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La mise en oeuvre de la société de l'information au Cameroun: enjeux et perspectives au regard de l'évolution française et européenne

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par Yves Léopold KOUAHOU
Université de Montpellier 1 - Docteur en droit privé option nouvelles technologies et droit 2010
  

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B. Une vision hétérogène de la régulation.

813. Plusieurs visions sont develo ppees pour justifier le choix d'une forme de regulation plus qu'une autre. Ces visions ont en commun de reconnaitre internet comme un es pace global et transfrontalier mais different sur la fagon de le reglementer. Ainsi, se croisent la vision reglementaire, la vision cooperative, la vision contractuelle et la vision libertaire de la regulation.

échanger des points de vue sur des centres d'intérêts ou sujets communs. Ces sujets sont soient proposes par les membres de la communauté soit par le modérateur du forum. Le modérateur joue ici le rôle d'arbitre et veille au respect des règles relatives au forum et écarte le cas échéant, les courriers non conformes. Par sa procédure préalable d'abonnement, le forum peut être ouvert à tous ou restreint à une catégorie de personne.

831 Les règles soumissent à l'acceptation de tout nouvel arrivant dans la communauté sont souvent tirées de l'éthique et de la morale quotidienne.

832 Le Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI) s'est déroulé en 2 phases. La première phase, accueillie par le Gouvernement suisse, a eu lieu à Genève du 10 au 12 décembre 2003 et la deuxième phase, accueillie par le Gouvernement tunisien, a eu lieu à Tunis du 16 au 18 novembre 2005.

833 En effet, l'article 39 de la loi de 1998 sur les télécommunications reconnaît aux associations d'utilisateurs agrées le pouvoir de saisir l'A.R.T pour voir sanctionner les opérateurs de télécommunications qui manqueraient à leurs obligations.

834 C'est, en tout cas, le rôle joué par une association dénommée « forum.net » qui organise régulièrement des forums consacrés à l'usage des TIC au Cameroun.

1. La regulation reglementaire ou étatique

814. Cette vision reglementaire fait entrer internet et la societe de l'information dans le domaine d'intervention de l'Etat qui doit organiser sa regulation a travers les sources formelles du droit que sont les traites internationaux, les directives et reglements communautaires, les lois et decrets.

Selon les tenants de cette vision, le fait de confier aux seuls acteurs le soin de definir les regles d'internet reviendrait a donner aux interets les mieux organises (comme les grands grou pes et les grandes enseignes detenant un fort pouvoir economique) une influence dis pro portionne sur la definition des regles ou des pratiques de reference. Or, les lois835 sont le fruit d'un travail muri et concerte et sont considerees comme suffisamment tres im portantes pour etre confiees a des personnes non ex perimentees. La regulation doit alors revenir aux pouvoirs etatiques qui, ont la competence et le pouvoir d'elaborer les regles regissant internet dans son ensemble et seuls, dis posent de la legitimite et de la re presentativite necessaire pour traiter des questions juridiques posees par ces multiples usages. Ce pouvoir peut etre partage entre l'autorite legislative et le pouvoir reglementaire dans les domaines precis et dans le cas d'une situation nouvelle, le legislateur peut toujours intervenir dans le processus pour clarifier ou completer les regles la ou la necessite s'im pose.

815. De ce fait, si internet apparalt aujourd'hui comme un domaine ou la decentralisation de la regulation est forte, il s'agit en meme temps d'un es pace dans lequel l'Etat continue de garder un grand pouvoir de normativite. Ainsi, dans la mesure ou internet n'est pas encore un substitut parfait aux services reseaux traditionnels comme le telephone, la radio ou meme la telediffusion, les reglementations et regulations etatiques en vigueur demeurent executoires.

816. L'observation de la realite quotidienne nous permet alors de voir qu'à l'interieur des territoires des Etats, cette vision reglementaire constitue une realite desormais bien etablie et se traduit par la multiplication des interventions legislatives dans les matières d'internet. C'est par exem ple le cas des legislations nationales concernant le develo ppement du commerce electronique, de la protection des droits d'auteurs dans l'univers numerique, des regles visant a la protection du consommateur, etc... C'est aussi

835 Le terme `'lois'' désigne ici l'ensemble des textes, lois, et règlements issus des pouvoirs étatiques et ayant pour but de réglementer une activité du réseau.

le cas de la definition des normes techniques et, surtout, la gestion du systeme d'adressage ou de numerotation qui demeurent encore une affaire des Etats.

Ce pendant, cette vision souffle d'une part, des limites frontalières des Etats836, et d'autre part, des limites intrinseques de la loi pour gerer des questions techniques necessaires au bon fonctionnement d'internet et de la societe de l'information. Cela contribue a la promotion des autres visions de la regulation.

2. La regulation cooperative ou coregulation.

817. La coregulation fait reference a une vision consensuelle de la regulation et se fonde sur l'idee que puisque les pouvoirs legislatifs et reglementaire sont trop lents dans l'elaboration de la loi ou trop peu au fait des realites techniques, il faut combiner son action regulatrice avec celle im portante des autres acteurs. Elle se base sur l'idee que le develo ppement de la societe de l'information et son usage posent des questions juridiques, techniques et de societe inedites, qui trouvent des re ponses a la fois dans la regulation privee, par les initiatives des acteurs economiques et sociaux et dans la regulation publique, par les procedes democratiques de droit commun que sont les interventions des pouvoirs legislatif, executif et judiciaire.

818. Cette vision, qui reconnait a la puissance publique le pouvoir d'edicter les regles, preconise la creation d'une instance de concertation reunissant les usagers, les acteurs economiques et les autorites publiques « afin qu'ils travaillent ensemble sur les questions posées par les réseaux837 * pour un echange permanent et fourni de maniere a soulever les questions im portantes, a les instruire plus ra pidement en tenant com pte de la dimension technique ainsi que de la realite et de l'evolution des usages. Selon le professeur Michel VIVANT, « c'est a plusieurs sources qu'une efficace et légitime régulation du net doit s'abreuver, ce sont plusieurs acteurs qui ont vocation a intervenir838*.

836 TGI Paris., réf., 20 nov. 2000, Yahoo !, N° 00 /053 08 ; Cahiers LAMY, déc., 2000(H), p.1, obs. Séballian. Yahoo ! proposait sur son site d'enchères publiques des objets nazis. Le site étant accessible en France, les associations anti-racistes françaises l'assignent devant le juge des référés parisien. Le juge se déclare compétent et juge la loi française, prohibant de telles pratiques applicables alors qu'aux Etats-Unis, lieu d'origine du site, la promotion de tels objets est parfaitement licite.

La limite frontalière de la régulation a été au centre des débats lors du Sommet Mondial sur la Société de l'Information qui s'est tenue à Genève du 10 au 12 décembre 2003. Sommet au cours duquel certains Etats non occidentaux (Chine, Brésil, Afrique du Sud entre autre) se sont prononcés pour une gestion intergouvernementale d'internet avec le transfert de l'intégralité des pouvoirs de l'ICANN à l'UIT ou à l'ONU. Cependant, cette demande n'a pas recueillit l'aval des Etats-Unis qui prône plutôt une réglementation minimum des Etats et un rôle accrue du secteur privé dans la régulation. Pour eux, il convient de limiter le domaine d'intervention étatique aux domaines sensibles tels que la sécurité de l'Etat et les intérêts nationaux des industries de contenus et des logiciels qui nécessiteraient une réglementation contraignante, et laisser le domaine des produits et des services à la réglementation des acteurs privés (majoritairement américains).

837 En ce sens, cf Falque-Pierrotin I, op cit, Le Monde 1999, p 17.

838 En ce sens, M Vivant et alii, op cit, p 1405, n° 2 367

819. La corégulation apparalt alors comme un lieu oit peut se construire un consensus entre les divers acteurs de la régulation et combinant autoréglementation et réglementation étatique839. Il s'agit entre eux « d'echanger des informations, de se coordonner, de constituer une instance de veille, d'information, de concertation, de conseil et de mobilisation84° ». C'est de fait, la position défendue par Christian Paul, dans un rapport au Premier Ministre Francais portant sur les droits et des libertés sur l'internet : « Si les institutions democratiques veulent remplir leur role sans se trouver court-circuitees par la realite, elles doivent etre capables de traiter les questions posses avec la rapidite et la pertinence necessaire. Elles doivent le faire en ecoutant d'avantage, en collaborant mieux avec l'ensemble des acteurs et les parties prenantes au debat841 >>.

820. A l'analyse, la corégulation nous semble le mode de régulation le plus ada pté : internet parce qu'il permet de prendre en com pte les réalités du réseau (détenues par les différents acteurs) et de concilier les intérêts de chaque acteur par la concertation.

821. Cette corégulation a largement été utilisée en France dans le cadre de l'élaboration de la loi pour la confiance dans l'économie numérique(LCEN) du 21 juin 2004842. Des avis ont été demandés aux différentes autorités de régulations com pétentes843, les organisations professionnelles ou re présentantes des utilisateurs ont également été écoutées, de même qu'un forum de discussion, le Forum des droits sur internet, a même été mis a la disposition de tout internaute844. Enfin, le débat parlementaire a permis d'amender largement le projet de loi au point de voter en faveur de la création d'un droit s pécifique a l'internet et aux communications numériques. Toutes ces consultations ont permis a l'Assemblée Nationale et au Sénat de ré pondre aux attentes des acteurs en soustrayant les services en ligne du régime de la communication audiovisuelle ou en aménageant la res ponsabilité des prestataires techniques845. Nous pensons que la corégulation offre a terme, une solution au probleme de la légitimité a réguler dans la mesure oit chaque acteur se sent écouté.

839 Sur la corégulation, la France est l'un des premiers pays à avoir adopté des textes consacrant la corégulation comme approche adéquate de la réglementation des activités sur le réseau internet. Cela a aboutit à la création d'une association qui ne dispose d'aucune prérogative de droit public et à but non lucratif appelé « Forum des droits de l'Internet ». L'association offre un espace de sensibilisation, de consultation et d'incitation au débat public aux personnes morales, publiques ou privées et ses initiatives ne manquent pas d'avoir des retombées concrètes en termes de régulation. Elle a notamment initié une réflexion sur le P2P qui a abouti le 28 juillet 2004, à la signature de la Charte d'engagement pour le développement de l'offre légale de musique en ligne, le respect de la propriété intellectuelle et la lutte contre la piraterie numérique.

840 I. Falque-Pierrotin, « Quelles régulations pour Internet et les réseaux ?», le Monde, 27 nov. 1999,

841 Christian Paul, op. cit. p 75 et suiv.

842Loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance da ns l'économie numérique. Consultable sur http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000801164. Consulté le 28 octobre 2010.

843 Il s'agit de l'ARCEP, du CSA et de la CNIL.

844 Il s'agit du forum des droits sur internet consultable sur http://www.foruminternet.org/. Consulté le 28 octobre 2010.

845 En ce sens, voir supra n° 361 et suiv sur « le régime spécifique des prestataires de service de la société de l'information ».

3. La régulation contractuelle ou autorégulation

822. L'autoregulation, qui est un refus de toute intervention des autorites etatiques, considere que internet est un es pace social dans lequel les regles de conduite peuvent permettre de maintenir un equilibre. Pour les tenants de ce courant, la definition des regles ne peut a ppartenir a l'Etat puisque la nature premiere d'une regle autoregulatrice est d'être volontaire, c'est-b-dire de ne pas etre obligatoire et contraignante au sens ou peut l'etre une norme etatique et « fait reference aux normes volontairement developpees et acceptees par ceux qui prennent part a une activite6 A>. On consent a adherer a de telles normes parce qu'elles presentent plus d'avantages que d'inconvenients.

823. De ce fait, internet est capable de se reguler tout seul a travers une res ponsabilisation des utilisateurs, techniciens ou non. En d'autres termes, sans aucune contrainte etatique, les acteurs, membres d'une communaute ou d'un grou pe peuvent accepter librement et volontairement de se soumettre a certaines regles qui decoulent d'un consensus et qui sont elaborees dans leur interet. L'exem ple le plus concret concerne l'interconnexion de l'internet ou peering qui est de puis l'origine un es pace d'autoregulation entre les divers acteurs technique de la chaine pour leur trafic mutuel. Chaque fournisseur est a la fois inde pendant et dependant de tous les autres, et puisqu'il n'existe pas d'autorite commerciale qui regenterait internet, ni un point central d'ob on pourrait controler le trafic et les acces, ils ont alors interDt a coo perer et a maintenir la connectivite globale fonde sur des regles de com portement partiellement non ecrites, meme si elles sont le plus souvent d'une grande o pacite.

824. Cette conception, qui a longtem ps ete presentee comme la seule alternative aux lacunes des reglementations etatiques est aujourd'hui largement utilisee dans les communautes (forum de discussion, divers reseaux d'echanges, etc...) pour lesquelles les membres s'auto engagent a une certaine ligne de conduite, en vue de limiter les pratiques contestables au moyen d'une intervention qui se veut com plementaire a la mise en ceuvre des dis positifs legislatifs et reglementaires.

Toutefois, même si l'internationalisation des relations rend difficile l'a pplication des lois, il
n'en demeure pas moins que chacun des membres de la communaute reste soumis a la

846 Trudel Pierre, « les effets juridiques de l'autoréglementation », Revue de Droit de l'Université de Sherbrooke (RDUS) 1988- 89, p. 247, cité par Lamy Droit des Médias et de la communication, 2009.

loi de l'etat dans lequel il reside847. De plus, les normes autoregulatrices presentent cet inconvenient de s'a ppliquer a un cercle restreint de personnes bien determine, quoique residants dans de pays differents. En outre, reconnaitre aux seuls acteurs la ca pacite de s'autoreguler revient a oublier la nature de tout individu, souvent tourne vers des interêts personnels egoistes.

4. La regulation libertaire ou multi regulation.

825. La multi regulation entend mettre en exergue le pluralisme des formes de la regulation qui considere que la societe de l'information est un « deuxieme monde » inde pendant n'obeissant pas aux memes contraintes que le « premier monde » et qui doit echa pper a tout schema etatique totalisant848. Ainsi, autant il est impossible d'elaborer des regles qui s'im poseront a tous les usagers, autant il est tout aussi impossible que ces regles puissent s'a ppliquer a toutes les situations de cette societe. Dans ce cas, non seulement toute reglementation serait un echec a cause de la virtualite du reseau, mais surtout elle contribuerait a entraver les o pportunites que la societe de l'information offre a l'individu. Cette conception est largement diffusee dans de nombreux sites et reprise par de nombreuses revues, comme par exem ple la revue americaine WIRED qui milite pour limiter autant que possible, l'intervention du gouvernement dans la vie publique849.

826. La multi-regulation apparait ainsi donc comme une reponse pertinente qui veut recourir a differentes sources de regles situees a differents niveaux en fonction des objets a reguler, permettant ainsi de former un maillage. Comme le fait remarquer Philippe Amblard, la multi regulation illustre « la concurrence des sources du droit de l'internet85° ». Dans ce cas, il ne s'agit plus de se demander si tel ou tel va intervenir, mais quels sont ceux qui concurremment sont fondes a partici per, a un titre ou a un autre, a la regulation du net851. A chaque situation du reseau correspond une regle s pecifique et a chaque communaute, correspond des regles s pecifiques a a ppliquer. L'existence d'une multitude de communaute favorise l'elaboration d'une pluralite de princi pes qui constitue autant de regles qui s'a ppliquent a leurs membres.

847 Cela étant, l'auto-régulation n'échappe donc pas à l'Etat, même si elle ne relève pas d'une intervention active et directe de ce dernier.

848 M. Vivant et alii, op cit, n° 2380, p 1409.

849 http://www.wired.com/. Consulté le 15 octobre 2010.

850 Ph. AMBLARD, « Régulation de l'internet, l'élaboration des règles de conduite par le dialogue internormatif », Cahiers du CRID, Bruylant 2004, n° 497, p 461.

851 M. Vivant et alii, op cit, p 1405, n° 2368.

827. Cette vision libertaire, qui refuse toute balisation normative et qui accorde une grande importance a la conscience humaine est largement utilisée de nos jours pour certains usages d'internet. Ainsi, des usagers qui refusent toute autorité n'hésitent plus a s'introduire dans les systemes, pro pager des virus, télécharger gratuitement des musiques, des données personnelles, etc... On trouve même un certain nombre d'individus prêts a défendre l'idée selon laquelle les oeuvres de toute nature, mêmes protégés par le droit d'auteur, n'a ppartiennent a personnes et que sur internet, la diffusion de toutes les oeuvres doit être possible sans restriction (il suffit de voir les astuces mises en place par les internautes pour télécharger illégalement les films sur internet malgré les sanctions mises en place notamment par l'HADOPI852).

Toutefois, cette configuration libertaire a une incidence sur la régulation puisqu'elle permet de mettre a jour des failles de sécurité et de dévelo pper les débats sur la protection des libertés853, faisant entre la régulation dans un processus de formalisation.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard