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La protection de l'écosysteme forestier congolais: cas de la réserve naturelle d'Itombwe

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par Moussa RUBUYE MUSAFIRI
Universite Officielle de Bukavu - Licence en Droit 2008
  

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Section 2 : Analyse de l'arrêté ministériel créant la RNI face à la protection forestière

Comme toute oeuvre humaine, l'arrêté en question n'a pas totalement démérité. Il a le mérite d'avoir freiné les ambitions vampiriques des personnes et entreprises intéressées à mener des activités économiques illégales dans la forêt d'Itombwe (coupe de bois, production de charbon de bois, déforestation pour créer des pâturages, exploitations minières, ...)

Ainsi donc, dans le but de relever les griefs retenus contre cet acte unilatéral, l'analyse de son régime juridique, spécialement des prescriptions relatives à son élaboration, son caractère obligatoire et exécutoire s'impose.

Paragraphe 1er : L'élaboration de l'acte administratif unilatéral

L'acte administratif unilatéral doit être légal, régulier dans le sens où l'administration est tenue de respecter, conformément au principe de la légalité, les règles et principes juridiques en vigueur au moment de l'adoption de l'acte et qui, en raison de la hiérarchie des normes, s'imposent à l'acte administratif unilatéral. Les vices dont est entaché l'acte administratif unilatéral sont les « illégalités » ou « irrégularités ».

Il en existe plusieurs classifications. La plus courante distingue entre les « illégalités externes » et les « illégalités internes » ; l'élaboration de l'acte administratif unilatéral s'effectue ainsi suivant les exigences de la légalité externe et celle de la légalité interne.

1. Les exigences de la légalité externe

Elles concernent les aspects externes de l'acte. Elles sont relatives à la compétence de l'auteur de l'acte et aux formes et formalités. La méconnaissance de ces exigences expose l'acte administratif unilatéral à la censure pour vice de compétence, vice de forme ou vice de procédure.

1.1. Vice de compétence

La compétence se définit comme l'habilitation à adopter des normes juridiques33(*). La compétence pour une autorité publique administrative est l'aptitude légale à accomplir un acte. Il peut s'agir donc de la compétence territoriale (ratione loci) qui reconnaît à l'autorité administrative l'exercice de son pouvoir dans un ressort territorial précis qui peut être national, provincial, urbain, municipal,... la compétence temporelle (ratione temporis) qui concerne la régularité de l'acte administratif par rapport au moment ou à la date où il a été pris.

Quant à la compétence matérielle (ratione materiae) qui va plus nous intéresser, l'autorité est investie du pouvoir de décision en fonction de la matière précise. Elle permet de distinguer les matières appartenant au pouvoir réglementaire de celles qui sont réservées à la loi, mais aussi de répartir les compétences entre les autorités administratives.

A cet égard, il importe de se référer aux textes fixant les compétences de chacune des personnes morales, publiques ou privées, investies d'un pouvoir réglementaire, mais aussi ceux déterminant au sein de chaque personne morale les autorités titulaires du pouvoir normatif34(*)

Ainsi donc, concernant l'arrêté créant la RNI, à la lecture de l'article 15 al.3 du Code forestier35(*), le Ministre de l'Environnement, Conservation de la Nature et Tourisme, n'est pas compétent (matériellement).

L'article stipule que « dans chaque province, les forêts sont classées suivant la procédure fixée par décret du Président de la République. Le classement s'effectue par arrêté du ministère après avis conforme du conseil consultatif provincial des forêts concernées, fondé sur la consultation préalable de la population riveraine. Toutefois, la création des réserves naturelles intégrales, des parcs nationaux et des secteurs sauvegardés relèvent de la compétence du Président de la République ».

Bien que l'arrêté susvisé n'ait pas donné une dénomination précise de l'aire créée, conforme à la nomenclature internationale ou nationale existante, l'article 3 dudit acte, reprenant l'article 4 de l'Ordonnance-Loi n° 69-041 du 22 août 1969 relative à la conservation de la nature rapproche la RNI à une réserve naturelle intégrale dont il importe d'en donner les caractéristiques principales : il est interdit à l'intérieur de la réserve :

1. d'introduire n'importe quelle espèce d'animal ou de plante, d'armes à feu, de pièges ou tout autre engin de chasse ; d'y tenir ou transporter des animaux sauvages vivants ou morts, leurs peaux ou trophées, leur viande ou toute autre sous-produit de la faune ;

2. de suivre, de chasser, de capturer, de détruire, d'effrayer ou de troubler de quelque manière que ce soit toute espèce animale, même les animaux réputés nuisibles, sauf en cas de légitime défense, et ce, conformément aux dispositions de l' l'Ordonnance-Loi n° 69-041 du 22 août 1969 relative à la conservation de la nature ;

3. de faire des fouilles, terrassements, soudages, prélèvements des matériaux et tous les autres travaux de nature à modifier l'aspect du terrain ou de la végétation ;

4. de bloquer les rivières, de prélever ou de polluer directement ou indirectement les eaux (...)

En érigeant Itombwe en réserve naturelle intégrale, le ministre a empiété les pouvoirs (compétences) du Président de la République (article 15 al 3).

Il existe cependant des règles d'aménagement de compétence. Cela résulte du fait qu'une autorité investie du pouvoir d'édicter un acte administratif peut habiliter une autre à agir en son nom ou à sa place. C'est le régime de délégation de compétence ou de signature.

En rapport avec notre étude et à notre connaissance, aucun texte présidentiel n'a habilité le ministre de l'Environnement pour créer un acte en la matière et comme on peut le constater : « une délégation de compétence ne peut exister que si elle est autorisée par un texte (...), en outre, la délégation de compétence qui doit obligatoirement être déterminée par un texte, ne peut être tacite, et ne doit pas consister en un transfert de compétence d'une autorité administrative à un subordonné ; elle doit déterminer précisément son étendue »36(*)

Quand à la délégation de signature : « l'autorité administrative compétente conserve son pouvoir : elle autorise seulement un subordonné à signer, matériellement la décision en ses lieu et place, mais c'est toujours lui qui est réputé prendre la décision (...)37(*)

En principe « la subdélégation de signature est impossible 38(*) sauf si la faculté a été expressément prévue par l'acte de délégation.

Le bénéficiaire d'une délégation régulière peut subdéléguer une partie de ses attributions qui lui ont été confiées, à une autre autorité à condition que soient fixées avec une précision suffisante les mesures dont le subdélégué aura à faire application.

1.2. Les formes et formalités

On distingue les formes et formalités selon qu'elles précèdent l'adoption de l'acte, selon qu'elles sont afférentes à l'acte ou selon qu'elles succèdent à l'adoption de l'acte.

1.2.1. Les formes et formalités précédent l'adoption de l'acte administratif unilatéral

Les formes et formalités en amont de l'acte administratif sont : l'avis et l'enquête publique.

L'article 15 al 2 de la loi forestière dispose que le classement s'effectue par arrêté du Ministre après avis conforme du conseil consultatif provincial des forêts concernées fondé sur la consultation préalable de la population riveraine.

L'avis dans l'élaboration d'un acte administratif est obligatoire ou facultatif. Le contenu de l'avis qualifié de « conforme » lie l'autorité. L'avis doit être régulier. Pour ce faire, il doit être sollicité et obtenu avant la décision, il doit émaner de la personne ou de l'organe compétent.

Quant à l'enquête publique, dans certains cas, il s'avère important pour l'autorité administrative de recueillir les réactions que la décision envisagée suscite auprès des personnes concernées par le projet. L'autorité administrative doit procéder à une enquête lorsqu'un texte le requiert. Une enquête est organisée préalablement au classement d'une forêt de production permanente, stipule l'article 23 al 1er du Code forestier. L'enquête vise, ensuite, à constater la nature et l'étendue des droits éventuels des tiers sur les forêts, précise l'article 84 al 1er et 2e du même code.

Une enquête socio-économique doit être effectuée préalablement à l'élaboration du plan d'aménagement d'une forêt classée. Cette enquête est menée par l'institution gestionnaire des forêts en collaboration, entre autre, avec les communautés locales. En plus de la recherche des potentialités de la forêt, l'enquête collecte les données relatives à la démographie et détermine les différentes utilisations que les populations riveraines font des ressources forestières39(*)

En ce qui concerne les forêts attribuées aux communautés locales, encore appelées forêts communautaires, une enquête sommaire est organisée en vue de faire l'état des lieux général de la forêt et de connaître les besoins de la population. Cette enquête comporte, entre autre, la description des activités pratiquées dans la forêt notamment l'agriculture et les autres activités productives ainsi que la démographie et l'habitat.

L'autorité administrative doit rendre l'enquête effective. Cela implique que cette dernière doit avoir lieu en temps utile lorsque le public dispose de l'information et du temps nécessaires pour réagir.

L'enquête ne doit pas être organisée à un moment très éloigné du moment de l'édiction de l'acte administratif unilatéral. L'autorité administrative doit en outre procéder à une enquête respectueuse des formes et formalités imposées par le texte. Il peut s'agir de l'obligation de tenir une réunion d'information préalable. A l'issue de l'enquête, l'autorité administrative doit tenir compte du résultat de l'enquête publique

Les textes internationaux font aussi de la procédure consultative une obligation impérative dans la prise de décisions en matière environnementale.

Le principe 23 de la charte mondiale de la nature recommande que « toute personne aura la possibilité, en conformité avec la législation de son pays, de participer, individuellement ou avec d'autres personnes, à l'élaboration des décisions qui concernent directement son environnement et au cas où celui-ci subirait des dommages ou des dégradations, elle aura accès à des moyens de recours pour obtenir réparation »40(*)

D.SHELTON précise que « le droit à l'information peut signifier de manière restrictive, la liberté de demander des informations ou de manière plus large, un droit d'accès à l'information ou même un droit de la recevoir. L'accès à l'information sur l'environnement est une condition préalable à la participation du public au processus de prise de décision et au contrôle des activités gouvernementales ou de secteur privé »41(*).

L'article 11 du protocole relatif aux aires spécialement protégées de la Méditerranée stipule que les parties s'efforcent d'informer le public aussi largement que possible de la valeur et de l'intérêt des aires protégées et des enseignements scientifiques qu'elles permettent de recueillir aussi bien du point de vue de la conservation de la nature que du point de vue archéologique42(*).

D'autres textes soulignent la même obligation : le protocole de Nairobi relatif aux aires spécialement protégées et à la faune et à la flore sauvages en Afrique orientale (article 15) ; la convention cadre sur les changements climatiques et la convention sur la diversité biologique (articles 13 et 17).

Cependant, en érigeant Itombwe en réserve, l'arrêté n'a pas respecté scrupuleusement les prescrits des textes tant nationaux qu'internationaux.

D'abord, précisons que plusieurs personnes vivant à Itombwe ont difficilement accès à l'information.

Ensuite, le Ministre en érigeant Itombwe en réserve naturelle n'avait pas consulté le conseil consultatif provincial chargé des forêts (parce qu'inexistant) mais surtout les consultations effectuées au profit des populations riveraines sont qualifiées d'irrégulières par une pétition initiée par une ONG du Sud-Kivu spécialisée en la matière43(*). Il s'agit des réunions de KAMITUGA et MIKI assorties des déclarations respectivement du 23 septembre 2005 et du 17 juillet 2006. On reproche à ces consultations une mauvaise sélection dans le recrutement des représentants.

En sus, la pétition souligne entre autre grief, l'absence de consentement des communautés à l'érection du massif d'Itombwe en réserve naturelle.

Cependant, BISIDI Y. et alli constatent que : « la grande majorité des personnes interviewées souhaitent que le gouvernement continue à prendre des mesures pour préciser le statut légal de la forêt d'Itombwe et les modes de gestion des différentes zones d'utilisation encore à préciser ». Il est important de noter qu'il y a divergence de point de vue entre secteurs quant au système de conservation des ressources forestières souhaitées44(*).

Le respect de la procédure est une garantie essentielle dans l'élaboration des actes administratifs : « en principe, le droit administratif n'est pas formaliste. Toutefois, dans un souci de bonne administration, d'une part, et dans un souci de garantie des intérêts des administrés, d'autre part, l'élaboration des actes administratifs se trouve assujettie à des nombreuses règles (...). La vie administrative deviendrait impossible si tout vice de forme pouvait entraîner l'annulation de l'acte (...).

Et pour cela, il faut tout d'abord qu'une forme obligatoire, substantielle ou prescrite à peine de nullité, ait été omise ou irrégulièrement accomplie.

L'irrespect de forme qui, tout en étant obligatoire en présentant néanmoins qu'un caractère accessoire, constitue certes un vice de l'acte, mais ce vice n'est pas suffisamment grave pour entraîner cette sanction ultime qu'est l'annulation (...).

Sont substantielles, les formes touchant à l'ordre public (...), les formes ayant une influence déterminante sur le contenu de l'acte »45(*).

1.2.1. Les formes et formalités afférentes à l'instrumentum

Il s'agit principalement de la date, du lieu d'adoption de l'acte et de la signature ou du contreseing. En effet, tout acte administratif doit en principe comporter la mention de la date et du lieu de son adoption. Dans le cas d'espèce, l'arrêté créant la RNI a été adopté le 11 octobre 2006 à Kinshasa.

La date est importante dans la mesure où c'est du jour de l'adoption de l'acte qu'il convient de se placer pour vérifier sa régularité.

Par contre, par la signature ou le contreseing, du point de vue du fond, l'autorité marque formellement son accord sur le texte de la décision.

L'arrêté en question est signé par Monsieur Anselme ENERUNGA, alors Ministre de l'Environnement, Conservation de la nature, Eau et Forêts.

1.2.2. Les formes et formalités succédant à l'adoption

Elles concernent les mesures de publicité requises pour que l'acte administratif unilatéral soit obligatoire. Il s'agit de la publication et de la notification.

La publication est l'opération par laquelle un acte administratif unilatéral est reproduit dans un journal ou un recueil officiel et est affiché, en vue d'être portée à la connaissance d'un large public. Quant à la notification, c'est le mode de publicité pour les actes administratifs unilatéraux de portée individuelle. L'inobservation de ces formalités n'entraîne pas l'irrégularité de l'acte mais simplement de son inopposabilité aux tiers.

2. Les exigences de la légalité interne

Elles concernent l'objet, les motifs et le but de l'acte administratif unilatéral.

2.1. L'objectif

L'objectif de l'acte est ce qui est décidé ou encore le contenu de l'acte. L'illégalité relative au contenu de l'acte est qualifiée de la violation directe de la loi. Il s'agit du cas où le contenu de l'acte, la norme édictée considérée en elle-même, qui n'est pas conforme à la légalité et plus précisément aux normes qui lui sont supérieures.

En ce qui concerne cette étude, précisons que l'arrêté créant la RNI est libellé : « Arrêté ministériel n°038/CAB/MIN/ECN-EF/2006 du 11 octobre 2006 portant création de la Réserve Naturelle d'Itombwe ».

En réalité, cette dénomination ne coïncide pas ni avec les principaux types d'aires protégées créées par l'UICN et l'UNESCO, ni avec le prescrit des articles 12 et 16 du Code forestier.

Donc, cette nomenclature est « défectueuse ». La nomenclature proposée respectivement par l'UICN et l'UNESCO retient uniquement : réserves naturelles intégrales (réserves scientifiques), parcs nationaux, monuments naturels, réserve de nature gérée (réserve de gestion des habitats et des espèces), paysages terrestres ou marins, aires des ressources naturelles gérées, régions biologiques, réserves anthropologiques, régions naturelles aménagées à des fins d'utilisation multiple ; et enfin, les réserves de biosphère et les sites « naturels » du patrimoine mondial.

L'article 12 du Code forestier, quant à lui, cite limitativement les forêts classées et les situe dans le domaine public de l'Etat :

· Les réserves naturelles intégrales ;

· Les forêts situées dans les parcs nationaux ;

· Les jardins botaniques et zoologiques ;

· Les réserves de faune et les domaines de chasse ;

· Les réserves de biosphère ;

· Les forêts récréatives ;

· Les arboreta ;

· Les forêts urbaines ;

· Les secteurs sauvegardés.

De tous les classements tant nationaux qu'internationaux, nulle part on rencontre «la réserve naturelle ». Et pourtant l'article 16 souligne que : « l'arrêté de classement détermine la localisation et les limites de la forêt concernée, sa catégorie, sa dénomination, le mode de gestion de ses ressources, les restrictions qui lui sont applicables (...) »

Ainsi donc, eu égard à ce qui précède, la RNI ne se retrouve dans aucune de ces catégories précitées, ce qui va entraîner des difficultés quant à sa gestion et aux droits susceptibles de s'y exercer.

2.2. Les motifs

Tout acte administratif unilatéral doit respecter des motifs de droit et de fait.

2.2.1. Les motifs de droit

Tout acte administratif doit reposer sur un fondement juridique. Ce fondement juridique doit en outre être correctement interprété. Le défaut de motifs en droit expose l'acte à une erreur de droit.

Bien que l'arrêté créant la RNI soit motivé dans le préambule, disons que, comme on l'a démontré précédemment, la nomenclature de la réserve n'a pas de fondement juridique. Ce qui constitue une entorse.

2.2.2. Les motifs de fait

Un acte administratif unilatéral peut être vicié quant aux motifs de fait soit en raison d'une erreur de fait, soit en raison d'une erreur de qualification juridique des faits soit encore en raison d'une erreur dans l'appréciation des faits.

Il y a erreur de fait lorsque la réalité des faits en raison desquels la décision a été prise n'est pas établie. Le contrôle des motifs de fait donne ainsi lieu à l'examen de leur exactitude matérielle par exemple, la population riveraine d'Itombwe au travers la pétition initiée par ERND Institute conteste les consultations sur lesquelles se fondement le ministre pour ériger Itombwe en réserve naturelle.

Et pourtant l'alinéa 10 du préambule de l'arrêté créant la RNI s'appuie sur des consultations qualifiées pourtant d'irrégulières « vu les sollicitations exprimées par les populations locales pour la conservation du massif d'Itombwe et le consensus y relatif découlant des déclarations de Kamituga en date du 23 septembre 2005 et de Miki en date du 17 juin 2006, ... ». Le peuple était absent matériellement car ses représentants aux assises étaient contestés.

Il y a en revanche erreur de qualification juridique des faits lorsque ces derniers n'ont pas reçu une qualification correcte en droit. Le contrôle des motifs de fait donne ici lieu à l'examen de la qualification juridique des faits. Il peut s'agir d'apprécier si un site doit être qualifié de « pittoresque » ou de réserve naturelle intégrale ou du patrimoine mondial au regard de la richesse faunistique ou floristique.

Il y a enfin, erreur d'appréciation des faits lorsque ces derniers ne sont pas de « nature » à justifier juridiquement la décision. Il s'agit d'apprécier si la décision est proportionnée par rapport aux faits ou si elle est tout simplement raisonnable. L'examen de la proportionnalité peut conduire par exemple à constater que la décision d'ériger Itombwe en une réserve proche d'une réserve à gestion de type policier (réserve naturelle intégrale, parcs, ...) et d'envisager l'expulsion de la population riveraine (sans le préalable du respect de la procédure en vigueur) est disproportionné et radical par rapport à la création d'une réserve à caractère communautaire, participatif où tous les intervenants (acteurs publics et privés) sont impliquées dans la protection de la nature.

2.2.3. Le but de l'acte

Le seul but de l'acte administratif unilatéral est la satisfaction de l'intérêt général. Le vice dont l'acte est entaché pour inobservation de cette prescription est le détournement de pouvoir. Les motifs et le but de l'acte ne se confondent pas. Les motifs sont des données objectives alors que le but est une donnée subjective, d'ordre psychologique.

Il permet d'apprécier le but en vue duquel l'autorité administrative a agi ; c'est rechercher ce qu'ont été ses mobiles et son intention.

L'annulation pour détournement de pouvoir permet de dénoncer la mauvaise foi de l'autorité administrative. Elle revêt le caractère d'une condamnation morale de l'administration. En ce qui concerne notre étude, l'auteur de l'acte sous examen a été animé du souci de préservation de notre écosystème.

3. Caractère obligatoire et exécutoire de l'acte administratif unilatéral

L'entrée en vigueur ne se confond pas avec l'acquisition par l'acte administratif unilatéral de la force obligatoire ou de la force exécutoire. La force obligatoire permet à l'acte administratif d'être en état d'obliger, ce qui ne peut pas dire qu'il n'oblige encore. L'acte acquiert la force obligatoire par la réalisation de la publicité qui en est faite ; qu'il s'agisse de la publication, de la notification ou de l'affichage. Les lois et règlements sont publiés au journal officiel. Les décisions favorables entrent en vigueur dès leur signature.

En revanche, le caractère exécutoire de l'acte administratif fait référence au privilège préalable et celui de l'exécution d'office. Le privilège du préalable signifie que les décisions administratives acquièrent force obligatoire dès leur adoption ou leur publication, et que le recours formé contre elles n'a pas de caractère suspensif46(*)

Le privilège de l'exécution d'office qualifié de l'exécution forcée, donne à l'administration la latitude de faire exécuter par la force ses décisions contraignantes préalablement à toute action judiciaire.

Au regard du « mode jupitérien », qui caractérise les actions de l'administration, certains auteurs et textes internationaux insistent sur les voies de recours contre les actes des autorités faisant grief47(*)

En droit de l'environnement ainsi que dans le domaine des droits de l'homme, on trouve un droit à un recours et réparation efficace. La Convention des Nations Unies sur les droits civils et politiques demande aux Etats de prévoir un recours chaque fois que les droits protégés sont violés. Dans la Convention Européenne des droits de l'homme, l'article 13 instaure un recours en cas de violation des droits et libertés contenus dans la Convention des droits de l'homme incluant la violation du droit à l'information.

Les systèmes régionaux interaméricain et africain en matière des droits de l'homme contiennent la même garantie. Les instruments en matière d'environnement proclament fréquemment la nécessité de recours efficaces.48(*)

De tous les recours, le recours le plus emblématique du contentieux administratif, assorti de la sanction la plus énergique (annulation rétroactive erga omnes) est le recours pour excès de pouvoir49(*)

Cela veut dire qu'on peut demander au juge de reconnaître l'illégalité d'une décision administrative et d'en prononcer par voie de conséquence, l'annulation.

A cette fin, correspond des recours en annulation dont le recours pour excès de pouvoir est le principal et dont l'ensemble forme le contentieux d'annulation. C'est le recours pour excès de pouvoir que l'administré doit utiliser lorsqu'il entend demander au juge :

- De confronter une décision de l'administration avec les règles de droit auxquelles elle est assujettie ;

- De constater la non-conformité de la décision à ces règles ;

- D'annuler la décision reconnue illégale50(*)

Toutefois lors de la présentation de la requête, le recours devra remplir les conditions suivantes avant d'être soumis à l'examen du fond par le juge : la nature de l'acte attaqué, la personne du requérant, le respect des conditions de délai et l'absence de recours parallèle.

4. Les modes ou systèmes de gestion des aires protégées

La généralité sur les systèmes de gestion, nous permettra de déterminer le mode approprié pour la RNI

4.1. Généralités sur la gestion des aires protégées

Les gouvernements ont une responsabilité fondamentale, à laquelle ils ne peuvent se soustraire, en ce qui concerne l'existence et l'état des réseaux nationaux d'aires protégées.

Ils doivent considérer ces aires comme des composantes importantes de leur stratégie nationale de conservation et de développement durable

La responsabilité effective de la gestion des aires protégées individuelles peut toutefois incomber au gouvernement central, régional ou local, à des organisations non gouvernementales, au secteur privé ou à la communauté locale. C'est pourquoi les présentes lignes directrices sont d'une flexibilité considérable quant à la forme de l'organe de gestion correspondant à chaque catégorie d'aires protégées, l'essentiel étant que l'autorité désignée soit capable d'atteindre les objectifs de gestion escomptés.

Quant aux modes de gestion de ces aires protégées, divers types ont été adoptés. Mais pour des raisons didactiques, on traitera limitativement le cas de :

a) Parc national et naturel

Le mode de gestion s'appuie prioritairement sur trois grands axes :

- une définition claire des objectifs de protection et conservation des qualités bioécologiques des milieux ;

- la mise en place d'un dispositif d'aménagement et de gestion fondée sur le système de la zonation par objectif ;

- la création de rapport de partenariat, plus ou moins contractualisé avec les usagers et exploitants.

b) Réserve naturelle

Le dispositif de gestion y est moins important que pour un parc national, mais relève des mêmes règles, avec pour variante une plus grande implication des impératifs de protection des milieux. Dans certains cas, une zone interne est délimitée comme zone de protection quasi intégrale. La gestion de ce type, devra s'établir en fonction du degré d'activité locale exercée à l'encontre des ressources naturelles, en cherchant à rationaliser celles-ci à travers des pratiques déjà testées dans le cadre des parcs (valorisation écotouristique, organisation des usagers, définition des quotas, etc.).51(*)

Les objectifs globaux de la stratégie, les aspects relevant de la protection et de la gestion patrimoniale des milieux naturels peuvent être liés à plusieurs objectifs d'ordre général concernant la RD Congo et même la planète si l'on se réfère aux systèmes écologiques globaux et aux dernières décisions internationales dont :

- Assumer la responsabilité internationale en matière du maintien de la biodiversité globale ;

- Garantir le bon fonctionnement du cycle écologique général de l'eau pour l'ensemble du pays ;

- Maintenir la productivité des principaux écosystèmes ;

- Mettre en place un réseau de parcs de réserve qui constituera une des réponses utiles qui puisse satisfaire les objectifs globaux ci-dessus.

4.2. Objectifs sectoriels 

- Assurer une protection urgente des écosystèmes les plus dégradés ;

- Mettre en place un suivi et une gestion conservatrice des écosystèmes les plus importants pour la RD Congo ;

- Ralentir et stabiliser les processus de dégradation au sein des sites forestiers montagnards, des zones humides et littorales ;

- Organiser au niveau national la sauvegarde du patrimoine phylogénétique ;

- Mobiliser les agents techniques responsables des administrations concernées par l'environnement, les élus locaux et les autorités, les représentant et les usagers, sur la nécessité de gérer rationnellement le patrimoine naturel congolais ;

- Appuyer l'effort éducatif national par une sensibilisation aux problèmes de la conservation de la nature ;

- Soutenir les initiatives privées et associatives liées à la protection de la nature ;

- Garantir une formation efficace en écologie et gestion des aires protégées des agents techniques et ingénieurs relevant de cette attribution.

* 33 M. LOMBARD et G. DUMONT, Droit administratif, 6ème éd., Paris, Ed. Dalloz, 2005, p 207

* 34 M. LOMBARD et G.DUMONT, op.cit, p.205

* 35 Voir la loi n° 011/2002 du 29 août 2002 portant Code forestier

* 36 Idem, p 107

* 37 Ibidem, p.107-108

* 38 J. RIVERO et J. WALLINE, Droit administratif, 20e éd, Paris, Dalloz, 2005, p. 341

* 39 Voir l'article 12 de l'arrêté ministériel n°CAB/MN/AF.F-ET/2002 du 3 octobre 2002 fixant la procédure d'établissement d'un plan d'aménagement forestier.

* 40 Charte mondiale de la nature, Nations Unies, New York, 1982

* 41 D. SHELTON, Techniques et procédures utilisées dans le domaine du Droit international de l'environnement, Genève, UNITAR, 1998, pp 73-77

* 42 Idem, p.78

* 43 Il s'agit d'ERND Institute (Environnement Ressources Naturelles et Développement)

* 44 Y.BISIDI et alli, L'utilisation et la conservation des ressources forestières à Itombwe : perception de la population, Nairobi, AERPO, 2008, p. 147

* 45 M. FLAMME, Droit administratif, Tome I, Bruxelles, Ed. Bruyant, 1989, pp 349-351

* 46 M. LOMBARD et G. DUMONT, op.cit, p. 116

* 47 Idem, p. 203

* 48 D. SHELTON, op.cit, p.80

* 49 J. MORAND DEVILLER, Droit administratif, 9e éd, Paris, Montchrestien, 2005, p 683

* 50 J. RIVERO et J. WALLINE, op.cit, p 221

* 51 Pour plus d'informations voir : http://www.rapc.org

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams