciaire opérée par l'ordonnance N° 72/04 du 26 Août 1972, c'est la chambre des mises en accusation de la cour d'appel qui était compétente pour connaître des demandes d'extradition passive au Cameroun. Cette ordonnance a supprimé cette instance judiciaire sans la remplacer par une autre, créant ainsi par la même occasion un vide juridique. C'est donc de manière prétorienne que la cour d'Appel, juridiction de jugement de second degré, s'est arrogée cette compétence pour combler ce vide juridique134(*). Le nouveau code de procédure pénale vient mettre fin à ce flou juridique en consacrant de manière expresse la compétence de la cour d'appel dans la procédure passive d'extradition au Cameroun. En effet, l'article 656 de ce texte dispose que « dès réception du dossier visé à l'article 651 ci-dessus, le Procureur Général, après s'être assuré de l'accomplissement des formalités prévues aux articles 653 et 654 ci-dessus, le transmet, assorti de ses réquisitions, au Président de la cour d'appel, qui procède à l'enrôlement de l'affaire et en fait donner notification à l'étranger et, le cas échéant, à son conseil ». On peut féliciter le législateur camerounais d'avoir enfin donné une base légale aux interventions de la cour d'appel dans la procédure d'extradition. Mais, cette réjouissance ne peut être de longue durée car on se rend très vite compte que plusieurs interrogations restent encore sans réponse.

En fait, la cour d'appel, juridiction de second degré, comporte plusieurs chambres : laquelle de ces chambres sera-t-elle compétente pour connaître des demandes d'extradition ? Est-ce la chambre civile, correctionnelle, criminelle ou alors la chambre de contrôle de l'instruction nouvellement créée par le nouveau code de procédure pénale135(*) ? Le nouveau code de procédure n'en souffle mot. Ce texte se contente d'énoncer que la cour siège en « chambre du conseil »136(*). Ce qui voudrait dire que les audiences ne sont pas publiques. Or, nous savons que les audiences de la cour d'appel statuant en matière pénale sont publiques ; qu'il s'agisse de la chambre criminelle ou de la chambre correctionnelle. Selon un auteur137(*), la nouvelle chambre de contrôle de l'instruction, juridiction d'instruction de second degré comme l'était d'ailleurs la défunte chambre des mises en accusation, serait mieux indiquée pour s'occuper de l'examen des demandes d'extradition en chambre du conseil. Mais, les articles 272 et suivants du nouveau code de procédure pénale ont limité sa compétence au seul contrôle des actes d'instruction. Les demandes d'extradition doivent-elles alors continuer à être examinées par les chambres correctionnelles des cours d`appel comme c'était le cas avant l'intervention du nouveau code de procédure pénale ? Quoiqu'il en soit, nous sommes d'avis qu' « une intervention législative est nécessaire pour indiquer la chambre de la cour d'appel compétente en matières d'extradition »138(*).

Cette imprécision dans la détermination de l'instance judiciaire compétente peut aussi s'analyser comme l'une des manifestations des lacunes dans la protection des droits fondamentaux de la victime.

B- La protection fragile des droits fondamentaux de la défense

La question de la protection des droits de la défense est le plus souvent absente dans l'ordre du jour des grands regroupements sur la procédure d'extradition. La même critique peut être avancée contre la procédure d'extradition telle que prévue par le nouveau code de procédure pénale camerounais. Certains auteurs reprochent à ce texte de ne pas imposer des délais contraignants afin d'assurer la célérité de la procédure. On note aussi l'absence des voies de recours pouvant permettre au délinquant de s'attaquer à la décision d'extradition.

1- L'absence de délai contraignant

S'agissant de l'absence de délai contraignant afin d'assurer la célérité de la procédure, il faut noter que cette situation est susceptible de prolonger la durée de détention du délinquant. En fait, le nouveau code de procédure pénale camerounais ne donne à la personne dont l'extradition est demandée aucun moyen lui permettant d'obtenir le déroulement rapide de la procédure. Si l'on observe une réelle volonté de la part du législateur d'accélérer la procédure dès la réception de la demande d'extradition139(*), il n'en demeure pas moins vrai que de la saisine de la cour jusqu'au prononcé de la décision donnant avis sur la demande d'extradition, aucun délai n'est prévu. C'est pour éviter que la procédure d'extradition ne dure indéfiniment que le code de procédure pénale français a prévu plusieurs délais : 24 heures pour la présentation de la personne au procureur de la république après son arrestation, 7 jours pour la représentation de la personne au procureur général, 4 jours pour l'incarcération de la personne dans la maison d'arrêt du siège de la cour d'appel à compter de sa présentation au Procureur général, 5 jours pour la comparution devant la chambre de l'instruction si la personne consent à son extradition (7 jours pour que la chambre lui donne acte), 10 jours pour la comparution devant la même chambre à compter de la présentation au procureur général si la personne réclamée déclare ne pas consentir à son extradition (la chambre doit alors rendre son avis dans le délai d'un mois à compter de la comparution140(*)). Mais, la situation dans la CEMAC n'est pas aussi lamentable que le laisse penser un auteur141(*). En effet, dans le contexte camerounais, l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC vient combler certaines lacunes du nouveau code de procédure pénale (NCPP) ; notamment en édictant des hypothèses de mise en liberté provisoire de plein droit pour contraindre les autorités administratives à la célérité.

L'article 16(1) de l'accord d'extradition donne la possibilité pour l'Etat requérant de solliciter et d'obtenir l'arrestation provisoire de l'individu recherché en cas d'urgence142(*). L'alinéa 2 de l'article 652 du NCPP dispose dans ces cas que  « la demande des autorités étrangères doit être régularisée dans les plus brefs délais, conformément aux dispositions de l'article 641 ci-dessus ». L'article 16 (4) de l`accord d'extradition quant à lui dispose que « l'arrestation provisoire peut prendre fin, si dans un délai de 72 heures après l'arrestation, sauf dérogation, la partie requise n'a pas été saisie de la demande d'extradition et des pièces mentionnées à l'article 13 ; elle ne peut en aucun cas, excéder 30 jours après l'arrestation. Toutefois, la mise en liberté provisoire est possible à tout moment, sauf pour la partie requise à prendre toute mesure qu'elle estime nécessaire en vue d'éviter la fuite de l'individu réclamé ». D'après cette disposition, la mise en liberté provisoire reste facultative pour les Etats parties. Elle est de plein droit à l'expiration du délai de 30 jours si l'Etat requérant n'a pas régularisé sa demande d'extradition ou si aucune demande d'extradition n'a été délivrée depuis l'arrestation provisoire de l'étranger.

L'article 18(4) du même texte donne une autre hypothèse de mise en liberté de l`individu réclamé. S'il n'a pas été extradé à la date fixée, il peut être mis en liberté à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter de cette date et il est en tout cas mis en liberté à l'expiration d'un délai de 30 jours143(*). La partie requise peut même refuser de l'extrader pour la même infraction. Cette disposition s'applique sous réserve de celle de l'article 18(5) du même texte.

2- L'absence de voies de recours

Le NCPP ne donne à la personne mise en cause aucune voie de recours pour le contrôle de l'avis se prononçant sur la demande d'extradition. Lorsque l'étranger renonce au bénéfice de la législation camerounaise sur l'extradition et consent formellement à être livré aux autorités de l'Etat requérant, la cour d'appel lui donne acte de sa déclaration. Sa décision est alors transmise sans délai par le procureur général au ministre chargé de la justice qui propose à la sanction du Président de la République un décret ordonnant l'extradition. Ce décret est notifié à l'étranger et n'est susceptible d'aucun recours144(*). Le décret ordonnant l'extradition n'est ainsi susceptible d'aucun recours. Seul l'avis de la cour statuant en chambre de conseil peut être attaqué devant la cour suprême, non pas par la personne mise en cause, mais par le procureur général qui a seul qualité pour exercer cette voie de recours.

Cette solution semblait conforme à l'idée selon laquelle le mis en cause a lui-même renoncé à bénéficier de la loi camerounaise sur l'extradition. On se serait alors attendu que dans l'hypothèse contraire, on lui donne la possibilité d'attaquer au moins l'avis de la cour d'appel devant la cour suprême. Mais, il n'en est rien et c'est un peu décevant au regard de la nécessité de protéger les droits fondamentaux de la défense. L'article 663 renvoie, en cas d'avis favorable sur l'extradition, aux dispositions de l'article 659(2) et (3), lesquelles excluent tout recours de la part de la personne mise en cause. Un auteur est même allé jusqu'à se demander « pourquoi le législateur a minutieusement réglementé les conditions de l'extradition si la personne mise en cause ne peut provoquer le contrôle de leur mauvaise application par le premier juge. Il est évident que le procureur général qui peut seul provoquer le contrôle de l'avis de la cour d'appel n'usera le plus souvent de cette faculté qu'en cas d'avis défavorable à l'extradition145(*) ». Selon cet auteur, le législateur camerounais est allé à contre-courant de l'évolution actuelle en reprenant ainsi la solution qui était contenue dans l'article 22(1) de la loi de 1964, laquelle aussi ne faisait que reprendre les termes de l'article 16 de la loi française du 10 Mars 1927. Pourtant, la situation en France n'est plus la même depuis la réforme opérée par la loi du 9 Mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité146(*).  En effet, cette loi admet désormais des voies de recours au profit de l'individu mis en cause aussi bien devant la chambre criminelle de la cour de cassation en ce qui concerne l'avis de la chambre d'instruction, que devant le conseil d'Etat en ce qui concerne le décret d'extradition. Au lieu de profiter de ces évolutions, le législateur camerounais a préféré faire « un pas en arrière en refusant au mis en cause la possibilité de se pourvoir en cassation contre l'avis de la cour d'appel et d'exercer un recours contre le décret d'extradition. [Ce qui est] de nature à remettre en cause le mérite du nouveau code de procédure pénale camerounais réputé plus protecteur des droits de la défense147(*) ».

Mais, on peut aussi comprendre la volonté du législateur camerounais sous un autre angle. On peut voir en l'exclusion des voies de recours contre l'avis et le décret d'extradition un moyen d'assurer la célérité de la procédure en évitant une multiplication de recours dilatoires. Car, les criminels sont souvent réputés pour leurs manoeuvres dilatoires tendant, sinon à assurer leur impunité, du moins à retarder au maximum leur condamnation.

C- Les contestations sur l'opportunité de la phase administrative de la procédure d'extradition

Avant l'avènement de la loi camerounaise sur l'extradition de 1964, c'est la loi française de 1927 rendue applicable au Cameroun par un décret du 29 Septembre 1928148(*) qui était en vigueur au Cameroun oriental en matière d'extradition ; lorsque plusieurs autres textes149(*) rendus applicables au Nigéria par le colon Anglais étaient applicables dans la partie occidentale du pays. Le décret de 1928 avait instauré une procédure d'extradition purement administrative. Il faudra alors attendre la loi du 26 Juin 1964 fixant le régime de l'extradition au Cameroun pour voir un partage de compétence entre les autorités administratives et judiciaires. Le NCPP maintient ce partage de compétence entre les autorités administratives et judiciaires en matière d'extradition. L'article 13(1) de l'accord d'extradition dispose que la demande d'extradition est formulée par écrit et présentée par le ministre chargé de la justice de l'Etat requérant au ministre de la justice de l'Etat requis, à moins que par arrangement direct deux ou plusieurs Etats parties ne dérogent à cette voie. D'après le code de procédure pénale camerounais, sous réserve de conventions internationales, toute demande d'extradition est formulée par voie diplomatique150(*). Le dossier d'extradition est, après vérification des pièces par le ministre chargé des relations extérieures, transmis au ministre chargé de la justice et c'est ce dernier qui saisit pour exécution le parquet de résidence de l'individu réclamé après vérification de la régularité de la procédure151(*). Ce n'est qu'en cas d'urgence qu'il peut y avoir dérogation à ces exigences.

Les autorités administratives sont également l'instance suprême de décision lorsqu'il faut accorder ou non l'extradition152(*). Cette situation est sévèrement critiquée par la doctrine (1) qui propose une collaboration directe de juge à juge (2) pour un besoin d'efficacité et d'impartialité.

1- Les critiques contre l'intervention des autorités administratives dans la procédure d'extradition

Plusieurs raisons ont le plus souvent été avancées pour justifier l'intervention de l'administration dans la procédure d'extradition. La raison la plus pertinente c'est que l'extradition est un acte grave susceptible de porter atteinte aux intérêts essentiels de l'Etat. La protection des intérêts fondamentaux de la nation justifierait ainsi l'intervention de l'administration centrale dans la procédure d'extradition.

S'il est tout à fait évident de veiller à la protection des intérêts fondamentaux de la nation, force est de constater qu'ils ne sont compromis que dans des cas rarissimes et qu'il s'agit aujourd'hui d'une notion aux contours vagues faisant une place trop large à l'arbitraire. En effet, le filtre administratif du ministre de la justice ou du Président de la République153(*) ne se justifie plus. Nous pensons que les administrations centrales n'apportent aucune valeur ajoutée dans ce domaine. Comme le fait remarquer un auteur154(*), il devient aujourd'hui inconcevable que le ministre de la justice de l'Etat requérant ou celui de l'Etat requis portent un jugement sur l'opportunité de l'extradition, car cela reviendrait à reconnaître en quelque sorte à l'autorité politique « un rôle d'instance d'appel de l'autorité judiciaire ». Cette situation donne une vue troublée de la séparation des pouvoirs. Car, il apparaît inutile de rappeler, dans des patries qui se réclament de MONTESQUIEU, que la démocratie est un régime politique composé de trois pouvoirs, l'exécutif, le législatif et le judiciaire, indépendants l'un des autres, et que l'immixtion d'un pouvoir dans le domaine de compétence de l'autre est souvent le reflet de l'arbitraire qui anime le régime. Il devient de plus en plus évident que cette intervention de l'autorité politique est motivée par des raisons strictement politiques et non par des besoins de justice. La protection des intérêts fondamentaux de la nation est donc une notion aux contours vagues derrière laquelle les dirigeants politiques se cachent pour assurer l'impunité de leurs proches ou amis politiques, ou encore pour réaliser leurs desseins politiques. L'exemple très récent de l'affaire des infirmières Bulgares et du médecin palestinien en Lybie constitue une parfaite illustration.

C'est pour parer à ces inconvénients que certains auteurs prônent une collaboration directe de juge à juge.

2- Pour une collaboration directe de juge à juge

Face aux différentes critiques avancées contre l'intervention de l'administration dans la procédure d'extradition, certains auteurs préconisent la suppression de cette phase administrative et l'adoption d'une procédure purement judiciaire. L'on estime que l'autorité judiciaire a la compétence nécessaire pour contrôler la régularité de la procédure. L'administration centrale, notamment les services du ministre de la justice, sera informée à bref délai dans les cas où les juges estiment que l'exécution de l'extradition est susceptible de porter atteinte aux droits fondamentaux de la Nation.

Cette solution est celle qui avait été retenue par la convention de Tananarive de 1961. En effet, l'article 49 de ce texte dispose que « la demande d'extradition sera adressée directement au procureur général compétent de l'Etat requis ». Cette solution rendrait la procédure beaucoup plus rapide et assurerait une plus grande efficacité dans la répression.

Nous pensons qu'il y va de l'intérêt de la pratique de la coopération judiciaire dans la zone CEMAC de simplifier au maximum la procédure d'extradition. Ceci permettra par exemple d'éviter que les Etats, confrontés aux lenteurs de la procédure d'extradition, ne se retournent vers des voies détournées. La simplification de la procédure aura donc pour effet de réduire la pratique des extraditions déguisées et des enlèvements des délinquants sur le territoire de refuge. La même solution est aussi fortement recommandée en matière d'entraide judiciaire.

Section II : Les entraves à l'entraide judiciaire

L'entraide judiciaire en matière pénale entendue comme une branche spécifique de la coopération judiciaire, peut être définie comme l'ensemble des actes qu'une autorité judiciaire d'un Etat (Etat requérant) tend à faire accomplir par les autorités judiciaires d'un autre Etat (Etat requis), en vue d'un procès pénal155(*). Il s'agit d'une catégorie vaste et hétérogène, qui comprend les commissions rogatoires entendues comme des demandes d'aides adressées par l'autorité judiciaire d'un Etat à l'autorité judiciaire d'un autre Etat dans le cadre d'une procédure pénale ouverte sur son territoire en vue d'accomplir en son nom et pour son compte une mesure d'instruction, et les autres actes qu'on qualifie d'entraide « mineure156(*) ». L'entraide répressive dans la zone CEMAC est régie pour l'essentiel par l'accord de coopération judiciaire du 28 Février 2004, lequel abroge toutes les conventions bilatérales existant jusqu'ici entre les Etats membres. D'autres textes spéciaux de la CEMAC contiennent des dispositions relatives à l'entraide répressive. C'est le cas par exemple de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale. C'est aussi les cas du règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale, et du règlement N° 08/05-UEAC-057-CN- B portant adoption de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale. Dans la mesure où elles ne sont pas exclues par des dispositions communautaires, les dispositions des législations nationales peuvent aussi être appelées à s'appliquer. Au total, l'entraide répressive renferme aussi bien la collaboration judiciaire que la collaboration policière. Cette dernière est renvoyée à des développements ultérieurs. Il sera donc question pour nous dans ces développements de la collaboration judiciaire. Mais, loin d'adopter une démarche qui nous fera reprendre en les expliquant tous les mécanismes de l'entraide judiciaire, il sera question pour nous, à travers une démarche analytique, de recenser les problèmes majeurs auxquels fait face la procédure d'entraide judiciaire et en donnant, si c'est déjà le cas, les solutions apportées par le législateur CEMAC ; sinon en proposant les solutions que nous jugeons adéquates.

Ces précisions étant faites, l'analyse de la procédure d'entraide pénale internationale nous permet de déceler plusieurs obstacles qui peuvent être d'ordre juridique (paragraphe I) ou matériel (paragraphe II).

Paragraphe I : Les difficultés d'ordre juridique

Sur le plan juridique, plusieurs critiques sont le plus souvent avancées à la pratique de l'entraide. En analysant de près les dispositions du législateur CEMAC sur la question, on s'aperçoit que le législateur CEMAC essaye tant bien que mal de les contourner. Les difficultés juridiques les plus courantes sont la protection du secret bancaire (A) et les lenteurs de la procédure d'entraide (B).

A- La protection du secret bancaire

Le secret bancaire peut être défini comme « l'obligation de confidentialité à laquelle sont tenus les établissements de crédit par rapport aux actes, faits et informations concernant leurs clients, et dont ils ont connaissance dans l'exercice de leur profession157(*) ». Il a donc pour but d'assurer la discrétion des transactions financières. Il met à la charge du banquier une obligation de confidentialité dont la violation est susceptible d'engager sa responsabilité civile. Cette institution qu'est le secret bancaire bénéficie dans certains Etats d'une réglementation tellement rigide qu'elle empêche toute possibilité de levée. Ceci a été pendant longtemps le cas de la Suisse158(*) et de nombreux autres « paradis fiscaux ». Mais, il apparaît que le lien est souvent vite fait entre une opération de blanchiment et la protection du secret bancaire.

En fait, les criminels pour injecter les produits de leurs crimes dans des circuits légaux ont le plus souvent recours aux établissements financiers, notamment dans les pays qui sont réfractaires à toute levée du secret bancaire. Le banquier sera d'autant plus crédible s'il peut demeurer le plus silencieux possible159(*). Mais il s'avère que le secret bancaire se pose le plus souvent en véritable obstacle à la pratique de l'entraide judiciaire. En effet, l`autorité judiciaire qui poursuit le blanchiment aura le plus souvent besoin des relevés bancaires pour apporter la preuve de cette infraction et celle de l'origine criminelle des fonds. C'est pourquoi la majorité de la doctrine préconise l'inopposabilité du secret bancaire aux autorités judiciaires pour un souci d'efficacité dans la répression de la criminalité. C'est pour tenir compte de cette situation que le législateur CEMAC a refusé que le secret bancaire soit opposé aux autorités judiciaires. L'article 57 du règlement CEMAC portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale dispose que  «l'entraide peut notamment inclure (...) les documents pertinents y compris de relevés bancaires, de pièces comptables, de registres montrant le fonctionnement d'une entreprise ou ses activités commerciales et financières ». Cette solution est corroborée sur le plan interne par le législateur camerounais. En effet, l'article 8(1) de la loi relative au secret bancaire160(*) dispose que « le secret bancaire ne peut être opposé à l'autorité judiciaire agissant dans le cadre d'une procédure pénale et aux officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire du Procureur de la République ».

Cette avancée réalisée dans le cadre de la CEMAC en ce qui concerne la lutte contre la criminalité financière est fort appréciable. Le législateur donne ainsi aux autorités judiciaires des Etats membres des moyens juridiques pour aller au-delà de la protection du secret bancaire et s'échanger mutuellement les documents bancaires nécessaires pour établir la preuve de certaines infractions comme le blanchiment des capitaux. Une autre difficulté rencontrée dans la pratique de l'entraide répressive est la lenteur de la procédure.

B- La lenteur de la procédure : l'absence de délai contraignant

L'une des difficultés majeures de l'entraide répressive internationale est l'inexistence de délai contraignant en vue d'assurer la célérité de la procédure. En fait, les différentes conventions régissant l'entraide répressive dans la zone CEMAC ne contiennent pas de mesures permettant d'assurer la rapidité dans l'exécution des demandes. Pourtant, l'on se retrouve dans un domaine où la rapidité est de mise si l'on veut s'assurer d'une plus grande efficacité dans la répression. Cette absence de délai est souvent aggravée par la procédure de transmission des demandes d'entraide qui privilégie la voie diplomatique.

Face à cette situation, plusieurs acteurs de la coopération judiciaire militent en faveur de la soumission de la pratique d'entraide à des délais contraignants pour assurer sa célérité, et partant, l'efficacité dans la répression. En effet, comme s'interrogeait un auteur161(*), «comment peut-on aujourd'hui concilier la lutte contre la criminalité transfrontalière et les retards dans les réponses aux demandes d'entraide ?«. Pour lui, délivrer une commission rogatoire internationale, c'est un peu comme jeter une bouteille à la mer. On espère qu'elle ne coulera pas, et que quelqu'un y lira le message, de là à espérer qu'il vous vienne en aide. Reprenant une remarque de Bernard BERTOSSA, cet auteur montre comment les frontières nationales représentent un avantage pour les délinquants alors qu'elles constituent une véritable source de blocage pour les autorités judiciaires : « le criminel met une heure pour ouvrir un compte en Suisse ou ailleurs. Le juge devrait pouvoir intervenir dans les vingt-quatre heures, ça ferait tout de même déjà vingt-trois heures de retard ... Mais, actuellement il arrive que ce soit vingt-quatre mille heures de retard »162(*).

Une réforme législative s'avère donc nécessaire pour s'assurer d'une plus grande célérité dans la pratique de l'entraide répressive en vue de lutter de manière plus efficace contre la criminalité transfrontalière. En attendant, les législations nationales pourraient combler cette lacune et les autorités judiciaires accorder beaucoup plus d'intérêt pour la réponse aux demandes d'entraide. D'autres difficultés rencontrées dans la pratique de l'entraide répressive internationale sont d'ordre matériel.

Paragraphe II : Les difficultés d'ordre matériel

Plusieurs difficultés d'ordre matériel peuvent se soulever dans la pratique de l'entraide judiciaire internationale. Il peut s'agir par exemple d'une insuffisance de formation des autorités judiciaires aux pratiques de l'entraide. Il peut aussi s'agir d'un manque de motivation de ces autorités face aux demandes d'entraide. Car il est constamment relevé que les magistrats aiment traiter de manière prioritaire leurs dossiers, reléguant parfois aux oubliettes les demandes de collaboration de leurs collègues étrangers. Mais, c'est sur le plan des échanges d'informations qu'on se heurte à plusieurs difficultés matérielles.

En fait, les Etats parties à l'accord de coopération judiciaire de la CEMAC se sont engagés à s'échanger entre eux toutes les informations nécessaires à la conduite d'une procédure pénale ouverte sur leur territoire. Ces informations peuvent concerner des personnes ou même des biens. Les informations sur les personnes sont contenues pour l`essentiel dans le casier judiciaire. Mais, on se heurte très vite à une tenue anarchique des casiers judiciaires dans les Etats (A). Pour essayer d'apporter une solution à cet obstacle et à beaucoup d'autres difficultés rencontrées dans l'échange d'information, la nécessité de créer un réseau communautaire d'échanges d'informations se fait de plus en plus ressentir (B).

A- La tenue anarchique des casiers judiciaires

L'article 27 (1) de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC dispose que « la partie requise communique, dans la mesure du possible, les extraits de casier judiciaire et tous les renseignements relatifs à la personne poursuivie qui lui sont demandés par les autorités judiciaires d'un Etat partie requérant ». Les Etats membres se sont ainsi engagés à communiquer les informations sur les personnes recherchées ou poursuivies contenues dans les casiers judiciaires. En fait, le casier judiciaire est un document tenu par les autorités judiciaires d'un pays et qui permet de retracer toutes les condamnations intervenues dans la vie d'un individu. C'est donc un relevé des condamnations criminelles ou correctionnelles dont un individu a fait l'objet. Il est réglementé au Cameroun par le nouveau code de procédure pénale163(*).

Il est institué un casier judiciaire au niveau du greffe de chaque tribunal de première instance appelé fichier d'arrondissement et qui concerne les personnes nées dans le ressort dudit tribunal. Il est également institué un casier judiciaire au Ministère de la justice appelé fichier central et qui centralise des informations concernant les personnes de nationalité camerounaise à l'étranger, ou dont le lieu de naissance est inconnu ou alors dont l'identité est douteuse. Ce fichier central renferme aussi les fichiers de casier judiciaire des personnes de nationalité étrangère nées au Cameroun, dont la naissance n'a pas été déclarée à l'état civil camerounais.

Malgré toutes les réglementations dont a toujours bénéficié le casier judiciaire, la pratique révèle toujours des légèretés dans sa tenue. C'est ainsi que malgré les dispositions légales « certains greffiers ne se donnent jamais la peine de remplir toutes les formalités requises pour l'inscription de ces condamnations au casier judiciaire des intéressés »164(*). Cela peut paraître très surprenant, mais, il apparaît qu'au Cameroun « plusieurs citoyens n'existent même pas au regard du casier judiciaire »165(*) ; et, même lorsque ce casier judiciaire a été régulièrement tenu, la personne concernée dont le casier judiciaire est déjà trop chargé dispose d'une voie « royale166(*) » qui lui est propre pour le « blanchir167(*) ». Il lui suffira de « changer d'identité168(*) » ; et cela n'est pas trop difficile puisqu'il est constant qu'au niveau des fichiers « les petits détails comme la photographie et les empreintes digitales de la personne sont négligés. Même lorsqu'on a des empreintes, les autorités n'ont pas les moyens adéquats pour pouvoir confronter ces empreintes en vue de déceler les cas de double identité 169(*)». Et, « ce n'est un secret pour personne » qu'à cause de la légèreté et du mauvais fonctionnement de nos administrations, « il suffit de moins de trente milles francs CFA au Cameroun pour se procurer un nouvel acte de naissance et une nouvelle carte d'identité nationale et enterrer le passé sans trop de souci. Heureusement que cela devient de plus en plus difficile avec les nouvelles cartes nationales d'identités informatisées »170(*).

Toutes ces observations montrent combien on ne peut pas toujours compter sur les informations contenues dans les bulletins du casier judiciaire171(*) pour avoir des renseignements fiables sur un individu. Et, « si il en est ainsi pour le Cameroun qui est l'Etat le plus stable de la sous-région, qu'en sera-t-il alors pour les autres Etats ; notamment ceux qui sont confrontés de manière régulière à des troubles intérieurs entrainant le dysfonctionnement de l'administration ? »172(*).

Nous pensons que pour limiter ces difficultés dans l'échange d'information, il apparaît nécessaire de procéder à la création d'un réseau d'information au niveau communautaire.

B- La création d'un réseau communautaire d'échanges d'informations

Nous pensons que pour faire face, ou du moins réduire les difficultés rencontrées dans la pratique de l'entraide répressive, et plus particulièrement dans les échanges d'informations, il paraît nécessaire de créer au niveau communautaire un réseau d'échanges d'informations. Mais, notre proposition ici ne consiste pas en la création d'une institution nouvelle. Nous jugeons qu'il serait plus efficace pour les Etats de la sous-région de procéder à une informatisation et une interconnexion de leurs réseaux judiciaires. Cette solution nécessite beaucoup d'investissements de la part des Etats ; mais, il y va de la sécurité des citoyens de la communauté qui ne saurait être sacrifiée sous aucun prétexte. Cette solution doit prendre corps sur le plan interne par une informatisation des fichiers publics. Le projet d'informatisation de l`administration camerounaise lancé par le gouvernement depuis 2004 ne peut donc qu'être encouragé.

Malgré les critiques portées au débit de la pratique de la coopération judiciaire dans la zone CEMAC, on observe de plus en plus l'émergence d'un véritable droit de poursuite au niveau communautaire dont certains aspects ont déjà été examinés dans ce chapitre.

Chapitre II : L'émergence d'un véritable droit de poursuite au niveau communautaire

La pratique de la coopération judiciaire dans la zone CEMAC n'est certes pas encore en « odeur de sainteté », mais elle révèle des avancées notables permettant d'affirmer qu'elle emprunte tout de même la voie de l'efficacité. En effet, le législateur CEMAC a déjà ouvert des voies que nous pouvons explorer (section I) avant d'envisager d'autres évolutions (section II).

Section I : Les avancées réalisées par le législateur CEMAC

La mise en oeuvre de la politique pénale de la CEMAC en matière de lutte contre la criminalité organisée fait ses preuves, tout au moins sur le plan théorique. On observe un certain renforcement de la coopération policière (paragraphe I), véritable corollaire de l'entraide judiciaire. On assiste également à la consécration du principe de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires, laquelle est un principe très important dans le dispositif de coopération judiciaire en matière répressive (paragraphe II).

Paragraphe I : Le renforcement de la coopération policière

Traditionnellement, chaque police n'est compétente que sur son territoire national. Ainsi, ne peuvent opérer des actes de police judiciaire sur le territoire national que les officiers de police judiciaire de cet Etat. Le conseil constitutionnel français avait eu l'occasion de rappeler ce principe dans une affaire en disposant que « les autorités judiciaires françaises, telles qu'elles sont définies par la loi française, sont seules compétentes pour accomplir en France, dans les formes prescrites par la loi, les actes qui peuvent être demandés par une autorité étrangère au titre de l'entraide judiciaire en matière pénale »173(*). Malgré cela, il n'en demeure pas moins que nous avons vu poindre dans le cadre de la CEMAC, des innovations apportant des atténuations à la rigueur de la compétence territoriale des autorités policières.

En fait, la collaboration policière entre les Etats s'avère nécessaire pour lutter contre les crimes internationaux. C'est pourquoi les Etats de la CEMAC ont adopté plusieurs conventions visant à organiser les mécanismes de coopération entre les polices nationales. La plus importante de ces conventions est l'Accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale174(*). Mais, d'autres conventions adoptées en d'autres matières regorgent aussi de dispositions spéciales d'entraide policière. C'est le cas par exemple de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique Centrale175(*). C'est aussi le cas pour de nombreuses conventions internationales auxquelles les Etats de la CEMAC sont parties176(*). Quoiqu'il en soit, les conventions adoptées dans la cadre de la CEMAC en vue de renforcer la coopération policière ont pour but essentiel de faciliter les enquêtes policières (A). Elles préconisent aussi la remise des suspects de police à police, ce qui soulève des controverses au regard des autres textes organisant le transfert des personnes poursuivies (B).

A- La facilitation des enquêtes policières

L'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de la CEMAC a prévu plusieurs mécanismes ayant pour but de faciliter les enquêtes policières. Il s'agit essentiellement des mesures relatives à l'échange des renseignements et à la recherche des moyens de preuve.

S'agissant de l'échange de renseignements, il est prévu pour l'essentiel par l'article 16 de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de la CEMAC. Les Etats signataires de cet accord s'engagent à fournir, dans la mesure du possible et à la demande des autorités policières des autres Etats, tous les renseignements en matière d'investigation criminelle, en matière de prévention criminelle et en matière de police générale177(*). Le même engagement est contenu dans l'article 4 alinéas 1, 2 et 9 de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale. Il ressort de ce texte que les Etats parties s'engagent à « (1) s'offrir mutuellement à travers leurs services compétents, toutes assistance telles que stipulées dans les conventions d'entraide judiciaire de la CEMAC, l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale ou tout autre instrument juridique en vigueur entre eux ;

(2) créer dans le cadre du comité des chefs de police d'Afrique centrale (CCPAC), une banque de données communes sur les personnes poursuivies pour terrorisme, les groupes, les mouvements et les organisations à caractère terroriste, visé à l`article 2 ci-dessus

(9) échanger tous renseignements concernant une infraction à caractère terroriste, commise ou en voie de préparation sur le territoire d'un Etat partie ».

Il serait important pour nous de relever que ces échanges de renseignements entre les polices judiciaires des Etats sont fortement renforcés par l'action de l'organisation internationale de police criminelle (OIPC/Interpol)178(*). Cet appui est rendu beaucoup plus facile grâce à l'implantation dans les pays membres de cette organisation, des Bureaux Centraux Nationaux (BCN). Cette organisation a pour but, conformément aux dispositions de l'article 2 de son statut, « d'assurer et de développer l'assistance réciproque la plus large possible de toutes les autorités de police criminelle dans le cadre des lois existant dans les différents pays et dans l'esprit de la déclaration universelle des droit de l'homme ; d'établir et de développer toutes les constitutions capables de contribuer efficacement à la prévention et à la répression des infractions de droit commun. »

En ce qui concerne la recherche des moyens de preuve, l'article 5 de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale dispose que « les parties contractantes s'engagent mutuellement à accepter sur leur territoire respectif les missions d'enquête en matière de police criminelle des autres parties contractantes. » Les autorités de police judiciaire étrangères devront être associées à leurs collègues de l'Etat dans lequel leurs investigations doivent être menées. Aux termes de l`article 18 du même texte, « les services de police des parties contractantes se transmettront mutuellement :

- les objets saisis provenant ou ayant un rapport avec une infraction de droit commun,

- les objets trouvés ou ayant été possédés par un étranger décédé,

- les rapports d'enquête de police concernant des citoyens d'une des parties contractantes pouvant comprendre des procès-verbaux de constatation, d'auditions de témoins, de perquisitions, de fouilles à corps ou de saisies, etc. ».

La transmission de ces objets pouvant servir de preuve se fait en principe par la poste. Une autre voie peut être utilisée en cas d'urgence ; comme la remise de police à police par exemple, solution retenue pour la remise des personnes poursuivies mais qui n`échappe pas à la controverse.

B- La controverse soulevée par l'échange des suspects de police à police

La controverse soulevée par l'échange des suspects de police à police est suscitée par l'analyse des articles 12 de l'Accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale et 4 alinéa 5 de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale, au regard des dispositions de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC.

En fait, il ressort des dispositions de l'article 12 du premier texte que les parties ont la possibilité de procéder à une remise de police à police des personnes appréhendées dans le cadre de la mission d'enquête lorsqu'ils sont les nationaux de l'Etat requérant. Cette solution est aussi retenue par l'article 4 alinéa 5 de la convention relative à lutte contre le terrorisme ci-dessus cité. Ce texte dispose que les Etats s'engagent à « remettre de police à police sous réserve de l'accord des autorités judiciaires compétentes, les personnes arrêtées pour terrorisme (...) saisies dans le cadre d'une telle procédure, conformément aux dispositions pertinentes de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats d'Afrique centrale, ainsi qu'aux dispositions de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC et de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC ». Selon un auteur179(*), cette procédure semble opposée à celle de l'extradition. Pour cet auteur, ces dispositions précitées ne précisent pas sous quelles formes les autorités judiciaires de l'Etat requis doivent donner leur accord : « doivent-elles donner cet accord d'une façon arbitraire sur la seule base des procès-verbaux établis par la police ou doivent-elles examiner le dossier avant de se prononcer ? »180(*). Et si c'était le cas, « doivent-elles soumettre le dossier à la cour d'Appel ? Auquel cas on revient à la procédure d'extradition et on ne comprend pas pourquoi il a été plutôt question de «remise« »181(*). Pour le même auteur, même s'il s'agissait d'une autre procédure de livraison qui n'a pas été organisée par les conventions, elle apparaît inopportune puisque celle de l'extradition est plus fiable, bien réglementée et plus protectrice des droits de la défense. La procédure de remise de police à police des personnes poursuivies serait donc manifestement contraire à l'esprit de l'Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC182(*) qui fait de l'extradition la seule procédure de remise des personnes. Il en est de même pour l'article 4 de la convention relative à la lutte contre la criminalité en Afrique centrale lorsqu'il dispose dans son alinéa 4 que les Etats parties s'engagent à « extrader vers l'Etat requérant les auteurs d'infraction à caractère terroriste, conformément à la convention d'extradition de la CEMAC, ou de tous autres accords auxquels l'Etat requérant et l'Etat requis sont parties ».

Nous pouvons souscrire aux observations de cet auteur, mais, nous ne sommes pas complètement de l'avis que la situation soit aussi alarmante. Nous savons que les statuts des tribunaux pénaux internationaux ad hoc ont déjà instauré des procédures de remise dérogatoires au droit commun de l'extradition. Est-ce pour autant dire que ces hautes instances judiciaires internationales ne respectent pas les droits de la défense ? Nous pensons que cette procédure de remise de police à police est susceptible d'assurer la célérité de la procédure et permettre ainsi que la justice soit rendue dans des délais raisonnables. Ceci mérite plutôt d'être porté au mérite de cette procédure de remise ; car, une justice rendue de manière tardive s'apparente beaucoup plus à une injustice. On pourra alors s'assurer d'un contrôle minimum des autorités judiciaires de l'Etat requis pour concilier cette procédure à l'idéal de protection des droits individuels du mis en cause. Ceci participera ainsi d'une nette avancée dans la pratique de la coopération judiciaire dans la zone CEMAC, comme l'est par ailleurs le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice consacré par le législateur communautaire.

Paragraphe II : La consécration du principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice par le législateur CEMAC

Le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice est l'un des principes fondamentaux en matière de coopération judiciaire. Par décision, il faut entendre aussi bien les condamnations à une peine d'emprisonnement que l'exécution d'une mesure de sûreté. La consécration de ce principe en Europe a été le fruit d'un long débat entre les Etats et d'un compromis souvent accepté à contrecoeur. Ce principe a été facilement consacré dans le cadre de la CEMAC. Il est l'oeuvre de l'Accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC183(*). Cet accord inscrit en faux le principe selon lequel les décisions répressives d'un Etat ne peuvent avoir une force obligatoire dans un autre Etat. Mais, il ne faut pas exagérer le mérite de cette convention car plusieurs textes antérieurs consacraient déjà ce principe184(*). Quoiqu'il en soit, ce principe tel que consacré par le législateur CEMAC permet aux décisions pénales d'un Etat d'avoir non seulement autorité de la chose jugée dans les autres Etats (A), mais aussi d'avoir force exécutoire (B).

A- L'autorité de la chose jugée des décisions répressives d'un Etat dans les autres

L'autorité de la chose jugée dans l'un des Etats membres s'impose dans les autres. Les décisions répressives d'un Etat partie peuvent avoir une autorité aussi bien positive que négative dans les autres Etats parties.

L'autorité de la chose jugée est dite positive lorsqu'on peut la prendre en considération pour lui faire produire certaines conséquences. C'est le cas par exemple de l'article 15 (a) du code pénal camerounais lorsqu'il dispose que les sentences pénales étrangères « sont prises en considération pour la récidive et la relégation, pour l'octroi ou la révocation des sursis, pour la révocation de la libération conditionnelle, pour la réhabilitation et l'amnistie ». C'est dire que les décisions répressives étrangères devenues définitives peuvent être prises en compte pour qualifier la récidive ou décider de la réhabilitation ou de l'amnistie.

S'agissant ensuite de l'autorité négative de la chose jugée, elle n'est qu'une application du principe « Non bis in idem ». Il s'agit de l'interdiction de toute nouvelle poursuite dans un Etat pour les mêmes faits lorsque ceux-ci ont déjà fait l'objet d'une condamnation dans un autre Etat membre. L'autorité négative de la chose jugée interdit donc toute nouvelle poursuite à raison des mêmes faits contre une personne qui a déjà fait l'objet d'une décision de relaxe, d'acquittement ou de condamnation devenue irrévocable. Cette solution est retenue sur le plan interne par l'article 15 (b) du code pénal camerounais. Mais, pour être appliquée, une triple identité d'objet, de cause et de parties est requise185(*).

C'est sur le fondement de ce principe que l'article 8 de l'Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC refuse d'accorder l'extradition lorsque « l'individu réclamé a été définitivement jugé par les autorités compétentes de la partie requise, pour l'infraction ou les infractions à raison desquelles l'extradition est demandée. L'extradition peut être refusée si les autorités compétentes de la partie requise ont décidé de ne pas engager de poursuite ou de mettre fin aux poursuites qu'elles ont exercées pour le ou les même (s) infraction(s) »186(*).

Quoiqu'il en soit, qu'il s'agisse de l'autorité positive ou négative de la chose jugée, la décision dont il est question doit être régulière. Elle doit avoir été rendue par un tribunal compétent suivant une procédure régulière et doit être définitive. Dans ces cas, cette décision peut être exécutée dans n'importe lequel des Etats parties.

B- La force exécutoire des décisions répressives des Etats membres

L'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC reconnaît une force exécutoire des décisions répressives d'un Etat partie dans les autres. En effet, l'article 9 de ce texte dispose que : « les hautes parties contractantes s'engagent à faire exécuter dans leurs établissements pénitentiaires, à la demande des autorités judiciaires de l'Etat requérant, les peines privatives de liberté, quelle qu'en soit la durée, prononcées par les juridictions de l'Etat requérant contre la personne quelle qu'en soit sa nationalité, qui sera trouvée sur le territoire de l'Etat requis ». Toute décision de condamnation ayant acquis autorité de la chose jugée conformément aux dispositions pénales en vigueur sur le territoire de l'Etat requérant peut donc être exécutée dans n'importe lequel des autres Etats membres187(*). Il en est de même pour les condamnations pécuniaires qui sont exécutées sur demande par les services de recouvrement compétents de l'Etat requérant188(*).

La solution ainsi proposée est beaucoup plus large que celle retenue par l'article 16(1) du code pénal camerounais. En effet, le texte interne réservait l'exécution au Cameroun des sentences pénales étrangères aux seules décisions mettant en cause des nationaux et résidents camerounais. Avec l'accord de coopération judiciaire, une adaptation de la législation nationale s'avère nécessaire. Dans tous les cas, en vertu du principe de la primauté de la norme pénale communautaire, les dispositions communautaires excluent celles nationales qui lui sont incompatibles.

Le renforcement de la coopération policière et la consécration du principe de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires constituent des avancées indéniables opérées par la CEMAC dans la coopération judiciaire. Mais, cette dernière n'étant pas un aboutissement mais un processus, d'autres aménagements et évolutions peuvent être proposés afin de renforcer l'efficacité de la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes ; laquelle est l'objectif essentiel de la coopération judiciaire en matière répressive.

Section II : Les évolutions envisageables

La CEMAC a déjà fait un grand pas dans la pratique de la coopération judiciaire en matière répressive. Mais, il reste encore du chemin à faire pour rattraper certains regroupements où l'intégration juridique est très avancée. Il s'agit par exemple du cas de la Communauté Européenne. Nos propositions s'inspireront très fortement des avancées réalisées au sein de cette communauté. Mais, loin de conseiller une transposition pure et simple du modèle européen dans la CEMAC, il sera question pour nous de faire une évaluation de ces instruments européens afin de recenser ceux qui peuvent être utiles et réalisables dans le contexte de la sous-région d'Afrique Centrale. Ceci se justifie amplement par le fait qu'il y a une nette différence de culture judiciaire entre les deux regroupements, facteur auquel il faut ajouter le degré d'intégration et la différence du niveau de développement des Etats de ces deux communautés.

Ces précisions étant faites, il semble nécessaire de créer dans la sous-région d'Afrique centrale des institutions communautaires chargées de la coordination des poursuites (paragraphe I). Et pourquoi pas penser dans l'avenir à la création d'un véritable parquet communautaire (paragraphe II).

Paragraphe I : La création d'institutions communautaires chargées de la coordination de la coopération judiciaire : l'exemple européen d'Eurojust

L'office européen de justice (Eurojust) a été créé par une décision du Conseil de l'Europe en date du 28 Février 2002189(*) . Il est un organe doté de la personnalité morale ayant pour mission de faire obstacle à toutes les formes de criminalité organisée (trafic de drogue, blanchiment d'argent, trafic d'être humain, contrefaçon, criminalité informatique, crime contre l'environnement, 190(*)...). Il est composé de procureurs, magistrats ou d'officiers de police des Etats membres de l'Union Européenne à raison d'un par Etat191(*).

Eurojust a compétence dans les 27 pays membres de l'Union Européenne. Il intervient lorsque les crimes concernent au moins deux Etats membres de l'Union Européenne, ou un Etat membre et des pays tiers. Ses missions s'articulent autour de trois objectifs majeurs :

- promouvoir et améliorer la coordination des enquêtes et des poursuites entre les autorités compétentes des Etats membres.

- améliorer la coopération entre ces autorités, en facilitant notamment la mise en oeuvre de l'entraide judiciaire internationale et l'exécution des demandes d'extradition.

- soutenir les autorités nationales afin de renforcer l'efficacité de leurs enquêtes et de leurs poursuites.

Cette unité de coopération judiciaire est en quelque sorte une courroie de transmission entre les autorités répressives nationales. Ce faisant, elle facilite l'exécution des demandes de coopération en évitant certains blocages pratiques susceptibles de se poser. Depuis sa création, Eurojust a enregistré plus de 2200 dossiers. En 2006, le nombre d'affaires qui lui ont été confiées a augmenté de 31%192(*).

La création d'un organe semblable dans le cadre de la CEMAC peut s'avérer très utile pour renforcer l'efficacité de la coopération judiciaire. En effet, composé de magistrats et d'officiers de police judiciaire, il permettra de renforcer le travail en équipe entre les autorités judiciaires et de mettre fin à l'obstacle, parfois illusoire, de la divergence de culture judiciaire entre les différents Etats membres. Plus encore, le développement de cet organe pourra conduire à la création d'un véritable parquet communautaire.

Paragraphe II : La création d'un véritable parquet communautaire

L'idée d'un parquet communautaire est au centre de plusieurs débats dans l'Union Européenne. Dès 1977, le Président Valery GISCARD d'ESTAING avait proposé, au cours d'une réunion du Conseil Européen à Bruxelles, la création d'un espace judiciaire européen, sans que cette idée recueille l'assentiment de l'ensemble des chefs d'Etat et de gouvernement des pays de la Communauté Européenne. En 1982, une nouvelle proposition française prévoyant notamment la création d'une « Cour d'Appel Européenne » s'était, elle aussi heurtée aux réticences de certains Etats193(*). Il s'agissait de créer un Procureur Européen indépendant chargé de la protection des intérêts financiers de la communauté.

Mais, cette idée qui n'a pas pu être réalisée dans l'Union Européenne peut l'être dans la CEMAC. En effet, plusieurs facteurs peuvent faciliter la mise sur pied d'un parquet communautaire. La règle de l'unanimité requise par exemple pour sa création peut facilement être remplie dans la CEMAC puisque le nombre d'Etats est plus réduit que dans l'Union Européenne. Plus encore, la consécration de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice par le législateur CEMAC est déjà un très grand pas favorisant une centralisation des poursuites au niveau communautaire.

Mais, quoiqu'il en soit, nous pensons que le futur parquet communautaire qui sera composé de magistrats désignés par chaque Etat membre, aura une compétence limitée aux formes les plus graves de criminalité organisée. Il sera compétent par exemple pour exercer les poursuites pénales devant les juridictions nationales contre les auteurs d'infractions de terrorisme, de blanchiment de capitaux, de trafic de drogue, de trafic d'être humain, etc. Ce parquet pourra aussi être compétent pour exercer l'action pénale contre les auteurs des atteintes aux intérêts financiers de la communauté comme la corruption de fonctionnaires communautaires, le détournement du budget communautaire, etc.

Il convient toutefois de relever que la consécration de pareilles solutions demande d'énormes sacrifices de la part des Etats concernant leur souveraineté. Plus encore, pour toutes les infractions qui seront reconnues comme relevant de la compétence du futur parquet communautaire, une harmonisation aussi bien des règles de fond que de procédure s'impose.

En attendant la mise en oeuvre d'une pareille solution qui demande beaucoup d'effort de la part des Etats membres, une autre solution beaucoup plus facilement réalisable serait la création dans les parquets des différentes juridictions nationales d'un service de la coopération judiciaire qui s'occuperait des demandes d'entraide judiciaire.

Au terme de notre analyse consacrée à l'émergence d'un véritable droit de poursuite au niveau communautaire, nous pouvons féliciter l'important effort effectué par le législateur CEMAC dans le cadre de la coopération judiciaire, lequel tend à faire émerger un véritable droit de poursuite au niveau communautaire. Ceci s'observe aussi bien par le renforcement de la coopération policière que par la consécration du principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice. Bien que très important, cet effort du législateur CEMAC peut évoluer dans le sens de la création d'une véritable institution communautaire chargée de la coordination des poursuites et de l'encadrement de la coopération policière ; ce qui pourra conduire à la création d'un véritable parquet communautaire.

Conclusion de la deuxième partie

Sur le plan opérationnel, malgré toutes les critiques avancées contre les mécanismes classiques d'extradition et d'entraide répressive internationale, la coopération judiciaire pénale est encore régie par ces vieux instruments. Le législateur CEMAC a toutefois consenti d'importants efforts en vue de l'amélioration de ces instruments ; contribuant par là même à rendre beaucoup plus efficace la coopération judiciaire pénale dans la sous-région. Mais, même si l'urgence d'une pareille initiative n'est pas signalée, il apparaît nécessaire d'aller un peu plus loin dans la coopération en instituant une véritable institution communautaire chargée de la coordination des poursuites au niveau communautaire, et pourquoi pas un véritable parquet communautaire.

Conclusion générale

Au terme de notre travail portant sur « la coopération judiciaire dans la zone CEMAC », et plus précisément sur le volet répressif de cette coopération, il était question pour nous de voir si ce système communautaire de réponse à la criminalité était capable de résorber ce problème grandissant de la criminalité transfrontalière. Comme nous avons eu l'occasion de le souligner, il est clair que la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes ne peut se permettre de buter sur des obstacles d'aucune sorte. Contre le crime organisé, rien ne doit justifier un refus de collaboration internationale ou l'impunité des délinquants transfrontaliers. Tout ceci implique d'énormes sacrifices de la part des Etats, surtout dans le domaine de la souveraineté. La réponse apportée dans la CEMAC revêt un double aspect normatif et opérationnel.

Pour une coopération judiciaire pénale efficace, il s'avère nécessaire d'améliorer le plus possible les aspects normatifs de la coopération judiciaire. Car, avant même d'être un problème de pratique, la coopération judiciaire est avant tout un problème de normes. Cette amélioration du cadre normatif passe par une simplification du processus d'édiction des normes pénales communautaires en impliquant le plus possible les représentants des populations. Cette nécessité s'impose de plus en plus puisque le droit pénal de fond et la procédure pénale sont des domaines très sensibles relevant sur le plan interne du pouvoir législatif. Il convient ensuite de procéder à une harmonisation des législations nationales pour réduire au maximum les blocages liés par exemple à l'exigence de la double incrimination et éviter que le même comportement soit réprimé de manière différente dans les Etats membres ; ce qui s'apparenterait à une sorte d'injustice. Sur ce point, le législateur CEMAC a consenti des efforts considérables au point d'être étonnamment en avance sur son homologue de l'Union Européenne. Il convient toutefois de souligner que le législateur CEMAC s'est largement fait aider par son homologue de l'OHADA dans son entreprise d'harmonisation du droit des affaires en Afrique.

Sur le plan opérationnel, nous avons constaté que le choix du législateur CEMAC s'est porté sur les instruments classiques de coopération que sont l'extradition et l'entraide répressive internationale. Ce choix comme nous l'avons relevé, est critiquable car il maintient en vie certaines exigences jugées inappropriées à la volonté d'efficacité dans la répression comme la double incrimination, la non-extradition en matière fiscale et l'intervention des autorités administratives en tant qu'instance décisionnelle suprême. Mais, quoiqu'il en soit, le législateur CEMAC peut se féliciter d'avoir mis fin à certains écueils de la coopération judiciaire en matière pénale en décidant de la non-opposition du secret bancaire aux autorités de poursuite et en consacrant le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice ; même si certaines évolutions restent encore envisageables.

Au total, nous pouvons déduire que l'évolution des textes est une bonne chose, et qu'il faut aussi travailler à l'évolution des mentalités194(*). Notre approche se doit d'être essentiellement pragmatique : appliquer les textes qui existent déjà et développer les contacts qui seront nécessairement à l'origine d'une évolution favorable. Tout ceci permettra aux policiers et aux magistrats d'atteindre des résultats importants dans la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes. Non plus en dépit du système, mais grâce au système. Nous ne pouvons que souhaiter que la coopération judiciaire puisse se développer davantage aussi bien dans le domaine pénal que civil, afin que nous puissions vivre dans une communauté de liberté et de justice respectueuse des droits fondamentaux de tous ses citoyens, victimes ou délinquants. Toutefois, comme le rappelait un auteur « il est toujours présomptueux de tenter de dégager les perspectives d'avenir d'une science. C'est qu'en effet la réponse dépend de facteurs qui nous sont inconnus. Nous ne savons pas ce qu'il adviendra dans l'ordre politique, économique, social, culturel dans les années futures. L'humanité sera-t-elle décimée par la guerre atomique ? La détresse économique du tiers monde sera-t-elle maîtrisée ? L'homme parviendra-t-il à dominer le progrès scientifique et technique à redécouvrir la dimension morale et spirituelle qu'il porte en lui ? Telles sont quelques une des questions dont il faudra connaître la réponse »195(*) pour tenter de préciser ce que sera l'avenir de l'humanité ; et partant, celui de la coopération judiciaire dans la CEMAC.

ANNEXES

ANNEXE I : ACCORD DE COOPERATION JUDICIAIRE ENTRE LES ETATS MEMBRES DE LA CEMAC

ANNEXE II : ACCORD D'EXTRADITION ENTRE LES ETATS MEMBRES DE LA CEMAC

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

I- OUVRAGES

1- BERMAN (P), Les habits neufs de la terreur, Nouveaux Horizons, 2004, 261 pages

2- BESSON (J-L), Les cartes du crime, «Questions judiciaires«, Paris, PUF, 2004

3- DELMAS-MARTY (M), Les grands systèmes de politique criminelle, PUF, collection Thémis, Paris, 1992, 462 pages

4- DELMAS-MARTY (M) (sous la direction de), Criminalité économique et atteintes à la dignité de la personne, IV, Edition de la Maison des Sciences de l'Homme, paris, 1996, 301 pages

5- DESPORTES (F) et GUNEHEC (F), Le nouveau droit pénal, I, Economica, 1997, 822 pages.

6- GAO MINGXUAN II (Sous la direction de), Criminalité économique et atteintes à la dignité de la personne, Chine, Edition de la Maison des Sciences de l'Homme, paris, 1997, 334 pages.

7- GIUDICELLI-DELAGE (G), Droit pénal des affaires, Mémentos Dalloz, 3è édition, 1996, 200 pages.

8- ISAAC (G), Droit communautaire général, 5e édition, Armand colin, 1997, 328 pages.

9- ISSA-SAYEGH (J), POUGOUE (P-G), SAWADOGO FILIGA (Ml), OHADA, Traité et Actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2002, 960 pages.

10- KEUBOU (P), Cours magistral de Droit Pénal International, Maîtrise Droit et Carrières Judiciaires, FSJP, Université de Dschang, 2006-2007, inédit.

11- LARGUIER (J), Droit pénal général, Mémentos de droit privé, 16e édition, Paris, Dalloz, 1997, 249 pages.

12- LEVASSEUR (G), CHAVANNE (A). MONTREUIL (J), Droit pénal général et procédure pénale, 14è édition, Paris, Sirey, 2002, 456 pages.

13- STEPHANI (G), LEVASSEUR (G) et BOULOC (B), Droit pénal général, Précis Dalloz, 16e, 1997, 638 pages.

14- VERMEILLE (G), Le nouveau doit pénal, Paris, Dalloz, 1994, 162 pages.

15- ZAÏRI (A), Le principe de la spécialité de l'extradition au regard des droits de l'Homme, LGDJ, Bibliothèque des sciences criminelles, tome 27, 1998, 181 pages.

II- MEMOIRES ET THESES

1- ADAMOU RABANI, Le droit pénal des affaires au Niger : une construction duale entre droit communautaire et législations nationales, Mémoire de DEA, ohadata D-O5-30, www.ohada.com

2- DAÏROU BOUBA, La problématique de la circulation des personnes dans le processus d'intégration des pays membres de la CEMAC, mémoire de DESS en Relations Internationales option Diplomatie, Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC), Université de Yaoundé II, Décembre 2002.

3- KEUBOU (P), L'extradition au Cameroun : Etude de la loi n° 64-LF-13 du 26 Juin 1964 fixant le régime de l'extradition, thèse de doctorat 3e cycle dactylographié, Université de Yaoundé II, Janvier 1998.

4- SOH FOGNO (D. R), La résolution des conflits de lois dans l'espace en matière d'extradition, Mémoire de Maîtrise, Université de Dschang, Février 1999.

5- TCHABO SONTANG (H. M), Secret bancaire et lutte contre le blanchiment en zone CEMAC, mémoire de DEA, Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Dschang, Avril 2007.

III- ARTICLES

1- ALT (E), «De Tampere à Séville : bilan de la sécurité européenne (2) «, in Cultures & Conflits, Jeudi 26 Juillet 2007, document html, www.conflits.org

2- AMBROISE-CASTEROT (C), «La coopération entre les juridictions pénales«, pie n° 2, Perspectives internationales et européennes, document html, http://revel.unice.fr/pie/document.html?id=399

3- BALLIGAND (J-P), MIGAUD (D), VALLS (M), «Traité constitutionnel : en finir avec la règle de l'unanimité«, Libération du 2 Juillet 2004, document html, www.psinfo.net

4- BARBE (E), «Schéma des procédures d'enquête comparées«, in Petites affiches n° 72, numéro spécial, « vers un espace judiciaire européen pour les enquêtes criminelles », 16 Juin 1997, Pp. 3-4.

5- BERTOSSA (B), «L'indispensable coopération judiciaire en Europe«, document pdf, www.cees-europe.fr

6- BORE (J), «La difficile rencontre du droit pénal français et du droit communautaire«, in Droit contemporain, Mélanges VITU, CUJAS, 1989, Pp 25-49

7- BORRICAND (J), «La répression du terrorisme écologique dans le nouveau code pénal«, in Problèmes actuels de sciences criminelles, volume VIII, presses universitaires d'Aix-Marseille, 1995, Pp 29-42

8- BOULOC (B), «L'influence du droit communautaire sur le droit pénal interne«, in Le droit pénal des communautés européennes, Pp 103-120

9- CARRU (C), «Droit européen et droit communautaire et droit pénal«, cours magistraux, document html, www.criminel.over-blog.org

10- COLOMBO (G), «La vidéoconférence au service des commissions rogatoires internationales«, in Petites affiches n° 41, La Vidéoconférence dans le procès pénal : Perspectives européennes, 26 Février 1999, Pp 23-24

11- COLOMBO (G), «Les enquêtes judiciaires internationales vues du parquet de Milan«, in Petites affiches n° 72, numéro spécial, « vers un espace judiciaire européen pour les enquêtes criminelles », 16 Juin 1997, Pp 11-12

12- DOMENACH (J), FROMENT (J-C), JOSSERAND (S), «Politique pénale : Territorialisation et européanisation de la justice«, Institut CERDAP, Publication Ronéo, Décembre 2001, document html, http://www.gip-recherche-justice.fr/recherches/syntheses/76-pol-penale.pdf

13- DUCOULOUX-FAVARD (C), «De l'urgence à améliorer les enquêtes judiciaires dans l'espace européen«, in Petites affiches n° 72, numéro spécial, « vers un espace judiciaire européen pour les enquêtes criminelles », 16 Juin 1997, Pp 3-4

14- IDOT (L), «Droit communautaire et droit pénal interne«, in Rev. Sc. Crim. 3, Juillet-Septembre 1999, Pp 641-646

15- KENNEDY (M), «Eurojust, unité de coopération judiciaire«, document html, 23/05/07, www.touteleurope.fr

16- KEUBOU (P), «Adaptation des législations internes aux exigences de la convention de Rome : Etude comparative du Cameroun et de quelques pays européens«, in Rev. Sc. Crim. Octobre-Décembre 2004, Pp 843-864

17- KEUBOU (P), «L'évolution de la pratique de l'extradition au Cameroun : de l'arbitraire au timide respect de la réglementation«, in Rev. Sc crim. 3 Juillet-Septembre 1999, Pp 563-573

18- KEUBOU (P), «La répression de l'usage et du trafic illites de la drogue au Cameroun : commentaire de la loi n° 97-19 du 7 Août 1997«, in Juridis périodique n° 65, Janvier-Février-Mars 2006, Pp. 73-90

19- KEUBOU (P), «Réflexion sur l'instance judiciaire compétente dans la procédure d'extradition au Cameroun« in Revue Juridique et Politique Indépendance et Coopération, n° 1, Janvier-Avril 2001, Pp. 55-61

20- MASSE (M), «L'entraide judiciaire internationale version française (suite), (Loi n° 2004-204 du 9 Mars 2004) «, in Rev. Sc. Crim. Octobre-Décembre 2004

21- MEGIE (A), «Arrêter et juger en Europe. Genèse, lutte et enjeux de la coopération pénale. généalogie du champ de la coopération judiciaire européenne«, in Cultures & Conflits n° 62 (2/2006), Pp 11-41, www.conflits.org

22- NDIAW DIOUF, «Acte uniforme et droit pénal des Etats signataires du traité de l'OHADA : la difficile émergence d'un droit pénal communautaire des affaires dans l'espace OHADA«, document pdf, ohadata D-05-41, www.ohada.com

23- NJEUFACK TEMGWA (R), «Le renouveau du cadre institutionnel et décisionnel au sein de la CEMAC : vers une communauté plus dynamique ?«, in annales de la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Dschang, tome 8, 2004, Pp 159-174.

24- PALAZZO (F), «La Mafia aujourd'hui : évolution criminologique et législative«, in Problèmes actuels de sciences criminelles, volume IX, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 1998, Pp 61-77.

25- PINATEL (J), «Perspectives d'avenir de la criminologie«, in La criminologie, bilan et perspectives, Mélanges offert à Jean PINATEL, édition A. LEDONNE, Paris, 1980, Pp 261-270.

26- RABATEL (B), «Les « Magistrats de liaison » : leur rôle dans la coopération judiciaire internationale et dans le domaine du droit comparé«, décembre 2003, document pdf, www.legalconnexion.com

IV- ETUDES ET RAPPORTS

1- OFFICE DES NATIONS UNIES CONTRE LA DROGUE ET LE CRIME, `'Criminalité et développement en Afrique'', juin 2005. http://www.un.org;

2- L'ESPACE JUDICIAIRE EUROPEEN, acte du colloque d'Avignon, Ministère français de la justice, la documentation française, 1999, 190 pages.

3- EUROJUST ET L'IDEE D'UN PARQUET EUROPEEN, document html, www.senat.fr

V- LEGISLATION

1- Constitution de la République du Cameroun du 18 Janvier 1996

2- Traité de N'djamena du 16 Mars 1994 instituant la CEMAC

3- Additif au traité de la CEMAC relatif au système institutionnel et juridique.

4- Traité du 17 Octobre 1993 relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique.

5- Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC adopté le 28 Janvier 2004 à Brazzaville.

6- Accord de coopération entre la CEMAC ET l'OIPC-INTERPOL du 26 Mars 2001.

7- Convention régissant l'Union Economique de l'Afrique Centrale (UEAC)

8- Convention régissant l'Union monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC)

9- Convention multilatérale de justice adoptée le 21 Septembre 1961 à Tananarive.

10- Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 Octobre 2003

11- Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme ouvert à signature le 10 Janvier 2000.

12- Loi N°64-LF-13 du 26 Juin 1964 fixant le régime de l'extradition au Cameroun modifiée par la loi N°67-LF-1 du 12 Juin 1967.

13- Règlement N° 08/05-UEAC-057-CM-13 du 7 février 2005 portant adoption de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale.

14- Règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC du 04 Avril 2003 portant prévention et répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique centrale.

15- Règlement N° 02/02/CEMAC/UMAC/CM du 14 Avril 2002 portant organisation et fonctionnement du groupe d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique centrale.

16- Règlement N° 4/CEMAC-069-CM-04 du 21 Juillet 2000 portant adoption de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale.

17- Règlement N° 1/99/UEAC-CM-639 portant réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles.

18- Code pénal Camerounais

19- Nouveau code de procédure pénale Camerounais

20- Loi n° 2003/004 du 21 avril 2003 relative au secret bancaire.

VI- QUELQUES SITES UTILES :

CEMAC : www.cemac.cf

BEAC : www.beac.int

GAFI : www.fatf-gafi.org

Nations Unies : www.un.org; www.undoc.org

Parlement européen : www.europarl.europa.eu

Interpol/OIPC: www.interpol.int

Gouvernement Camerounais: www.spm.gov.cm

TABLE DES MATIERES

DEDICACE I

REMERCIEMENTS II

PRINCIPALES ABREVIATIONS III

SOMMAIRE IV

RESUME V

ABSTRACT VI

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIERE PARTIE : LES ASPECTS NORMATIFS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 9

CHAPITRE I : LA DIMENSION POLITIQUE DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 11

SECTION I : Le rôle prépondérant du pouvoir exécutif dans la définition de la politique pénale communautaire 11

Paragraphe I : Une législature à l'exécutif 12

A- Le rôle actif des représentants de l'exécutif dans la CEMAC 12

B- Le Conseil des Ministres de l'OHADA, véritable législateur pénal 15

Paragraphe II : La nécessité d'une plus grande intervention des représentants du pouvoir législatif 17

A- Les critiques avancées au pouvoir exécutif comme législateur pénal 18

B- La nécessité de renforcer l'intervention des représentants du peuple dans le processus d'élaboration des normes pénales communautaires 19

SECTION II : Le poids important des revendications de souveraineté 20

Paragraphe I : L'approche de coopération adoptée 21

A- L'Etat, acteur principal de la coopération judiciaire 22

B- La rareté d'institutions communautaires chargées de la coopération 22

Paragraphe II - Le laxisme du processus d'adoption et de ratification des textes communautaires 24

A- Le rayonnement de la règle de l'unanimité en matière de coopération judiciaire 25

B- Les écarts entre adoption et ratification 27

CHAPITRE II - LA DIMENSION JURIDIQUE DE LA COOPÉRATION 30

Section I : L'harmonisation des incriminations au niveau communautaire 31

Paragraphe I : L'affirmation d'un pouvoir d'incriminer au niveau communautaire 32

A- Les modes traditionnels de légitimation du pouvoir d'incriminer 32

B- Un effort considérable de communautarisation des incriminations 33

Paragraphe II : Les interférences entre les incriminations communautaires et la norme pénale interne 38

A- La cohabitation « pacifique » entre la norme pénale communautaire et la norme interne 38

B- Conflit entre incriminations communautaires et droit pénal interne 39

Section II : Une harmonisation timide des sanctions 42

Paragraphe I : Le rôle important des Etats dans la détermination des sanctions 42

A- Le système des sanctions de l'OHADA 43

B- Le renvoi du législateur CEMAC aux législations nationales 45

Paragraphe II : La nécessité d'une harmonisation des sanctions pénales 45

A- L'effort du législateur CEMAC en matière d'harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires 47

B- Les techniques d'harmonisation des sanctions aux incriminations communautaires 48

Conclusion de la première partie 51

DEUXIEME PARTIE : LES ASPECTS OPERATIONNELS DE LA COOPERATION JUDICIAIRE 52

CHAPITRE I : LES CRITIQUES AVANCÉES CONTRE LES INSTRUMENTS CLASSIQUES DE COOPÉRATION 55

Section I : L'inadaptation de certains mécanismes d'extradition à la volonté d'efficacité dans la répression 55

Paragraphe I- L'inopportunité de certaines conditions de l'extradition 56

A- La double incrimination 56

B- La règle de la non-extradition en matière fiscale 58

Paragraphe II- La complexité de la procédure d'extradition 59

A- L'imprécision dans la détermination de l'instance judiciaire compétente 60

B- La protection fragile des droits fondamentaux de la défense 62

C- Les contestations sur l'opportunité de la phase administrative de la procédure d'extradition 66

Section II : Les entraves à l'entraide judiciaire 68

Paragraphe I : Les difficultés d'ordre juridique 70

A- La protection du secret bancaire 70

B- La lenteur de la procédure : l'absence de délai contraignant 72

Paragraphe II : Les difficultés d'ordre matériel 73

A- La tenue anarchique des casiers judiciaires 73

B- La création d'un réseau communautaire d'échanges d'informations 75

CHAPITRE II : L'ÉMERGENCE D'UN VÉRITABLE DROIT DE POURSUITE AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE 77

Section I : Les avancées réalisées par le législateur CEMAC 77

Paragraphe I : Le renforcement de la coopération policière 77

A- La facilitation des enquêtes policières 78

B- La controverse soulevée par l'échange des suspects de police à police 80

Paragraphe II : La consécration du principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice par le législateur CEMAC 82

A- L'autorité de la chose jugée des décisions répressives d'un Etat dans les autres 83

B- La force exécutoire des décisions répressives des Etats membres 84

Section II : Les évolutions envisageables 85

Paragraphe I : La création d'institutions communautaires chargées de la coordination de la coopération judiciaire : l'exemple européen d'Eurojust 86

Paragraphe II : La création d'un véritable parquet communautaire 87

Conclusion de la deuxième partie 90

CONCLUSION GÉNÉRALE 91

ANNEXES 94

ANNEXE I : ACCORD DE COOPERATION JUDICIAIRE ENTRE LES ETATS MEMBRES DE LA CEMAC 95

ANNEXE II : ACCORD D'EXTRADITION ENTRE LES ETATS MEMBRES DE LA CEMAC 104

TABLE DES MATIERES 121

* 1 DELMAS-MARTY (Mireille), Les forces imaginantes du droit : Le relatif et l'universel, Paris, Le Seuil, 2004, P.7 reprise par MEGIE (Antoine), «Arrêter et juger en Europe. Genèse, lutte et enjeux de la coopération pénale«, généalogie du champ de la coopération judiciaire européenne, Cultures & Conflits n° 62 (2/2006) Pp. 11-41, document html, www.conflits.org

* 2 C'est la puissance colonisatrice qui posa les jalons et les premiers contours d'un ensemble économique par la création le 15 Janvier 1910 de l'Afrique Equatoriale Française (A.E.F.) en Afrique Centrale. L'idée s'est poursuivie et affermie même après les indépendances. Par la convention de Brazzaville du 7 Décembre 1959 modifié par la convention signée le 23 Juin 1962 en République centrafricaine pour marquer l'entrée du Cameroun, les Etats d'Afrique Centrale ont d'abord crée l'Union Douanière Equatoriale (UDE). L'accession à l'indépendance des territoires composant l'AEF et l'adhésion du Cameroun à cet ensemble rendirent nécessaires d'importants remaniements institutionnels qui s'avèrent difficiles à réaliser dans le cadre de l'U.D.E. C'est alors que les Etats créèrent l'UDEAC par la signature le 8 Décembre 1964 du traité de Brazzaville qui fut modifié le 7 Décembre 1974 à Yaoundé. Cette union douanière sera remplacée par la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (C.E.M.A.C.), institué par le traité du 16 Mars 1994.

Il convient de souligner que, si les Chefs d'Etats ont décidé de la mort de l'UDEAC lors de leur sommet de Malabo le 5 Février 1998, la CEMAC n'est effectivement entrée en vigueur que lors du sommet tenu les 24-25 Juin 1999 en Guinée Equatoriale. Toutefois, dans la perspective de la réalisation du Plan d'Action et Acte final de Lagos, les Etats d'Afrique Centrale ont créé la communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) par le traité de Libreville du 18 Octobre 1983 : V. N'KODIA, C, l'intégration économique : les enjeux pour l'Afrique Centrale, l'Harmattan, 2000, 33 et S. ; A.A MAHAMAT, « présentation générale de la CEMAC : structures et attributions, in Sensibilisation au droit communautaire de la CEMAC », Actes du Séminaire sous-régional, Douala-Cameroun 16-20 Décembre 2002, éd. GIRAF, 13 ; commentaire tiré de NJEUFACK TEMGWA (René),«Le renouveau du cadre institutionnel-décisionnel au sein de la CEMAC : vers une communauté plus dynamique ?«, Annales de la FSJP de l'université de Dschang, tome 8,2004, P.160

* 3 Dictionnaire encarta 2007

* 4 Cette convention avait été ratifiée par l'ensemble des Etats membres de la CEMAC, à l'exception de la Guinée Equatoriale

* 5 Adopté au cours de la 68e séance plénière lors de la 45e session de l'assemblée générale de l'organisation des Nations Unies (O.N.U) le 14 Décembre 1990 et modifié par la résolution n° 53/112 de l'assemblée générale en 1998

* 6 Adopté au cours de la 68e séance plénière lors de la 45e session de l'assemblée générale des Nations Unies le 14 Décembre 1990 et modifié par la résolution n° 52/88 de l'assemblée générale en 1997

* 7 Pour reprendre l'expression utilisée par un responsable du secrétariat exécutif de la CEMAC approché

* 8 Articles 5 à 7 de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC.

* 9 Articles 14 à 18 Ibid.

* 10 LEVASSEUR (Georges), CHAVANNE (André). MONTREUIL (Jean), Droit pénal général et procédure pénale, 14è édition, Paris, Sirey, 2002, P 2.

* 11 MEGIE (Antoine), «Arrêter et juger en Europe. Genèse, luttes et enjeux de la coopération pénale«, doc. html op. Cit. pp 11-41

* 12 Si vous me permettez de reprendre en la déformant cette célèbre expression de René DESCARTES

* 13 Traité signé à Port-Louis aux Iles Maurice le 17 Octobre 1993, l'OHADA est composée aujourd'hui de 16 Etats membres (Bénin, Burkina-Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon Guinée, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo), la République Démocratique du Congo (RDC) devait être le 17e membre depuis janvier 2004, mais son adhésion est toujours en cours.

* 14 Nous entendons par là la petite criminalité à échelle réduite comme le vol, l'abus de confiance, le viol, etc.

* 15 Il s'agit de la criminalité à grande échelle, du crime organisé comme le terrorisme, le trafic des êtres humains, le trafic de drogue, etc.

* 16 STRAW (Jack),  l'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon, la documentation Française, 1999, P. 90

* 17 « Ces coupes et ces greffes, que le droit communautaire réalise hardiment dans un droit pénal qui demeure l'une des expressions les plus fortes de notre souveraineté nationale, ne peuvent manquer d'inquiéter tout esprit soucieux du respect des principes constitutionnels. Nul n'ignore en effet que le principe de la légalité des délits et des peines a valeur constitutionnelle », BORE (Jacques), « la difficile rencontre du droit pénal français et du droit communautaire », droit pénal contemporain, Mélanges VITU, CUJAS, 1989, Pp. 25-49

* 18 Union Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

* 19 Union Monétaire des Etats de l'Afrique Centrale.

* 20 Le chapitre II du titre II de ce texte traite des actes juridiques et du contrôle des activités de la communauté.

* 21 Ceci par le biais des actes, des règlements, des décisions, des directives et des recommandations

* 22 Article 20 additif au traité de la CEMAC.

* 23 Article 21 alinéa 1er additif au traité de la CEMAC.

* 24 Comme nous l'avons déjà signifié, ces deux textes ne sont pas encore entrés en vigueur parce que non encore ratifiés par l'ensemble des Etats membres.

* 25* Aux termes de l'article 9 additif au traité de la CEMAC, le Conseil des Ministres de l'UEAC est « composé de représentants des Etats membres, comprenant les ministres en charge des finances, et des affaires économiques.

* le Comité Ministériel de l'UMAC est composé, d'après les dispositions de l'article 13 de l'additif au traité des représentants des Etats membres à l'ordre de deux ministres par Etat au rang desquels le ministre en charge des finances.

* 26 Article 21 additif au traité de la CEMAC.

* 27 *Article 38 (2) accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC et article 25 (2) accord d'extradition entre les membres de la CEMAC.

* Article 4 acte additionnel N° 9/00/CEMAC- 086/ CCE 02 du 14 Décembre 2000 portant création du groupe d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique centrale (GABAC) : « Les modalités de fonctionnement du GABAC sont arrêtées par le comité ministériel de l'UMAC en concertation avec le conseil des ministres de l'Union Economique des Etats de l'Afrique Centrale (UEAC) ».

* 28 - Pour quelques exemples :

* Règlement N° 07/05-UEAC-057-CM- 13 du 7 Février 2005 portant adoption de la convention créant un centre de formation spécialisée en matière d'enquête criminelle.

* Règlement N° 08/05-UEAC-057-CM- 13 du 7 Février 2005 portant adoption de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique centrale.

* Règlement N° 4/CEMAC-069-CM- 04 du 21 Juillet 2000 portant adoption de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique centrale.

* Règlement N° 02/02/CEMAC/UMAC/CM du 14 Avril 2002 portant organisation du groupe d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique centrale (GABAC).

* 29 Pourtant lorsque le traité indique les matières qui entrent dans le domaine du droit des affaires en son article 2, le droit pénal ne semble pas y ressortir de manière explicite.

* 30 Même s'il est vrai que les gouvernements nationaux et la CCJA interviennent dans le processus d'élaboration des Actes Uniformes, seuls le secrétariat permanent et le conseil des ministres jouent un rôle primordial, ce qui justifie notre choix.

* 31 Article 5 alinéa 2 du traité OHADA précité

* 32 Puisque selon les termes de l'article 40 du traité, le secrétariat permanent est nommé par le conseil des ministres qui est lui-même composé des représentants du pouvoir exécutif des Etats membres.

* 33 Article 27 alinéa 1 du traité de l'OHADA.

* 34 On peut s'interroger sur la force juridique de ces avis. Ont-ils un effet contraignant ou alors ne sont-ils que de simples avis consultatifs ? Quoiqu'il en soit, Jacqueline LOHOUES-OBLE dans son commentaire du traité de l'OHADA (traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope 2002) prône une distinction entre les avis que la CCJA est amenée à donner sur les avant-projets d'Actes Uniformes et les demandes d'avis émanent des Etats ou des juridictions, les premiers seraient consultatifs alors que les seconds pourraient avoir un caractère beaucoup plus contraignant (voir POUGOUE (Paul-Gérard), direction d'étude de Droit Processuel OHADA, la CCJA, DEA de droit communautaire et comparé CEMAC, FSJP, université de Dschang, 2005-2006, inédit).

* 35 Article 10 traité OHADA précité.

* 36 -C'est le cas par exemple des règlements et règlements- cadres des institutions de la CEMAC

- C'est aussi le cas des actes uniformes de l'OHADA qui entrent en vigueur sans un réel contrôle des législateurs internes.

* 37 Article 26 additif au traité de la CEMAC.

* 38 Article 44 « (...) la commission contribue par le dialogue et les débats, aux efforts d'intégration de la communauté dans les domaines couverts par le traité et les textes subséquents. Elle peut exprimer ses vues sous forme de résolution ou de rapports. (...) celle-ci peut entendre notamment le Président du conseil des ministres, le Président du comité ministériel, le secrétariat exécutif ou le gouverneur de la BEAC ».

* 39 Si vous nous permettez une fois de plus de reprendre en la déformant l'expression de René Descartes « je punis, donc je suis ».

* 40 DOMENACH (Jacqueline), FROMENT (Jean-Charles), JOSSERAND (Sylvie), «  territorialisation et européanisation de la justice », institut CERDAP, Décembre 2001, publication RONEO, document html.

* 41 Au lieu d'unification ou d'intégration qui sont des voies beaucoup plus radicales.

* 42 Hachette, Edicef, 2e édition, 1998.

* 43 DELMAS- MARTY (Mireille) (sous la direction de), criminalité économique et atteintes à la dignité de la personne, IV, institution internationale, Edition de la maison des sciences de l'homme, Paris, 1996, page 34.

* 44 BERTOSSA (Bernard), l'espace judiciaire européen, acte du colloque d'Avignon précité, p. 123

* 45 Issu d'une décision du conseil du 28 février 2002.

* 46 Organe issu d'un acte du conseil du 26 Juillet 1995.

* 47 AMBROISE-CASTEROT (Coralie), « la coopération entre les juridictions pénales », pie n° 2, Perspectives Internationales et Européennes, document html ? id= 399

* 48 TCHABO SONTANG (Hervé Martial), secret bancaire et lutte contre le blanchiment d'argent en zone CEMAC, mémoire de DEA, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques (FSJP), Université de Dschang, Avril 2007. P. 49

* 49 TCHUENKAM (Boniface) repris par TCHABO SONTANG précité. P 49

* 50 Crée par acte additionnel N°05/00/CEMAC-086/CCE 02 du 14 Décembre 2000.

* 51 Article 4 du règlement du 14 Avril 2002 portant organisation et fonctionnement du GABAC.

* 52 TCHABO SONTANG (Hervé Martial) op cit. P. 53-54

* 53 NJEUFACK TEMGWA (René), « le renouveau du cadre institutionnel-décisionnel au sein de la CEMAC : vers une communauté plus dynamique ? », op. cit.pp 159-174.

* 54 NJEUFACK TEMGWA (René), Ibid.

* 55 Article 8 §1et 16 §2 du traité de l'UDEAC.

* 56 NJEUFACK TEMGWA (René), op. Cit. pp. 159-174.

* 57 AMBROISE-CASTEROT (Coralie), « la coopération entre les juridictions pénales », pie, N°2 Perspectives Internationales et Européennes, document html ? id = 399 op. Cit.

* 58 BURCHARDT (Gustaaf),  l'espace judiciaire européen, acte de colloque d'Avignon précité, page 129.

* 59 VEMHOFSTADT (Guy) dans le journal UFBE  « BELAL ETRANGER_229-3 » du 10/11/06. Fustigeant la règle de l'unanimité, ce premier ministre Belge affirme : « quand on m'interroge sur ce qu'il faut faire avec la constitution (européenne), ma réponse est très simple : faisons une constitution avec un seul article dans lequel la règle de l'unanimité est abolie ».

* 60 Et on ne peut que s'en réjouir.

* 61 Article 7 additif au traité.

* 62 Article 12 de la convention régissant l'UEAC.

* 63 Article 26 de la convention régissant l'UEAC.

* 64 -Article 25 (1) Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC

-Article 38 (1) Accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC

* 65 DAIROU BOUBA, la problématique de la circulation des personnes dans le processus d'intégration des pays membres de la CEMAC, mémoire de DESS, IRIC, Décembre 2002. p. 72

* 66 DEHOUSSE (Jean-Maurice), les organisations internationales. Essaie de théorie générale Liège, libraire Paul GOTHIER, 1968, pp 163-164, repris par DAIROU BOUBA op cit. P. 72

* 67 La démocratie sans être l'écrasement de la minorité par la majorité, ne doit pas tolérer le blocage d'une large majorité par quelques-uns.

* 68 BALLIGAND (Jean-Pierre), MIGAUD (Didier) et VALLS (Manuel), « Traité constitutionnel : en finir avec la règle de l'unanimité », libération, édition du 2 Juillet 2004, document html.

* 69 Le cas des actes uniformes de l'OHADA est un cas particulier. D'après les dispositions de l'article 9 du traité, ces actes uniformes n'ont besoin d'  « aucun acte national » pour leur entrée en vigueur (voir commentaire du Professeur LOHOUES OBLE, ouvrage précité, pp 36-37.

* 70 ZANOTO (Jean-Pierre), l'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon, précité, p138.

* 71 Dès 1957, l'entraide en matière répressive a donné lieu en Europe à la conclusion d'une convention européenne d'extradition. Elle sera suivie par la convention européenne d'entraide judiciaire du 20 Avril 1959. Il faut attendre la fin des années 1970, avec l'émergence de la question de la lutte contre le terrorisme, pour que de nouveaux textes soient élaborés en faveur d'une plus grande coopération pénale entre les Etats membres. On assiste alors à une multiplication de projets concurrents qui, pour la plupart, ne verront jamais le jour du fait des oppositions entre les Etats. Chargé d'élaborer une convention par laquelle ces derniers s'engagent à arrêter et à extrader les auteurs de prises d'otages, le premier groupe de travail est pris de vitesse par le conseil de l'Europe. Ce dernier, sur proposition Belge, présente, le 27 Janvier 1977, une convention pour la répression du terrorisme. Cependant, plusieurs Etats refusent de ratifier ce texte, en raison, officiellement de la trop grande hétérogénéité des systèmes judiciaires.

Ce blocage conduit à l'accord de Dublin du 4 Décembre 1979 qui prévoit l'application de la convention du conseil de l'Europe uniquement entre les Etats des communautés Européennes, en obligeant tous les Etats signataires à poursuivre et à extrader les auteurs d'actes terroristes. La France accepte de signer ce texte en contrepartie d'une avancée sur son projet de convention de coopération en matière pénale. Mais, après plus de deux ans de travail et une signature prévue le 19 Juin 1980 à Rome lors de la conférence des ministres de la Justice des neufs Etats membres de la communauté, ce premier projet de coopération judiciaire à l'échelle européenne est finalement rejeté du fait du refus des Pays-Bas. Il faudra attendre plusieurs années pour que la coopération judiciaire puisse encore être véritablement relancée en Europe, notamment avec les accords de Schengen du 14 Juin 1985 complétés par sa convention d'application du 19 Juin 1990.

* 72 BONTEMPI (Rinaldo), l'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon précité, p149.

* 73 Article 26 (2) Accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC

-Article 39 (2) Accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC

* 74 *Décret N° 2006/050 du 30 Janvier 2006 portant ratification de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC adopté à Brazzaville le 28 Janvier 2004

* Décret N°2006/048 du 30 Janvier 2006 portant ratification de l'accord d'extradition entre les Etats membres de la CEMAC.

Notons aussi que nous n'avons pas pu obtenir des informations concrètes sur l'état de ratification des autres Etats membres. Nous savons tout au moins que pour la République du Congo Brazzaville, deux projets de loi portant respectivement autorisation de la ratification de l'accord de coopération judiciaire et autorisation de ratification de l'accord d'extradition ont été adoptés au cours de la réunion du conseil des ministres du Mercredi 11 Avril 2007 et soumis au parlement, mais, nous ne savons pas encore si le Congo a déjà ratifié ces conventions.

* 75 KEUBOU (Philippe), « adaptation des législations internes aux exigences de la convention de Rome : Etude Comparative du Cameroun et de quelques pays européens », Revue de sciences criminelles, Octobre/Décembre 2004 pp 843-864.

* 76 STONE SWEET (Alec) et SANDHOLTZ (Wayne), « European Integration and supranational Governance », Journal of European public policy, Septembre 1997, vol. 4, N° 3, 1997, pp 297-317, repris par MEGIE (Antoine), « Sociologie Politique de l'international : arrêté et jugé en Europe » op cit.

* 77 DOMENACH (Jacqueline), FROMENT (Jean-Charles), JOSSERAND (Sylvie), « politique pénale : territorialisation et européanisation de la justice », document html op. Cit.

* 78 Levasseur (Georges), CHAVANNE (André) et MONTREUIL (Jean), droit pénal général, 14e édition, Paris, Sirey, 2002, P.2

* 79 L'espace judiciaire européen ; Acte du colloque d'Avignon précité, p117.

* 80 Signé à Libreville le 27 Mai 2004 entre les 6 Etats qui composent la CEMAC, la République Démocratique du Congo et la République Démocratique du Sao Tomé et Principe et adopté par le règlement N°08/05-UEAC-057-CM-13 du 7 février 2005.

* 81 Loin de donner une définition du terrorisme, cet acte procède plutôt par une détermination des actes considérés comme « acte terroriste ». Nous pouvons alors dire de manière simpliste que le terrorisme est le fait d'accomplir des actes terroristes.

* 82 Le code pénal camerounais par exemple ne prévoit pas l'infraction du terrorisme.

* 83 Nous avons une panoplie de textes internationaux parmi lesquels : la convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs signée à Tokyo le 14 Septembre 1963 et entrée en vigueur le 4 Décembre 1969 ; la convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs signée à la Haye le 16 Décembre 1970 et entrée en vigueur le 14 Octobre 1971 ; la convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile signée à Montréal le 23 Septembre 1971et entrée en vigueur le 26 Janvier 1973, et son protocole complémentaire adopté le 24 Février 1988 à Montréal et entré en vigueur le 6 Août 1989 ; la convention pour la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les argents diplomatiques, adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies le 14 Décembre 1973 à New York et entrée en vigueur le 20 Février 1977 ; la convention internationale sur la protection physique des matières nucléaires adoptée à Vienne le 2 Octobre 1979 ; la c internationale contre la prise d'otage adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies le 17 Décembre 1979 à New York et entrée en vigueur le 3 juin 1983 ; la convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime conclue à Rome le 10 Mars 1988 ; la convention sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection signée à Montréal le 1er Mars 1991 et entrée en vigueur le 21 juin 1998 ; la convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies le 15 Décembre 1997 à New York ; et la convention internationale des Nations Unies pour la répression et le financement du terrorisme du 9 Décembre 1999.

* 84 Règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC signé le 04 Avril 2003 à Yaoundé.

* 85 En fait, la lutte anti -blanchiment dans la zone CEMAC n'a véritablement été lancée qu'au cours de la conférence des Chefs d'Etat de la CEMAC du 14 Décembre 2000 et sous l'impulsion du groupe d'action financière international (GAFI). C'est dans ce cadre qu'a été crée le groupe d'action contre le blanchiment d'argent en Afrique Centrale au niveau communautaire, et les agences nationales d'investigations financières (GAFI) au niveau des Etats membres.

* 86 Cet article dispose que : « au sens du présent règlement, le blanchiment des capitaux désigne un ou plusieurs des agissements ci-après énumérés commis intentionnellement :

a) la conversion ou le transfert de biens provenant d'un crime ou d'un délit au sens des textes applicables dans l'Etat membre ou du présent règlement, dans le but de dissimuler ou de déguiser l'origine illicite desdits biens ou d'aider toute personne qui est impliquée dans la commission de ce crime ou délit à échapper aux conséquences juridiques de ses actes ;

b) la dissimulation ou le déguisement de la nature, de l'origine, de l'emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété de biens provenant d'un crime ou d'un délit au sens des textes applicables dans l'Etat membre ou du présent règlement ;

c) l'acquisition, la détention ou l'utilisation de biens provenant d'un crime ou d'un délit au sens des textes applicables dans l'Etat membre ou du présent des règlements ;

d) la participation à l'un des actes visés au présent article, l'association pour commettre ledit acte, les tentatives de le perpétrer, le fait d'aider, d'inciter ou de conseiller quelqu'un à le faire ou le fait d'en faciliter l'exécution ».

* 87 TCHABO SONTANG (Hervé Martial), Secret bancaire et lutte contre le blanchiment d'argent en zone CEMAC, mémoire de DEA précité. P. 1

* 88 ROBERT (J.H), l'intégration par renvoi du législateur national à des règlements communautaires futurs. Mélanges Levasseur, P.164 repris par NDIAW DIOUF, «Actes Uniformes et droit pénal interne des Etats signataires du traité de l'OHADA : la difficile émergence d'un droit pénal communautaire des affaires dans l'espace OHADA«, ohadata D-05-41, www.ohada.com

* 89 Il s'agit de l'acte uniforme relatif au droit commercial général (J.O OHADA, N°1 du 1er Octobre 1997), de l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE (J.O OHADA, N° 2 du 1er Octobre 1997) de l'acte uniforme portant organisation des sûretés (J.O OHADA, du 1er Juillet 1998), de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (JO. OHADA du 1er Juillet 1998), de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recours et des voies d'exécution (JO.OHADA N° 6du 1er Juin 1998), de l'acte uniforme relatif au droit de l'arbitrage (JO. OHADA du 15 Mai 1999), de l'acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises (JO.OHADA N° 10 ) et de l'acte uniforme relatif aux contrats de transport de marchandises par route (JO. OHADA N° 13 du 31 Juillet 2003).

* 90 Expression empruntée à BORE (Jacques) dans son étude « la difficile rencontre du droit pénal Français et du droit communautaire », Mélanges VITU, droit pénal contemporain, CUJAS, pp 25-49 précité.

* 91 Article 5 traité OHADA précité

* 92 BORE (Jacques), op. cit. parlant du contexte Français.

* 93 IDOT (Laurence), « Droit communautaire et droit pénal interne », Revue de sciences criminelles N° 3, Juillet-Septembre 1999, pp 641-646.

* 94 Cour de justice des communautés européennes (CJCE), arrêt COSTA, 15 Juillet 1964 repris par BORE (Jacques) op cit.

* 95 Dans son article précité

* 96 BORE (Jacques), op cit

* 97 Cette question peut aussi être posée concernant les règlements communautaires inconstitutionnels puisqu'ils sont obligatoires et directement applicables sans aucune procédure de ratification.

* 98 BORE (Jacques) op cit

* 99 BORE (Jacques), « la difficile rencontre du droit pénal français et du droit communautaire », op cit.

* 100 Partie III intitulée « dispositions pénales » (articles 886 à 905)

* 101 L'article 886 indique que le fait visé est constitutif d'une infraction pénale. les articles 887 et suivants prévoient simplement que les personne auteurs des agissements visés encourent une sanction.

* 102 NDIAW DIOUF, document html précité, www.ohada.com.

* 103 Article 43

* 104 Article 111

* 105 A l'heure actuelle, seul le Cameroun et le Sénégal ont déjà satisfait à cette obligation

* 106 NDIAW DIOUF op cit

* 107 Article 109 (7°) acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution ; article 228 et 229 acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

* 108 MAYER (Daniel), « l'ouverture européenne du droit pénal », Mélanges LOUSSOUAN 1994, repris par NDIAW DIOUF précité.

* 109 Un auteur a pu affirmer : « systèmes nationaux à basse et à haute pression (...) autorisent une concurrence déloyale nourrit par la diversité, la contrariété, l'absence de sanctions pénales des violations du droit communautaire », voir LABAYLE (Henri), « l'application du titre VI du Traité sur l'union européenne et la matière pénale », Rev. SC. Crim. 1995, pp 35 et suivants repris par NDIAW DIOUF précité.

* 110 Cas de l'Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI). Les infractions relatives à la propriété intellectuelle sont prévues par l'accord de Bangui du 02 Mars 1977modifiant l'accord de Libreville du 13 Septembre 1962 notamment dans ses annexes I, II, III et IV. Cet accord a été ratifié au Cameroun par le décret N° 79/499 du 06 Décembre 1979. Ce texte assorti toutes les incriminations qu'il édicte de sanctions (peines de prison, peines d'amende, interdictions, confiscation).

Tel est aussi le cas pour la conférence Africaine des Marchés d'assurance (CIMA) dont le traité a été signé le 10 Juillet 1992 à Yaoundé au Cameroun entre 14 pays parmi lesquels les 6 Etats membres de la CEMAC. Le code des assurances CIMA contient des infractions assorties de sanction. Ce code est entré en vigueur, pour ceux des pays qui l'ont ratifiés le 15 Février 1995 (voir les articles 330-15 ; 333-1 ; 333-2 ; 545)

* 111 Suivant cet article, les peines prévues à l'article 46 « sont doublées lorsque :

1° le blanchiment des capitaux est commis de façon habituelle ou en utilisant les facilités que procurent l'exercice d'une activité professionnelle ;

2° le blanchiment des capitaux est commis en bande organisée ;

3° lorsque les circonstances prévues par le régime général des circonstances aggravantes de la législation pénale applicable dans l'Etat membre sont établies ».

* 112 Pour une vision complète de ces infractions, lire intégralement l'article 48 du règlement précité.

* 113 Article 52 règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC précité.

* 114 Article 54 Ibid.,

* 115 Article 49 Ibid.

* 116 Article 50 Ibid.

* 117 « L'harmonisation du droit européen », publié sur le site du parlement européen, doc html www. europarl. europa.eu.

* 118 Il s'agit pour l'essentiel de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC et de l'accord d'extradition entres lesdits Etats. Mais, il faut cependant relever qu'en attendant l'entrée en vigueur « imminente » de ces textes, les dispositions des législations nationales continuent à régir la matière, ainsi que les conventions internationales auxquels les Etats membres de la sous-région sot parties comme la convention multilatérale de justice de Tananarive du 21 Septembre 1961 encore en vigueur aujourd'hui entre le Cameroun, le Benin, la Côte d'Ivoire, le Gabon, le Burkina -Faso et le Niger. Mais, notre étude portera beaucoup plus sur les textes de la CEMAC

* 119 Pour reprendre l'expression d'Henri LABAYLE, espace judiciaire européen, acte du colloque d'Avignon précité, P. 133

* 120 En attendant l'entrée en vigueur de l'accord d'extradition et de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC, les législations nationales, relayées par les conventions internationales multilatérales sont les principaux textes actuellement.

* 121 Article 4 (1), Accord d'extradition CEMAC ; article 48 (1) convention de Tananarive, article 636, 637, 640 et 649 (a) du Nouveau Code de Procédure Pénale camerounais (NCPP).

* 122 Article 8, Accord d'extradition CEMAC : articles 48 (2) et (5) convention de Tananarive ; article 649 (5) NCPP.

* 123 Article 48 (5) convention de Tananarive ; article 64 (1a) NCPP.

* 124 Article 4 (2) Accord d'extradition CEMAC ; article 643 NCPP

* 125 Article 45 convention de Tananarive

* 126 Article 10 Accord d'extradition CEMAC.

* 127 Repris par DELMAS-MARTY (Mireille), Criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, précité, P. 64.

* 128 Article 4 (4) ; la formule retenue est la même que celle de l'article 47 de la convention de Tananarive de 1961. La même formule avait été retenue par l'article 5 de la convention européenne d'entraide judiciaire de 1959, mais, le deuxième protocole additionnel à cette convention est venu renverser cette règle en étendant l'extradition aux infractions fiscales.

* 129 ZIEGLER (Jean), l'espace judiciaire européen, acte du colloque d'Avignon précité, P 115

* 130 DELMAS-MARTY (Mireille), criminalité économique et atteintes à la dignité de la personne, précité, P 64

* 131 Loi N° 64/LF/13 du 26 Juin 1964 fixant le régime de l'extradition au Cameroun, modifié par la loi N° 97/010 du 10 Janvier 1997.

* 132 Articles 646 672 du NCPP.

* 133 Expression empruntée à KEUBOU (Philippe), cours magistral de DPI, maîtrise 2006-2007 inédit.

* 134 Voir KEUBOU (Philippe), l'extradition au Cameroun, thèse de Doctorat 3e cycle, l'université de Yaoundé II (SOA), dactylographiée P 156. Voir également le même auteur dans son article intitulé « réflexion sur l'instance judiciaire compétente dans la procédure d'extradition au Cameroun », in Revue électronique Afrilex, N° 4, Décembre 2004, PP 212 et suivants.

* 135 Interrogations empruntées à KEUBOU (Philippe), cours magistral précité. Voir le même auteur dans son article «Réflexion sur l'instance judiciaire compétente dans la procédure d'extradition au Cameroun« in Revue Juridique et Politique Indépendance et Coopération, n° 1, Janvier-Avril 2001, Pp. 55-61

* 136 Articles 656, 657, 660

* 137  KEUBOU (Philippe), cours magistral précité

* 138 Ibid.

* 139 L'article 653 du code de procédure pénale prévoit que dans les vingt-quatre heures de l'arrestation de la personne dont l'extradition est demandée, un magistrat du parquet du tribunal de première instance procède à la vérification de son identité, à son interrogatoire et à la notification de son titre d'arrestation. L'étranger est ensuite transféré dans « les meilleurs  délais » à la maison d'arrêt du siège de la cour d'appel dans le ressort de laquelle il a été arrêté, conformément aux dispositions de l'article 654.

* 140 Articles 696-10 à 696 -15 du code de procédure pénale français, repris par KEUBOU (Philippe), cours magistral précité. L'article 21 de la loi de 1964 prévoyait que l'intéressé devait comparaître devant la cour d'appel dans les 8 jours de la notification du titre officiel d'arrestation, mais celle disponible n'a pas été reconduite.

* 141 KEUBOU (Philippe), cours magistral précité

* 142 Relayé sur le plan national par l'article 652 al 1 du NCPP

* 143 Ce délai est de 3 mois pour le NCPP (article 666). Cet article dispose que : « En cas de force majeur empêchant la remise ou la réception de l'individu à extrader, la partie intéressée en informera l'autre partie. Les deux parties se mettant d'accord sur une nouvelle date de remise et les dispositions du paragraphe 4 du présent article sont applicables ».

* 144 Article 659 (1), (2) et (3).

* 145 KEUBOU (Philippe), cours magistral précité.

* 146 Publiée au Journal Officiel de la République française le 10 Mars 2004, l'article 20 de cette loi abroge de manière expresse la loi du 10 Mars 1927.

* 147 KEUBOU (Philippe), cours magistral précité.

* 148 Journal Officiel du Cameroun 1928, P774 : code et lois du Cameroun, tome II, P 10111.

* 149 Extradition article de 1870, Fugitives Offender Act de 1881, West African (fugitive offenders), order in council de 1923, rendus applicables au Nigéria par l'extradition ordinale, chapitre 65 de l'édition de 1958.

* 150 Article 650 (1) NCPP.

* 151 Article 651.

* 152 Articles 659, 661 et 663 Ibid.

* 153 Puisque dans le contexte camerounais, c'est à lui que revient la décision finale d'accorder ou non l'extradition par décret insusceptible de recours.

* 154 ZONOTO (Jean-Pierre), l'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon op cit pp 135-136.

* 155 DELMAS-MARTY (Mireille), criminalité économique et atteinte à la dignité de la personne, op cit, P 65.

* 156 Notification à l'étranger, échange d'informations, communication d'extrait de casier judiciaire, comparution et transfert des témoins.

* 157 Article 3 de la loi camerounaise N° 2003/04 du 21 Avril 2003 relative au secret bancaire

* 158 ZIEGLER (Jean), professeur de droit, à l'époque député suisse qui bataille contre le blanchiment d'argent sale et la corruption au niveau international remarquait de façon presque mélancolique que : « j'ai fait quarante-cinq voix au parlement sur deux cent en Septembre (1998) en demandant la suppression pure et simple du secret bancaire »

* 159TCHABO SONTANG (Hervé Martial), mémoire précité, p. 6

* 160 Loi N° 2003/004 du 21 Avril 2003 précité

* 161 MASSE (Michel),  L'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon précité P 106

* 162 Dans l'espace judiciaire Européen, acte du colloque d'Avignon précité

* 163 Articles 573 à 583 NCPP

* 164 Entretien avec un greffier en chef d'une juridiction camerounaise de première instance.

* 165 Ibid.

* 166 Ibid.

* 167 Ibid.

* 168 Ibid.

* 169 Ibid.

* 170 Ibid.

* 171 Le casier judiciaire au Cameroun contient trois bulletins N° 1, N° 2  et N°3, voir l'article 581 NCPP

* 172 Entretien précité.

* 173 Conseil constitutionnel français, Arrêt du 17 Juillet 1980, repris par Didier GUERIN, « les instruments juridiques de la coopération pénale : l'évolution des instruments européens », in petite affiche N°72,16Juin 1997, pp 21-26.

* 174 Entre les Etats de la CEMAC, la RDC et la RD du Sao Tomé et Principe du 29 Avril 1999

* 175 Adopté par le règlement N°08/05-UEAC-057-CM-13 précité. A Yaoundé adopté par le règlement N° 4/CEMAC-069-CM-04 du 21 Juillet 2000 ratifié au Cameroun par décret N° 2001/274 du 24 Septembre 2001.

* 176 Convention de MONTREAL de 1971 relative à la sûreté de la navigation aérienne, la convention de Viennes de 1988 relative au trafic des stupéfiants, la convention de Montégo Bay du 10 Décembre 1982 sur le droit de la mer

* 177 L'article 16 de ce texte dispose :  « En vue de prévenir et de lutter contre la criminalité dans la sous-région d'Afrique Centrale, les polices des parties contractantes devront, dans le cadre du présent accord, échanger entre elles les renseignements en matière d'investigation criminelle, de prévention criminelle et de police générale ».

* 178 Organisation mondiale regroupant plusieurs pays du monde. L'article 3 de l'accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l'Afrique Centrale prévoit que : « Les Bureaux Centraux Nationaux (BCN INTERPOL) serviront d'organe de liaison entre les différents services de police criminelle des parties contractantes. Les équipements de télécommunication en leur possession pourront être utilisés à cette fin.

Chaque partie contractante pourra, au besoin, également requérir l'assistance du Bureau Sous-Régional (BSR) pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre, organe de coordination et de suivie, pour faciliter cette liaison. »

* 179 KEUBOU (Philippe), cours magistral op cit

* 180 KEUBOU (Philippe), ibid

* 181 Ibid.

* 182 L'article 2 de cette convention prévoit que : «chaque Etat Partie s'engage à extrader, selon les règles et sous les conditions déterminées par le présent accord, les individus qui sont poursuivis pour des infractions de droit commun ou recherchés aux fins d'exécution des peines ou des mesures de sûreté par les juridictions compétentes de l'un d'eux dénommée partie requérante«

* 183 Accord précité.

* 184 Articles 60 à 66 de la convention de Tananarive de 1961 ; convention de Vienne de 1988 précité, etc.

* 185 En matière pénale, l'objet de la demande est toujours l'application d'une sanction pénale, dont il y a toujours identité d'objet. Quant à l'identité de parties, il s'agit de la partie poursuivante et de celle poursuivie ; il y a toujours identité de parties car la partie poursuivante est le ministère public et la partie poursuivie le délinquant. L'identité de cause suppose le même fait délictueux ayant justifié les deux poursuites. Mais, il était admis que les faits sont différents et de nouvelles poursuites possibles lorsqu'il y a découverte d'une circonstance nouvelle qui colore autrement le fait délictueux en le faisant correspondre à une qualification différente de la première : voir l'affaire THIBAUD, chambre criminelle de la cour de cassation française, 25 Mars 1955, I, P.39, note BROUCHOT ; JCP 1954, II, 8272, note VERDIER repris par KEUBOU (Philippe), cours magistral précité.

* 186 Voir également l'article 18 (c) du règlement CEMAC sur la prévention et la répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale précité.

* 187 Article 10 de l'accord de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC

* 188 Article 13 alinéa 2 ibid.

* 189 2002/187/JAI

* 190 KENNEDY (Michael) (Président d'Eurojust), « Eurojust unité de coopération judiciaire », document html, www.touteleurope.fr (23/05/07)

* 191 Mais, ce membre peut être assisté d'une ou plusieurs personnes

* 192 « Eurojust : 5 ans de coopération judiciaire européenne », Interview de FALLETI (François), Avocat général à la cour de cassation, représentant de le France à Eurojust, 7 Août 2007, www.justice.fr

* 193 « Eurojust et l'idée d'un parquet Européen », document html, www.senat.fr

* 194 KRIEGK (Jean François), L'espace judiciaire européen, Acte du colloque d'Avignon précité, P.116

* 195 PINATEL (Jean), « Perspectives d'avenir de la criminologie », in La criminologie, Bilan et Perspectives, Mélanges offert à Jean PINATEL, édition A. LEDONE, Paris, 1980, Pp.261-270






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