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Les populations rurales du Burkina Faso à  l'épreuve du déboisement : l'exemple du département de Toma

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par Jean Paulin KI
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - DEA en sociologie 2009
  

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Conclusion partielle

En trois chapitres, cette partie de notre travail a présenté et analysé les données de notre recherche sur de déboisement dans le Département de Toma. Au fur et à mesure du temps, le paysage naturel n'a cessé de se détériorer sous l'action de l'homme créant ainsi un déséquilibre dans l'écosystème naturel. Ce déséquilibre lui-même n'est pas resté sans effets sur la vie sociale, économique et culturelle des populations de ladite localité, faisant ainsi du déboisement un réel facteur de changement social.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Le Département de Toma, au Burkina Faso, vit une crise environnementale sérieuse à savoir le déboisement. Face à une telle situation créée par les populations elles-mêmes et qui ne cesse de prendre de l'ampleur, au point d'être un « fait social total », nous nous sommes intéressé aux conséquences du phénomène dans cette recherche en partant de la question suivante : Quelles sont les transformations socioculturelles opérées par le déboisement dans le Département de Toma ?

Pour répondre à cette question, nous avions émis l'hypothèse que le déboisement, comme facteur de changement social, déstructure les communautés villageoises, instaure de nouvelles sociabilités et est cause de paupérisation des populations du Département de Toma. De fait, nos recherches ont révélé que cette crise environnementale qui est la résultante d'une dynamique entre les populations villageoises et le milieu naturel affecte la structure sociale en créant des dysfonctionnements. Ces dysfonctionnements se situent, d'une part, au niveau général de l'écosystème où la dégradation progressive de la biodiversité crée des ruptures dans le système social traditionnel san. En effet, la raréfaction progressive des ressources naturelles a conduit les populations à changer de modes de vie. C'est ainsi que le système traditionnel de gestion des ressources naturelles a été mis à rude épreuve, avec des difficultés pour se maintenir en équilibre. En effet, dans la société san habitant le Département de Toma, les terres et leur contenu sont la propriété des lignages qui les gèrent de génération en génération. Au niveau de chaque village, les fonctions sociale et religieuse de contrôle des patrimoines et de propitiation en cas de violation des interdits sont dévolues aux chefs de terre et de village. Tant que les rapports à l'arbre et à la terre sont restés dans les limites du respect des valeurs traditionnelles de parenté et du sacré (respect des forêts sacrées), le système social est resté en équilibre. Or, avec le phénomène du déboisement massif et la modernité, les perceptions paysannes de la nature ont changé ainsi que les comportements et attitudes à l'égard des plantes, faisant de l'arbre non plus une ressource nutritive et sanitaire mais bien une ressource commerciale importante pour la préparation du dolo. Il en a résulté ce que l'on constate dans les villages : non-respect des normes anciennes de gestion de l'environnement, violation des propriétés foncières et conflits.

D'autre part, les dysfonctionnements apparaissent également dans le système moderne et étatique de gestion de l'environnement qui a pour rôle de freiner le déboisement. En effet, la loi de 1996 sur la réforme agraire et foncière reste difficilement applicable dans la pratique

et occasionne de multiples tensions entre les populations et le service forestier et entre les populations elles-mêmes à qui le service forestier délivre des permis payants de coupe de bois. L'effet pervers de ces permis se situe au niveau même de leur compréhension par les paysans qui non seulement exagèrent la coupe du bois mais également s'octroient un droit de coupe dans les propriétés foncières ne leur appartenant pas. Ceci n'était pas possible dans le système traditionnel. En effet, dans la société san, du moment où la terre a une dimension religieuse c'est-à-dire sacrée, les rapports à cette terre et même les rapports sociaux concernant cette terre ne sauraient être uniquement juridique. Un conflit latent autour du contrôle social existe désormais entre autorités administratives chargées de l'environnement et autorités coutumières ainsi qu'avec les populations villageoises. Tout ceci contribue à confirmer notre hypothèse selon laquelle le déboisement déstructure les communautés villageoises.

Mais également, face aux proportions que prend le déboisement, les populations villageoises du Département de Toma commencent à prendre conscience des dangers qui les guettent tels que l'insécurité alimentaire et entreprennent collectivement des initiatives de restauration des sols. C'est là aussi que le deuxième aspect de notre hypothèse se trouve confirmé, en ce sens que le déboisement instaure de nouvelles sociabilités. Mais il est cause de paupérisation des populations parce que le recul de la végétation ou même sa disparition diminue les rendements agricoles dont la conséquence est la famine. Celle-ci, ainsi que d'autres besoins, poussent de nouveau les populations à recourir à la coupe du bois pour avoir de l'argent.

Cette recherche nous a permis de comprendre comment le déboisement est un phénomène social et un facteur de changement social. Nous avons découvert sur le terrain que les nouvelles formes de contrôle social introduites par le service forestier étatique contribuent au raffinement des stratégies des coupeurs de bois. Cette nouvelle dimension de la réalité infirme partiellement notre hypothèse qui se focalisait uniquement sur les taxes et soutenait que plus les autorités administratives taxent la coupe du bois, plus les populations développement des stratégies raffinées d'exploitation des ressources ligneuses. Par contre, dans les actions collectives de restauration et de fertilisation des sols initiées avec l'appui des ONG et les institutions étatiques, les populations paysannes montrent leur capacité à dépasser les conflits pour préserver leurs intérêts. A travers cette dimension de la réalité sociale, se vérifie notre dernière hypothèse selon laquelle le degré d'implication des populations dans la protection de l'environnement est donc fonction de l'intérêt qu'elles tirent de l'appui institutionnel.

A la fin de cette étude, nous restons conscient des limites de notre travail et savons que nous n'avons pas épuisé toute la question du déboisement dans le Département de Toma. Pour être complète, cette étude devrait intégrer les représentations de la nature ou de l'arbre. Cette dimension, pensons-nous, pourra faire l'objet d'une recherche ultérieure.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry