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Le pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionels Dogon aux dépens des lois et règlements en vigueur

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par Amadou Sangara
Université de Bamako, Mali - Maitrise Droit Privé 2007
  

Disponible en mode multipage

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MINISTERE DE L'EDUCATION NATIONALE REPUBLIQUE DU MALI

*********** ---------------

UNIVERSITE DE BAMAKO UN PEUPLE - UN BUT - UNE FOI

° ° °

FACULTE DES SCIENCES JURIdiQUES ET POLITIQUES (FSJP)

° °

MEMOIRE DE FIN DE CYCLE

?

THEME :

« LE POUVOIR DECISIONNEL DES CHEFS RELIGIEUX TRADITIONNELS DOGON AUX DEPENS DES LOIS ET REGLEMENTS EN VIGUEUR.»

Présenté et soutenu par :

Amadou SANGARA

Pour l'obtention du diplôme de maîtrise en sciences juridiques.

Option : Droit privé (carrière judiciaire)

Promotion : 2002-2006

Membre de jury : Sous la direction de :

Prof. Amadou KEITA Dr Daniel TESSOUGUE

Date de soutenance :

Le 12 juillet 2007

REMERCIEMENTS.

Nous remercions d'abord Dieu, de nous avoir permis de finir ce travail de mémoire dans sa bénédiction et dans sa grâce.

Nous remercions également le décanat et le corps professoral de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques (FSJP), particulièrement notre directeur de mémoire Docteur Daniel TESSOUGUE, pour sa qualité humaine remarquable mais aussi, pour ses conseils pédagogiques exemplaires et pour sa disponibilité infaillible, nous lui exprimons notre profonde gratitude.

Egalement sont à remercier, particulièrement Moussa Sangara et son épouse Aïssata, Sana Guindo et sa famille, Andogoly Guindo et sa famille, la famille Dolo à Médina-coura, Amadou Sagara et son épouse Djénèba Dolo, Nantimé, Nouh, Seydou, Andiè, Amayoko Seydou Adè, Emmanuel et leurs familles, qu'ils trouvent ici l'expression de notre sincère reconnaissance.

A tous nos oncles, tantes, frères, soeurs et amis qui nous ont soutenu tant matériellement que moralement.

Enfin, nos remerciements vont à l'endroit de tous ceux sans oublier personne qui nous ont accompagné et soutenu dans la réalisation de ce mémoire.

Nous remercions infiniment tous et toutes pour leur sens élevé de solidarité et pour la sincérité à laquelle ils nous ont témoigné.

MERCI !

DEDICACES. 

Amadou Sangara :

Je dédie ce mémoire à mon père Ogokongo (Souleymane Sangara), Prêtre de Arou (Tuogou), décédé en juin 2005 et à ma mère Aïssata dite Yaïguerè Telly qui, m'ont donné la chance d'aller à l'école, d'aboutir à ce résultat que voici et d'être ce que je suis présentement.

Egalement, je dédie ce mémoire à Monsieur Nouhoum Koné et à son épouse Sabine koné qui m'ont tout donné et qui ont tout fait pour moi et, sans lesquels ce mémoire n'aurait été ce qu'il est aujourd'hui.

Bref, je dédie ce mémoire, à tous les défenseurs du panafricanisme et ambassadeurs des traditions noires africaines et en particulier de la tradition dogon qui oeuvrent inlassablement pour la perpétuation de nos valeurs culturelles séculaires.

Et à tous les traditionalistes de quelle que nationalité qu'ils soient, soucieux ou persuadés de la nécessité de concilier tradition et modernité.

SOMMAIRE.

Remerciements i

Dédicaces ii

Première partie

Le pouvoir des chefs religieux dogon 5

Chapitre I : Statut et autorité des chefs religieux dogon 7

Section I : Classification sociale des chefs religieux dogon 7

Section II : L'autorité des chefs religieux dogon 9

Chapitre II : Points de divergence entre l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat 14

Section I : Différence de forme 14

Section II : Conflits de compétence 19

Deuxième partie

La cohabitation des deux autorités : autorité traditionnelle et autorité publique 23

Chapitre I : La tradition dogon, consolide les dispositions relatives aux citoyens 25

Section I : Complémentarité_ autorité traditionnelle et autorité publique 25

Section II : L'autorité des chefs religieux dans un contexte intercommunautaire démocratique 30

Chapitre II : Conciliation indispensable entre tradition et modernité 34

Section I : Capacité d'adaptation au changement 35

Section II : La persistance de la tradition 38

INTRODUCTION.

La région occupée par le peuple dogon est située au centre-est de la république du Mali. Elle occupe une zone tampon à la frontière sud-est, entre le Mali et le Burkina Faso.

Elle est rattachée à la 5e région administrative (Mopti) du Mali, dont elle occupe toute la moitié Est, avec de gros centres semi-urbains tels Bandiagara, Bankass, Douentza et Koro.

Adossés à la roche ou construits sur le plateau rocheux, les villages Dogon sont, nichés au pied de la falaise en bordure du haut plateau de Bandiagara, et face à une vaste plaine qui s'étend vers le sud.

Ce sanctuaire de la falaise de Bandiagara inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, d'une superficie de 4 000 km2, est un site mixte à la fois, culturel et naturel réparti entre les trois régions naturelles du pays Dogon:

- Le plateau, les falaises et la plaine du Seno-Gondo;

Le pays dogon est une des zones les plus anciennement peuplées d'Afrique de l'Ouest; ses populations ont été au cours des siècles les témoins des différents troubles qui ont marqué le territoire.

Le plateau et la falaise de Bandiagara ne sont pas occupés par une population homogène mais par une mosaïque de communautés descendant des différentes vagues de migrations qui sont arrivées dans ce refuge idéal pour mieux se protéger contre les guerres et les famines.

Plusieurs recherches et enquêtes ont dévoilé les analogies entre ces villages et ceux du sud de la Mauritanie, datant du 1er Millénaire établissant ainsi un lien entre ces populations. Lien patent pour les constructions de pierre de textiles, etc., qui peut s'expliquer par cette migration Nord-Sud ou qui peut-être le reflet d'un même stade de développement.

Ces « Dogon » aux multiples dialectes ont su vivre ensemble depuis plusieurs siècles sans qu'ils aient eu de grands problèmes autres que des guerres sporadiques, ce qui leur a donné une certaine cohésion.

Cette histoire commune, les similitudes culturelles et l'unité du territoire ont permis de les regrouper en une ethnie « Dogon ». Ces populations nouvelles, qui se sont superposées aux autochtones, ont à peu près divisé le territoire du plateau entre l'Ouest et le Sud-Est.

Le peuplement dogon se rattache à deux principales arrivées de populations.

La première migration est descendue très tôt du Nord avant le X è siècle, venant de l'empire du Ghana.

Quittant leur pays en guerre et en proie à la désertification, les animistes Soninké appelés aussi Wakoré vont se diriger vers le Niger, source d'eau constante, rejoignant d'anciennes villes Djenné ou en fondant de nouvelles: Goundam, Dia et surtout Djenné-Djenno avec l'aide des autochtones Bozo, IX è Siècle.

Non loin de là, selon Monteil aurait été fondé un royaume Nono, autre branche Soninké, sous la conduite d'une reine qui occupera toute la région Nord et Ouest du plateau de Bandiagara : Pignari, Leogelou, N'Duleri.

Dans ces régions aujourd'hui les habitants se disent d'origine Nononké ou Djénnéké d'ethnie Sâman.

Cette première migration n'est pas très bien connue de la plupart des Dogon, ce qui explique le fait que lors des grandes cérémonies traditionnelles, les griots n'en font pratiquement pas allusion quand ils font l'éloge des dogons ou décrivent le parcours historique du peuplement dogon.

La seconde migration, beaucoup mieux connue, serait venue du Mandé à la suite de persécutions religieuses ou pour fuir le commerce des esclaves. De sérieuses présomptions laissent penser qu'une première vague de migrants malinké serait arrivée de Yatenga dès le X è siècle; Elle serait à l'origine des Kibsi.

La migration principale du Mandé, celle des quatre familles dogon qui peupleront la falaise et le plateau, daterait du XII è siècle. Les étapes et la chronologie de ce long voyage, sont déclamées lors des cérémonies et participent au mythe fondateur commun qui unit tous les dogons, ce mythe dogon varie suivant les régions.

Les quatre clans de migrants qui étaient arrivés au pied de la falaise devront se battre pour le territoire avec les différents occupants dont les Tellems1(*) qu'ils vont absorber ou faire fuir puis, selon la tradition, ils se sépareront à ``kan'' pour fonder chacun leurs propres villages.

De nos jours, nous pouvons retrouver des descendants des Tellems, une minorité dans les confins de la frontière entre le Mali et le Burkina; Lors d'une cérémonie annuelle organisée à l'intention de toute l'ethnie Tellem, ils viennent jusqu'à Iréli pour les festivités, comme pour témoigner des liens étroits existants entre Dogons et Tellems.

Les dogons vont occuper le plateau et la plaine en élaborant au cours des siècles, afin de continuer la lignée, une vie religieuse très codifiée et une vie sociale basée sur la hiérarchie des générations.

Ces dogon-Mandé, ayant adopté les rituels locaux sans peine car tous étaient animistes, vont résister aux poussées venues de toutes parts, tant celle de l'empire musulman songhoï, qui rayonnait depuis sa capitale Gao sur toute la région de Tombouctou et du Hombori, que celle des voltaïques. Ceux ci exerceront une forte influence sur les rites, apportant par exemple les sociétés de masques qui n'existaient pas chez les Tellems, la métallurgie et leur langage, ce qui fera classer le dogon ``toro'' parmi les langues voltaïques.

Selon la tradition les quatre faces de la toguna ou case à palabre ou le « grand abri » représentent les quatre familles fondatrices dogons. Dans chaque prière, dans la construction du grenier, de la case habitée, on constate la présence du nombre quatre inspirée sans étonnement et incontestablement des quatre clans venus du Mandé.

Egalement les quatre points cardinaux de l'univers sont déjà connus, et sont intégrés dans la pratique de certains rites ou cérémonies et cela bien avant le contact avec l'extérieur ou la colonisation.

La connaissance des étoiles et le calcul du vent témoignent de l'existence de la boussole traditionnelle. Aussi est-il intéressant de noter que généralement les cérémonies de prière ou d'imploration des esprits-dieux sont précédées toujours de la représentation ou de l'évocation du nom de ces quatre points cardinaux, qui sont entre autres nommés et reconnus comme suit (en tôrô-sô): Dou (l'Est), Mouyonron (l'Ouest), Natangan (le Nord), Teingourou (le Sud.)

L'organisation sociale chez les dogons, repose sur une classification bien définie. Et ainsi, chez les dogons, les chefs religieux traditionnels sont la sommité dans l'organisation sociale. Ils détiennent des pouvoirs très importants et énormes. Leur champ d'action est très étendu et multiforme.

La vie quotidienne dans la société dogon est organisée en fonction d'une hiérarchisation très codifiée, la religion est étroitement associée à des personnes précises et au rang social qu'elles occupent.

La société dogon est patriarcale, composée d'un ensemble de familles ou clans. La base de cette société est la famille étendue, groupée sous l'autorité d'un patriarche.

Le chef religieux traditionnel est l'homme le plus âgé du village ou celui qui a été choisi par les divinités ou les ancêtres. Il n'existe pas un chef religieux pour chaque localité, aussi les chefs ont-ils plusieurs « circonscriptions »?

Contrairement au chef de village, dont la fonction se transmet du père au fils aîné, le chef religieux est choisi par plusieurs villages qui sont des descendants d'un même clan ou qui ont une origine commune.

Le chef religieux le plus élevé en grade est celui du clan Arou, du village du même nom. Son pouvoir spirituel est totalement indépendant du pouvoir temporel, c'est à dire de la politique menée par le village.

Mais auparavant, avant l'arrivée du colonisateur, les chefs disposaient aussi d'une réelle autorité politique.

Aujourd'hui, en ce qui concerne les affaires du village, le pouvoir politique est exercé par le chef du village et le pouvoir spirituel par le Prêtre mais, les décisions qui dépassent le cadre du village sont prises par le chef religieux.

Les zones de compétence de l'un et de l'autre ont en fait tendance à se chevaucher mais, de nos jours encore la parole du chef spirituel a plus de valeur que celle du chef temporel.

Le pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionnels ou encore autorités traditionnelles, présente dans un certain nombre de domaines des différences aux textes. Mais aussi, on constate des complémentarités ou compatibilités dans beaucoup d'autres domaines entre l'autorité traditionnelle et l'autorité publique ou les textes.

En effet, ce sujet sera traité en deux parties :

La première partie parlera du pouvoir des chefs religieux dogon. Quant à la deuxième partie, elle étudiera la cohabitation des deux autorités : autorité traditionnelle et autorité publique.

PREMIERE PARTIE.

Le pouvoir des chefs religieux dogon.

Dans la société dogon, les pouvoirs du hogon ne sont pas illimités et ne donnent pas tous les droits. Ils doivent compter avec la puissance des prêtres qui, sont aussi des chefs spirituels traditionnels, véritables maîtres de décision dans leur domaine propre : « Maître de la terre », « Maître du couteau » ou sacrificateur.

Les prêtres dogons prédisent l'avenir à partir des traces laissées la nuit par les chacals ou renards sur des portions de sol quadrillées, la veille bien auparavant. Cette pratique religieuse permet aux chefs religieux dans la prise de décisions, d'êtres conscients ou avertis tout au moins des avantages ou inconvénients qui pourraient résulter ou assortir d'une décision et le tollé que pourrait susciter une décision prise sans précaution.

Tout au long de l'analyse de cette première partie deux points retiendront notre entière attention qui, sont respectivement le statut et l'autorité des chefs religieux dogon en chapitre premier et les points de divergence entre l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat en chapitre deuxième.

CHAPITRE PREMIER.

Statut et autorité des chefs religieux dogon.

Il est important de souligner ici que, dans la mesure où la presque totalité des dogons partagent la même origine, il n'y a pas une très grande différence du point de vue forme entre les chefferies religieuses traditionnelles, leur caractéristique est pratiquement la même, même si l'autorité, la notoriété de certains, sont plus visibles et plus notables.

On va envisager successivement dans ce chapitre premier : en premier lieu la classification sociale des chefs religieux dogon (Section I) et, en second lieu l'autorité de ces chefs religieux (Section II).

Section I: Classification sociale des chefs religieux dogon.

Le chef religieux est choisi en fonction de sa capacité à diriger, sa sagesse vis-à-vis de la tradition, sa droiture, en un mot en fonction de sa caractéristique d'un homme plus ou moins parfait.

Certains chefs religieux traditionnels plus ou moins populaires sont pris ou choisis par le conseil des anciens en fonction de leur âge; le plus âgé du clan est automatiquement choisi comme chef religieux.

La classification sociale des chefs religieux dogon fait ressortir deux points essentiels à savoir l'importance sociale de ces derniers (Paragraphe I) et leur qualité d'auxiliaires de l'administration (Paragraphe II.)

Paragraphe I: L'importance sociale des chefs religieux dogon.

Les chefs religieux traditionnels ne sont pas élus ou nommés par les individus du moins par les populations mais, choisis par les divinités ou culte des ancêtres qui, ont été sollicitées en la matière.

Nous, nous sommes rendus au cours de notre voyage d'étude sur le terrain à Arou, où, réside le hogon le plus élevé en grade de tout le <<pays dogon>>, et nous l'avons rencontré, ce qui a confirmé le bien fondé de ces témoignages sur le pouvoir de décisions, la fonction ou le statut des chefs religieux traditionnels.

D'après le témoignage du hogon de Arou le système religieux se présente comme suit: au sommet il y a le hogon principal, il est le cerveau du système religieux et le chef spirituel, il est l'image incarnée du respect que le dogon, en particulier le Arougown c'est à dire le ressortissant du clan Arou2(*), accorde à sa civilisation, sa culture, sa religion en un mot à sa tradition.

C'est lui qui a autorité pour toutes les questions religieuses dans les tribus dogon « animistes » dans la région est. Son pouvoir est soutenu par les différentes divinités ou culte des ancêtres qui régissent la religion traditionnelle dogon. Ensuite il y a les prêtres, qui sont au nombre de trois, viennent successivement des villages de Tuogou (Ogokongo), et Youga-piri (Ogogênè et Ogopanrion); Ils représentent l'axe central, sinon un des piliers incontournables dans le système religieux, dans la mesure où se sont eux et uniquement eux qui sont habilités à effectuer les différents sacrifices religieux. Leur fonction est multiple et diversifiée; puisqu'ils sont les maîtres de cérémonies lors de l'investiture et des funérailles du hogon spirituel.

Viennent enfin les chefs de ``wagum'' et les hogons d'un certain nombre de villages dont les plus notoires sont ceux des villages de Damasongo et de Nombori (clan Arou.) Aux yeux des populations tous ces intervenants sont considérés comme étant de fidèles serviteurs à leur tradition ancestrale.

Les affaires qui ont trait à la coutume et à la religion traditionnelle sont du seul ressort du hogon principal de cette même zone.

Paragraphe II: Les chefs religieux auxiliaires de l'administration.

A l'époque d'avant la colonisation, les chefs religieux traditionnels étaient considérés comme étant à la fois les chefs coutumiers et administratifs et, ils jouissaient d'une très grande renommée, et les relations à l'extérieur des frontières de la tribu étaient presque inexistantes à cette époque hormis, les quelques pactes de non agression mutuelle, le bon voisinage oblige.

A cette période, la vie sociale était régie par des règles coutumières rigoureuses, sous la tutelle et le contrôle permanent du chef coutumier et administratif.

Avec la colonisation et par la suite, les évènements ont fait que les fonctions coutumière et administrative ne soient plus concentrées sur un même individu.

Actuellement les grands dignitaires religieux qui sont chargés des pouvoirs exécutifs sont nommés à vie. De plus en plus de nos jours, les grands dignitaires religieux dogons, interviennent régulièrement dans des affaires du ressort de l'administration, et cette intervention généralement subordonnée à la gravité ou encore à l'urgence des cas.

Par exemple en cas de crime, délit de vol, d'agression, il n'est pas rare de voir ou d'entendre parler, des autorités traditionnelles, aider les autorités publiques qui sont compétentes ou qui connaissent ces genres de cas à mettre la main sur leurs auteurs qui ont, ainsi violé les vertus locales ou traditionnelles de la communauté.

Egalement pour la collecte des impôts ou tout autre service public, il est fréquent de voir les chefs religieux inciter leurs subordonnés à s'acquitter ou à remplir pleinement leurs obligations citoyennes.

Ce qui est frappant dans tout ça et non des moindres c'est que les chefs religieux traditionnels dogon ne dénient aucunement l'autorité publique, pourtant l'Etat a du mal à s'imposer, dans une zone où la coutume ou la loi tribale a plus de force que celle votée à Bamako.

« Cependant il est un fait avec lequel il faut compter c'est que rarement les habitudes séculaires ne peuvent être bousculées à coups de lois ou de règlements. Les réalités sociales tracent des sillons pour le développement économique et culturel par une confrontation pacifique des civilisations afin de changer progressivement la nature des choses 3(*)»

En effet, notons particulièrement que bien avant la colonisation les sociétés traditionnelles étaient déjà régies par des principes généraux établis avec l'accord et l'apport des populations.

C'est ainsi que le Mandé d'où sont originaires également, presque tous les Dogon, Soundjata Keita après avoir triomphé de Soumakourou Kanté lors de la bataille de Kirina en 1235 a établi les principes généraux qui vont désormais régir la société du mandé. Ces principes embrassaient tous les secteurs et toutes les composantes de la société du Mandé.

Les droits et devoirs du citoyen mandéka sont détaillés, la division de la société en classe dont chacune des classes est affiliée à un domaine déterminé et qui lui est propre, donc à chacun sa place et sa classe sociale. Les principes sociaux doivent êtres respectés par tous sans exception, ceux qui ne les respectent pas, sont punis conformément aux dispositions applicables en la matière.

Section II: L'autorité des chefs religieux dogon.

La célébrité ou le pouvoir spirituel du chef religieux d'Arou est visiblement manifeste, car Arou est l'unique clan dont la tenue du chef spirituel est constituée d'un bonnet rouge et d'un costume blanc.

Egalement, la maison du chef religieux est crépie en rouge et blanc ; la couleur rouge symbolise la force du royaume, et signifie à l'étranger sa puissance spirituelle ou rituelle. La couleur blanche symbolise l'hospitalité, la patience, la tolérance et l'entre aide.

Contrairement à ce que beaucoup pourraient laisser entendre sur les religions traditionnelles, le dogon a foi en un seul dieu, l'unique Ama.

Cependant il a donné la possibilité aux hommes de l'approcher en s'adressant à différents intermédiaires placés sous le contrôle et la supervision des chefs religieux traditionnels.

Les chefs traditionnels, qui sont plutôt des chefs religieux, sont associés au serpent; leur autorité est liée à la terre. Le chef religieux est maître du village et de la brousse des hommes, des animaux et de tous les végétaux.

Le plus grand prêtre du lèbè au « pays dogon » est celui de «Arou.»

Prêtre de binru; pour avoir ce titre, il faut passer par une initiation qui consiste à avoir une certaine prédisposition, à accueillir la communication des ancêtres par la manifestation d'un rite de possession. Le prêtre binru est toujours de sexe masculin. Comme le chef spirituel, il est fondamentalement lié au cycle végétal, on lui présente les semences avant de les enfouir en terre, de même que les prémices avant les récoltes.

En outre les chefs sont astreints à des interdits très stricts. Le titre de chef religieux comporte un certain nombre d'interdictions allant de l'impossibilité de contact avec une femme en état de règles à l'interdiction de consommer certains aliments tels que la viande de chèvre ou encore le Fonio. Aussi un chef ne marche jamais pied nu, si le hogon marche pied nu, l'on dit que la terre devient rouge, ce qui est symbole d'infertilité et les récoltes ne donneront pas bien.

Ainsi la ``terre'' sanctionne l'inattention des citoyens envers leur chef caractérisé par le fait que celui-ci ait marché pied nu alors qu'il devait bénéficier d'une attention particulière de la part de ses subordonnés ou concitoyens.

Le chef religieux ne fait son apparition publique principalement qu'à l'approche de l'hivernage à l'occasion de la prestigieuse fête religieuse annuelle organisée pour rendre hommage aux ancêtres protecteurs qui n'ont ménagé aucun effort dans la réussite de la saison pluvieuse écoulée et sont adorés pour la bénédiction de la saison qui s'annonce vers l'horizon.

Tous les ressortissants où qu'ils soient se rendent là-bas (à Arou) pour les festivités dans la mesure du possible. Même les Moronaba (Mossi) du Burkina viennent lors de cette célébration annuelle des rites. D'ailleurs d'après les témoignages de traditionalistes ces Moronaba seraient même d'origine du clan Arou, donc auraient des liens ancestraux très proches ou de parenté avec les Dogon.

Deux situations expliquent cet état des faits d'abord, les chefs religieux dogons sont les garants des valeurs ancestrales (Paragraphe I) ensuite, la force obligatoire de leurs décisions (Paragraphe II).

Paragraphe I: Les chefs religieux garants des valeurs ancestrales.

Les chefs religieux traditionnels effectuent l'essentiel ou presque la totalité du travail religieux ou coutumier au nom, et dans l'intérêt des populations.

Le respect de l'autre, du culte des ancêtres est primordial et obligatoire. Les divinités priment sur tout même sur les hommes car celles-ci représentent l'ensemble des ancêtres morts et des dieux ou esprits protecteurs, bienfaiteurs, garants de la tradition et du bien être de la communauté, des dieux témoins des temps anciens, maîtres du présent, espoirs du futur c'est à dire qu'ils ont la destinée de la communauté entre leurs mains.

Les chefs religieux voyagent exceptionnellement de façon officielle, ils ne voyagent pas sur n'importe quelle destination et non plus par n'importe quel chemin ou encore n'importe quand. Ils sont sensés posséder d'énormes pouvoirs sur les eaux, ils ont le secret du contrôle des pluies. Il arrive dès fois que les leaders religieux interromprent les pluies pendant un lapse de temps très court pour rappeler aux populations qu'ils existent des autorités supérieures qui veillent au respect strict des principes de la vie communautaire et de la religion traditionnelle, qu'il ne faut pas ignorer ou sous estimer celles-ci. Notons que c'est une pratique très ancienne, léguée par les générations successives. Ainsi les citoyens amènent des sacrifices qu'on donne aux ancêtres à travers les divinités compétentes en la matière.

C'est un impôt que doivent effectuer les citoyens, qu'ils soient de prêt ou de loin concernés. Mais pendant ces dernières décennies on assiste dès fois à la pratique d'interruption des pluies par des particuliers, qui ont également pu posséder ce genre de pouvoirs et font subir des souffrances aux populations qui voient leurs cultures ruinées sous leurs yeux, car la pluie est perturbée, voire même empêchée de tomber au moment crucial de l'hivernage. Dans ce cas d'espèce, une fois les dieux (punitifs) de la pluie sollicités, si l'auteur de cet acte ignoble ne se précipite pas pour « détacher la pluie » sens plus près du mot en dogon, avant que ces divinités n'entrent en scène, sinon après la peine sera inévitablement la mort. Il n'existe rien, aucun individu, aucune autorité, qui puisse annuler ou empêcher l'application de cette peine, même pas les chefs religieux car ayant donné préalablement tout leur accord aux esprits concernés et d'accepter le verdict, qui n'est d'ailleurs pas un verdict prononcé, quel qu'en soit le sacrifice c'est à dire quel qu'en soit le rang social ou la personnalité du criminel. La condamnation à mort n'est pas approuvée dans la société dogon, ce qu'il faudrait préciser ici est que cette condamnation est du seul ressort des divinités qui ne font simplement qu'appliquer les principes et protéger les innocents contre les malfaiteurs ou ennemis de la société. Tout le processus est supervisé par les plus hautes autorités pour assurer son bon et plein aboutissement.

Dans la société dogon le mot d'ordre est « Ensemble préservons notre dignité, sauvons notre honneur » car pour le dogon l'honneur est l'essence de la vie pour un homme, il est un des éléments prépondérants de la qualité humaine qu'un homme doit préserver de façon intime dans le courant de sa vie. Par ailleurs, dans cette société, comme dans toute autre société, la collaboration entre vieux et jeunes est privilégiée et recommandée, car ici nul n'en doute de la nécessité de coopération entre ceux catégories centrales, de la vie communautaire. « Si vous voulez sauver des connaissances et les faire voyager à travers le temps, disaient les vieux initiés dogon, confiez-les aux enfants ». C'est pour signifier de l'importance et de la nécessité de collaboration et d'écoute entre vieux et enfants.

Amadou Hampaté Ba dans un discours à l'UNESCO, n'a-t-il pas dit la fameuse formule, intégralement « En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle.»

Les vieux doivent être approchés sans condition par les jeunes afin de perpétuer la tradition. Ainsi, dans le domaine de l'initiation aux masques cette collaboration entre anciens et jeunes, est bien visible et pratique.

En effet, à l'approche des grandes cérémonies religieuses traditionnelles, les autorités traditionnelles à travers leurs sages, qui sont des délégués et compétents en la matière, décident en rassemblant tous les jeunes hommes ayant relativement le même âge, du moins l'âge de la puberté, en tout cas tous ceux qui conviennent aux critères coutumiers prédéfinis, et qui devront s'isoler dans la brousse pendant quelques jours en compagnie des initiateurs aux masques. Permettant ainsi l'initiation de ces jeunes aux nombreuses techniques de danse des masques, aux mystères ou secrets des masques et éventuellement au langage tant mystifié des masques qu'on appelle en dogon (Sigssô4(*).)

En effet, le pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionnels est l'un des garants de la stabilité de notre système républicain actuel et, de la consolidation ou préservation de la paix sociale.

Paragraphe II: La force obligatoire des décisions des chefs religieux.

Lorsque les chefs religieux sont sollicités ou lorsqu'ils interviennent dans des affaires, les décisions qu'ils rendent sont des décisions sages et simultanément irrévocables, dans la mesure où ils n'interviennent qu'en dernier ressort.

Quand les chefs religieux dogon rendent une décision cela trouve, qu'au préalable les citoyens ont été consultés à travers le conseil des ancêtres ou du village composé de tous les chefs de famille et des chefs héréditaires ou à travers les délégués de tous les villages originaires du clan, car plusieurs villages forment une ``confédération''. Les décisions sont toujours prises dans l'intérêt commun de la communauté.

La société dogon est composée de nobles et d'hommes de caste. Le mariage ou les relations sexuelles entre les deux classes sont formellement interdits. Ceux qui portent atteintes à ces interdits sont punis et sanctionnés conformément aux principes établis en la matière. Si une personne de la classe noble commet un acte sexuel avec une autre de la classe caste, elle perd automatiquement son titre de noble, et par conséquent devient homme de caste. Si d'autre part, le fautif ne déclare pas son acte sous prétexte de n'avoir été vu par aucun individu, s'il perdure dans cette voie il encourt la folie ou pour le pire la mort. Généralement ceux qui sont accusés de ces actes préfèrent quitter leur village d'origine, pour s'installer loin ailleurs.

En cas de commission d'une simple faute, les condamnations généralement infligées sont, les amendes, la confiscation des biens, à défaut, la personne condamnée doit effectuer un travail d'intérêt commun, pratique qui est d'ailleurs le cas aussi devant les autorités étatiques.

Lors des grands travaux qui entrent dans le cadre de l'entretien de la cour royale et de tous les autres services tout le monde doit y participer. Chacun participe à l'entreprise sans que un ordre soit donné. Le champ communautaire qui est affilié au chef religieux est, cultivé et récolté par la population, et dont les céréales récoltées serviront à recevoir les invités lors des différentes cérémonies religieuses traditionnelles et également à nourrir le chef et sa famille.

Mais également, lors des travaux importants tous les villages originaires ou les ressortissants du clan doivent envoyer leurs représentants ou à défaut envoyer leur contribution pécuniaire ou matérielle. L'irrespect ou l'inapplication des décisions rendues ou des sanctions prononcées par le chef religieux, la transgression de certains codes de bonne conduite prédéfinis par la communauté entraînent chez leurs auteurs des conséquences, souvent très lourdes. Entre autres, crier sur un plus âgé ou interrompre sa langue ``sa parole'', fréquenter un lieu qui est, interdit au public sauf à des initiés, s'habiller de façon inadéquate ou se mettre nu en public, voler, mentir ou porter atteinte à une personne, agresser sans raison, la violation d'un pacte ancestral par exemple : pénétrer un lieu sacré, transgression alimentaire. La violation des principes qui régissent le comportement des hommes envers la nature visible, couper un arbre en lieu sacré, ne pas participer à l'accomplissement de rites de purification de la brousse ou d'un fétiche, et les êtres non visibles qui représentent un pacte de paix dans l'usage commun de l'espace terrestre : pénétrer en des lieux où vivent les jinnadji ou jinnu5(*) sans prononcer les mots de protection.

CHAPITRE II.

Points de divergence entre l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat.

L'autorité traditionnelle présente, dans un certain nombre de domaines des différences avec l'autorité publique.

L'autorité de l'Etat étant une autorité publique, elle prend toutes les décisions relatives à la gestion des affaires publiques et dispose du pouvoir de coercition pour assurer le respect des décisions prises.

Pour le bon fonctionnement des institutions étatiques et le respect des libertés et restrictions des citoyens, la prévalence et l'existence de l'autorité de l'Etat sont, indispensables.

L'autorité étatique tient son pouvoir que d'elle-même. En dehors de son consentement aucun autre pouvoir ne peut s'imposer à elle.

En outre, l'autorité étatique est dotée de la personnalité morale et de la souveraineté.

La personnalité morale conduit au fait que l'Etat se distingue des gouvernants c'est à dire les décisions prises par ceux-ci sont imputables à l'Etat seul.

Un Etat est dit souverain lorsqu'il ne tient son pouvoir que de lui-même et n'est soumis à aucune autre autorité supérieure. Le principe d'autorité de l'Etat signifie que si c'est ne que cette dernière « il n'y a pas d'actes semblables faits par les particuliers ».

Dans ce chapitre nous évoquerons des différences de forme entre ces sortes d'autorité (Section I) et les conflits de compétence entre elles (Section II.)

Section I: Différences de forme.

Il n'est pas étonnant de constater que du fait même de la nature de ces deux autorités, inévitablement elles présentent des différences de forme.

Que ce soit un litige du foncier (terrain, domaine, champ cultivé ou libre), un litige successoral ou encore du vol, de l'agression ou d'une atteinte à la personne, bref de n'importe quel litige résultant de la gestion des rapports sociaux ou communautaires entre individus, les chefs traditionnels connaissent tous ces litiges en premier lieu et donc inévitablement aux dépens des autorités étatiques compétentes en la matière.

Mais au niveau local, il faut noter que le chef religieux intervient en dernier ressort. L'expérience a prouvé qu'en tout cas sur le terrain essentiellement que seule une décision rendue par les autorités traditionnelles arrive pour le moins à être reconnue par les parties opposées ou belligérantes.

Ces différences se focalisent essentiellement dans le domaine du foncier (Paragraphe I) et dans le règlement des litiges (Paragraphe II).

Paragraphe I: Dans le domaine du foncier.

Dans le domaine foncier l'autorité traditionnelle exerce, le pouvoir sur la terre à cause de son droit de 1ere occupation tandis que la seconde, l'autorité politique (l'administration générale, collecte des impôts, défense du territoire.)

Généralement l'autorité politique respecte les droits de la dite 1ere occupation à cause du pacte d'alliance qui le lie au génie du sol.

Les Dogon quand ils vinrent s'installer sur le plateau et la falaise, il leur a fallu de combattre les Tellems qui occupaient et qui vivaient déjà sur les lieux afin, de les déloger des surfaces qu'ils occupent.

C'est ainsi que lors de grandes cérémonies religieuses les griots font l'éloge des dogons comme étant un peuple combatif, fier, digne et intègre qui ne recule guère devant l'obstacle ou le danger.

Aussi pour s'installer sur ce terroir il a fallu aux Dogons de rendre harmonieux le paysage et la terre afin de consacrer le pacte d'alliance et de l'honorer.

L'autorité traditionnelle aura plus de facilité à accéder à l'acquisition des terres pour ses besoins personnels. Cependant ce principe est souvent mis en cause par certains qui, à cause de leur tyrannie, remettent en cause les principes de la 1ère occupation, ce qui ne va pas sans conséquences.

Les droits fonciers coutumiers se reposent sur quatre principes fondamentaux: ils sont collectifs, inaliénables, sacrés et transmissibles.

Ils sont collectifs, car dans la société traditionnelle la terre appartient à toute la collectivité c'est-à-dire le village, la famille, la tribu, le clan si non pas à un seul individu.

Ils sont inaliénables parce que la terre ne peut faire l'objet d'aucune transaction commerciale, vente ou gratuit.

Ils sont sacrés car dans la société traditionnelle assimilée à une divinité, elle abrite aussi les ancêtres. A ce titre que des sacrifices lui sont rendus.

C'est à ce titre que Henri Labouret déclarait: « la terre est l'objet d'un culte chez les populations agricoles c'est à dire l'immense majorité des noirs. Une tribu qui s'installe dans un pays fait alliance avec la terre non pas avec la planète mais avec l'esprit de ce territoire déterminé.»

Ils sont transmissibles, car dans la société traditionnelle la terre se transmet de génération en génération afin de garantir la survie du groupe parental. Par conséquent dans la société traditionnelle la théorie des terres vacantes et sans maître est inopérante car la terre appartient à une collectivité.

La mutation importante est liée à l'arrivée du colonisateur français, qui en s'installant par la force à introduit de nouveaux instruments de gestion qui ont fondamentalement bouleversé la vision domaniale et foncière des sociétés traditionnelles.

La terre jusque là collective, sacrée, inaliénable et transmissible devient un bien négociable susceptible d'appropriation privée.

Paragraphe II: Dans le règlement des litiges.

Pratiquement, dans la société dogon les chefs religieux traditionnels sont incontournables en matière de règlements ou de résolutions des litiges ou conflits locaux.

Dans certains cas sur un problème déterminé, quand même une décision aurait été prise par l'Etat, son application dans la société dite traditionnelle pose, souvent problème.

En effet, ici nous voulons énumérer un certain nombre de faits ou cas réels qui se sont déroulés et pour certains très récemment, dans lesquels cas l'affaire a été portée devant la justice, la justice a été rendue et de fortes mises en garde ont été faites au(x) perdant(s) ou au(x) débouté(s) mais, force est de reconnaître que dans la majorité des cas, le conflit ne s'éteint pas, même si l'Etat déploie sur place ses représentants chargés de veiller sur la pleine application du verdict.

Cela témoigne hélas d'un certain mépris de l'autorité de l'Etat dont, ce dernier en est le principal coupable, car ne se rapprochant pas depuis longtemps d'avantage de ses citoyens ou dans certains cas en ne tenant pas compte des vertus locales fondées sur des principes souvent dérogatoires avec ce que nous appelons les textes fondamentaux de la nation qui embrassent pourtant tous les secteurs ou domaines de notre société. Par exemple: quand une personne `X' tue un proche `P' à `Y', la loi interdit à `Y' de venger `P' sur `X' car, selon la loi nul ne doit se faire justice soi-même.

Egalement, dans la tradition dogon, on donne une grande valeur au pardon. On l'accorde même à celui qui a fait le plus de mal. Et la vengeance est considérée comme un réflexe regrettable. On dit qu'un homme qui peut se contenir ne se venge pas; elle n'est ni admirée ni mise en valeur. On laisse à un homme le droit de se venger s'il a subi un tord. S'il pardonne, c'est bien; mais même s'il ne pardonne pas, on ne peut non plus le lui reprocher.

Depuis l'indépendance ces populations dites traditionnelles n'ont qu'une vision négative des autorités étatiques. Selon elles, l'Etat ne s'est résolu qu'à la seule vocation punitive ou répressive des citoyens. Et que ce dernier n'a pu démontrer qu'il n'était qu'arrogant voire répressif ou indifférent à leurs égards et à toutes leurs préoccupations majeures.

Prenons par exemple le cas foncier un problème récurant en société dogon; nous avons recueilli des témoignages, mais également nous avons, nous personnellement été témoins de nombreux cas litigieux que nous ne nous hasarderons pas à citer nommément les parties ou villages en conflit.

Dans lesquels cas, l'Etat ayant intervenu en sa qualité de gardien de la paix sociale, n'a pu apporter de solutions durables aux crises. Comme, si pour dire que l'Etat ne peut solutionner unilatéralement tous les litiges et que pour certains cas d'entre eux, le concours des autorités traditionnelles est primordial, même si ce cas de figure paraît inadmissible pour certains.

Par contre, renversement de situation, si c'est une autorité traditionnelle qui intervient, nous constatons que le conflit est pour le moins géré ou résolu de façon coutumière car, c'est entre frères ou parents.

Cela n'est pas fortuit ou banal que ça car l'autorité traditionnelle a une arme que l'Etat n'a pas, en fait les autorités traditionnelles envoient aux belligérants ou utilisent les cousins qui sont de plusieurs catégories et qui sont en effet, une sorte de médiateurs.

Egalement, ces personnes sont déléguées par une ou des chefferies traditionnelles avec la ou lesquelles au moins une des parties belligérantes à un lien clanique ou tout autre lien d'amitié ou de collaboration. Ou, si tout simplement le conflit ou le litige se déroule dans le ressort de compétence d'une autorité traditionnelle quelconque.

Aussi, la création du poste de médiateur de la république par l'Etat en 1997 entre, dans le cadre de la préservation des droits et intérêts des particuliers face à l'Etat, c'est une initiative remarquable, pour le moins ambitieux.

Il y a également un autre mécanisme de prévention et de résolution des différends. Cela si les belligérants affirment êtres d'accords pour procéder par cette voie de règlements, un mécanisme ou moyen de résolution très court, une pratique que l'on appelle localement en dogon Binru Kaïyi ou Binru N'yèyi6(*).

Pratique par laquelle les parties en conflit ou litige, l'une après l'autre, conjurent sur ce rite, chacune se proclamant être véridique ou si c'est une chose, être le propriétaire légitime; bien sûr que chacune est consciente du fait qu'il ne pourrait y avoir deux vérités à la fois sur une même affaire ou chose.

Chacune des parties, généralement il y a deux et rarement plus, avance ses preuves qu'elle juge fondées et concrètes dont seul le binru est capable de déceler les zones d'ombre ou celles de vérité. Simultanément chaque camp jure d'être puni conformément aux principes du binru kaïyi, s'il s'avérait qu'il a dit faux ou a été de mauvaise foi et que si les esprits consultés arrivaient à lui donner tord, généralement la peine encourue est la mort.

Comprenez que, ce ne sont pas des coups que lui asséneront les hommes mais une punition discrète des esprits consultés qui sont, supposés être des esprits véridiques et juges.

Il faudrait souligner que quand même les dites parties en litige sont composées de plusieurs individus, chacune choisie dans son camp un individu qui lui représentera lorsque le moment de Binru kaïyi sera venu.

Egalement il est signifié aux parties que la décision qui sera issue de cette sorte de jugement est irrévocable quel qu'en soit le verdict. Il est supposé que le premier des représentants des deux camps qui décédera le premier lieu, est le perdant et qui a tord suppose-t-on et cela jusqu'à nos jours personne n'a pu démontrer le contraire.

Ici la formule est unique et sans équivoque que, la vérité finie toujours par triompher le mensonge.

Pour la plupart des dogons malgré l'existence de nombreux mécanismes de prévention et de résolution mis en place par l'Etat, cette pratique de « Binru Kaïyi » est la plus équitable, la plus sûre, la plus concrète et la plus impartiale des systèmes de recherches de vérité.

Par ailleurs il est évident que dans une localité ou un pays lorsqu'une chose ou méthode `A' est plus prisée qu'une autre chose ou méthode `B', à défaut d'êtres sur le même pied d'égalité sur ce terrain, elles sont manifestement, l'une supérieure à l'autre du fait du choix de l'acteur.

Pour expliquer le ras-le-bol ou l'indifférence de ces dites populations locales envers l'Etat, nous avons décidé d'élucider le cas du tourisme et celui de la cohabitation agriculteurs et nomades éleveurs principalement. Le secteur du tourisme est l'un des secteurs en pleine croissance de nos jours et qui rapporte énormément de devises à l'échelle nationale. Mais les populations visitées, pour le cas qui nous intéresse le «pays dogon», voient à longueur de journée comme de saison se succéder les touristes dans leurs villages et sites, ont l'impression d'être exploitées et épargnées du partage du « gâteau » et se plaignent de ne pas en profiter pleinement des retombées financières.

Bien sûr, il faut le dire tous les acteurs dans ce secteur ont leur responsabilité dans cet état des choses, y compris les populations elles qui se disent exploitées et lésées pour des raisons qui ne semblent pas faire l'objet de notre sujet.

Mais nous estimons que l'Etat doit prendre ses responsabilités afin de donner aux populations concernées une image gagnant-gagnant du secteur du tourisme. Aide ou redistribution des ressources que nous jugeons même si, elle existe est, insuffisante par rapport à l'attente escomptée des populations.

Dans la cohabitation entre agriculteurs, dogon et éleveurs ou nomades Peuhl, les contentieux sont multiples et très fréquents surtout sur la plaine et s'accusent fréquemment d'être l'instigateur.

Pour les agriculteurs, à presque totalité dogon quand les affaires liées à ce domaine sont portées devant une autorité publique, ils dénotent toujours une certaine passivité ou partialité de la part de celle-ci, ce qui témoigne de leur perplexité quant à la réelle volonté de celle-ci de vouloir résoudre les litiges d'une manière durable. Ils se sentent largement défavorisés dans cet état des faits par rapport aux éleveurs. Un motif supplémentaire pour les premiers de manifester leur désarroi envers l'Etat et, ses autorités.

Section II: Les conflits de compétence entre ces deux autorités.

Il y a un certain conflit de compétence entre l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat dans la mesure où dans un certain nombre de cas l'autorité traditionnelle, une fois saisie d'une affaire, fait tout pour solutionner à son ressort, l'affaire. Et l'autorité étatique même si elle est indirectement au courant de l'affaire comme elle ne peut pas s'auto saisir dans les tous les cas n'a naturellement pas le choix que de se tenir à l'écart.

Les conflits de compétence ou devons-nous dire le conflit de compétence qui peut exister entre l'autorité des leaders religieux et les textes ou autorités gouvernementales n'en est rien qu'un conflit de fait car en principe tous les deux côtés s'accordent et sont soucieux des idéaux de justice, du bien être social et de la paix sociale, bref de tous les maux qui constituent notre société, mais les avis ou les moyens d'actions divergent si elles ne se contredisent pas.

Pour le dogon, le chef religieux traditionnel incarne l'unificateur, l'impartial mais aussi le chef spirituel auquel il accorde son entière confiance et sa pleine dévotion.

Quel qu'en soit la complexité ou l'embarras d'une affaire, une réponse leur est apportée. Tous les sujets ou cas trouvent ici leur issu en tout cas pour le moins qu'on puisse dire, ce qui ne peut en rien empêcher l'Etat à affirmer sa primauté ou son autorité s'il le faut.

Les deux points qui seront mis en lumière ici sont : les chefs religieux, sont des acteurs de proximité (Paragraphe I) et l'affirmation de la primauté de l'Etat (Paragraphe II.)

Paragraphe I: Les chefs religieux traditionnels acteurs de proximité.

Les chefs religieux dogon étant les premiers responsables de la société dans laquelle ils vivent, sont les premiers ou du moins les privilégiés, quand il y a lieu de solliciter l'intervention d'une autorité dans tel ou tel cas ou situation.

Inutile de jouer aux sourds ou aux aveugles pour les pessimistes de la réalité des faits, plus concrètement de l'existence d'un réel pouvoir de décisions des chefs religieux traditionnels, hautement reconnu et approuvé par les populations locales, car cet état de fait est un fait concret donc, constatable sur le terrain.

En matière successorale, la plupart des cas ou des affaires sont solutionnées sur place c'est à dire par les chefferies traditionnelles. Les intéressés dans ces genres de cas préfèrent ne pas porter leurs affaires devant les autorités politiques ou administratives étatiques, estiment-ils ces autorités publiques ne prennent pas toujours nécessairement en compte les pratiques d'ordre local ou coutumier auxquelles ils sont intimement liés.

Egalement, la succession s'opère sous une forme pouvons-nous affirmer contradictoire aux dispositions et textes existants en la matière. Exemple, cas de décès d'un chef de famille, les héritiers ou successeurs sont les frères directs ou de la famille étendue du défunt et non ses plus proches, épouse(s), enfant(s) comme le prévoit la loi. Ici la succession suit des normes coutumières aux dépens des textes républicains.

Localement soutient-on que c'est pour éviter de se chamailler pour un héritage et également pour éviter, la division ou la dislocation de la famille uniquement sur la succession d'un être cher perdu, çà serait là déranger son sommeil, son repos dans sa nouvelle vie à l'au-delà.

Ne voyons donc pas, cette pratique comme une atteinte aux droits des proches du défunt (épouse(s), enfant(s)), car pratiquement dans la majorité des cas le mariage en lui-même a été célébré dans les normes coutumières sans la participation quelconque de telle ou telle autorité administrative ou politique.

Les chefs religieux traditionnels sont réputés êtres des individus très sages, discrets, respectables et respectés par tous, par conséquent la population adhère à l'idée selon laquelle ces chefs ne rendent aucunement des décisions hâtives ou imprécises.

Notons particulièrement qu'en matière coutumière, les tribunaux de première instance et les justices de paix à compétence étendue sont complétés par des assesseurs de la coutume des parties. N'est-il pas intéressant de le souligner, ces assesseurs ont voix délibérative.

Cette mesure opérée par l'Etat est salutaire car celui-ci ne pouvait se permettre d'ignorer pour le bon fonctionnement de ses institutions, les coutumes locales gages de tout équilibre social. Seulement ces populations locales sont réticentes à adhérer aux systèmes dits modernes instaurés par l'Etat, systèmes qui les ont pris de court et sur lesquels elles sont évidemment moins informées ou mal informées.

Mais de nos jours, progressivement le fossé s'amenuise entre ces deux tendances. Ainsi, nous pouvons dire que les décisions des chefs religieux traditionnels ne contredisent pas pour autant les lois et règlements de la république.

Car de nos jours au Mali les sociétés traditionnelles ignorent la majorité des institutions républicaines existantes ou du moins les méconnaissent. Cela n'est pas fortuit, car depuis des décennies l'Etat n'a manifesté aucune volonté de sensibiliser ces sociétés ou populations qui sont pour autant un des piliers majeurs de développement dans une société.

L'Etat n'est sollicité que et cela est peu fréquent que quand les problèmes dépassent des frontières de ces sociétés et impliquent, des parties hétérogènes c'est à dire de localités différentes ou lointaines.

Mais notons quand même, que cet acte peut être interprété comme un geste d'ouverture ou de reconnaissance, opéré par les autorités traditionnelles à travers leurs chefs à l'endroit des autorités étatiques. Et pour démontrer, aux défenseurs de l'idée selon laquelle il ne peut y avoir de pouvoir décisionnel sous quelle que forme que ce soit autre que celui de l'Etat que ces dites sociétés ne sont et sont loin d'être des hors-la-loi.

Paragraphe II: L'affirmation de la primauté de l'Etat.

L'Etat primant sur tout, son autorité étant une règle qui s'impose à tous, dans les faits celle-ci rencontre des obstacles. Pour bien énumérer cette situation, prenons principalement le thème tant évoqué de l'émancipation de la femme, un sujet cher à l'Etat et sur lequel il compte asseoir son autorité mais, mal compris ou mal interprété voire tabou pour les secondes, à savoir les autorités traditionnelles.

Dans ces sociétés la femme est et doit rester ce qu'elle est entendez par-là, une femme de ménage, une éducatrice des enfants.

Ce que trouve comme idées, archaïques voir hors contexte, notre Etat républicain à travers ses textes, Etat qui se veut égalitaire et qui entend voir tous ses citoyens sur le même pied d'égalité.

Malgré cette conception de la femme dans nos sociétés traditionnelles, les choses évoluent positivement pour celle-ci. Actuellement il n'est pas étonnant de rencontrer au « pays dogon » des femmes accéder à certaines professions ou fonctions locales (Maire, Enseignement, animation socioculturelle...etc.)

Et la femme est en même temps victime de nombreuses brimades liées essentiellement, à la persistance de la coutume et de la tradition dans le droit de la famille.

Notre Constitution aux allures progressistes et modernes s'engage à défendre les droits de la femme et de l'enfant, alors que les conditions de la femme dans une société foncièrement traditionnelle restent encore à améliorer. En fait le droit malien de la famille est basé sur une conception inégalitaire des rapports entre époux.

On pourrait à volonté multiplier l'évocation des textes (du code du mariage au code successoral, etc.) par lesquels notre société ou en tout cas notre législateur, sous le joug des pesanteurs de la tradition et des coutumes, n'est pratiquement pas parvenu à élaborer dans certains domaines des lois qui se soustraient à la difficile conciliation entre tradition et modernité.

D'autre part, le mariage est une institution à laquelle l'Etat s'intéresse, les parties n'ont pas la libre disposition de tous les droits. Celui-ci campe sur la pleine réglementation du mariage ce qui ne va pas sans poser de problèmes, car dans les sociétés traditionnelles, en l'occurrence dans la société dogon le mariage dans la plupart des cas ne, tient pas compte des dispositions légales existantes en la matière. Par exemple, dans la société dogon, généralement le consentement de l'une ou de l'autre partie n'est pas toujours effectif et n'est pas une condition sine quo non de la validité du mariage, car l'on suppose, seul le consentement du futur époux suffit pour conclure le mariage.

Tandis que, selon l'article 16-2 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme « le mariage ne peut être conclu qu'avec le libre et plein consentement des futurs époux ».

Dans ces milieux nul ne conteste que l'homme est, le chef de famille et a une large autonomie quant à l'exercice de la puissance paternelle, des pratiques que trouve dérogatoires aux textes, l'Etat, qui se veut soucieux du respect de l'équilibre social ou familial.

Cela montre à quel point les sociétés traditionnelles à travers leurs chefs ont du poids au Mali mais sont sous le contrôle vigilant de l'Etat, car celui ne veut permettre ou tolérer un libertinage quelconque de la part de ses sujets ou entités.

DEUXIEME PARTIE.

La cohabitation des deux autorités : l'autorité traditionnelle et l'autorité publique.

L'expression pourrait paraître erronée voire détestable à certains. En effet, concrètement quand nous parlons du pouvoir décisionnel des chefs religieux traditionnels aux dépens des lois et règlements en vigueur, cela il ne faudrait pas le comprendre par le sens stricte des termes.

Car les décisions prises par les chefs traditionnels ne sont pas pour autant contraires aux dispositions des lois et règlements, dans la mesure où ces chefs ne rendent les décisions qu'après concertation des différents intervenants dans le système, également les décisions sont rendues au nom de toute la communauté et dans l'intérêt général de celle ci.

Ces sociétés sont des sociétés religieuses traditionnelles plusieurs fois séculaires, si d'aventure il y a une contradiction ou du moins une incompatibilité entre celles-ci et les autorités publiques, cette contradiction n'est pas pour autant manifeste et visible; même si certaines habitudes ou pratiques existantes dans ces sociétés doivent évoluer et nécessiter une certaine amélioration et un certain changement.

A défaut d'êtres uniformes ou égalitaires, ces deux catégories d'autorité doivent et cela dans l'intérêt des deux camps, cohabiter pour éviter une quelconque confrontation ou bras de fer qui peut être fatal pour notre société. Il est important de noter que depuis longtemps les autorités gouvernementales ont su respecter l'ordre dogon et ce dernier persiste.

Dans cette seconde et dernière partie de notre sujet nous soulignerons principalement le fait que la tradition dogon consolide les dispositions relatives aux citoyens (Chapitre I) et qu'une conciliation est indispensable entre tradition et modernité (Chapitre II) afin de pérenniser les acquis démocratiques.

CHAPITRE PREMIER.

La tradition dogon, consolide les dispositions relatives aux citoyens.

En société dogon, rien, n'est vraiment distraction simple. Nous pouvons dire que le profane n'existe pas ici, tout est religieux, tout a un but, tout a un sens. La tradition est la grande école de la vie, dont recouvre et concerne tous les aspects.

Elle peut paraître chaos à celui qui n'en pénètre pas le secret et dérouter l'esprit cartésien habitué à tout séparer en catégories bien définies.

En elle, en effet, spirituel et matériel ne sont pas, dissociés. Passant de l'ésotérique à l'exotérique, la tradition dogon sait se mettre à la portée des hommes, leur parler selon leur entendement et se dérouler en fonction de leurs aptitudes.

Elle est tout à la religion, à la connaissance, à la science de la nature, à l'initiation de métier, à l'histoire, au divertissement et à la récréation, tout point de détail pouvant toujours permettre de remonter jusqu'à l'unité primordiale.

Aujourd'hui dans la société Dogon l'on rencontre des chefs religieux traditionnels de plus en plus animés d'un esprit d'ouverture, toue chose qui facilite le contact, les rapports avec le monde extérieur.

Ce chapitre sera axé sur la complémentarité_ autorité traditionnelle et autorité publique (Section I) et sur l'autorité des chefs religieux dogon dans un contexte intercommunautaire démocratique (Section II.)

Section I: Complémentarité entre autorité traditionnelle et autorité publique.

Dans la société dogon, les principes sociaux, il faut le préciser sont sous le contrôle et la supervision des chefs religieux traditionnels ou du moins ces derniers veillent sur le strict respect et sur l'application correcte de ces principes.

Dans la hiérarchie des normes qui est un classement des règles juridiques dans un ordre hiérarchisé, il est clairement énoncé que les normes de droit inférieur doivent êtres conformes aux normes de droit supérieur. Par exemple la loi doit se conformer à la Constitution, qui est la norme suprême placée au sommet de la hiérarchie des normes dans un Etat.

Ainsi, la pyramide de la hiérarchie des normes se présente comme suit: Au sommet se situe la Constitution. Viennent ensuite les traités ratifiés qui n'ont une autorité supérieure à celle des lois que s'ils sont publiés et appliqués par l'autre partie.

On trouve à un troisième niveau les règlements autonomes ou d'application de la loi, les ordonnances à valeur réglementaire prises par le Gouvernement mais non encore ratifiées par le Parlement.

Au pied de l'échelon se trouvent la notion de coutume et la jurisprudence.

Pour la matière qui nous intéresse ici, la coutume est, « une règle reconnue par tous et résultant en un moment donné d'un ensemble de comportements répétés, constants et clairs7(*) ».

La coutume constitue une source du droit à condition de ne pas aller à l'encontre de la loi. Il est clair que dans le principe la coutume ne doit déroger aux lois et aux règlements, donc ne doit pas être contraire à ces derniers.

Au Mali ici il y a sans doute une multitude d'ethnies donc naturellement il y a évidemment une multitude de coutumes, distinctes les unes des autres dans leur pratique.

De là si l'Etat prenait le risque de laisser à toutes ces coutumes la liberté d'action ou la libre pratique, il s'en sortirait probablement, pas et l'unité du pays serait ou peut être menacée, car le Mali est ``Un Peuple-Un But-Une Foi'', comme le témoigne notre devise nationale.

L'Etat a bien vu de ne pas tomber dans ce piège qui dressait devant lui, en uniformisant les dispositions c'est à dire les règles de gestion de la société malienne dans son ensemble, par l'élaboration des textes applicables à tous les citoyens sans exception de coutume ou d'ethnie.

Pour autant, les lois et règlements ne doivent s'immiscer dans la pratique de la coutume qui est en quelque sorte le miroir des religions traditionnelles ou de la tradition tout simplement afin d'éviter d'éventuelles confrontations avec celle-ci.

Les lois et les règlements sont le fruit de la colonisation, en effet, dès leur indépendance dans les années 1960, les Etats francophones d'Afrique en l'occurrence le Mali, se sont doté de règles inspirées de celles françaises. C'est ainsi que la Constitution du Mali, est largement inspirée de la Constitution française du 04 octobre 1958.

En effet, pétri dans le monde des traditions et des us et coutumes, malgré (ou à cause) son contact avec l'occident, le législateur malien a produit des textes hybrides à cheval entre la tradition et la modernité. Cette situation a, par exemple pour le cas de la femme d'une part accordé d'immenses droits et faveurs à la femme jusque là considérée comme être inférieur et d'autre part, elle a consacré un anachronisme criard qui défavorisait la même femme.

La démocratie est connue et pratiquée dans la société dogon depuis fort longtemps, ce que confirme cette citation de Aimé Césaire dans *Discours sur le colonialisme*(Présence africaine), en parlant des sociétés africaines précoloniales ''S'étaient des sociétés communautaires, jamais de tout pour quelques-uns; S'étaient des sociétés pas seulement ante capitalistes, mais aussi anticapitalistes.''

Ainsi, nous pouvons affirmer que même de nos jours dans certaines zones certains de ces traits des sociétés précoloniales n'ont pas totalement disparus. Mais, malgré l'évolution rapide des habitudes et comportements, il serait impossible de faire table rase du passé sinon ça serait suicidaire culturellement parlant.

Les droits de l'Homme existent et sont respectés dans les sociétés traditionnelles, principalement dans la société Dogon depuis la nuit des temps et nous ne cesserons de le répéter, l'autorité traditionnelle incontestablement complémentaire avec celle étatique.

Ainsi, au niveau même, des autorités publiques la coordination est un des principes recommandés sinon exigés dans la prise de décisions.

Pour mieux expliquer la complémentarité entre ces tendances nous mettrons l'accent sur la coordination dans la prise de décisions dans les autorités traditionnelles comme c'est le cas au niveau des autorités étatiques (Paragraphe I) et les zones dans lesquelles il y a concordance entre elles (Paragraphe II.)

Paragraphe I: Autorités traditionnelles: coordination dans la prise de décisions.

Chez les Dogon l'organisation sociale est telle que rien n'a été négligé, la prise des décisions par les chefs religieux s'effectue dans une chronologie bien soignée et bien déterminée, aucune étape n'est brûlée, aucune erreur n'est admise.

Le hogon d'une zone pour prendre une décision importante, envoie un message, dans le sens large du terme car le message n'est pas en soi un écrit mais constitué par des signes rituels que seuls les initiés peuvent déchiffrer.

Pour transmettre un message d'un village à un autre, d'une zone à une autre, le chef religieux fait appel aux griots ou crieurs publics. Ces derniers sont les messagers, les conseillers du chef, et sont également les mobilisateurs de foule en temps de divers travaux collectifs ou encore dans les champs de bataille dans le temps. Ils embellissent l'histoire, les circonstances pour leur maître pour qu'il soit très fier du passé glorieux de ses ancêtres mais également de sa propre personnalité. Ils sont les détenteurs de l'histoire et sont souvent qualifiés de médiateurs.

Dans le passé et aujourd'hui encore, les griots sont sollicités dans la résolution des crises : raisonner des individus, des villages en conflit ou en litige. Ils sont sous l'autorité du chef religieux et sont au service de celui-ci.

La toguna ou « abri de la parole », est le lieu privilégié pour les débats et décisions importantes. Elle appartient aux hommes d'un même lignage, à l'exclusion des femmes. C'est le lieu de la parole, de la discussion des affaires du village par les ancêtres qui y passaient leur journée à y donner des conseils aux jeunes gens et à rendre des jugements.

Tous ceux-ci entrent dans le cadre de la transmission des savoirs des anciens aux jeunes qui sont les futurs représentants de la tradition.

Dans la société dogon les femmes n'entrent pas directement dans le processus du fonctionnement de la religion traditionnelle. Il est de même qu'il n'y a pas de chef religieux femme, mais leur concours est indispensable dans la pratique de la religion traditionnelle et elles jouissent d'une grande autonomie.

Chez les dogons l'organisation communautaire est une réponse de la vie sociale. C'est ainsi que chez les dogons on évite l'anarchie.

Paragraphe II: Les zones de concordance.

Dans bon nombre de domaines, l'autorité traditionnelle et l'autorité politique sont, compatibles et peuvent parfaitement être complémentaires.

Dans certains cas des règles de nature coutumière vont s'appliquer en vertu d'une prescription formelle du législateur dans ce cas la coutume a un pouvoir qui lui est contesté par personne.

Dans les articles 80 et 102 du code du mariage et de la tutelle la loi se réfère de façon expresse à la coutume quand elle dit qu'après la dissolution du mariage par décès ou par divorce, il sera constaté par les moyens généralement admis que la femme n'est pas enceinte des oeuvres de son mari. De même l'article 58 du code de la parenté dit que l'adoption protection a lieu selon les règles de la tradition.

La coutume en tant qu'usage ou pratique entre virtuellement dans l'analyse de certaines notions légales de telle sorte pour appliquer ces notions le juge doit se livrer à une appréciation selon la coutume. Par exemple l'on dit qu'une personne qui est chargée d'administrer ou de conserver le bien d'autrui doit agir en bon père de famille comme s'il était un propriétaire dirigeant et soigneux.

Cela implique que pour juger, il faudrait se reporter à l'usage couramment effectué par les pères de familles exemplaires.

La loi parle souvent de notion de faute, en disant que l'on doit réparer les dommages, que l'on a causé par sa faute personnelle, mais elle ne, définie pas cette notion. Par conséquent le juge va se référer à la coutume.

Lorsque la coutume complète la loi on parle de coutume praeter legem. Ici on à faire à des situations où la coutume s'applique de façon autonome indépendamment de la loi. Ce rôle de la coutume a été contesté au motif qu'on ne peut admettre la force obligatoire de celle-ci en dehors de la prescription de la loi.

En défaveur de cette argumentation il faut dire que la coutume est une règle différente de la loi, aussi rien ne s'oppose à ce que la coutume puisse intervenir sans renvoi du législateur en cas de lacune du droit légiféré.

Jean Etienne Porthalis jurisconsulte français, l'avait déjà admis dans le discours préliminaire par lequel il présentait le projet de code civil dans les termes suivants: « A défaut d'un texte précis sur chaque matière, un usage ancien, constant et bien établi tient lieu de loi ».

En fait les cas d'intervention de la coutume sont rares en droit civil parce que lorsqu'une question soulève un conflit d'intérêts importants, elle est réglée par la loi ou la jurisprudence avant qu'une coutume ait eu le temps de se former.

On peut citer comme exemple la coutume qui veut que la femme porte le nom de son mari. On peut également considérer comme étant une règle coutumière la preuve de la qualité d'héritier.

De nos jours avec la mise en oeuvre de la décentralisation, les sociétés, jadis perplexes à la modernité ou au changement se sentent désormais, concerner dans la gestion des affaires publiques et s'intéressent d'avantage au rôle des autorités administratives et politiques de l'Etat; toute chose qui fortifie les rapports entre elles.

Egalement, la diffusion de l'information envers celles-ci est aujourd'hui rendue possible à travers la création de nombreuses radios de proximité.

La politique de la décentralisation de l'école ou de l'éducation au niveau primaire et fondamental, est révolutionnaire et louable de la part de l'Etat malien.

La création de centres pédagogiques, multifonctionnels et d'alphabétisation mais surtout, de centres de santé communautaire, plus pratiques et plus proches des populations sensibles, mise en oeuvre par l'Etat avec le concours des partenaires au développement, est salutaire. Sont également salutaires les récentes mesures prises par l'Etat en matière de sécurité alimentaire, mesures favorisant la création de nombreux magasins de stockage de céréales à travers toutes les collectivités territoriales pour épauler les populations rurales pendant les moments défavorables et cruciaux.

L'idée est bonne voire même géniale, mais dans la pratique l'effet escompté est dérisoire car il se situe largement en deçà des attentes des populations et, manifestement celles-ci sont largement déçues de cette situation.

Par ailleurs, l'éducation étant le moteur de développement d'une nation, il est naturellement décevant de constater que tous les modes d'éducation en voie de disparition n'ont pas été pris en charge dans les programmes d'éducation dont l'école est le principal levier.

Section II: L'autorité des chefs religieux dans un contexte intercommunautaire démocratique.

Les chefs religieux traditionnels jouissent d'une renommée et d'une autorité, non négligeables au sein de leur communauté et ont au moins deux casquettes : d'abord représentants des populations et ensuite auxiliaires de l'administration.

Principalement un domaine nous semble être le mieux indiqué pour expliquer la nécessité de l'autorité traditionnelle dans ce monde plus que jamais dominé pour la modernité et marqué par une fuite incessante vers l'avant à savoir le domaine de la décentralisation dans un premier paragraphe et pour compléter cette section, l'important nous semble être de savoir ou de mettre l'accent sur les avis des populations dogons sur l'autorité de leurs chefs religieux dans un second paragraphe.

Paragraphe I: Dans le domaine de la décentralisation.

Les chefs traditionnels ont beaucoup d'appréhensions par rapport à ce sujet ou domaine dit de la décentralisation. Leurs craintes sont relatives à la perte de pouvoir, de légitimité, de territoires qu'engendrent la communalisation, en tout cas le morcellement des territoires en centres décentralisés de plus en plus nombreux et qui se dotent d'une certaine autonomie vis-à-vis des premiers

Depuis l'avènement du processus démocratique et l'émergence de nouveaux acteurs sur l'arène locale, leur pouvoir a considérablement diminué, ce qui justifie leurs craintes :

- Certains de leurs administrés sont devenus des militants des partis politiques, d'ONG, d'associations, et échappent ainsi à leur contrôle ;

- L'administration locale est devenue partisane, elle les écoute de moins en moins et s'accapare certaines de leurs prérogatives ;

- La présence d'une délégation judiciaire et d'association de droits de l'homme offre plusieurs possibilités de recours quant à leurs décisions en matière de règlements de conflits ;

- Les projets de développement traitent directement avec les populations, les ONG et Associations, alors que l'attribution des opérations de développement était devenue, il y a quelques années une source de légitimation pour les chefs ;

- Les députés et les autres cadres nationaux tendent de plus en plus à se substituer à eux dans la représentation des populations et le règlement des conflits.

Tous les nouveaux acteurs de l'arène locale se sont en fait, établis aux dépens d'une parcelle de leur pouvoir.

Leurs relations avec les autres acteurs sont ambiguës, faites de suspicion du foncier ou du règlement litigieux et des attributions respectives. Il y a conflit de compétences entre les conseils municipaux et les chefs traditionnels, d'où la nécessité de l'adoption des textes adaptés et très précis fixant les attributions ou compétences de tout un chacun.

Dans des zones comme, la presque entière partie du « pays dogon » où il y a une faible présence de l'Etat, les structures traditionnelles ont survécu aussi bien à la période coloniale que post-coloniale, et les gens ont gardé leurs formes traditionnelles d'organisation sociale.

Les structures traditionnelles restent très importantes dans l'organisation de la vie des gens au niveau local en dépit des structures de l'Etat moderne. Les autorités traditionnelles, par exemple, règlent la vie du village, contrôlent l'accès à la terre, et règlent les conflits.

L'existence des autorités traditionnelles signifie que la décentralisation ne se fait pas dans le vide. L'expérience récente a montré que pour réussir la décentralisation il faut tenir compte des structures traditionnelles existantes. Bien que l'opinion répandue a été qu'elles sont un fardeau historique sur la route de la modernité, il est maintenant largement reconnu que pour beaucoup de gens, les structures traditionnelles sont souvent plus légitimes que l'Etat moderne.

Dans beaucoup de cas, les gens acceptent les structures traditionnelles en raison des échecs du gouvernement central à mettre en place des structures fonctionnelles au niveau local. Se fier aux normes et aux règles traditionnelles est non seulement compréhensible mais également tout à fait raisonnable particulièrement lorsqu'il n'y a aucune meilleure alternative.

Si l'Etat ne peut pas améliorer de façon significative la vie des gens au quotidien, il n'est pas surprenant que les gens continuent à vivre selon leurs structures et leurs règles traditionnelles sans trop faire attention au gouvernement central.

En ôtant tout pouvoir réel de décision aux autorités traditionnelles, la décentralisation marque une rupture avec l'ordre ancien. L'organisation harmonieuse du pouvoir de décision entre les autorités communales désignées par la loi et les autorités traditionnelles aurait du être une des originalités de la décentralisation au Mali.

La non implication effective des autorités traditionnelles dans l'exercice du pouvoir a abouti à un ``déficit de conscience citoyenne'' car dans la plupart des cas, l'autorité communale traite directement avec le citoyen sans se référer à son chef traditionnel qui a un ascendant sur lui. Il convient de noter que les difficultés de mobilisation actuellement constatées et la faiblesse de recouvrement des taxes sont en partie liées à cette situation.

Dès lors, il importe de réhabiliter les chefs traditionnels afin qu'elles puissent mieux jouer leur rôle dans la mise en oeuvre du processus de décentralisation.

Mais les chefs religieux traditionnels gardent une capacité de nuisance, notamment en tant que garants des valeurs traditionnelles et sont incontournables dans la résolution des conflits. Il ne fait aucun doute que ces dits chefs ont perdu leur influence d'antan au profit des nouveaux leaders politiques.

Mais toujours est-il qu'ils ont gardé le monopole du pouvoir coutumier aux mains des grandes familles régnantes actuelles et de leurs descendants.

Egalement ces chefs tout en se maintenant plus ou moins sur le terrain politique, opèrent un glissement vers le développement.

En effet, ceux-ci sont de plus en plus sollicités dans le cadre de la sensibilisation des populations.

Paragraphe II: Avis recueillis sur l'autorité des chefs religieux dogon.

Suite à notre descende sur le terrain nous avons effectué un sondage auprès des populations dans un certain nombre de villages dogon, sur l'importance et le respect qu'accordent les citoyens dogon aux chefs religieux traditionnels, mais également sur l'autorité et l'avenir de la religion traditionnelle dans la société dogon.

Nous, nous sommes rendus pour la circonstance successivement à Nombori (Cercle de Bandiagara), à Bankass et à Dinangourou (Cercle de Koro).

Entre 75 et 80% des personnes interrogées dans ces trois localités affirment approuver le pouvoir décisionnel à savoir l'autorité des chefs religieux traditionnels, car selon eux ces chefs sont des personnalités qui ont un sens très élevé de la spiritualité et réaffirment leur sympathie pour la religion traditionnelle et ses rites.

Ce résultat est évocateur de la place prépondérante de la religion traditionnelle chez la plupart des dogon, cela de nos jours dans un monde où l'on assiste constamment à la création de nouvelles religions ou du moins de nouveaux courants religieux et où la religion est utilisée à des fins personnelles ou utilisée comme un outil financier ou de propagande.

Globalement entre 85 et 90% de la totalité des individus interrogés affirment pratiquer d'autres religions et se proclament êtres croyants de ces religions, sans pour autant, dénier leur appartenance ou affection plus ou moins forte à la religion traditionnelle. Ils pratiquent ainsi une sorte de syncrétisme qui les protège doublement.

Entre 10 et 15% d'entre eux, nous confient avec une certaine incertitude perceptible que les chefs religieux n'ont plus leur place dans notre société actuelle dans un XXI è siècle en plein bouleversement et en plein essor, dans lequel la modernisation touche presque tous les secteurs de la société, donc de la vie.

Il est intéressant de noter que cet échantillon d'individus perplexes ou pessimistes quant à la réelle importance des chefs religieux traditionnels vit dans la plaine, comme pour dire qu'il est plus facile de contester le rôle de ces chefs à la plaine que sur les falaises ou le plateau.

Cette réticence n'est que temporaire car ils sont parfaitement conscients du fait que quand leur tour arrivera de s'installer eux aussi sur les falaises ou plateau, cette idéologie s'éclipse nettement.

Mais la grande majorité des personnes approchées estiment être conscientes du fait que toutes nos moeurs et traditions ne doivent pas être ignorées ou abandonnées à une ère où chacun est à la recherche d'une vraie identité, une identité qui lui est singulière; même si elles sont d'accord que certaines mentalités et pratiques doivent nécessairement voir indispensablement pour ne pas être sur le côté du sens inverse du goudron qui mène vers un développement plus ou moins épanouie ou encore de ramer à contre courant c'est à dire à aller l'encontre de la mondialisation.

CHAPITRE II.

Conciliation indispensable entre tradition et modernité.

Il le faut bien car aucun domaine de notre vie sociale n'échappe désormais à la difficile conciliation entre tradition et modernité.

Qu'il s'agisse du mariage, de l'éducation des enfants, du comportement vestimentaire, de l'excision, de l'habitat, de la promotion de la femme, du traitement des maladies, de la consultation maraboutique, de l'hospitalité, de la célébration de nos rites ou du respect des tabous, rien dans le quotidien du dogon n'est épargné par le conflit permanent engagé entre les deux tendances.

De fait, notre société malgré sa tendance à embrasser des canons universels se laisse aller à des comportements dominés par des tabous aux relents purement archaïques.

Mais qu'est-ce qu'un tabou? Nous pouvons définir un tabou comme étant un interdit social et moral à caractère religieux ou coutumier. Le même interdit ne s'applique pas uniformément à tous les Maliens. Il change selon les ethnies et les religions.

Participent à la perpétuation de l'ordre ancien, les tabous servent à imposer le respect de certaines croyances anciennes.

Mais s'il y a un domaine de notre culture où le difficile mariage entre tradition et modernité crée le plus de tension, c'est incontestablement celui de l'excision.

Pratiquée depuis la nuit des temps dans notre société, l'excision était une réjouissance populaire qui créait l'affection et réactivait les liens de parenté. C'est un phénomène qui a des racines mythiques fortement ancrées dans le subconscient du plus grand nombre des dogon, d'ailleurs des maliens qui croient fermement que « une femme n'est femme que lorsqu'elle est excisée ». Alors doit-on interdire une telle pratique à l'aide d'une loi ?

Nous estimons qu'il faut laisser le temps au temps qui se chargera de faire disparaître cette pratique. « L'excision mourra d'elle-même », tandis qu'une forte surmediatisation ne ferait que rendre furieuses ou septiques, les populations qui la pratiquent, sur la motivation réelle des détracteurs de l'excision.

Nous constatons également que l'Etat républicain n'a élaboré pratiquement pas de textes clairs et précis portant sur la non légitimité ou l'abrogation des autorités traditionnelles, si ce n'est que quelques dispositions larges tendant à ignorer celles-ci ou du moins à les uniformiser; car il faut le savoir, ces dites autorités sont multiples et diverses ce qui peut poser problème si on n'arrivait pas à les contrer ou contrôler.

D'une certaine manière l'Etat approuve implicitement la légitimité et les pouvoirs qui sont reconnus à ces chefferies traditionnelles.

Et on peut prétendre dans ces conditions que le silence vaut acceptation ou plus explicitement que qui ne dit mot, paraît consentir.

Par ailleurs, il est judicieux d'admettre que les sociétés traditionnelles sont les seules garantes et témoins de nos valeurs séculaires, de notre identité propre à nous dans un monde en pleine mutation et, dans lequel une société sans identité est vouée à disparaître.

L'analyse de ce chapitre portera sur la capacité d'adaptation au changement des sociétés dites traditionnelles (Section I) et sur la persistance de la tradition (Section II.)

Section I: Capacité d'adaptation au changement.

Le penseur l'a dit, et l'avenir le démentira, certainement pas, unique l'expérience l'a prouvé: seul le changement est constant. Notre société change au fil des ans et avec, elle, notre culture.

Certaines pratiques considérées il y a trente à quarante ans comme des valeurs sûres de civilisation ne font plus l'objet de la même considération.

Sous l'effet de l'évolution et de la modernité, les mythes, les tabous et autres interdits tombent ou s'effritent. Mais tous ne disparaissent pas.

Quelques-uns uns resurgissent au gré des hommes, des circonstances et des époques.

Le Malien en général, en particulier le dogon, vit un pied dans la tradition, l'autre dans la modernité. La tradition est souvent pesante, la modernité n'est pas toujours enchanteresse. On pourrait le voir comme un arbre, dont la souche est fortement implantée dans le sol et les branches tournées vers l'extérieur.

Cette dualité aurait été des plus vivables si de fait elle ne représentait pas trop souvent le mariage de la carpe et du lapin. Les comportements les plus progressistes et les plus cartésiens alternent avec les agissements les plus rétrogrades frappés du sceau de l'anachronisme.

Là, réside une contradiction fondamentale: placé au seuil du 21è Siècle, l'homme dogon y entre en crabe, pas franchement moderne, mais plus entièrement traditionaliste.

Les habitudes traditionnelles de ces autorités traditionnelles connaissent de réelles améliorations ou avancées de nos jours.

C'est ainsi qu'on voit de plus en plus de localités traditionnelles faire recourir à certaines méthodes qui leurs étaient étrangères ou qui ne faisaient l'objet de leur attention.

Mais aujourd'hui certaines chefferies procèdent par écrit pour établir la liste exhaustive de tous les villages ou de tous les hauts personnages originaires ou dépendant de leur ressort, pour déceler lors des différentes cérémonies religieuses et des travaux communautaires la présence, la participation ou non de tel ou tel village ou individu.

Il nous convient ici d'évoquer cette nécessité d'adaptation au changement d'abord dans le domaine matrimonial (Paragraphe I) et en matière coutumière ou plus précisément dans le domaine socioculturel (Paragraphe II.)

Paragraphe I: Dans le domaine du mariage.

Dans le domaine qui est celui du mariage, nombre de considérations d'ordre culturel déterminent encore les choix et conditionnent la réussite des ménages.

Ainsi, parmi les principaux blocages, on peut relever la question des mésalliances et la problématique de la polygamie. Dans l'un comme dans l'autre cas, les préjugés, les superstitions, les interdits traditionnels continuent de peser socialement, de manoeuvrer les freins psychologiques et de limiter les degrés de liberté individuelle.

D'un autre côté, la modernité développe en même temps une liberté sexuelle qui, souvent s'exerce malheureusement sans conscience et sans responsabilités individuelle et sociale.

En effet, au moment où le mariage est « libéralisé » officiellement selon l'esprit du renouveau et de la modernité, l'interdiction de mariage entre noble et griot ``homme de caste'', entre Dogon et Bozo lève un coin de voile sur les multiples contradictions de notre société.

La dualité est si forte que même au niveau des contrevenants à cette règle, il subsiste une réelle appréhension après la transgression de l'interdit.

Il suffit par exemple, qu'au sein d'un même couple composé de noble et d'homme de caste, persistent un malentendu ou une infertilité pour que la tradition rattrape vite la modernité dans l'esprit du couple.

Ce dernier se mettra à se poser des questions sur la justesse de son choix. « Aurions-nous dû faire cela, notre malheur n'est-il pas dû à notre mépris pour les interdits? » Se lamentent-ils sans cesse.

Les mariages interethniques, interconfessionnels et interprofessionnels sont de nos jours de plus en plus faciles. Mais il n'empêche, qu'ils restent toujours tributaires de l'application souvent non conçue de la dot.

Celle-ci reste encore un blocage culturel de notre société moderne malgré la forte progression au concubinage et aux unions libres, ce qui pose du coup la question de « la valeur marchande du mariage ».

En effet, sous la modération, le mariage de dignité et d'honneur se remplace progressivement par le mariage d'intérêt. La tendance est inexorablement favorisée par ce qu'on appelle « le travestissement de l'économie qui appauvrit les pays sous développés8(*) ».

Le difficile passage d'une habitude de mariage traditionnel à une alliance où seul le matériel prime constitue, un hiatus négatif avec son cortège de divorces, d'humiliation et de ruptures de rapports sociaux. D'où la problématique de la cellule familiale dont le visage change selon que l'on soit en campagne ou en ville. Ou selon qu'il s'agisse des instruits ou des analphabètes.

Le mariage traditionnel n'étant pas reconnu par la loi, l'affirmation de sa validité peut être assujettie par certains modes de preuve généralement admis pour un cas civil comme celui du mariage sont entre autre l'aveu c'est à dire reconnaître les faits personnellement, le serment c'est à dire jurer sur une divinité ou un haut symbole avec lequel la personne concernée a une affinité étroite, pour un dogon par exemple, jurer sur le « bahbinru9(*) », le témoignage s'il y a un témoin qui, atteste les faits donc le mariage ou s'il y a concordance d'idées de plusieurs témoignages sur le même sujet.

Paragraphe II: Dans le domaine socioculturel.

Le mariage entre ces deux tendances n'est pas évident. Fortement influencé par les idées et les attitudes que lui communiquent les médias modernes, mais continuant à se référer aux vestiges plus ou moins actifs de son éducation traditionnelle, le citoyen dogon est continuellement tiré à hue et à dias.

La culture dogon se trouve à la croisée des chemins. Elle doit servir d'inspiration pour une société qui cherche de manière souvent désespérée ses repères, mais a-t-elle suffisamment évolué elle-même pour pouvoir donner des réponses satisfaisantes à ceux qui la sollicitent?

D'une part il faut noter que les tabous engendrent souvent des superstitions qui sont facteurs de retardement, car elles sont filles de l'ignorance et ne survivent que grâce à celle-ci.

Un très grand nombre de dogon croient encore par les temps qui courent aux présages et aux influences occultes. Cette disposition d'esprit les rend vulnérables à toutes sortes d'impulsions instinctuelles qui sollicitent leur être profond et l'emporte vers les sphères sécurisantes des traditions.

C'est dans cette optique que l'on peut situer ces interdits qui, empêchent dans certains milieux, aux femmes qui présenteraient des signes distinctifs dits maléfiques; ou qui empêchent les nobles de s'adonner à des travaux comme ceux de la forge. Même, lorsque cette activité est rémunératrice.

Section II: La persistance de la tradition.

Dans nos sociétés certaines traditions frappent d'interdit des actes, des objets ou même des êtres auxquels elles confèrent un caractère sacré ou impur.

Ces interdits communément appelés totems sont issus d'alliance ou de solidarité ayant existé entre les ancêtres d'une famille, d'un clan et un objet ou animal particulier. L'observation de ces interdits, est censée préserver des effets néfastes qui frapperaient tout contrevenant.

Les pratiques individuelles et sociales qu'impose l'observation des tabous sont donc des comportements culturellement caractéristiques. Psychologiquement elles sécurisent et sont vécues par ceux qui s'adonnent comme des valeurs culturelles.

Pourtant si les tabous dans certains de leurs aspects peuvent ralentir notre processus de développement avec leur caractère souvent réfractaire au changement, ils ne constituent pas pour autant, un problème insurmontable pour la construction d'une modernité inclusive à la fois de valeurs traditionnelles positives et de connaissances scientifiques et technologiques modernes.

En tout cas faut-il le reconnaître les tabous sont des phénomènes socioreligieux qui existent toujours dans une société, quel que soit son degré de développement. Il y a toujours dans l'inconscient collectif, affirme-t-on, des interdits et des comportements irrationnels qui provoquent des blocages collectifs ou individuels.

C'est pourquoi, même dans notre société moderne, le tabou de la malédiction est une donnée fondamentale de notre culture. Elle consacre par exemple le sacro-saint principe selon lequel « qui délaisse ses parents, sera délaissé à son tour par ses enfants ».

Les tabous résistent donc à la modernité, mais ils subissent en même temps l'effet de celle-ci. En effet, dans les centres urbains et dans les milieux des instruits et des expatriés, les gens croient de moins en moins aux tabous qui ne sont, que partiellement définis et « négativisés » par l'occident et ses disciples africains; et donc le tabou est une lecture méprisante et culpabilisante de notre société par les instruits. Certains tabous peuvent tomber, mais, ils sont toujours remplacés par de nouveaux. Il n'y a pas cependant que les tabous qui soient source de blocage culturel, le Dogon moderne rencontre aussi dans des domaines du mariage et de la promotion de la femme de vieux réflexes culturels qui ont encore la vie dure.

La persistance de la tradition est imputable à l'Etat et plus précisément à deux situations majeures successivement l'inadaptation des textes (Paragraphe I) et nous estimons qu'il faut passer de la théorie à l'acte en faisant de l'adage ``nul n'est sensé ignorer la loi'' une réalité (Paragraphe II).

Paragraphe I: L'inadaptation des textes.

S'il y a dérogation aux lois et règlements du fait de la pratique des religions traditionnelles et de l'existence de l'autorité des chefs religieux traditionnels il n'en est rien qu'une certaine méconnaissance des textes.

La théorie selon laquelle toute loi est supposée connue après publication et l'adage qui s'en suit: « Nemo censetur ignorare legem » qui signifie « nul n'est sensé ignorer la loi » n'est pas effective car pratiquement dans ces sociétés traditionnelles le pouvoir étatique est sous représenté ce qui soutient la thèse de l'inaction voire même de l'absence de certains services de l'Etat.

Par ailleurs cette théorie est paradoxale dans la mesure où une très large partie des citoyens maliens sont, analphabètes, et simultanément on (l'Etat) prend des dispositions, on vote des lois au nom des citoyens, mais on ne les explique pratiquement guère le sens ou le contenu de ces lois, pourtant ils sont un des premiers concernés, c'est regrettable comme situation.

La coutume est un droit populaire et ce droit est né du peuple lui-même et c'est son usage qui devient le droit tandis que la loi est formulée par les seuls gouvernants et imposée par eux issu du peuple lui-même.

Le droit coutumier est exactement ce qui convient à sa nature et répond à ses besoins, il se modifie quand ses besoins se modifient car l'usage change alors la loi au contraire n'évolue pas en même temps que la société elle, est souvent en retard et quand une reforme intervient elle arrive parfois trop tard et se heurte à l'opinion.

C'est pourquoi il n'est pas étonnant de voir des textes ou lois votées, mettre des années à s'appliquer car, ne suivant pas l'évolution sociale. Donc il sera judicieux de reconnaître que cette règle est loin sans contenir des exceptions à que la précision de ses termes.

Paragraphe II: Faire de l'adage ``nul n'est sensé ignorer la loi'' une réalité.

Voici un adage qualifiable presque d'une pure théorie voire utopie qui, dans la pratique ne répond pas aux nombreuses questions qui restent sans réponse adéquate ou en suspend.

Pourquoi parle-t-on français ou le doit-on dans les services étatiques ou devant les autorités publiques alors que les citoyens dans leur majorité ne, le parlent et le comprennent ?

L'Etat doit prendre ses responsabilités dans cet état de fait de non reliment ou de non jonction de la théorie à la pratique c'est à la fois vouloir une chose et son contraire. Et par conséquent, l'Etat doit mettre en oeuvre tous les moyens susceptibles de le promouvoir ou de le concrétiser dans les faits cet adage qui semble pour l'instant n'être qu'une parfaite théorie.

Et par ailleurs est clairement indiqué que la loi est supposée connue dès sa publication au journal officiel. La question qui se pose est de savoir si combien sont les citoyens capables et à mesure de lire ce journal officiel dans un pays à populations majoritairement illettrées.

Si nul n'est sensé ignorer la loi alors à quoi sert la création des prisons dans la mesure où l'on considère que la loi est supposée connue de tous sans exception.

Nous pouvons ainsi dire qu'encore une fois, cet adage allonge la liste des dispositions qui témoignent d'une certaine ineptie du législateur donc de l'Etat, quant à leur adaptabilité réelle, car nous ne cesserons de le répéter et de le rappeler, les textes dans la plupart des cas ne sont pas harmonisés avec le présent ou, ne suivent pas les réalités socioculturelles et économiques du présent.

CONCLUSION.

En définitive, nous remarquons que dans l'ensemble, la convergence est plus importante que la divergence dans la cohabitation entre les autorités, traditionnelle et celle de l'Etat.

Les chefs religieux en tant que, acteurs de proximité, mais aussi garants de la tradition bénéficient largement de la confiance des populations, bien que l'autorité de l'Etat ne soit pas mise en cause par celles-ci.

Mais force est de reconnaître dans le principe ces deux tendances d'autorité ne sont pas aussi contradictoires que çà, comme beaucoup seraient tentés de le soutenir.

Car l'autorité traditionnelle comme celle étatique ont pour but la préservation de l'intérêt général et de veiller sur l'application et le respect strict des principes sociaux ou des textes.

Sans vouloir créer de polémique, nous estimons que l'avenir des autorités traditionnelles ou chefs traditionnels est morose voire incertain du point de vue social, car leur autorité sera de plus en plus contestée et cela risque de les réduire au silence et d'affecter sérieusement leur légitimité.

Mais une alternative est pour ces autorités traditionnelles de suivre ou de combiner avec l'évolution du temps et de refuser de demeurer éternellement contre le changement ou la modernité.

Quant à l'Etat il doit ménager avec les autorités traditionnelles afin d'éviter que ses citoyens ne puissent paraître à des morceaux de bois dans l'eau. D'où cet adage « quel qu'en soit la durée d'un morceau de bois dans l'eau il ne se transformera jamais en caïman »; c'est dire combien il est important voire indispensable pour nous de tirer notre épingle du jeu de la mondialisation sinon c'est la disparition assurée de nos moeurs et traditions et de notre identité propre à nous.

Nous devons combiner les meilleurs aspects des deux modes de civilisation ou du moins de culture pour faire un mariage réussi entre tradition et modernité.

En contradiction avec la volonté des ancêtres, l'évolution lui est aujourd'hui imposée. Comment réagira-t-il alors l'homme de la tribu ? La réponse est capitale pour nos sociétés de demain. Si les esprits évolués ont le bon sens et la patience de préserver le plus précieux du passé et de le fondre avec les éléments du présent on peut attendre de nos sociétés quelque chose de magnifique pour l'avenir.

BIBLIOGRAPHIE.

I. Ouvrages généraux :

Anta Diop, C- L'unité culturelle de l'Afrique noire. Présence Africaine éd., Paris, 1982.

Abeles.M ? C.Collard (dir.) 1985. Age, pouvoir et société en Afrique noire. Paris. Karthala.

II. Ouvrages spécialisés :

Dieterlen, Germaine, le titre d'honneur des Arou (Dogon-Mali), mémoire des sociétés Africanistes, Paris, 1982.

Bouju, Jacky « Qu'est-ce que ``l'ethnie'' dogon ? », Cahiers des Sciences Humaines de l'ORSTOM XXXI (2), Paris, 1993.

III. Textes législatifs :

Constitution du 25 février 1992 de la République du Mali, Bamako. Secrétariat du gouvernement.

La loi n°62-17/AN-RM du 03 février 1962 portant code du mariage et de la tutelle.

La loi n°95-034/ portant code des collectivités territoriales.

Le décret n°95-210/P-RM du 30 mai 1995 déterminant les conditions de nomination et les attributions des représentants de l'Etat au niveau des collectivités territoriales.

IV. Revues :

Diakité, D. « Histoire du peuplement dogon d'après les écrits », Jamana (Revue culturelle malienne).

L'Essor, Mali 2000, Hors-série, janvier 2000.

Die magische welt der Dogon, Kunst, Kult und Hirse in westafrika, Museum für völkerkunde Hamburg, 2004.

TABLE DES MATIERES.

Introduction 1

Première partie

Le pouvoir des chefs religieux dogon 5

Chapitre I : Statut et autorité des chefs religieux dogon 7

Section I : Classification sociale des chefs religieux dogon 7

Paragraphe I : L'importance sociale des chefs religieux 7

Paragraphe II : Les chefs religieux auxiliaires de l'administration 8

Section II : L'autorité des chefs religieux dogon 9

Paragraphe I : Les chefs religieux dogon garants des valeurs ancestrales 10

Paragraphe II : La force obligatoire des décisions des chefs religieux 12

Chapitre II : Points de divergence entre l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat 14

Section I : Différences de forme 14

Paragraphe I : Dans le domaine du foncier 15

Paragraphe II : Dans le règlement des litiges 16

Section II : Conflits de compétence 19

Paragraphe I : Les chefs religieux, acteurs de proximité 20

Paragraphe II : L'affirmation de la primauté de l'Etat 21

Deuxième partie

La cohabitation des deux autorités : autorité traditionnelle et autorité publique 23

Chapitre I : La tradition dogon, consolide les dispositions relatives aux citoyens 25

Section I : Complémentarité_ autorité traditionnelle et autorité publique 25

Paragraphe I : Autorités traditionnelles : coordination dans la prise de décisions 27

Paragraphe II : Les zones de concordance 28

Section II : L'autorité des chefs religieux dans un contexte intercommunautaire démocratique 30

Paragraphe I : Dans le domaine de la décentralisation 30

Paragraphe II : Avis recueillis sur l'autorité des chefs religieux dogon 32

Chapitre II : Conciliation indispensable entre tradition et modernité 34

Section I : Capacité d'adaptation au changement 35

Paragraphe I : Dans le domaine du mariage 36

Paragraphe II : Dans le domaine socioculturel 37

Section II : La persistance de la tradition 38

Paragraphe I : L'inadaptation des textes 39

Paragraphe II : Faire de l'adage ``nul n'est sensé ignorer la loi'' une réalité 39

Conclusion 41

Bibliographie 42

* 1 Peuple, qui occupait l'actuel « pays dogon » avant l'arrivée des dogons.

* 2 Le benjamin des quatre clans ou familles dogon originaires du Mandé.

* 3 Prof. D.Tessougué, Cours droit civil, Maîtrise Droit privé.

* 4 Langage des masques, très codifié dont seuls les initiés peuvent parler et comprendre.

* 5 Esprits invisibles, dotés de pouvoirs surnaturels (esprits protecteurs mais peuvent devenir dangereux si on en frein à leurs lois ou règles.

* 6 Littéralement, manger le sacré ou la sollicitation des esprits juges pour la résolution d'un litige.

* 7 V. Lexique de politique, Dalloz 6ème édition 1992, page 132.

* 8 Pascal Baba Coulibaly ; L'Essor-Mali 2000 : Hors série, janvier 2000.

* 9 L'interdit parental ou clanique, le totem familial (ancestral).






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