WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La régulation des télécommunications au Congo

( Télécharger le fichier original )
par Audry Jostien EYOMBI
Université Marien Ngouabi de Brazzaville - Master en droit public  2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section 2. Organe national de régulation

L'effectivité des méthodes opérationnelles et procédurales que requièrent la transparence du marché des télécommunications ne va pas de soi. Les reformes entreprises en la matière sont fondées sur au moins trois idées majeures qu'on retrouve dans le droit administratif des Etats d'Afrique noire francophone, notamment au Congo : aménager l'exercice de la fonction administrative, informer l'administré sur l'action administrative et améliorer le règlement des litiges administratifs.1(*)

Elles dépendent étroitement de deux conditions auxquelles une autorité de régulation doit satisfaire. Il s'agit d'une part de l'indépendance que lui reconnait l'Etat, en lui dotant d'un certain nombre de pouvoirs (paragraphe1) , d'autre part de la légitimité que lui confère la compétence technique, juridique et économique et du personnel que l'Etat lui alloue(100),qui fait d'elle un organe complexe dans l'ordre juridico-administratif congolais(paragraphe 2).

Paragraphe 1. Les pouvoirs de l'ARPCE

La démocratie administrative (101), en République du Congo a eu pour effet l'émergence des autorités de régulation dans presque tous les secteurs économiques libéralisés. Ceci, pour préserver les droits des administrés face à l'administration, en le faisant participer dans le processus des prises des décisions publiques. L'administration ne décide plus seule ; elle ne peut plus décider aujourd'hui comme hier. Aussi, la décision administrative perd-il de son caractère unilatéral pour donner une place plus importante au citoyen dans sa formation (102).

C'est ainsi que l'Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) (103) joue la police du secteur des marchés publics, tandis que l'Autorité de Régulation de l'Aval Pétrolier(ARAP) (104) quant à elle régule un autre secteur très important dans l'économie congolaise : le pétrole.

L'administration ainsi représentée laisse peu de place à la discussion et à la délibération. Administrer, c'est alors ordonner, au sens de `' mettre de l'ordre'' et de `'donner des ordres'', et être obéit (105).

Loi n° 11-2009 du 25 novembre 2009, portant création de l'ARPCE attribut clairement à cette dernière le pouvoir de sanction, qui fait implicitement de cet organe administratif un Juge(A).Et pourtant dans l'exercice de ses pouvoirs, l'ARPCE est loin d'être une Juridiction(B).

A. ARPCE : Les pouvoirs des sanctions de l'ARPCE

De façon un peu plus délibérée, la loi n°11-2009 énonce que l'agence dispose du pouvoir `' d'infliger des sanctions, à tout opérateur des postes et des communications électroniques, qui se rend coupable des violations manifestes des lois et règlements en vigueur `' (106).De la même manière qu'un juge, l'ARPCE est aussi en mesure d'infliger des véritables sanctions.1(*)

Le pouvoir de sanction administrative suscite toujours le questionnement : pourquoi l'administration peut-elle infliger elle-même une peine sanctionnant une infraction au droit applicable ?(107) A quelles conditions une telle procédure d'évitement du juge est-elle justifiée ?(108).

Indépendamment du problème de la définition même de la sanction, la première difficulté juridique est la conformité de la répression administrative au principe de séparation des pouvoirs.

Dans la logique institutionnelle classique, il revient en effet au seul juge, singulièrement au juge pénal de sanctionner les atteintes au droit. Car, comment accepter qu'une autorité normative soit chargée de sanctionner le non respect des règles qu'elle édicte ? Le pouvoir réglementaire des autorités administratives indépendantes est réputé poser problème parce qu'il contribue à la confusion des pouvoirs dont elles bénéficient.

En effet, à l'instar de l'agence de régulation, certaines autorités disposent non seulement d'un pouvoir réglementaire, de celui d'édicter des mesures individuelles, d'un pouvoir incitatif, mais aussi d'un pouvoir d'investigation, de médiation, d'arbitrage, de règlement des différends, de sanction et de saisine du juge. (109)

Qu'une autorité cumule des pouvoirs aussi divers pose problème parce que son emprise sur le secteur régulé est générale et permanente(110).

L'absence de réponse pertinente à ces interrogations laisse supposer que le pouvoir réglementaire des autorités administratives indépendantes souffre d'illégitimité.

Peut-on résoudre ce problème ? La question se pose avec obstination dans la mesure où un retour en arrière ne saurait être envisagé. Il règne en effet un certain consensus pour louer l'utilité des autorités administratives indépendantes.

Pourtant, le Conseil constitutionnel français a admis le principe d'une sanction échappant à la compétence du juge, à la condition d'être « exclusive de toute privation de liberté » et de « sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis »(111).

Cette position a été confirmée à l'occasion de l'examen de la constitutionnalité de plusieurs dispositions législatives relatives à l'Autorité de la Concurrence(112).1(*)

Certes, le pouvoir de sanction de l'agence de régulation est, comme, du reste la sanction administrative en général, un instrument lourd et exigeant. C'est ce qui explique notamment que la loi ait instauré des régimes de mise en demeure préalable, afin de limiter le recours à la sanction(113), laquelle est alors l'instrument ultime face aux violations du droit. Cependant, l'exercice du pouvoir de sanction par l'agence de régulation permet de stigmatiser rapidement et efficacement un comportement contraire à la réglementation en vigueur et donc aux objectifs poursuivis dans ses missions. Le législateur congolais sous recommandation du règlement CEMAC a prévu une procédure spéciale à l'agence, pour aboutir aux sanctions.

Lorsqu'il s'est avéré qu'une entreprise a manqué à ses obligations résultant de la réglementation internationale ou communautaire, ou même de la réglementation nationale applicable en matière de communications électroniques, ou des conditions attachées à son autorisation ou sa déclaration, ou lorsqu'une action ou une pratique anticoncurrentielle peut lui être imputée ;l'autorité nationale de régulation le `' met en demeure'' de cesser cette infraction dans un délai qui ne peut être inferieur à un mois, ou dans un délai plus court si le manquement est répété. Elle peut rendre publique cette mise en demeure(114).

Ce pouvoir lui permet de prendre des mesures à l'encontre de tous ceux qui violeraient ses obligations et les lois en vigueur. Il faut noter qu'au Congo, toutes les autorités administratives indépendantes ne disposent pas de pouvoir de sanction.

Tandis que le Conseil Supérieur de Liberté de la Communication et l'Autorité de Régulation des Postes et Communications Électroniques se sont vus attribuer un tel pouvoir, le Médiateur de la République ne peut pas prendre des telles mesures(115).1(*)

De façon plus originale, en France(106) comme au Congo(107),l'autorité de régulation s'est vu reconnaitre, au surplus, un pouvoir de règlement des différends lorsque des operateurs de télécommunications ne parviennent pas à un accord en matière d'interconnexion entre réseaux ou d'utilisation partagée d'installations existantes.

Ce pouvoir singulier donné à une autorité administrative indépendante de statuer sur les litiges relatifs à des rapports contractuels de droit privé s'explique par la volonté du législateur de permettre à l'agence de veiller à ce que de nouveaux services puissent effectivement être proposés aux consommateurs, dans un secteur longtemps fermé à la concurrence. Ce pouvoir de régulation économique ne pouvait être dévolu, pour assurer une parfaite impartialité qu'à une autorité administrative indépendante, dès lors que l'Etat reste le principal actionnaire de l'operateur historique dans le secteur des télécommunications, Congo télécom.

On peut même estimer avec le professeur Frison-Roche que « les prescriptions des AAI ne sont crédibles que si elles disposent du pouvoir de les sanctionner »(118).Toutefois, lorsqu'elle existe et plus encore lorsqu'elle est utilisée, la sanction apparait souvent comme une source d'insatisfaction en termes de respect des droits fondamentaux. Les débats doctrinaux prétoriens sont d'ailleurs nombreux, qui démontrent que les solutions juridiques sont encore mouvantes et incertaines(119).

* 106. Cour Const., 18 septembre 2003

107. Auby (J-B), « Remarques préliminaires sur la démocratie administrative », précité., p.1.

108. Sauvé(J.M), « les nouveaux modes de décision administrative ». Forum de Trans Europe Expert ; les enjeux juridiques européens ; nouvelles régulations en Europe, Paris, 2007.

* 109. Décret n° 2009-156 du 20 mai 2009, portant création de l'ARMP.

110. Loi n° 31-2006 du 12 octobre 2006, portant création de l'organe de régulation du secteur pétrolier aval.

111. Sauvé(J.M), « Les nouveaux modes de décision administrative », précité. p. 24.

112. Article 4 de la loi du 25 novembre 2009.

113. Conseil d'Etat, « les pouvoirs de l'administration dans le domaine des sanctions ».Documentation française 1995, p. 36.

114. Brunet(F), « De la procédure au procès : le pouvoir de sanction des autorités administratives indépendantes », RFDA, 2013, p. 113.

115. Titre III de la loi 11-2005, du 25 novembre 2009, portant création de l'Agence de Régulation des Postes et Communications Electroniques.

* 117. Haquet(A), « Le pouvoir réglementaire des autorités administratives indépendantes », , RDP, 2008, n°2, p. 394.

118. Décision n° 88-248-DC du 17 janvier 1989, loi modifiant la loi relative à la liberté de communication.

119. Botteghi(D), « Quelle efficacité des droits de la défense en cas de sanction administrative ? », AJDA.

120. Article 171, loi du 25 novembre 2009.

121. Règlement CEMAC, Op. Cit.

*

122. Moudoudou(P) et Markus(J.P), Droit des institutions administratives congolaises, l'Harmattan, 2007, p. 123-140.

123. Lombard(M), Droit administratif général, Paris, Dalloz, 4e éd., 2001,p. 119.

124. Moudoudou(P) et Markus(J.P), Droit des institutions administratives, Op. Cit, p. 125.

125. Frison-Roche(A.M), « Etude dressant un bilan des autorités administratives indépendantes », Paris, 2010,915.

126. Brunet(F), Op. Cit. p.2

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore