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Contre histoire de la philosophie / le laboratoire de la philosophie vivante chez Michel Onfray

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par Rania Kassir
Universite Libanaise - DEA 2008
  

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Chapitre I : L'Elysée : philosophie ou religion ?

A. Les deux attitudes de l'Elysée :

En ce qui concerne l'Elysée, Michel Onfray se rend compte que la République française contemporaine oscille entre l'application de la loi de 1905 en privé et l'exigence proclamée (officiellement et publiquement) des valeurs chrétiennes.

Pour ce qui est de la loi de 1905, celle-ci est la séparation de l'Etat et de l'Eglise. A ce titre, la République française contemporaine fait preuve de tolérance et applique le premier article de la loi de 1905 selon lequel : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes (...) »487(*). On y respecte alors la liberté d'autrui en matière d'opinions : le bouddhisme, le judaïsme, l'islam, l'animisme, le polythéisme, le christianisme, l'agnosticisme, le shintoïsme et l'athéisme.488(*) Chacun peut penser à sa guise pourvu qu'il n'affiche publiquement son point de vue. Avec l'application de cette loi, ajoutait Onfray, la religion est traitée au même pied d'égalité avec la philosophie (athéisme)489(*).

Néanmoins, cette égalité entre la religion et la raison cède le pas dans le deuxième volet au primat de la religion, particulièrement chrétienne, sur la philosophie. Cette laïcité veut donner l'impression qu'elle est tolérante puisque dehors, dans le registre de la vie publique, c'est le judéo-christianisme qui régit les diverses branches de la société.490(*) Ceci est nettement visible dans l'entretien qu'a eu lieu entre Nicolas Sarkozy et Michel Onfray.491(*)

Dans ce dialogue, le politique ne s'empêche de soumettre à un examen critique la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Il voulait réhabiliter la question religieuse longtemps mésestimée en France. A ce propos, il trouve que la République ne peut se passer de la religion, car celle-ci peut organiser seulement la vie en société mais elle est inapte à donner un sens à la vie, cette question essentielle relève de la responsabilité de la religion. Sarkozy confie à son interlocuteur qu'il croit, qu'il espère et qu'il va à la messe parce que la religion le rassure et le tranquillise. La dépendance de Nicolas Sarkozy à l'égard du religieux est éminemment manifeste dans la réponse donnée à son interlocuteur (Onfray) qui vient lui poser : « Vous ne raccrochez pas les wagons entre les situations criminogènes et les criminels, entre les situations sociales pathogènes et les comportements délinquants ? »492(*). A ce sujet, Sarkozy ne fait que démarquer les premières lignes de la Genèse et le point de vue de l'Eglise catholique, apostolique et romaine. Il trouve que l'homme est libre et qu'il peut lui-même, indépendamment de la société, choisir le vice. Cet homme mérite d'être puni et envoyer passer des années en prison. En ce sens, Sarkozy écrit : « je me suis rendu récemment à la prison pour femmes de Rennes. J'ai demandé à rencontrer une détenue [parce qu'elle a tué son mari]. Cette femme me paraît tout à fait normale. » Normale donc responsable.

Ce mariage d'amour entre la « République » de Sarkozy et l'Eglise catholique nous le trouvons encore plus accentué dans le discours du Latran493(*). Voici quelques extraits de ce discours : « J'assume pleinement le passé de la France et ce lien particulier qui a si longtemps uni notre nation à l'Eglise. » . « Les racines de la France sont essentiellement chrétienne. ». « Le christianisme a beaucoup compté pour la France et la France beaucoup compté pour le christianisme. ». « La laïcité est également un fait incontournable dans notre pays. Je sais les souffrances que sa mise en oeuvre a provoquées en France chez les catholiques, chez les prêtres (...). C'est surtout par leur (...) partage des souffrances de leurs concitoyens, que les prêtres et les religieux de France ont désarmé l'anticléricalisme, et c'est leur intelligence commune qui a permis à la France et au Saint-Siège de dépasser leurs querelles et de rétablir leurs relations. ». « La laïcité n'a pas le pouvoir de couper la France de ses racines chrétienne. Elle a tentée de le faire. Elle n'aurait pas dû. Comme Benoît XVI, je considère qu'une nation qui ignore l'héritage éthique, spirituel, religieux de son histoire commet un crime contre sa culture. ». « Dans la transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur, même s'il est important qu'ils s'en rapproche, parce qu'il lui manque toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d'un engagement porté par l'espérance. »

Sans extraire et analyser certaines citations de ce discours, Michel Onfray se contente d'énoncer cette idée : « Si Barbare il y a, on ne le trouvera pas chez Bartabas, mais chez un président de la République flanqué de l'inventeur du `lâcher de salopes' au Vatican. »494(*)

Dans cette deuxième étape, les déclarations de Sarkozy ont toutes montré que cet homme de droite essaye de tailler un Etat à la mesure des principes chrétiens.

Nous voilà en présence des deux attitudes de l'Elysée : la philosophie est ou posée à un même niveau de la religion ou supplantée par cette dernière. Dans les deux cas, le rôle de la philosophie (athéisme) en est réduit.

B. La radicalisation de la laïcité

Pour marquer sa rupture avec cette manière de traiter la philosophie, Michel Onfray se consacre à la critique des deux attitudes de l'Elysée.

En ce qui concerne la loi de 1905, dite aussi « laïcité vieux style », elle induit par sa tolérance et sa neutralité l'erreur et le faux. Elle diffuse l'idée selon laquelle un discours mythique et irrationnel (Bible, Coran,...) vaut un discours philosophique et rationnel.495(*) Dans ces conditions, la neutralité loin d'incarner la liberté de conscience pour chacun, elle ne fait que mésestimer la pensée athée. A ce propos, Michel Onfray avoue la nécessité d'une laïcité qui nous fait passer de l'ère religieuse à l'ère philosophique. Ce faisant, la laïcité prônée par Onfray réclame l'athéisme et non le relativisme comme position officielle de la République. Ce qui n'est pas niable, c'est que Michel Onfray a toujours salué les luttes passées de la « laïcité vieux style » pour la libération de l'Etat de la tutelle de la religion, mais il s'est aperçu que la loi de 1905 a contribué à la persistance des Eglises, des mosquées et de tous les lieux de culte. Pour lui, la vraie « République en fait [les cultes] une affaire strictement privée, une affaire radicalement personnelle comme la sexualité à pratiquer chez soi dans l'intimité des quatre murs de la maison. »496(*). La laïcité revendiquée par Onfray plaide alors en faveur de l'éradication de la religion de la République ou de sa réduction au plus privé.

Nous touchons à présent la deuxième attitude de la République : la primauté des valeurs chrétiennes. Celle-ci est fortement reprouvée par Michel Onfray car elle ne se restreint pas à un refus systématique de la laïcité « post moderne » revendiquée par Onfray (ce qui est normal) mais elle contribue aussi à la mise à l'écart d'une laïcité moins révolutionnaire que la première : une laïcité selon l'ancien modèle. D'où le tissu de contradiction souvent repéré et critiqué dans le discours de Sarkozy : d'un côté une République neutre face à la question de la religion et d'un autre côté une République prenant parti pour le christianisme et se contentant de rappeler que la France est « la fille aînée de l'Eglise ».

Si avec Sarkozy et la droite en général, l'affaire du christianisme a été rendue publique, il reste que cette dernière échappe le plus souvent à la connaissance consciente du peuple français et par extrapolation du peuple européen. Afin de contester ce règne des valeurs chrétiennes, Michel Onfray quitte l'Elysée pour entamer un examen de l'épistémè judéo-chrétienne qui régit les esprits français et européens de notre siècle.

* 487 Cf. Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat - Wikisource.

* 488 Cf. Traité d'athéologie, op.cit., p.278 ; p.279

* 489 On a souligné l'équivalence entre philosophie et athéisme ici, puisque pour Onfray, dans ce 21ème siècle, la seule philosophie digne d'intérêt est l'athéisme.

* 490 Ibid., p.278 ; p.279

* 491 L'entretien s'est passé durant les semaines précédent le premier tour de l'élection présidentielle. Nicolas Sarkozy était encore un candidat à la présidentielle.

Voir philosophie magazine N 8 - Quelles idées pour l'Elysée ? - Dialogue exclusif : Nicolas Sarkozy et Michel Onfray

* 492 Onfray de sa part ne soutient pas ces idées qui tiennent beaucoup au religieux. Il trouve qu'il y a des cas où le social construit notre identité. Un pédophile par exemple n'a pas choisi sa sexualité et s'il avait le choix, il aurait dû choisir une sexualité qui serait moins= = traumatisante pour ses victimes. Pourquoi alors se contenter de cette vie sexuelle s'il a les moyens de la changer?

* 493 Vous pouvez voir le discours intégral sur le site suivant:

http:// www.france-catholique.fr/Discours-de-Nicolas-Sarkozy-au.html.

* 494 Libération, 16 Janvier, 2007

* 495 Voir l'entretien avec Onfray sur le site suivant: endehors.org/news/pour-une-laicite-post-chretienne

* 496 endehors.org/news/pour-une-laicite-post-chretienne, op.cit

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry