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John rawls et la question de la justice: une lecture de theorie de la justice

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par Israel Jacob Barouk MEKOUL
Université de Yaoundé I Ecole normale superieure de Yaoundé - DIPES II 2014
  

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CHAPITRE I : LES MODALITES D'ELABORATION DES PRINCIPES DE

LA JUSTICE CHEZ JOHN RAWLS

La conception de la justice chez Rawls apparait comme l'achèvement d'un long processus qui précède la présence d'un ensemble d'attitudes ou de structures. Pour ce qui est de la structure, celle qui est au coeur de son système de philosophie politique, c'est la structure de base, c'est-à-dire, toutes les institutions politiques et socio-économiques mises en place au moyen de la Constitution et des textes ordinaires pour garantir les droits et libertés des citoyens, et assurer la stabilité de la démocratie. Cette structure de base est le lieu de déploiement de la praxis humaine, c'est-à-dire, des attitudes caractéristiques des personnes, libres et égales, devant construire la future communauté. Ce sont ces attitudes que nous allons analyser dans le chapitre premier, car, elles balisent la voie pour la mise en oeuvre des principes de la justice.

Pour cela, nous examinerons les préalables rawlsiens d'implementation des principes de la justice, tout en rappelant les conceptions philosophiques de la justice.

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1 : LES CONCEPTIONS PHILOSOPHIQUES DE LA JUSTICE

L'usage du terme « justice » en philosophie est variable mais complémentaire. Il peut être utilisé pour désigner le caractère de ce qui est soit conforme au droit, soit impartial ou alors considéré comme bien sur le plan moral.

L'analyse des conceptions de la justice avant John Rawls portera sur la conception ancienne et consequentialiste.

1.1. LA CONCEPTION ANCIENNE DE LA JUSTICE : LA JUSTICE COMME

HARMONIE.

Nous n'exposerons ici que la pensée de Platon et celle d'Aristote, car, Rawls s'en inspire directement.

Dans la philosophie morale antique, la justice est essentiellement une vertu. Elle participe de l'ordre de l'univers et de l'homme. Elle y est vue comme une harmonie8, comme un principe de concorde et comme une vertu partagée9. Les sophistes seront les premiers à briser cette union en affirmant que les lois sont artificielles, qu'elles n'existent que pour assurer la conservation de la communauté et la satisfaction de ses intérêts. Leur conception de la justice comme instrument de pouvoir sera critiquée par Socrate.

Les critiques de Socrate sont exposées par Platon, dans La République, dialogue sous-titré « De la justice », dans lequel, il établit un parallèle entre la justice de l'âme et la justice politique par lequel le microcosme (l'homme et ses vertus) est en phase avec le macrocosme (le cosmos et la Cité), ordonné et harmonieux. L'idée de justice, qui permet le maintien de l'ordre, procède de ce parallèle. Dans la société, la justice platonicienne repose sur l'équilibre de trois parties sociales décrites dans La République : les philosophes qui dirigent la Cité, les guerriers qui la défendent et les artisans qui veillent à sa prospérité. Mais elle est aussi un état de faiblesse lorsqu'on la réclame : dans le Gorgias, il est dit que les esclaves, en réclamant justice, expriment par là même leur condition inférieure. Au final, « Il s'agit pour Platon,

8 Harmonie qui est synonyme d'un autre concept central dans la pensée rationaliste grecque : le Bien.

9 À la différence de vertus individuelles comme la sagesse ou le courage.

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dans sa réflexion sur la justice, de sortir d'une simple logique de la rétribution - c'est-à-dire, au fond, de sortir d'une simple logique morale »10.

Quant à Aristote, on lui doit une distinction essentielle entre deux aspects de la notion de justice : une justice relative, individuelle, qui dépend d'autrui et une justice globale et communautaire. La première est une vertu ; la seconde concerne les lois et la constitution politique et relève de la raison. D'idéale, la justice devient ainsi politique. Aristote dit de la diké (« justice » en grec) qu'elle est l'ordre objectif de la communauté politique. Dans le livre

V de son ouvrage l'Éthique à Nicomaque, il distingue l'injuste du juste par le fait que ce dernier est « ce qui produit et conserve le bonheur et ses parties pour la communauté politique »11.

Cependant, Aristote ne se contente pas de reprendre l'idée de Platon selon laquelle la justice est la vertu principale. Pour lui : « La vertu de justice est la vertu par laquelle l'être humain accomplit sa finalité éthique »12. Contrairement à Platon, il fait dépendre cette vertu d'une situation et, en conséquence, d'éléments extérieurs à l'action de l'homme vertueux. Si pour Platon la justice consiste à donner à chaque partie (et à chaque homme) la place qui lui revient dans le tout, pour Aristote, elle consiste à conformer nos actions aux lois afin de conserver le bonheur pour la communauté politique: « le juste est le bien politique, à savoir l'avantage commun »13.

La justice dans l'entendement de Platon et Aristote est téléologique, c'est-à-dire que les institutions sensées l'assurer sont justes dans la mesure où elles favorisent efficacement « le bien unique et rationnel »14.

S'intéressant à cette justice téléologique, John Rawls précise à la page 50 de Théorie de la justice que : « Les théories téléologiques exercent une attraction profonde sur l'intuition puisqu'elles semblent incarner l'idée de rationalité. Il est naturel de définir la rationalité par la maximisation et, en morale, par la maximisation du bien. »

A l'opposé de cette conception téléologique, se pose la conception déontologique du juste qui s'inspire de Kant. La conception déontologique définit le juste indépendamment du bien par l'exigence rationnelle d'universalisation de la maxime. En outre, le juste est d'emblée compris comme une limite imposée à chacun dans la recherche de son bien. « Dans

10 Ibid.

11 Aristote, Éthique à Nicomaque, 1129b, 17-19.

12 Idem, 1129b, V, 10, 1143a24-b2.

13 Idem , 1129b, V, 10, 1143a24-b2.

14 John Rawls, Justice et démocratie, Ed. Seuil, 1993, éd. Française, p. 237

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la théorie de la justice comme équité, le concept du juste est antérieur à celui du bien. »15 Mais, les biens en question, ce sont les « biens premiers»16 dont la distribution est l'objet des principes de justice. Kant justement relève que : « Est juste toute action qui permet ou dont la maxime permet à la liberté de l'arbitre de tout un chacun de coexister avec la liberté de tout autre selon une loi universelle »17. John Rawls par opposition à Kant, avec qui, il partage l'idée de positionnement de la justice avant le bien, accorde sa préférence au régime

d' « humanité », alors que Kant accorde la sienne au régime de « personnalité ». Là où Kant voyait l'implication du régime d' « humanité » à celui de « personnalité », Rawls relève que le premier régime n'implique pas le second. La conséquence de cette non implication est que, pour fonder la société juste, il est louable de faire appel au régime d' « humanité » de la raison, c'est-à-dire à la capacité d'employer les moyens les plus efficaces pour atteindre les fins désirées.

Pour revenir aux philosophes de l'Antiquité, soulignons que, contrairement à Platon et à Aristote, Rawls estime que les partenaires choisissent les principes sous le « voile d'ignorance » car, elles sont des personnes libres et rationnelles, désireuses de favoriser leurs propres intérêts et placées dans une position initiale d'égalité. De son point de vue, la justice ne saurait se limiter au partage des richesses et des honneurs. Elle doit tenir compte des défavorisés.

Bien plus, vouloir d'abord le bien avant la justice pose le problème de la distribution de ce bien : puisqu'il n'y a pas de règles préalables dictées pour le partager, celui-ci ne peut que créer des injustices dans la société. Pour que le voeu de Platon se réalise, à savoir, la réalisation de la Cité idéale avec l'avènement des « philosophes-rois » ou des « rois-philosophes », il est opportun de fixer les règles de partage, à savoir les principes de la justice avant de procéder à toute forme de partages de biens.

Chez les philosophes antiques, c'est le bien qui est premier. Chez Rawls, c'est le juste qui occupe la première place.

Cette conception ancienne de la justice nous permet d'entrer dans l'analyse de la conception conséquentialiste.

15 John Rawls, idem, p. 57

16 John Rawls, idem, p. 290

17 Kant, Doctrine du droit, section C

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