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L'intégration de la protection de l'environnement en droit des aides d'état

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par Olivier PEIFFERT
Nancy-Université - Master 2 à‰tudes européennes 2009
  

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3 ) La portée du principe d'intégration

Si l'utilisation du terme de « principe » est largement partagée, tant par les institutions que par de nombreux auteurs, établir avec certitude le statut juridique de l'intégration des exigences environnementales ne relève pas pour autant de l'évidence. Cette qualification conduit à la recherche malaisée d'un fil d'Ariane, au cours de laquelle « la rencontre du Minotaure est inévitable »34(*). Le traité n'apporte en effet aucune définition précise de l'intégration. La jurisprudence de la Cour de justice, qui pour l'instant ne s'est prononcée qu'à de rares occasions sur l'art 6 et jamais dans le cadre d'un recours en annulation dirigé contre un acte communautaire, entretient ce flou juridique.

La Cour n'a cité qu'une seule fois la notion de principe d'intégration et préférera par la suite se borner à mentionner l'énoncé de l'art 6, le plus souvent à l'appui de son raisonnement35(*). Dans les arrêts Commission contre Conseil36(*) et Commission contre Autriche37(*), la Cour de Luxembourg déclare ainsi qu'« il est constant que la protection de l'environnement constitue un des objectifs essentiels de la Communauté » ; « aux termes de l'article 6 CE, «[l]es exigences de la protection de l'environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des politiques et actions de la Communauté», disposition qui souligne le caractère transversal et fondamental de cet objectif. » Ces arrêts n'apportent rien d'autre que la proclamation par un considérant de principe d'une évidence qui ressort manifestement des traités, tant au vu de l'inscription de l'environnement aux art 2 et 3 CE qu'au contenu de l'art 6, et semblent considérer l'intégration comme un objectif.

Il apparaît cependant que l'art 6 ne peut être regardé comme l'expression d'un simple objectif : les critères de définition applicables à cette notion ne correspondent pas au statut juridique conféré à l'intégration. Un objectif revêt avant tout un caractère programmatique ; s'il n'est pas dépourvu de portée normative, portée qui s'avère même fondamentale lorsque l'on sait le rôle structurant que peut jouer un objectif et la fonction qu'il occupe dans l'interprétation dynamique du droit communautaire par la Cour de justice, il ne peut fonder ni une obligation opposable aux institutions européennes et nationales, ni un droit invocable par les particuliers. Or une analyse de l'intégration, au regard des critères doctrinaux de détermination du statut juridique d'une norme tirés de la jurisprudence et de la position des institutions38(*), met en lumière son statut « d'obligation juridique s'imposant aux autorités publiques et, susceptible, à ce titre, de justifier un recours dans le cadre du contentieux de la légalité »39(*). La lettre de l'art 6 consacre la prise en compte des exigences environnementales comme une obligation générale dont le champ s'étend à l'ensemble des matières du traité. Par ailleurs, l'intégration a vocation à rayonner à l'intérieur comme à l'extérieur de la sphère communautaire par le jeu des clauses sectorielles d'intégration, de la clause de cohérence générale et des interactions entre l'ordre communautaire, l'ordre international et les ordres nationaux40(*). Si l'on peut alors parler d'un véritable « principe » d'intégration, la qualité de principe général du droit est cependant à écarter. Celle-ci implique en effet une autorité supérieure qui est elle-même fonction d'un énoncé clair, précis et inconditionnel de la norme en cause. Or le principe de prise en compte de la protection de l'environnement, qui a vocation à s'appliquer lors de la définition et la mise en oeuvre des politiques de la Communauté, n'est par nature opposable qu'aux seules autorités publiques, excluant ainsi la reconnaissance d'un effet direct complet. De plus, l'intensité du principe d'intégration n'étant pas définie par le traité, lesdites autorités disposent d'un pouvoir discrétionnaire lorsqu'il s'agit de le mettre en pratique41(*). En résumé, la valeur normative du principe d'intégration est « au-delà de la qualité d'objectif et en deçà d'un principe général du droit communautaire».42(*) En sus des interrogations ayant trait au statut juridique de l'intégration, il convient d'aborder la question de son effectivité. Or sa justiciabilité est restreinte, le principe n'étant opposable qu'aux seules autorités publiques et son invocabilité étant limitée par les rigoureuses conditions d'accès des requérants non privilégiés au prétoire de la Cour. Cette justiciabilité étriquée est doublée d'un contrôle juridictionnel à géométrie variable, cantonné par le jeu de l'appréciation discrétionnaire à l'erreur manifeste d'appréciation pour les institutions européennes et au respect des dérogations légales aux règles du droit communautaire pour les Etats43(*). Ces éléments ne laissent entrevoir qu'un modeste potentiel d'effectivité, conduisant à la conciliation des exigences environnementales avec les objectifs spécifiques des différentes actions et politiques communautaires plutôt qu'a leur prééminence44(*).

En tout état de cause, et même si la doctrine est partagée sur la question de l'effectivité du principe d'intégration et de son efficacité au regard de la protection de l'environnement, le processus de mise en cohérence environnementale à désormais atteint nombre de domaines du droit communautaire.

* 34 N. HERVE-FOURNEREAU, Le « principe » d'intégration des exigences de la protection de l'environnement : essai de clarification juridique, préc., p. 643

* 35 comme dans l'arrêt CJCE, 13 mars 2001, PreussenElektra AG, aff. C-379/98, Rec. I-2159

* 36 CJCE, 13 sept. 2005, Commission des Communautés européennes c/ Conseil de l'Union européenne, aff. C-176/03, Rec. I-7879, pts. 41 et 42 ; ce « grand arrêt » est surtout connu pour avoir tranché au profit de l'intégration un « conflit de base juridique de seconde génération », ou « interpiliers », portant sur une mesure définissant un certain nombre d'infractions à l'environnement, pour lesquelles les États membres sont invités à prévoir des sanctions de nature pénale

* 37 CJCE, 15 nov. 2005, Commission des Communautés européennes c/ République d'Autriche, aff. C-320/03, Rec. I-9871, pts. 72 et 73

* 38 analyse not. menée par N. HERVE-FOURNEREAU, Le « principe » d'intégration des exigences de la protection de l'environnement : essai de clarification juridique, préc.

* 39 Ibid., p. 663

* 40 Ibid., p. 666

* 41 Ibid., p. 667

* 42 Ibid., p. 661

* 43 Idem, p. 674 et s.

* 44 Ibid., p. 681 et s.

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