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Cohabitation population fang/CNPN, WCS dans la conservation de l'environnement au Gabon : Analyse du cas du Parc National des Monts de Cristal

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par Aimée Prisca MEKEMEZA ENGO
Université Omar Bongo - Maîtrise 2007
  

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Chapitre 4 : Les fondements socio-économiques de la société fang

1. Conception de la forêt

Forêt « mère nourricière » 

Depuis des millénaires, la population rurale dépend de son milieu naturel, pour subvenir à ses besoins.

Entretien 7 : ASSONG NDOUTOUME Micheline, 45ans, ethnie fang, village Misome, clan yéguin, lignage Ndong Evo'o, mariée, 2 enfants, agriculteur, département Como-Kango, sur la conception traditionnelle des forêts des Monts de Cristal. L'entretien a eu lieu le 4 avril 2006, dans son salon, à 9h45mn.

Texte en fang

Traduction française

Afan éne biè éban, da vole bia. Afan éde ébele bia éning. Ka afan, bise ke ning, bia ye wou nzè, bia ye deng dia édzome bine dzo'o some ébime bia bot, fogue oya'a mebiang ye ébieme bia ve éning adza'a.

 La forêt est très importante pour nous, elle satisfait nos besoins. C'est une source vitale pour les Fang. Sans elle nous ne pourront pas vivre, nous allons mourir de faim, nous n'aurions pas de quoi s'acheter les habits avec, encore moins les médicaments et toute chose qui rend la vie possible au village.

L'informatrice, dans son commentaire ressort l'aspect positif de leur forêt. En effet, la forêt occupe une place de choix au sein de cette communauté. Elle comble l'homme de ses besoins alimentaire, vestimentaire, pharmacologique, monétaire et dans le domaine de la construction. La forêt offre une grande variété d'aliments aux Hommes. Ces aliments sont extrêmement importants pour maintenir l'équilibre nutritionnel dans les régimes alimentaires traditionnels. Ils comprennent des feuilles, des gousses comestibles, des fruits, des racines, des noix, du miel, des champignons et du gibier. En dehors de l'alimentation, beaucoup parmi ces plantes comestibles servent de médicaments. L'homme puise dans les ressources de son environnement pour satisfaire le premier de ses besoins « se nourrir ». C'est la grande disponibilité des ressources naturelles qui va favoriser les activités de production essentiellement extrativistes. Notre accent est mis sur l'agriculture, la chasse, la pêche, la cueillette, la coupe du bois, l'orpaillage et l'artisanat traditionnel.

1.1.1. L'agriculture

L'agriculture itinérante sur brûlis est la principale attraction de la population riveraine aux Monts de Cristal. C'est une agriculture vivrière pratiquée sur la base des techniques traditionnelles et donc soumise à un type de régime collectif et quelque fois individuelle. Elle est soumise aux aléas de la nature parmi lesquels, précipitation, soleil, situation du relief, la nature des sols et de la couverture végétale. Pour la population, le site idéal est une terrasse plate, bien drainée et non inondable, couverte d'une forêt primaire et dépourvue néanmoins de gros arbres dont l'abattage représenterait un investissement important en travail. Ces facteurs sont déterminants dans le choix de l'essart et des cultigènes à planter. L'agriculture impose dans un premier temps, le choix du site. Ce choix obéit au delà des aspects purement naturels à des pratiques sociales. C'est un exercice féminin. Le choix se fait dans les terres du village et des familles.

Entretien 8 : ENGOUANG MINKO Nicolas, 47 ans, ethnie fang, village Avang, clan Guèn, lignage Osan Mbot Zam, marié, père d'une grande famille, département haut-como, canton Mbé , sur la gestion des forêts traditionnelle des forêts. L'entretien a eu lieu dans son salon, à 14h40mn. Notre entretien s'est passé dans son salon, le 6 avril 2007, à 9h30mn. L'entretien n'était pas facile d'autant plus la maîtrise de la langue nous faisait défaut. Il nous a pris 45mn.

Texte en fang

Traduction française

1 Mefane mâ mene nkabane, dza'a ésese ébele akabe dzen, da'a mbot da bera bele éfus. Mbot asese abale afan dzen. Vedzameda'a, mbot ane nsome mefan mese.

1 Nos forêts sont partagées, chaque village a sa forêt et dans le village, chaque famille en a la sienne. L'entretien de la forêt se fait par les propriétaires. Cependant, cela n'est pas très contraignant pour la chasse

2 Ngue ba pwène mbot ésa fup, mboté ayiène dzo dzam ava'a ke bô. Ve bia bô gne dzam akal bi ne mo bo'o.

2 Si quelqu'un s'introduit dans la plantation de l'autre, ce dernier a droit à une explication. Mais on ne lui inflige pas une sanction parce que nous formons une seule personne.

Ce récit nous donne une idée de la répartition des forêts dans la société riveraine aux Monts de Cristal. Les forêts sont gérées par familles, et cela de génération en génération. Au sein de la famille, la forêt est conçue comme un héritage et se transmet de père en fils et d'une femme à sa belle fille ou à sa fille. Cependant par rapport aux autres activités, la chasse n'est pas très contraignante. Les hommes font la chasse dans toutes les parties de forêts destinées à la chasse dans le lignage. Cette activité s'inscrit dans un finage.

La fertilité du sol est une donnée fondamentale dans le choix de l'essart. Cette population fait ses plantations deux fois dans l'année. D'abord pendant la grande saison sèche (juin, juillet et août), et ensuite pendant la petite saison sèche (décembre, janvier et février).

Elle les fait aux alentours du village, parce qu'elle craint les éléphants (Loxodonta africana cycliotis) et les buffles ((Syncerus caffer). Ces animaux font du tort aux plantations. La dimension d'un essart est condition de la capacité de la force de travail de la femme, de sa progéniture, des contraintes écologiques et des difficultés posées par ces animaux. Habituellement ce sont de petites plantations. Elles font environ 3000 à 5000 m2 de surface d'après l'IGAD (institut Gabonais d'Appui au Développement). Après le choix du site, les hommes vont défricher l'essart qui a été choisi pour la semence. Le défrichage est un travail difficile et à risque, d'autant plus qu'il demande beaucoup d'efforts physiques. C'est pendant le mois de juin qu'il se fait pour la plantation de la grande saison sèche (afup oyone), et en décembre pour la plantation de la petite saison sèche (afuf esep). Elle se fait au moyen d'une machette et consiste à couper tous les buissons, arbustes du sous-bois, et les débris de taillis étant laissés sur place.

Deux semaines après, ces derniers vont abattre les arbres qu'ils n'ont pas pu couper, par rapport à leur diamètre et à leur hauteur. Habituellement, ce sont de gros arbres. Ils préfèrent les abattre lorsque le site à cultiver est aéré, cela les épargne des éventuels accidents. Cette étape se fait en juillet pour la plantation de la grande saison sèche et en janvier pour la plantation de la petite saison sèche. L'abattage est compliqué, de par la grosseur des arbres. Ils le font à la machette, hache et à la tronçonneuse. L'utilisation de la tronçonneuse consiste à économiser du temps, l'énergie et à alléger l'abattage. Ils abattent tous les arbres excepté les arbres fruitiers et ceux qui ont un intérêt pharmacologique et symbolique.

Tableau 10 : Les essences épargnées lors de l'abattage

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Andok

Andok

Irvingia gabonensie

Ekouk

Emien

Alstonia congensis

Edum

Doussié

Afzelia pachyloba

Adzap

Moabi

Baillonella toxisperma

Abe'e

Cola

Cola spp

Ewom

Coula

Coula edulid

Mbè

Padouk

Pterocarpus soyauxii

Alen

Palmier

Detarium macrocarpum

Aguma

Okoumé

Aucoumea klaineana

Abam

Longhi sub

Gambeya subnuda

Amvout

Trichoscypha

Trichoscypha spp

Abang

Millettia

Millettia spp

Ognein

Garcinia ou bois amer

Garcinia spp

Tom

Dabema

Piptadeniastrum africanum

Asia

Ozigo

Dacryodes buettneri

Asas

Atangatier

Dacryodes edulis

Elone

Tali

Erythrophleum ivorensis

Eyene

Movingui

Distemonanthus bentamianus

Asam

Rikio

Uapaca spp

Source: Nos informateurs, mars 2007.

Ce tableau n'est pas représentatif de toutes les essences protégées. Ces essences sont épargnées pour des raisons diverses. Ces raisons sont à la fois pharmacologique, nutritionnel et pour la construction. Du point de vue pharmacologique, elles ne sont pas utilisées dans le même traitement. D'autres, en dehors de ces aspects, revêt aussi un caractère symbolique, c'est le cas du palmier. Cette essence protège les femmes contre des éventuelles intempéries. Il est également utilisé dans des cérémonies.

A la suite de l'abattage, vient le brûlage. Ce dernier se fait au mois d'août pour la première plantation et en février pour la petite plantation. Il se fait au fur et à mesure que l'herbe brûle. Il est contraignant pour les femmes. Les hommes le font s'ils le veulent. Elles se servent des allumettes (mesis) et du roseau (nke) pour faire ce travail.

Pour chaque plantation, le nettoyage se fait un jour après le brûlage. Le principe consiste à regrouper les troncs d'arbres qui n'ont pas brûlé et les brûlés de nouveau. Pour ces derniers, le feu leur permet de gagner en temps. Après l'essartage, les femmes plantent. La semence se fait un jour après le nettoyage, généralement fin août pour la première plantation et fin février pour la deuxième plantation. Il se fait avec la machette (mpwara) et la houe (ebak). Ce sont des champs à diverses cultures.

Tableau 11 : Les cultigènes plantées par les femmes dans leurs plantations

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Agneune, gnona'a

Oignon

Allium cepa

Akabo

Taro

Colocasia esculenta

akwama mbo'o

Tubercule de manioc

Manihot esculenta

Asso'o

Igname

Discorea Sp

Bigoma

Courge

Sicana odorifera

Edeng

Amarante

Amaranthus

Ekone

Banane plantain

Musea balbisiana

Essang

Oseille

Hibiscus gabdaniffer

Etetame

Gombo

Lubiscus esculentus

Fone

Maïs

Zea mays

Ngone

Concombre

Ipomea batatas

Nkok fang ou nkok mebong

Canne à sucre

Saccharum officinanum

Nkokgnonga

Ananas

Annanas comosus

Okame

Piment

Capsicum sp

Owone

Arachide

Arachis hypogea

Voumba

Tomate

Solamum lylopersium

Zong

Aubergines

Solanum Spp

Source : Nos informateurs, avril 2007

Ce tableau présente les cultigènes que renferme la société fang, mais cette liste n'est pas exhaustive. Nous n'avons noté que celles qui sont consommées habituellement. A travers cet inventaire alimentaire, on se rend compte que ces Hommes n'ont pas perdu leurs anciennes habitudes. Malgré le contact des cultures, ils ont su conserver leur alimentation de base et continuent à assurer sa transmission. Elles sont utilisées à des fins différentes. Certaines servent de condiment, d'autres de complément, et le reste comme aliments de base.

Après les semences, les femmes vont de temps en temps voir l'état des plantations. Elles vont sarcler de temps en temps dans leurs plantations. Cette activité est indispensable d'autant plus qu'il supprime les voraces compétiteurs des plantes cultivées et met ces dernières dans la propriété. Le sarclage se fait à la machette. Une fois ce travail fait, les femmes font la récolte. La collecte se fait en fonction de la maturité des plantes et cela à des périodes différentes. Ainsi, elles récoltent d'abord l'arachide, le mais, les légumes, etc. A la suite de ces aliments, on a les ignames, le manioc, le concombre, la banane plantain, la canne à sucre, etc. ces aliments sont consommés évidement par saison et sont associés à la viande et aux poissons. L'agriculture a un but alimentaire et lucratif.

Entretien 9 : ESSENG ESSENG ESSONO Céline, 61 ans, ethnie fang, village Misome, clan Yégun, ligange Meye Me Ze, veuve, 6 enfants, département, Como-Kango, canton Mbé, sur le but de l'activité agricole. Notre enquête s'est passée le 5 avril 2006, à Misome dans son village natal. Cet entretien a eu lieu dans son salon. Il était 9h15mn. Notre entretien a duré 48 mn.

Texte en fang

Traduction française

1 Mimbou minga alot, binga bobo'o bra metsi. Ve engueng ni, na bidzi, binga bo'o bwane metsi ye mare benzok, akal ba ji bi metsi ntsouk. Mengueng mezeng bia somane absiye. Bia somane adza'a. Ebenega ba som, ba zou fe som mbo'o, ékone, ye melos.

1 Dans les années antérieures, on faisait de grandes plantations. Cependant, vu les dommages causés par les éléphants, nous sommes obligés de faire de petites plantations, juste pour manger. Il nous arrive quelque fois de vendre le surplus. La vente se fait au village. Les commerçantes viennent également acheter le manioc, banane, mandarine, oranges, pamplemousse.

2 Bia somane bidzi na'a bi bele ntap, nku, megnang, mbone, tchiasin. Bia simane fe akone. Miang mite, mine bi vole na'a bisome mebiang.

2 On vend notre nourriture pour pouvoir se procurer le savon, le sel, le lait, l'huile, le pétrole. Et on prévoit aussi le cas des maladies. Cet argent peut nous aider dans l'achat des médicaments.

Il ressort dans ce récit que l'agriculture n'est pas uniquement destinée à l'alimentation. Les villageois vendent évidemment le surplus de leur production pour s'alimenter en produits de première nécessité tels que le lait, les allumettes, le sel, le sucre, le pétrole. Cet argent leur sert également dans l'achat des médicaments. Ce surplus se vend en bordure des routes ou sur commande. Les femmes ne se rendent pas en ville à cause du mauvais état de la route. Il arrive parfois que les commerçantes s'y rendent dans la région pour se procurer du manioc, de la banane, des mandarines et des pamplemousses. La commande varie de 5000 à 15 000fr par femme.

Tableau 12 : Prix de quelques cultigènes sur le marché

Noms en fang

Noms en commun

Prix (F CFA)

Ebang mbo'o

Paquet de manioc

500

Nsa'a ékone

Régime de banane

500 à 3000

Apoma mbo'o

Tas de tubercules

500 à 1000

Akabo

Tas de taro

500 à 1000

Nkura owono

Sac d'arachides

15 à 25000

Source : Nos informateurs, avril 2007.

A travers ce tableau, on constate que les populations indépendamment de consommer leurs produits, ces dernières les vendent aussi, cependant à des prix différents. Ainsi, on s'aperçoit qu'il y a des produits qui coûtent plus chers que d'autres, c'est le cas du sac d'arachide. La différence s'explique par le fait que l'arachide est un aliment de base pour ces populations et il est difficile que les femmes en fassent une production suffisante. La production moyenne est de trois sacs par femmes. Certaines femmes sont obligées d'en acheter pour en avoir suffisamment, surtout pour les femmes qui ont un nombre élevé d'enfants.

1.1.2. La chasse 

L'activité cynégétique n'est pas en reste dans la société riveraine aux Monts de Cristal. Elle joue un rôle non négligeable dans cette société et est essentiellement masculine. Généralement, elle occupe les hommes valides et se fait en groupe ou individuellement. Les hommes chassent aux alentours du village et quelque fois en forêt, surtout lors des cérémonies, cela leur permet de faire une chasse quantitative. Ils chassent la nuit comme le jour.

La chasse se pratique toute l'année, mais le moment propice est la saison des pluies, parce que les hommes estiment qu'en ce moment, les animaux circulent librement, le feuillage et le sol sont humides, par conséquent, les chasseurs font la chasse librement sans pourtant se faire entendre par les animaux. Cependant, en saison sèche, le moindre craquement des feuilles fait fuir les animaux. Pendant cette saison, ils chassent partout mais le meilleur endroit, c'est aux bords des cours d'eau. A cet endroit, ils ont la facilité de tuer les animaux qui viennent s'abreuver.

Entretien 10 : NGUEMA Antoine, 65 ans, ethnie fang, village Song, clan Esokè, lignage Mba Efak, marié, père d'une grande famille, département Haut-Como, canton Mbé, sur l'organisation de la chasse. Notre enquête s'est passée le 7 avril 2007, dans son village natal. Cet entretien a eu lieu dans son salon. Il était 13h45mn. Notre entretien a duré 55 mn.

Texte en fang

Traduction française

1 Bi bele mindzang minsome miben: nsome ye zale ye melame. Bia bô nsome ngura mbu. Bia bô nsome nâ bibô mingura mi mame. Bia bira bô nsome mbu sughe égna dang wuin. Nsome ye sala bia ke ékuna mewale zanbwa. Melame mébele ngura awola. One ke awola asese ye mos.

1 On a deux types de chasse : la chasse au fusil et les pièges. On fait la chasse toute l'année. On la fait en fonction de nos besoins. La grande et petite saison des pluies sont les plus propices. Pour la chasse au fusil, on va très tôt le matin (7h). Les pièges n'ont pas de moment précis. Tu peux aller à n'importe quelle heure de la journée.

2 Bia lame mefane engeung wa kume ye wune abuin. Bia bô nsome y'alu ye wui y'omos. Nsome yalu bia bô wo ye zala ba sum wô mewola mesamane y'étun y'alu. Awola bia ni afan da sanla y'abime dulu bia yiène wulu nâ bi tchuin afan bia yiène nsome. Be bô nsome besese bebele édzango ngomane ake nâ be bô nsome. Bi bele ve bidzango bia venâ bibele menga, ébie ngomane adjuè si angua mane bibô.

2 On pose les pièges aux alentour des villages ou en forêt, lorsqu'on veut avoir beaucoup de gibier. On fait la chasse de nuit et celle de jour. La chasse de nuit est au fusil, on va vers 18h30. L'heure de départ varie selon la distance à parcourir. Tous les chasseurs n'ont pas de permis de chasse. Nous avons seulement les permis d'autorisation de porte-d'armes, établis par le ministère de l'Intérieur.

Ce récit fait état du type de chasse exercée par cette population. En effet, les hommes font la chasse au fusil. Ils posent également des pièges. Ces derniers chassent la nuit comme le jour. L'inconvénient ici est que ces hommes chassent sans avoir obtenu au préalable une autorisation administrative. Ce qui cause toutefois l'arrestation de ces derniers par le Ministère des Eaux et Forêts. Non seulement, ils ne disposent pas de permis de chasse mais ils pratiquent une chasse abusive des espèces animales. Ils font pour la plupart, une chasse clandestine. C'est cela qui entraîne généralement la saisie de leur gibier. L'administration en charge de la protection et de la conservation de l'environnement et des espèces animales doit y remédier. Ces hommes se servent de l' « arme passive » (piège) et de «l'arme active» (fusil) (Philippe Descola, 1989 : 283).

Diagram

me 1 : Répartition des chasseurs des villages enquêtés par techniques de chasse

Source : CNPN, 2006

Ce digramme présente les pourcentages de chasseur par technique utilisée. En effet, le constat que nous pouvons faire est que, dans cette société, les hommes chassent à la fois au fusil et aux pièges. Il existe seulement peu qui font uniquement la chasse au fusil ou aux pièges. Cela s'explique par le fait que d'une part, il y a des animaux qui meurent à la fois aux fusils et aux pièges et des animaux qui meurent seulement au fusil ou qui se font prendre aux pièges d'autre part. Ce diagramme témoigne du manque d'habilité des hommes à un type de chasse spéciale. Pour combler ce déficit, les hommes sont obligés d'associer les deux techniques de chasse.

Le fusil à cartouche est considéré comme plus rapide, fiable et productif. La chasse au fusil (miyeng misala) se fait en pleine forêt, à des dizaines de kilomètres, de longues et pénibles heures de marche. Elle se pratique sur des espaces qui sont communs à l'ensemble de la communauté. Comme matériel, nous avons, le fusil (nge'e) « calibre 12 et calibre 458 », panier (nkuen), couteau de chasse (nzok bam) ou machette (nkpware), les cartouches (mekong). Chaque objet a un rôle à jouer dans la chasse.

Les pièges ne sont pas en reste. Leur pratique est toutefois non négligeable. Les hommes s'en servent pour exterminer les rongeurs qui commettent des déprédations dans les plantations. Comme matériel utilisé, nous avons le câble (ntchip), le peru (mèè), le panier (mpwè'è), la machette (nkpware) ou le couteau de chasse (nzok bam). Ils piègent dans les zones périphériques de l'habitat des animaux attirés par les cultures, notamment à l'endroit de leur sente habituel. L'animal meurt par strangulation. Dans cette société, les hommes chassent toute sorte d'animaux. Mais le produit diffère selon qu'il s'agit du piège ou du fusil.

Tableau 13 : Les animaux chassés dans la forêt des Monts de Cristal

Noms en fang

Noms pilotes

Noms scientifiques

Esegue

Mandrill

Mandrilus sphinx

Fima

Pangolin géant

Smutsia gigantea

Mvein

Chat huant

Nandinia binotata

N'sing

Genette servaline

Genetta servalina

Ngom

Athérure

Atherurus africanus

N guin

Potamochère

Potamochoerus porcus

Nkuingn

Rat palmiste

Cricetomys emini

Opong

Céphalophe bleu

Cephalophus monticola

Zok

Eléphant

Loxodonta africana cyclotis

Source : Nos informateurs, mars 2007

Ce tableau ne représente pas tous les animaux qui sont chassés par les hommes de cette région. Les hommes font la chasse au gros et aux petits gibiers. La proportion de la chasse au gros gibier n'est pas très importante. Le plus souvent, les hommes abattent les éléphants avec l'accord du personnel du Ministère de l'Economie Forestière. L'éléphant est abattu lorsque ce dernier fait du tort aux populations. La richesse de cet animal (les poiles, l'ivoire) revient aux eaux et forêt, les villageois se départagent le gibier et quelque fois, ils vendent le surplus. L'abattage de l'éléphant n'est pas à la portée de tous. Par conséquent, il est abattu par des spécialistes. Cet animal est tué au fusil, à l'aide du calibre 458.

Les animaux de la famille des Potamocherus porcus sont les plus prisés. A la suite de cette famille, nous avons la famille des Bovidae, la famille des Cercopithecidae. Les autres familles sont moins chassées à cause de leur rareté et du fait de la prise de conscience de la préservation de certaines espèces pour les générations futures par les hommes. Ces derniers respectent la loi.

Tous ces animaux ne sont pas consommés, pour plusieurs raisons. Ces hommes entretiennent des liens étroits avec beaucoup d'animaux. Certaines espèces sont considérées comme leur « Totem »3(*) et bénéficient d'une protection absolue. Par conséquent, la prise d'un de ces animaux est suivie d'une libération et d'une vente. D'autres animaux ne sont pas consommés à cause de leur constitution. Ceux-ci sont surtout interdits aux femmes enceintes et aux jeunes filles. Seuls les hommes et les femmes âgées ont la possibilité de les manger. Ce type d'interdit est très ancien.

Tableau 14 : Les animaux dont la consommation est interdite dans les villages enquêtés

Villages

Noms en fang

Noms pilotes

Noms scientifiques

Avang

Mandrill, Awoun

Mandrill, Potto de bosman

Mandrilus sphinx Perodicticus potto edwarsi

Akoga

Esouma, miè

Pogonias, Céphalophe du Gabon

Cercopithecus mona nigripes, Cephalophus leucogaster

Mbé akélayong

Avoum

Potto de bosman

Perodicticus potto edwarsi

Nkann

Miè

Céphalophe du Gabon

Cephalophus leucogaster

Song

Esouma, Avoum

Pogonias, Potto de bosman

Cercopithecus mona nigripes, Perodicticus potto edwarsi

Mela

Esouma, Miè, Awoun

Pogonias, Céphalophe du Gabon, Potto de bosman

Cercopithecus mona nigripes, Perodicticus, Céphalophus leucogaster, potto edwarsi,

Andok-foula

Miè

Céphalophe du Gabon

Céphalophus leucogaster

Misome

Miè, Awoum

Céphalophe du Gabon, Potto de bosman

Cephalophus leucogaster, potto edwarsi

Source : Nos informateurs, Avril, 2007

A partir de ce tableau, nous pouvons lire les rapports qui existent entre les Hommes et certains animaux. Ces animaux sont protégés, et d'autres sont formellement interdits aux femmes enceintes pour éviter d'éventuelles déformations de l'enfant à naître. Le mandrill est considéré comme « totem » pour le lignage « Ossan Mbot Zam » du village Avang. A l'inverse, le céphalophe du Gabon et le Pogonias sont considérés comme des animaux dangereux. Ils entraînent des malformations chez le nouveau-né ou les crises d'épilepsie. Ici, on peut constater que les populations sont soucieuses de leur santé.

Le Potto de bosman est mangé par les seuls hommes. Cet animal est très sollicité par la population, à cause de sa symbolique. Il est surtout utilisé pour unir et renforcer les mariages. Son prix sur le marché n'est pas à la portée de toutes les bourses.

Tableau 15 : les destinations symboliques de ces animaux

Noms en fang

Noms pilotes

Noms scientifiques

Parties

Destinations

Mandrill,

Mandrill,

Mandrilus sphinx

L'animal entier

Totem dans la famille Osan Mbot Zam (village Avang)

Essouma,

Pogonias,

Cercopithecus mona nigripes,

L'animal entier

Malformations chez le nouveau né. L'enfant risque de lui ressembler.

Awun

Potto de bosman

Perodicticus potto edwarsi

La main

Renforce

Les mariages.

Miè

Céphalophe du Gabon

Céphalophus leucogaster

L'animal entier

La fragilité chez le nouveau né. L'enfant risque de tombé en marchant comme le fait cet animal.

Source : Nos informateurs, avril, 2007

Les animaux chassés sont destinés à la subsistance. Mais de temps en temps, pour subvenir à certains besoins primaires tels que se soigner, acheter les produits de lavage, envoyer les enfants à l'école etc., les villageois sont parfois emmenés à vendre certaines de leurs prises. Cette vente se fait moins en utilisant des véhicules pour se déplacer qu'en exposant le surplus de leur prise en bordure de route, en espérant qu'un éventuel visiteur ou un passant pourra l'acheter.

Photo 3: Exposition d'un hocheur destiné à la vente, en fang « avem », nom scientifique « cercopithecus nictitans »

Source : CNPN, 2004

Sur cette photographie, nous voyons un animal mis à la vente. Nous apercevons au premier plan, un hocheur sur un fût. A l'arrière plan, on peut apercevoir les bois enfoncés dans le sol. Cette image renseigne sur la destiné du produit de chasse. En effet, comme nous l'avons signalé plus haut, le produit de chasse n'est pas seulement consommable mais aussi commercialisé. Ils se rendent le plus souvent vers les villes de Kango, Ntoum, et Libreville. C'est une activité très rentable. Le prix du gibier varie selon la grosseur et la saveur de l'espèce, voire le statut social de l'acheteur.

Tableau 16 : Les animaux chassés dans la forêt des Monts de Cristal

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Prix (Fcfa)

Esegue

Mandrill

Mandrilus sphinx

20 à 25000

Fima

Pangolin géant

Smutsia gigantea

35 à 80000

Ka

Pangolin nain

Manis tetradactyla

3 à 6000

Mvein

Chat huant

Nandinia binota

2500

N'sin

Genette servaline

Genetta servalina

2500

Ngom

Athérure

Atherurus africanus

4 à 8000

Nguign

Potamochère

Potamochoerus porcus

20 à 60000

Nkuin

Rat palmiste

Cricetomys emini

1500

Opong

Céphalophe bleu

Céphalophus monticola

3500 à 7000

Source: Nos informateurs, avril 2007

Ces animaux sont vendus en entier pour les petits gibiers et par gigot pour les gros gibiers. Ces prix sont acceptés sans trop de difficultés. La majorité de la population de Libreville et ses environs s'alimente de plus en plus en viande de brousse. Ce qui, toutefois, encourage « le braconnage », et par conséquent la disparition de certains animaux. Il est difficile de vendre le gros gibier en entier d'autant plus qu'il coûte cher. Les prix du gibier varie selon le lieu (ville ou village). Le prix du village est plus abordable, alors qu'en ville, le chasseur cherche à récupérer les dépenses qu'il a effectuées pendant le déplacement du gibier.

1.1.3. La pêche

Les Fang font aussi la pêche. Leurs techniques de capture sont adaptées à un type spécifique de cours d'eau et à la population de poissons qu'il abrite. Pour ce faire, ils peuvent choisir parmi un arsenal très diversifié : pêche à la ligne (nyop), à la nasse « mesame » ( pour les femmes), « avwot » ( pour les hommes ) , à l'hameçon (binga). Ces techniques changent avec les saisons (en fonction des hautes et des basses eaux) et concernent des espèces variées (poissons et crustacé). La pêche est une activité mixte. Elle se fait individuellement (à la ligne) et collectivement (au filet, nivrée). Ces activités sont saisonnières. Elles suivent les variations de la pluviométrie. Contrairement à la chasse, l'agriculture, la pêche ne retient pas l'attention d'un grand nombre de personnes.

Entretien 11 : NZE NDONG Christian, 26 ans, ethnie fang, village Akoga, clan Ntun, lignage Elo'o, célibataire, département Como-Kango, canton Mbé, sur les difficultés liées à la pêche. Notre enquête s'est passée le 12 avril 2006, dans son corps de garde. Il était 19h23mn. Notre entretien a duré 40 mn.

Texte en fang

Traduction française

Melu meng'alot, bian bebô mefup, nsome ye minyop. Melu mâ, bia bia dâ fe ke minyop aka achui dâ' adang ndem. Bia bô minyop ngura mbu. Ve mbeba ngueng ane oyone akal achui éne nkot.

Par le passé, on pratiquait l'agriculture, la chasse et la pêche. De nos jours, la pêche est moins pratiquée à cause des multiples inondations auxquelles on fait face. Nous faisons la pêche toute l'année. Mais le meilleur moment est la saison sèche car la marée baisse légèrement.

A travers ce récit, on peut dire que la pêche est moins pratiquée dans la région des Monts de Cristal. Ceci est dû au mauvais état des sites. Pour la plupart, ils sont inondés toute l'année. Ce qui amène les hommes à négliger cette activité au profit de la chasse par exemple etc.

Ces inondations sont provoquées par les barrages de Tchimbélé-Kinguélé alors que l'humidité dure toute l'année. Patrice Christy dit à propos : « Dans l'extrême Nord du paysage, la différence entre la saison sèche et la saison de pluies sont confondues ou semblable » (2003 : 16). La pêche se pratique de façon moyenne toute l'année avec des périodes vastes pendant la grande saison sèche. Les camps de pêche sont rigoureusement attribués. Les hommes font la pêche aux alentours des rivières, surtout à proximité des villages. Comme matériel de pêche, nous avons la nasse (tân), la ligne (nyop), le filet (aya, avwat) qu'on accompagne avec la machette (nkpware), la torche (élame), panier (npwèn), verres de terre (nsong), le manioc cuit (mbo'o) mélangé à l'huile de palme (mbwan melen) et les crevettes (minwas). Ces hommes pêchent la nuit (alu) comme le jour (omos).

Tableau 17 : les espèces halieutiques de la pêche

Noms en fang

Noms commerciaux

Noms scientifiques

Ekone

Tilapia

Sarotherodon

Enguil

Poisson rouge

Lutjanus dentalus

Kara

Crabe de terre

Potamon fluviatile

Fabara

Ablette

Alestes macrophalmus

megnein, agnegna

Silure électrique

Malapterurus electricus

Mvié

Silure marron

Heterbranchis longifilis

Mvong

Machoiron à tache

Caecomastacembelus sclateri

Nd'o

Poisson chat

Claria spp.

Ngoo

Silure noir

Clarias buthupogon

Ntotom

Mormyre

Mormyrops sp.

Nwas

Crevette orange

Cambarellus Patzcuarensis

Mva'a

Sardine

Brycinus kigsleyae

Source : Inspection des pêches et de l'aquaculture de l'Estuaire, juin 2007 (pour les noms scientifiques et les noms commerciales). Les noms en fang sont de nos enquêtes personnelles.

Ce tableau présente les espèces halieutiques que les populations pêchent dans cette région. Ce travail a été fait lors de notre enquête de terrain. La liste n'est pas exhaustive. Ces ressources halieutiques sont prises dans les rivières des Monts de Cristal. Ces poissons sont pris aussi bien de nuit comme de jour par les femmes ou les hommes.

La pêche à la nivrée (miok) est moins pratiquée à cause de l'inondation permanente des espaces de pêche. Les populations pêchent toute sorte de poissons. Mais tous ces poissons ne sont pas consommés, pour des raisons de santé. C'es le cas du poisson courant (megnein). Celui-ci est strictement interdit aux femmes enceintes. Il a un effet secondaire sur l'enfant prêt à venir au monde. Ce poisson est également utilisé dans les traitements de la stérilité féminine. Le poisson est avant tout un produit de consommation. Cependant, le surplus est vendu à des prix plus ou moins acceptables.

Tableau  18 : Les prix des espèces halieutiques au kilogramme

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Prix en FCFA/ quantité

Ngo'o

Silure

Clarias pachynema

1000 (10)

Va'a

Sardine

Brycinus kigsleyae

1000 (10)

Ntotom

Mormyre

Mormyrops sp.

1000 (20)

Enguil

Poisson rouge

Lutjanus dentalus

1000 (10)

Fabara

Ablette

Alestes macrophalmus

1000 (10)

Mvong

Machoiron à tache

Caecomastacembelus sclateri

1000 (10)

Kara

Crabe de terre

Potamon fluviatile

1000 (10)

Bikone

Tilapia

Sarotherodon

1000, 2500, 3000 (5 à 6)

Source : Nos informateurs, avril 2007

Les espèces halieutiques présentées dans ce tableau sont vendues à des prix différents et selon leur valeur et leur taille. Les poissons de grande taille ont leur prix. Ceux de grande valeur en ont les siens. Cependant, on observe une grande différence au niveau du prix du tilapia et des autres espèces. Le prix de ce poisson reflète sa qualité. Ce poisson est beaucoup sollicité sur le marché.

1.1.4. Le sciage de bois

Le sciage du bois est une source d'énergie, une activité très importante. La forêt des Monts de Cristal offre une bonne base et de bonnes possibilités de développement pour une industrie du bois diversifiée. Elle recouvre un vaste champ de bois cotés sur les plans national et international, et qui intéressent les populations actives.

Tableau 19 : Les essences de bois utilisés lors du sciage

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Adzaa

Moabi

Baillonella toxisperma

Anguma

Okoumé

Aucoumea klaineana

Mbé

Padouk

Pterocarpus soyauxii

Édum

Doussié

Afzelia pachyloba

Assia

Ozigo

Dacryodes macrophylla

Oveng

Kervazingo

Guibourtia tessmanii

Ebègne

Ebiara

Berlinia bracteosa

Zam ngila

Acajou

Khaya ivorensis

Etègne

Ilomba

Picnanthus angolensis

Etom

Kosipo

Entandrophragma candollei

Okès

Pau rosa

Swartzia fistuloides

Abam

Longhi

Gambeya lacourtiana

Abang

Iroko

Chlrophora excelsa

Ngong

Niove

Staudtia gabonensis

Aloma

Bilinga

Nauclea diderrichii

Source : Nos informateurs, avril 2007

Cette liste n'est pas exhaustive. Ces arbres sont ceux qui sont généralement utilisés lors de l'exploitation forestière. Leur choix réside au niveau de leur valeur. Certains ont plus de valeur que d'autre. C'est le cas de l'Okoumé. Cet arbre est le plus utilisé non seulement parce qu'on le retrouve facilement dans les forêts Gabonaise, mais aussi parce qu'il est facilement transportable. Ce qui n'est pas le cas avec les autres essences qualifiées « bois durs ». Le sciage respecte les valeurs de la société fang, de ce fait, elle ne prend pas en compte tous les arbres. Il y a des arbres qui ne peuvent pas être scier à cause de leur symbolique, nombreux interviennent dans la thérapie des villageois.

Tableau 20: Les arbres épargnés dans le sciage et leurs destinations symboliques

Noms en fang

Noms en français

Noms scientifiques

Destinations symboliques

Afiè

Avocatier

Persea americano

Cet arbre mélangé au manguier moderne (Mangifera indica), soigne les maux de dents. Le principe consiste à faire bouillir leurs écorces et faire des bains de bouche.

Atom

Atom

Dacryodes macrophylla

Cet arbre soigne l'empoisonnement. Le principe consiste à prendre les écorce de cet arbre et les mettre dans de l'eau. Il revient alors au patien de boire cette eau. On peut également bouillir ces écorces et faire des purges.

Ekuk

Emien

Alstonia spp

Après que ces écorces soient bouillies, son jus soigne le paludisme, le mal de ventre. Le traitement se fait par voie orale.

Mebamne

Mebamené

Parinari chrysophylla

Cet arbre comme son nom l'indique, est doté d'une puissance efficace. Mélangé à l'oeuf du tonnerre, Il renforce les unions. Il permet également aux hommes de multiplier leurs chances. Grâce à ce dernier, un individu peut se procurer certaines choses. Le patient fait des bains au moins pendant une semaine, le meilleurs moment c'est lorsqu'il y'a du soleil. Le malade doit toujours regarder le soleil et faire ses voeux. Cet arbre mélangé à d'autres éléments soigne la drépanosithose.

Aseng

Parasolier

Musanga cecropioides

Les écorces bouillies, ce jus est préconisé dans le traitement des vers. On peut également mettre les écorces de cet arbre dans de l'eau et faire boire au patient. Cette potion soigne la toux.

Asas

Atangatier

Dacryodes edulis

Lorsqu'on mélange ses feuilles à celles de la papaye, il est considéré comme un anti-paludisme. Il évite au paludisme de se développer.

Source : Nos informateurs, avril 2007

Cette liste n'est pas complète, il existe d'autres arbres qui ont évidemment une efficacité symbolique. Les arbres qui figurent dans ce tableau interviennent dans la médecine traditionnelle et celle des villages environnant le Parc en particulier. Cela évite aux populations de se rendre régulièrement dans les centres hospitaliers les plus proches. L'efficacité symbolique de ces arbres émane des populations elles même, d'autant plus qu'elles leur accorde une importance et cela depuis de générations. Par ailleurs, il nous convient alors de dire que les populations riveraines au Parc ont non seulement un attachement alimentaire mais aussi symbolique avec leur forêt.

Le sciage de bois consiste à abattre et à débiter les arbres en lattes et en chevrons destinés à la vente, à la construction des maisons. Il présente de nombreuses autres possibilités : la fabrication des tabourets, de chaises, de pilons et mortiers, des masques, statuettes, tam-tam et autres objets décoratifs. C'est une activité dont le rôle économique, voire social, est loin d'être négligeable.

Tableau 21 : Prix des planches sur le marché de la région des Monts de Cristal

Entités

Prix du m3 des planches ordinaire en FCFA

Prix du m3 des planches coffrages en FCFA

Prix du m3 des planches de ferme en FCAF

Okoumé

85.000 (soit 84 planches)

80.000 (soit 84 planches)

90.000 (soit 74 planches)

Bois dur (kévazingo, moabi, bilinga, padouk, pau rosa, acajou, ilomba, kosipo, etc.)

130.000 (soit 84 planches)

150.000 (soit 84 planches)

130.000 (soit 74 planches)

Source : Nos informateurs, avril 2007

Ce tableau confirme en effet que le sciage est une activité rentable. Apres l'activité, les scieurs vendent les planches, chevrons et lattes à leurs clients. La vente se fait sur place et par m3. Les scieurs font habituellement la vente en gros, la vente en détail revient à cet effet à leurs clients qui, vont revendre ce produit dans leurs quincailleries. Le prix du m3 de planches, chevrons, lattes varie selon qu'il s'agisse de l'okoumé ou du bois dur. Les dimensions des planches, chevrons, lattes vont de 2 à 6m de long. La vente en détail tient compte de ces dimensions.

Le sciage est une activité masculine qui exige d'énormes efforts physiques. Il se fait en forêt. Il peut également se pratiquer dans les champs. Lors de la période du débroussage ou de l'abattage, les hommes épargnent les arbres dont le diamètre peut interresser les acheteurs. Ce diamètre oscille entre 60 à 80 cm. Le sciage est fait par des autochtones ou par des étrangers qui travaillent dans les sociétés SEEF (Société Equatoriale d'Exploitation Forestière), NGB (Négoce des Bois du Gabon), BSG (bois et scieries du Gabon), etc. Cette activité se fait avec ou sans autorisation de l'administration forestière. L'extraction clandestine du bois se fait sous couverture d'une autorisation du chef coutumier. C'est une activité à l'aval d'une filière importante d'où plusieurs familles de la région tirent des revenus.

Entretien 12 : OBIANG ESSONO Edouard, 30 ans, ethnie fang , village Song, clan Oyèk, lignage, Envone Zome, célibataire, département Como-Kango, canton Mbé, sur l'heure du sciage. Notre enquête s'est passée le 3 avril 2006, dans sa salle à manger. Il était 15h10mn. Notre entretien a duré 57 mn.

Noms en fang

Traduction française

Nsigane bile ôbele ngueng. Bia bôde ésama. Esenté éne abé akal élé éne bi ku ayo. Ewas éne dzugu mbot. Bia sum ésenté ékuna mewola zambwa ye kire bi keki mane mewola zambwa me samane me y'alu.

Le sciage n'a pas de saison. On le fait en groupe. Pendant cette activité, on court des risques. Un arbre peut tomber sur nous, la scie peut faire mal à quelqu'un. Le sciage se fait très tôt le matin. On commence le travail vers 7h du matin et on arrête vers 18h.

Nous retenons de ce récit que le sciage de bois se fait en toute saisons. Il se fait toute l'année. C'est une activité masculine très pénible. Il renferme beaucoup de risques. Il se fait très tôt le matin parce que, à pareille heure, les hommes sont encore très valides. Comme outils, ils se servent de la tronçonneuse, de la scie, d'un ruban, d'un réglet, du pied à coulisse, du compas, du papier abrasif silex, des ciseaux à bois, des bédanes, des rabots, du bauchoir, de l'huile d'ébrasions et du vernis. Ici, les outils rustiques ont cédé la place aux outils modernes. Ces derniers permettent de quantifier et de qualifier la production tout en gagnant du temps.

Chaque outil joue un rôle bien déterminé dans la coupe du bois. Les produits issus du sciage sont transportés par vagues successives au village où ils sont déposés au bord de la route, jusqu'à ce que le tout soit stocké et conduit en ville, où ils sont vendus. Cette opération a l'avantage d'être plus rapide et moins pénible.

1.1.5. La cueillette

La cueillette bien qu'étant une activité secondaire, la société fang a découvert et utilise d'innombrables espèces de plantes aux feuilles comestibles. Les feuilles enrichissent le régime alimentaire, réduisant ainsi diverses carences. Elles jouent un rôle dans le bien-être des populations et fournissent à l'unité familiale un complément nutritionnel, un ensemble de plantes médicinales d'usage courant, et l'essentiel des matériaux nécessaires à l'habitat. Elles procurent également un appoint alimentaire non négligeable. C'est une activité mixte. Elle est exercée par les hommes, les femmes et les enfants. Les hommes ne sont pas très contraints dans cette activité. Ils sont surtout sollicités lorsqu'il faut grimper sur un arbre. Cette activité s'exerce pendant la saison sèche et la petite saison de pluies.

Entretien 13 : MBANG NDONG Adélaïde, 70 ans, ethnie fang, village Andok-Foula, clan Opoé, lignage Avomo Mam , célibataire, département Como-Kango, canton Mbé, sur la période de cueillette. Notre enquête s'est passée le 8 avril 2006, à sa terrasse. Il était 11h05mn. L'entretien a duré 55 mn.

Texte en fang

Traduction française

melos ma boban mimbou mise. wa boba oyone ye mone mbou veng, dzamete ene ye oyaya. bia vile alos, ofumi, bignoum mbou veng. niene gueng ete elora, bisefe me bera deng. bia dzi minkong ye vio'o oyone. melos me vo'o mengueng mezeng, ane andock fang.

La cueillette se fait chaque année. Elle se fait pendant la grande saison sèche et la petite saison de pluies, ça dépend des fruits, et autres. On suce les mandarines, les oranges, pamplemousse. On suce les fruits pendant la petite saison de pluies. Après cette période, on ne peut plus les retrouver. Les chenilles et les champignons sont consommés pendant la grande saison sèche. Les autres fruits sont consommés par épisode, c'est le cas du manguier sauvage.

Ce récit nous amène à dire que dans la région des Monts de Cristal, les produits de cueillette varient selon les saisons. Les fruits sont généralement consommés en petite saison sèche, les végétaux et le manguier sauvage, pendant la grande saison sèche. Cette rotation est respectée chaque année. Cependant certains arbres fruitiers ne produisent pas chaque année, c'est le cas du manguier sauvage. La cueillette se fait au village et en forêt. Les plantes sont misent en valeur dans les jardins des cases et dans les plantations.

La cueillette se fait à la grimpée, au jet de pierres, par l'abattage des branches d'arbres et avec un crochet. Dans cette région, il existe une profusion de fruits et de plantes qui offrent d'énormes possibilités locales de développement commercial. Ces fruits sont très riches en vitamines. Ce sont des compléments aux autres aliments. Ces derniers sont utilisés dans maintes préparations et recettes. Ils sont très appréciés par la population et sont considérés comme des friandises agréables.

Tableau 22 : Les produits de la cueillette

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Alos

Mandarinier

Citrus reticulata

Ofumi

Oranger

Maclura aurantiaca

Bignoum

Pamplemoussier

Citrus maxima

Abé'é

Cola

Cola spp

Nguélébam

Citronnier

Citrus limon

Ewome

Noisetier

Coula

Atom

Le fruit du dabéma

Dabéma

Abam

Longui

Longui

Adzap

Moabi

Baillonnella tosisperma

Amvout

Trichoscypha

Trichoscypha spp

Afiè

Avocatier

Persea américana

Fuvo'o

Papayer

Carica papaya

Ebom

Corossolier

Anonidium mannii

Vio'o

Champignons

Hebeloma sinapizons

Andok

Andok

Irvingia gabonensis

Source : Ministère des eaux et forêts pour les noms scientifiques, mai 2007 et nos informateurs pour les noms en

fang avril 2007.

Ce tableau présente certaines des espèces de plantes et les fruits consommés par la population fang. Cette dernière connaît certaines de ces plantes depuis des siècles et leurs connaissances sont transmises de génération en génération. Ces plantes et fruits ne sont pas la propriété d'un individu. On peut cependant les trouver plantées dans des vergers privés. On peut également les trouver dans des terres communautaires. Dans ce cas de figure, ils appartiennent à tout le monde. Il existe une multitude de champignons parmi lesquels vio'o akok (Lactarius sp), vio'o bab (Amanite loosu), vio'o étok (Auricularia auricula), vio'o mbone (Lycoperdon) , vio'o bisesa (Agaricus arwensis), vio'o nkom (favalus). Toutes ces espèces sont très appréciées par les populations et les utilisent dans des préparations différentes. Ces fruits et plantes alimentent quelque peu le circuit monétaire dans la mesure où, ils sont commercialisés. La vente se fait dans les villages et centres urbains les plus proches.

Tableau 23 : Prix du produit de la cueillette sur le marché

Noms en fang

Noms communs

Noms scientifiques

Prix en FCFA/ quantité

Alos

Mandarinier

Citrus reticulata

25 (1)

Ofumi

Oranger

Maclura aurantiaca

50 (1)

Bignoum

Pamplemoussier

Citrus maxima

100 (1)

Abé'é

Cola

Cola spp

1 (25)

Nguélébam

Citronnier

Citrus limon

100 (5)

Ewome

Noisetier

Coula

100 (10)

Atom

Le fruit du dabéma

Dabéma

100 (15)

Abam

Longui

Longui

25 (1)

Adzap

Moabi

Baillonnella tosisperma

25 (1)

Am vout

Trichoscypha

Trichoscypha spp

100 (10)

Afiè

Avocatier

Persea américana

100 (1)

Fuvo'o

Papayer

Carica papaya

200 (1)

Ebom

Corossolier

Anonidium mannii

300 (1)

Vio'o

Champignons

Agaricus bisporus

100 (le tas)

Source : Ministère des eaux et forêts pour les noms scientifiques, mai 2007 et nos enquêtes personnelles pour

les noms en fang, avril 2007.

Ce tableau présente les prix du produit de la cueillette dans les villages et les centres commerciaux les plus proches de la région des Monts de Cristal. Ce produit n'est pas seulement destiné à l'alimentation, les hommes et les femmes vendent le surplus pour résoudre les problèmes d'ordre hygiénique, sanitaire etc. Ces prix sont appréciés de tous.

1.1.6 L'exploitation minière artisanale

L'exploitation minière existe dans toutes les régions du Gabon. La population riveraine au Parc National des Monts de Cristal n'est pas restée à l'écart. Les orpailleurs sont pour la plupart des clandestins, étrangers ou des gabonais d'autres régions du pays, qui se sont installés dans la région pour pratiquer cette activité. Ces derniers sont encadrés et exploités par des patrons orpailleurs. L'orpaillage peut se définir comme l'exploitation artisanale des alluvions aurifères ou, la recherche de l'or dans les rivières. C'est une activité mixte. Elle intéresse à la fois les hommes et les femmes. Elle se fait en groupe et demande beaucoup d'efforts physiques. C'est une activité nocturne. Les orpailleurs préfèrent la nuit parce qu'ils craignent se faire arrêtés par les autorités. Généralement, ils n'ont pas de permis d'exploitation, pour la plupart. L'orpaillage est très complexe. Il ne suffit pas d'aller dans une rivière, creuser au hasard et orpailler. D'après nos informateurs, le principe consiste d'abord à prospecter les lieux. Cela est nécessaire, parce que l'or ne se trouve pas dans tous les coins d'une forêt. Ce gravier se trouve en concentration à quelques endroits seulement, qui dépendent du courant de la rivière au moment des crues.

Habituellement, les prospections se font dans les petites anses et ils sont certains d'en trouver dans les endroits où les graviers contiennent des galets de minerais de fer. Lorsqu'ils trouvent le filon, ils sont convaincus de récolter une dizaine de paillettes en moyenne par batée. Cette étape demande plusieurs heures de travail. L'or se trouve aussi bien au fond du cours d'eau que sur les berges en hauteur. Les paillettes d'or ne se déplacent qu'en cas de fortes crues. Donc, elles se déposent souvent sur un niveau supérieur de l'eau en période normale (saison de pluies). Mais le moment propice relatif à cette activité, c'est la saison sèche.

Entretien 14 : MBE ELLA Michel, 46 ans, ethnie fang, village Nkann, clan Efak, lignage Mbela, veuf, département haut-como, canton Mbé, sur les étapes de l'orpaillage. Notre enquête s'est passée le 13 avril 2007 à 17h, dans son corps de garde. Notre entretien a duré 45 mn. Malgré son état de santé, il a accepté de nous recevoir.

Texte en fang

Traduction française

anto mimbu miben ya zambwa ave mesuma sen or. menga suma bo esente a tchimbele, mezene nkann. esen or ene ededa ndsuk. ebele mebong.wa yiene taredzeng l'or, eyongte odzeng evom wa fak. bia bo esente ngura wola. n iene abongte da mane, bi kule ne or asiete, bia, bi mane sop, bi kelegne adza'a, evom bia somanegne ye kegnenie ngomane abale avale bieme bite.

Je travail l'or depuis 27 ans. J'ai commencé à Tchimbélé. Après là-bas, je suis venu à Nkann. Le travail de l'or est très complexe. Il obéit à des étapes. Il consiste d'abord à un sondage. Le sondage nous permet de savoir si le site choisi a de l'or. Il se fait pendant une heure. Après le sondage, vient la sortie du trou, lorsque le site est bon. Et on le nettoie. A la suite du nettoyage, on l'amène au village, où il est vendu et déposé également au Ministère des mines.

D'après ce récit, le travail de l'or est très pénible et incertain. Il demande une certaine force physique et beaucoup de patience, d'autant plus qu'on n'est jamais sûr de trouver l'or lors de la première tentative. Cependant, il est bénéfique lorsque le site est productif.

Comme outils, ils se servent d'une batée, d'un seau, d'un « sluide »4(*) et d'une pelle. La pelle sert à écarter les cailloux. Le seau contient le sable lavé. La batée permet de séparer les paillettes d'or du sable. Elle sert aussi à analyser la teneur en or du gravier et à extraire l'or déconcentré obtenu à partir des moquettes posés sur une rampe de lavage ou dans une sablière. Les compétitions de lavage d'or ont lieu dans la dextérité du maniement de cette batée. Seul restent au fond les éléments lourds : le fer, la magnétique et les éventuelles paillettes d'or. Ce tri des paillettes se fait manuellement disaient nos informateurs. Tout ce matériel est fondamental à cette activité. Ils ont pour rôle de piéger seulement les paillettes, en laissant s'échapper le sable et le gravier chassés par l'énergie hydraulique.

L'orpaillage vise un but commercial. Après cette étape, l'or est vendu clandestinement bien que cela soit interdit par le Ministère des Mines. Les marchants ambulants sillonnent les rivières et les villages pour acheter aux ramasseurs leur recette journalière. Ce produit est également vendu clandestinement auprès des bijoutiers des villes de Kango, Ntoum, et Libreville. Le prix du gramme est discutable sur place. Habituellement, le prix moyen est 5000 F, le gramme. En ville, les orpailleurs vont déposer la production au Ministère des Mines. Ce cas de figure concerne surtout les orpailleurs qui ont un permis minier et les sociétés d'exploitation minière, d'autant plus qu'ils font cette activité d'une manière légale. Il revient à ce Ministère de fixer le prix du gramme de l'or. Ce prix est évalué à 7000 francs cfa. En effet, la commercialisation de l'or permet aux orpailleurs de satisfaire leurs besoins et d'améliorer leurs conditions de vie. Sur le plan national, il favorise le développement de l'économie.

1.1.7. L'artisanat et la vannerie

La vie de l'homme en zone rurale est étroitement liée à celle de la plante. Celle-ci lui procure : alimentation, habillement, parures, remèdes, armes, outils, mobiliers et ustensiles. De tous les végétaux, l'arbre représente la plante par excellence. Son bois est pour ainsi dire la matière première universelle des arts et métiers, des paysans. On comprend pourquoi dans l'artisanat et la vannerie (ololong), l'usage du bois occupe une place privilégiée. Pour les essenc es, ces derniers utilisent non seulement le bois de menuiserie, charpente, mais aussi des espèces négligées par les grandes exploitations. L'artisanat et la vannerie sont des activités masculines. Elles demandent beaucoup d'énergie. Elles se font au village, précisément au corps de garde, dans les cuisines et dans la cour.

L'outillage de la sculpture est très simple : hache (ovone). La hache sert à grossir le bois. En dehors de cet instrument, ils se servent aussi de l'herminette, du grattoir, de la lame de fer. Pour le ponçage du bois, ils se servent des feuilles à râper, le couteau. Pour traiter le bois sculpté, ils utilisent le vernis. La matière première est tirée directement de la forêt. Les plantes utilisées sont presque toujours sauvages.

- L'ébène (Diospyros spp) est l'un des matériaux privilégiés de la sculpture. Il englobe une gamme d'espèces répandues dont la caractéristique commune est que le bois est dur, avec un aubier blanc et le coeur brun foncé qui devient de plus en plus noir au fur et à mesure que l'arbre devient plus sec.

- L'émien (Alstonia spp) est un arbre dont l'écorce et la sève donnent une espèce de quinine. Son bois, blanc et léger, est excellent pour la sculpture. Les autres espèces les plus employées sont pratiquement les mêmes que l'on retrouve dans la grande industrie du bois. Tous les bois de la forêt ne sont pas utilisés dans la sculpture.

- Le bambou raphia dont les feuilles servent pour la toiture est également utilisé.

- Le rotin n'est pas en reste. Il fournit le fil. Ce dernier donne une écorce aussi bien que faible. Les paysans l'appellent nlong, communément désigné sous le nom de liane. Le produit de la vannerie et de l'artisanat est très diversifié. Ils fournissent une grande partie du mobilier traditionnel.

Tableau 24 : Les objets de l'artisanat et de la vannerie

Noms en fang

Noms en français

Nkwè

Panier

Mbek

Mortier

Ntsum

Pilon

Akan

Fumoir

Etan

Fumoir

Dzat

Corbeille

Source : Nos informateurs, avril 2007

Ce tableau présente les objets issus de l'artisanat et de la vannerie. Cette liste n'est pas complète. Nous nous sommes limitée à ces derniers pour illustrer le savoir-faire des villageois. Ces derniers sont spécialistes dans l'activité artistique. Le produit de l'artisanat et de la vannerie est commercialisé. Les vanniers et les artisans exposent leurs produits en bordure des routes, dans leurs villages. Ceci, dans le but de résoudre leurs déficits, l'achat du pétrole, du savon, allumette, etc.

Entretien 15 : NNANG Nfan Louis Mari , 56 ans, ethnie fang, village Akoga, clan Ntun, lignage Elo'o, marié, père d'une grande famille, département haut-como, canton Mbé, sur le but de la vannerie et de l'artisanat. Notre enquête s'est passée le 1 avril 2007, dans son village natal. Cet entretien a eu lieu dans salon. Il était 9h00mn. Notre entretien a duré 43 mn.

Texte en fang

Traduction française

ma long mipeun ba lerane wo mbong. ma long fe bitô, mintum ye bidong. dzoma sese ébele étang dzen. ma bôki tang abé akal ma somane adza'a été. bot ba sô medza'a mene enfefeng ne bâ ze some. ngueng zine, ébot bâ lot be ba some fe me biéme. bot ba gnegue metang mame.

Je fabrique les paniers qui servent à transporter le manioc. Mais également des tabourets, des pilons et des mortiers. Le prix varie selon l'article. Généralement je ne vends pas cher, parce que je vends au village. Les gens viennent des villages voisins pour acheter. Il arrive aussi que les voyageurs achètent mon produit. Il est très apprécié sur le marché.

Ce récit nous fait savoir que le vannier ou l'artisan produit plusieurs objets. Ces objets sont à la portée de toutes les bourses. Le fabricant ne cherche pas à trop gagner. Ce qui l'importe, c'est faire valoir ses capacités artistiques.

1-2 Forêt protectrice

Au-delà de sa valeur nutritionnelle, la forêt des Monts de Cristal revêt aussi une valeur symbolique et religieuse. C'est une source importante de l'imaginaire. Elle est le milieu phénoménal ambiant où les populations locales puisent des signifiants et des signifiés, lisent des signes. Elle reflète une vision faite d'ordre, d'harmonie et de rythmes. D'après les autochtones, cette forêt est un endroit vénéré et réservé à l'expression de leur culture. Elle se situe toujours au centre de la vie culturelle et sociale.

Entretien 16 : Ndong Mbang Mathurin, 59 ans, ethnie fang, village Mbé-Akélayong, clan Ntun, lignage Membe, marié, département Haut-Como, canton Mbé, sur la forêt protectrice. Notre enquête s'est passée le 6 avril 2007, dans son village natal. Cet entretien a eu lieu dans sa boutique. Il était 14h40mn. Notre entretien a duré 55 mn.

Texte en fang

Traduction française

afan ene bia abuin eban. biansese afa ete. embe de dzo'o bia ngue bot ane lete ngue se lete eyong akwane. bian ke bobo mebiang afan ete akal na bong beta'a yene mekeng. engueng bia bobo bisen bite, bimbe bi kobe ye biere. afan ene abum da'a da'a bale bia. afan da'a vole bia abuin, da'a ve fe bia mebiang.

La forêt est très importante pour nous. On soignait les malades en forêt, elle nous disait s'il était possible de le soigner ou pas. On faisait des rites initiatiques dans la forêt parce qu'on ne voulait pas que les jeunes et les non initiés voient. Pendant des cérémonies initiatiques, on faisait des prières qui s'adressaient au Biéri. la forêt est un ventre pour nous. Elle nous protège. La forêt nous sert beaucoup. elle nous produit des médicaments.

Ce récit ressort le caractère protecteur de la forêt. La forêt a toujour été une protection pour ces Hommes. Elle a toujours été une mère pour eux. Bien qu'ils soient dépossédés de leurs rites aujourd'hui, la forêt a été et reste un encadreur pour ces dernières. Les populations ont toujours su garder leurs relations avec la forêt et les ont transmises de génération en génération.

De nombreux tabous et normes contribuent à son respect. C'est un lieu de sépulture de leurs ancêtres. Ces derniers ajoutent que : «  leurs forêts abritent des esprits des ancêtres et les dieux protecteurs du village, à qui des cultes traditionnels sont régulièrement adressés ». la forêt est aussi le siège du tribunal coutumier, le lieu des rites initiatiques, des sociétés secrètes, d'intronisation et d'inhumation des chefs traditionnels. C'est le moyen de communication des villageois avec l'au-delà, c'est à dire les ancêtres, lesquels constituent le lien qui permet de rentrer en contact avec les éléments de la nature, donnant ainsi un sens à leur existence. C'est une base spirituelle. Cette population a développé des techniques qu'elle inculque aux enfants depuis l'âge de 6 ans. On lui apprend les noms des plantes et des arbres. Il saisit alors l'importance de la forêt. La prise de conscience de ce fait est renforcée à travers les rites initiatiques. La connaissance de la forêt implique l'apprentissage du courage, de l'endurance, de manière à ce que l'individu soit apte à éviter les pièges tendus par la nature au cours de ces pérégrinations dans les bois.

Cet apprentissage se fait par l'administration villageoise. D'après Bouroubou Bourobou Henri-Paul : « Ce sont les milieux dont les mythes font appel aux génies de la nature ou encore, ce sont les sanctuaires des dieux et des ancêtres qui ont été établis par les populations. Leur accès demeurant le plus souvent interdit » (1998 : 185). Cette forêt n'est pas à la portée de tous. Ces milieux sont fermés. Ils appartiennent seulement à leur communauté. Ces écosystèmes sont des résidences d'agents spirituels. Ils servent à préserver des espèces individuelles des plantes et d'animaux. Ils sont également des rappels utiles et visibles aux populations de la précieuse valeur de la flore et de la faune locale.

Ces écosystèmes sont également des synonymes de fontaines grâce aux sources d'eaux qui sont souvent présentées dans ces milieux. Habituellement, elle est gérée par un chef de clan qui dicte la conduite à tenir. Elle est gérée selon les règles régies par leur tradition. Le respect des interdits et des lois se fonde sur la crainte de la colère des dieux véhiculée à travers les mythes. D'après cette population, ce sont les dieux qui se chargent des punitions. Dans la forêt, il y a des arbres et des animaux sacrés. Il est tabou de les chasser d'autant plus que certains sont considérés comme totems. La personne qui venait en freindre à ces principes se livre à des sanctions.

1.3. L'impact des activités traditionnelles dans la forêt des Monts de Cristal

Les sols et les forêts ont une mémoire. Ils se remettent difficilement des agressions que l'homme leur inflige. Une bonne prévention vise à éviter les dégâts dus à la déforestation et à l'érosion. A ce propos, le chef de la section Sol et Biologie générale de l'Office Fédéral de l'environnement des forêts et du paysage de Suisse (2002) cité dans Wikipédia, dira que : « Il faut des millénaires à la nature pour former un sol fertile, quelques temps peuvent suffire à le détruire ». Les sols, les forêts, les rivières ayant subi de graves atteintes mettent souvent des décennies à s'en remettre.

Le labour en lui même n'est pas destructif, c'est la technique utilisée par les hommes qui est destructive. L'agriculture peut détruire les espèces pérennes, même si celles-ci disposent de racines profondes. Mais pour ce qui concerne l'agriculture traditionnelle, elle ne détruit pas d'autant plus qu'elle ne dessouche pas. Ce qui peut aggraver la situation, c'est lorsque que l'exploitation ne se limite pas à labourer pour répondre à des besoins en culture vivrière mais, intensifie la pratique des cultures en vue d'une rentabilité immédiate. Un autre aspect est que, compte tenu de la baisse du rendement, les hommes vont toujours rechercher des sols fertiles assurant un profit permanent, au détriment de l'équilibre environnemental. Aussi, la tendance des exploitants agricoles à laisser les terres à faible rendement expose celles-ci à « l'érosion »5(*) provoquée par les eaux de pluies et le vent, entraînant aussi une désertification accrue du milieu lorsque le temps de jachère n'est pas respecté.

Le sciage de bois, l'artisanat et la vannerie sont très dangereux pour la forêt. Ces derniers détruisent le couvert forestier et réduisent ainsi, l'effet de serre.

Photo 4: Un site en pleine exploitation forestière

Source : CNPN, 2004.

Cette image présente un site après exploitation forestière. Derrière, on aperçoit deux voitures, deux hommes qui sont en pleine discussion et des troncs d'arbres et plus près, nous avons un engin. Cette image prouve en effet que la forêt des Monts de Cristal n'est pas seulement exploitée pas les villageois mais aussi par les sociétés forestières (l'Etat). Les marqueurs écologiques sont très destructifs et on des retombées négatives sur l'espèce humaine, la flore et la faune. Les scieurs et les artisans détruisent les arbustes. Le gibier qui se faisait prendre facilement s'éloigne, devenant méfiant. On observe également la perturbation des rythmes des pratiques traditionnelles ayant un lien étroit avec la forêt primaire. La cueillette n'est pas destructive en elle-même, ce sont les techniques utilisées qui causent des dommages à la forêt. C'est le cas de la coupe des branches et du jet des pierres, du bois. Ces techniques consistent à détruire l'arbre, à faire tomber des fruits qui ne sont pas encore murs et à déposséder l'arbre de ses feuilles.

Il existe plusieurs catégories de nuisances liées à l'activité aurifère en milieux forestiers, quant elles sont faites sans application de la réglementation. Les impacts de cette activité sont classés par leur importance sur le milieu naturel et sur les hommes. Premièrement, après l'activité, les criques et les fleuves sont saturés par les rejets de boue, ce qui entraîne la souffrance de la flore aquatique et son dépérissement. Les poissons ont les branchies colmatées, et un goût impropre à la consommation. En dehors de ça, la recherche aurifère consiste à creuser les surfaces sur plusieurs mètres en profondeur, et à laisser les sites sans réaménagement.

Photo 5: Un site après l'exploitation minière

Source : CNPN, 2004

A l'arrière plan de cette image, on aperçoit les arbustes, plus près, nous avons un sol nu, dépouillé de sa végétation. Cette image montre dans quel état reste la forêt après l'exploitation minière. L'exploitation minière est très destructive en ce sens qu'elle laisse la forêt à un stade dégradé. Pour sa régénération, il faut un temps considérable.

La chasse constitue le mode de gestion raisonnée et durable par excellence, alors qu'elle permet non seulement la conservation du biotope, du gibier et de la faune en général, mais également l'exploitation de la ressource qu'est le gibier. Cependant le braconnage constitue une menace fondamentale pour la faune des Monts de Cristal. Les hommes font la chasse quantitative pour un but monétaire. Ce qui entraîne toutefois la disparition de certaines espèces, c'est le cas des « Athérures » par exemple.

Photo 6 : Trois porcs-épics pris par braconnage

Source : CNPN, 2004

Sur cette image, nous voyons trois porcs-épics dans une cache des « braconniers ». A droite, nous avons un sac de couleur blanche dans lequel les « braconniers » emballent leur butin. Cette photo est une preuve d'un braconnage important dans la région des Monts de Cristal. Le braconnage est une menace fondamentale dans ce massif forestier. Les hommes viennent des régions les plus proches pour faire la chasse irrationnelle.

La pèche également n'est pas très destructive. Ceci s'explique par la diversité de ces techniques. Seule la technique à la nasse qui est destructive. Car, elle consiste à attraper plusieurs poissons de petite taille. Ce qui toutefois interrompt leur croissance et cela entraîne la destruction de l'écosystème marin.

* 3 Animal ou végétal considéré comme l'ancêtre et le protecteur d'un clan.

* 4 Canal en bois ou en métal, dans lequel, les orpailleurs écoulent les alluvions avec un courant d'eau. C'est un outil qui aspire les alluvions dans le fleuve ou dans les rivières et les déversent sur une rampe de lavage posée sur un radeau.

* 5 Déplacement des composants du sol à la surface de la terre, sous l'action de l'eau ou de l'air en mouvement.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand