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Les Réfugiés comme enjeu de sécurité

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par Coraline Barré
Sciences Po Grenoble - Diplôme de Sciences Po Grenoble 2006
  

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II - LA COORDINATION DES OPERATIONS AVEC LES MILITAIRES

La coopération entre agences et entre ONG est un défi à relever pour l'efficacité de l'action de la communauté internationale et pour le bien de l'approche multilatérale. Cependant, apparu dans les crises post-Guerre Froide des années 90, le défi à relever aujourd'hui en matière de coordination est l'épineux problème de la coopération entre ONG, OI et agences de l'ONU avec les forces militaires intervenant dans ces situations humanitaires complexes. Cette mutation, justifiée par la sécurité humaine, n'est pas sans poser certains problèmes.

- La coordination des ONG avec les militaires

Traditionnellement, les ONG agissent de manière très indépendante. Même si financièrement elles sont soutenues par certains donateurs, qui alors peuvent leur poser quelques conditions d'action, elles restent en général extrêmement attachées à leur autonomie notamment par rapport aux gouvernements. Par conséquent elles ont rarement travaillé en coopérant et en coordonnant leurs actions avec d'autres ONG, les OI ou les forces militaires. Elles restent très attachées à leur neutralité, et surtout à cette sorte de vulnérabilité, de fragilité, qui au lieu de les exposer les protège de toute attaque. Mais même si cela peut ne pas leur plaire, les ONG, ainsi que les OI et les agences de l'ONU, ont compris qu'elles devaient coopérer avec les militaires pour assurer l'efficacité de leur action. En effet, les conflits aujourd'hui diffèrent des grands conflits de la Guerre Froide, et les opérations militaires ont changé de nature. Aujourd'hui les forces militaires s'engagent dans ces guerres pour stopper le conflit mais aussi pour rétablir la paix, et ont donc besoin d'ajouter à leur stratégie un volet humanitaire. Dans les situations humanitaires complexes,

les militaires ont donc besoin des civils, et vice-versa.

Dans des opérations comme en Irak ou en Somalie, l'établissement de relations de travail privilégiées entre militaires et ONG permit le succès de l'assistance humanitaire dans un environnement très dangereux et volatile33. Ces mêmes opérations, cependant, soulignent également l'importance d'établir une meilleure et plus rapide communication parmi tous les acteurs agissant de la communauté internationale, pour une meilleure compréhension des objectifs globaux de l'opération. Il est vrai que même si la coopération fut un succès en Somalie, les ONG et les militaires avaient des objectifs bien différents. Les militaires, eux, voulaient éviter l'enlisement dans une situation complexe. Ils voulaient donc entrer dans le pays, réparer ce qui n'allait pas, et repartir. Les humanitaires, eux, n'avaient évidemment pas du tout la même vision de leur engagement. Leurs actions s'inscrivent en effet su le long terme, s'adressant aux causes profondes du problème et prolongeant l'assistance humanitaire au delà de la simple offensive militaire. Ces analyses et objectifs différents sot autant d'obstacles à la coopération, mais ils ne sont pas les seuls. Il faut noter que la culture humanitaire et la culture militaire sont diamétralement opposées. La plupart des ONG par exemple prennent leurs décisions de manière collégiale, et non de manière hiérarchique, comme les militaires. La culture des humanitaires va également souvent à l'encontre de la culture sécuritaire des militaires. De plus, les militaires sont extrêmement entraînés à affronter toutes sortes de situation, la structure et les objectifs de la mission ainsi que les règles d'engagement sont définis à l'avance, et rien ne peut les faire déroger à la règle établie, qu'il s'agisse d'un soldat première classe ou d'un général trois étoiles. Mais parfois l'approche décentralisée et flexible des ONG peut aussi être un atout dans des situations difficiles, où il faut savoir changer soudain de stratégie. Ces deux mondes, humanitaires et militaires ont donc parfois beaucoup de mal à se comprendre, et parfois se méprisent même.

Mais ces deux mondes ont eu plusieurs occasions de se rapprocher et de mieux se comprendre, comme récemment au Kosovo, au Timor Oriental ou en Sierra Leone. Aujourd'hui de plus en plus d'acteurs humanitaires commencent à penser qu'ils ont parfois besoin des imposantes capacités logistiques des armées, et de plus en plus de militaires apprécient le dévouement ainsi que l'innovation apportées par les humanitaires. Parfois même les militaires se sont plaints que les ONG, et derrière elles le HCR, n'avaient pas les capacités ni le personnel suffisants pour répondre aux demandes des militaires.

Les militaires ont eux-mêmes vocation à améliorer les relations ONG-OI / militaires en créant des Centres des Opérations Civiles-Militaires afin de rapprocher les objectifs et stratégies des deux « camps ». Ces centres cependant ne servent pas de mécanismes de coordination. Et même quand acteurs humanitaires et militaires veulent coopérer étroitement, certains facteurs peuvent les en empêcher. Par exemple, en Bosnie, leurs règles d'engagement empêchaient les

33 Cependant en Somalie la défaite militaire des forces américaines en 1992 compromit la délivrance de cette aide huamanitaire.

militaires américains de voyager dans des convois de moins de quatre véhicules, pour des questions de sécurité. Ils ne pouvaient donc pas se déplacer de manière rapide dans le pays. Par conséquent, le personnel des ONG et des autres agences présentes voyagèrent souvent par eux- mêmes, sans attendre qu'un convoi militaire soit formé. Mais malgré ce genre de problèmes, militaires comme humanitaires reconnaissent en général aujourd'hui que même s'ils s'engagent dans ces conflits pour des raisons complètement différentes, le succès des uns est indispensable au succès des autres. Les ONG et les acteurs humanitaires en général dépendent fortement des conditions de sécurité assurées par les forces militaires pour protéger leur personnels, leur équipements, mais aussi par exemple les réfugiés34. Les forces de maintien de la paix elles ne peuvent en général se retirer que lorsque les agences civiles ont fini leur travail de consolidation de la paix et commencent la phase de reconstruction et de réconciliation. Les uns ont besoin des autres, et le départ précipité de l'un des deux acteurs peut précipiter l'échec de l'autre. C'est ce qu'il se passe en ce moment même au Timor Oriental, où les forces de maintien de la paix se sont retirées trop tôt. Les Etats donateurs ont fait pression sur l'ONU pour renvoyer les soldats dans leurs casernes et ce notamment pour des raisons financières, le coût de leur maintien étant relativement élevé. Malgré les appels au maintien d'une force, même un peu réduite, au Timor Oriental, de la part des membres du gouvernement et des observateurs internationaux sur place , les soldats se retirèrent alors que la situation politique était encore trop fragile. Il y a peu, des conflits armés ont ré-éclaté dans la capitale, obligeant l'Australie (mandatée par l'ONU), à redéployer ces soldats. L'opération de maintien de la paix au Timor Oriental, qui était présenté comme un modèle du genre par l'ONU, a donc été entaché par un retrait trop précoce des forces de maintien de la paix. Le risque est que le conflit qui reprenne aujourd'hui et ruine le travail entamé par les humanitaires.

La cohérence entre le travail des acteurs humanitaires et les forces militaires est donc primordiale. A travers des ateliers de travail, des consultations... les ONG et tous les acteurs humanitaires peuvent élargir et soutenir les négociations officielles, par exemple en faisant la promotion d'idées qui peuvent nourrir le processus officiel de résolution du conflit. Mais pour cela, la collaboration doit implique plus que de simplement garder les autres parties informées. Cela nécessite de s'accorder sur les méthodes, sur les objectifs, et de rester discipliner pour laisser l'autre, quand il est plus à même de remplir une tâche, prendre le relais. Il est ici question de responsabilité. Les ONG et autres agences doivent prendre conscience de la répercussion de leurs actes, puisque ceux-ci sont susceptibles d'avoir des incidences fortes sur la situation. Surtout que les agences internationales spécialisées et les ONG ont tendance à prendre des responsabilités qui dépassent de loin leur mandat initial. Par exemple au Rwanda les agences ont dû avancer dans le noir le plus total, dû à l'effondrement de l'autorité centrale. Surtout, les ONG et les autres agences de secours ont tendance à devoir se substituer à une communauté internationale qui ne veut pas s'engager politiquement ; elles doivent donc se substituer à l'échec

34 Comme nous le verrons plus en détail dans la seconde partie.

du multilatéralisme. Mais elles doivent par conséquent faire très attention aux conséquences inattendues de leurs actes, et aux effets pervers de leur présence massive dans un pays.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote